JOURNAL SPIRITUEL
1942
Sans Directeur Spirituel

Recours à la Vierge... - Cheminer sans lumière... - « Mon âme semble se déchirer... » - « Je veux vous donner des âmes... » - Un journaliste de Lisbonne... - Les "feuilles" du Père Terças... - « Combien douloureuse est ma souffrance... » - « Vous a-t-on interdit de venir ici ?... » - « J’ai érigé un calvaire... » - Craintes de rester sans la Communion... - Les pressentiments se réalisent... - « Je brûle du désir du ciel... » - Le départ du Père Mariano Pinho... - « Les lettres de mon Père - spirituel... » - Obscures ténèbres... - Les lettres rendues... - « Jésus, m’entendez-vous ?... » - Nouvelle forme de crucifixion - Une nouvelle vie... - « Quelle gloire pour le Portugal !... » - « Mon cœur est tellement blessé... » - « Combien je suis triste... » - « Gloire à Jésus; gloire à Marie !... » - « Je me sens abandonnée de tous... » - « Le Ciel est rempli de gloire !... » - « Le ciel est tout proche... » - « Un corps pour souffrir.... » - « Je creuse ma sépulture... » - « Seul le ciel sera ma vie... » - « Je me vois au bord d’un abîme... » - « Mon état est grave... » - « Triomphe ! Triomphe !... » - L’annonce de la Consécration... - En voyant la Vierge de Fatima... - NOTES

 

Recours à la Vierge...

Lors de ma préparation pour recevoir mon Jésus [dans l’Eucharistie], j’ai demandé à la Maman de me remplir d'amour et de me revêtir de sa grâce et de sa pureté, de rendre mon cœur pur comme quand j’ai reçu mon baptême, parce que Jésus comprends tout je voulais renaître en ce premier jour de la nouvelle année pour aimer mon Jésus et ne jamais l'offenser. [1]

Cheminer sans lumière...

Jésus est venu et a allumé dans mon cœur un peu de son divin feu ; il m’a donné quelques rayons de sa lumière :

— Ma fille, l’heure de me donner la plus grande preuve d’amour et d’héroïsme est arrivée : cheminer sans lumière dans un complet abandon... [2]

« Mon âme semble se déchirer... »

Mon âme semble se déchirer en morceaux. Ce n fut que le 7 janvier, jour où vous êtes venu me voir, Père, que ma souffrance, aussi bien physique que morale, a connu une pause. [3] Il est vrai que Jésus me prive actuellement de tout, mais Il m’a donné encore quelques heures de soulagement et quelques moments de douceur et de suavité pour l’âme. Je m’en souviens avec peine et il me semble mentir, car maintenant je n’ai pas de lumière... [4]

« Je veux vous donner des âmes... »

Vivre sans soutien me fait peur. J’ai tout perdu sur la terre et dans le ciel. Je veux savoir aveuglément que Jésus et la Maman du ciel ne m’ont pas abandonnée, mais je tombe dans le découragement, je reste abattue, plongée dans la détresse.

Mon Dieu, mon Jésus, je crois en Vous, je crois en votre divin Amour pour moi. Je Vous aime et je veux vous donner des âmes.

Hier le médecin est resté ici presque deux heures. Jésus s’est servi de lui pour adoucir ma douleur... J’ai encore sur la terre quelqu’un qui a de la compassion pour moi. Cette pensée a redonné vie à ma fidélité... [5]

Un journaliste de Lisbonne...

Hier, un journaliste de Lisbonne est venu ici ; je ne lui ai rien dit des choses de Jésus, mais le fait m’a fait souffrir. Presque tous les prêtes me cherchent: ils posent mil questions à Monsieur le Curé. Et tout cela à cause des écrits du Père Terças. Si seulement je pouvais partir d’ici! Je ne voudrais pas être connue; j’aimerais me cacher... [6]

Les "feuilles" du Père Terças...

Aujourd’hui Monsieur le Curé est venu me lire deux feuilles du Père Terças avec plusieurs demandes. Désirera-t-il continuer à parler de moi ? Je lui ai dit ne rien avoir révélé des choses du Seigneur et que je souffre du fait de lui avoir parlé. Ce n’est point la peur d’être prise en quelque mensonge: je pourrais être interrogée des milliers de fois que je dirais toujours la même chose, parce que la vérité n’a qu’un seul chemin. C’est la blessure que je ressens qui m’oblige à procéder de la sorte.

Vienne qui voudra: je ne parlerai cependant qu’avec l’autorisation de mon directeur... [7]

« Combien douloureuse est ma souffrance... »

Combien douloureuse est ma souffrance !... Mon Dieu, Si du moins cette croix n’était destinée qu’à moi seule! Mais, malheureusement, ce n’est pas le cas. Il est inutile que vous, mon Père, que vous me disiez que vous ne souffrez pas [8] : je n’ai pas besoin d’autres témoignages, les sentiments de mon âme me suffisent... Pour ma plus grande confusion je sens en être la cause de tant de souffrance; je le suis et le serai la vie entière.

Je serai aussi la cause de beaucoup d’humiliations et de souffrances pour le médecin. Quelle triste récompense pour tout ce que vous avez fait pour moi! C’est une chose bien involontaire ; je ne souhaiterais être ingrate envers qui que ce soit.

Quand je reçois Jésus je m’en rappelle aussitôt et je reste seule dans ma douleur. Il me semble que si j’entendais Jésus, je ne l’écouterais pas et Lui tournerais le dos, même si je ne l’ai jamais fait... [9] Combien grande est la peur de me tromper ! J’ai beaucoup pleuré et je suis triste de mon comportement. Je ne voudrais pas recevoir la croix avec des larmes, mais je n’ai plus la force.

Je pleure, mais dans le cœur, la volonté de Le suivre, de Le consoler, de tout souffrir par amour pour Lui et de Lui donner des âmes, est toujours présente. Priez pour moi... [10]

« Vous a-t-on interdit de venir ici ?... »

Vous a-t-on interdit de venir ici ? On ne cesse pas de vous faire souffrir ? On essaie de vous humilier et de vous déprimer davantage ? Jésus soit avec nous ! Que nous vienne en aide la Maman du ciel et qu’elle nous donne la force pour supporter autant de souffrance. Que tout ceci soit pour la plus grande gloire de Jésus et un avantage pour les âmes... [11]

« J’ai érigé un calvaire... »

Je sens que vous souffrez presque tout seul... Mon Dieu, j’ai érigé un calvaire pour mon Père spirituel qui a tant fait pour amener mon âme à Jésus.

J’en ai élevé un autre pour le docteur, qui se sacrifie tant pour mon corps. O Jésus, ô Maman du ciel, appelez-moi à vous afin que je ne sois davantage la cause de tant d’humiliations et de souffrances !... Je préférerais souffrir toute seule. Si seulement j’avais pu souffrir cette marée de souffrances et que personne n’en ait eu connaissance, excepté Jésus ! Je voudrais disparaître du monde, de sous le regard de tous et rester dans l’oubli... [12]

Craintes de rester sans la Communion...

Je suis dans un état de révolte et je me sens seule, complètement seule... Quelle horrible tempête !... Je suis au comble de mon agonie. Je crains de devenir infidèle à mon Jésus : je n’ai pas de force pour en supporter d’avantage... Quand viendra-t-il le ciel ? Pauvre de moi s’il tarde !...

Dimanche après-midi [8 février], vers le soir, un grand tourment envahit mon esprit: la crainte de rester sans mon Jésus [eucharistique], que Monsieur le curé, interdit par Monseigneur, l’archevêque, ne viendrait plus me porter ; que tous les prêtres seraient défendus de venir me voir, aussi bine que toute autre personne, sous peine d’excommunication. Mon Dieu, sans avoir un prêtre pour me confesser, que dois-je faire ? Faire en sorte de ne pas pécher, de ne pas causer, dans la moindre chose de la tristesse à mon Jésus et Lui demander bien pardon. Mon Dieu, mon Dieu, quelle confusion de devoir mourir ainsi, sans un prêtre !...

O mon Père, une nouvelle souffrance vient de survenir: on m’interdit de prendre conseil auprès de mon Père spirituel... À qui dois-je recourir ?... [13]

Les pressentiments se réalisent...

Les hommes essaient d’éloigner et d’arracher d’auprès de moi pour toujours celui qui m’aidait et pouvait me donner réconfort. Ils m’ont enlevé mon Père spirituel, m’interdisant enfin toute correspondance. Consentez-moi au moins, mon Jésus, de m’épancher avec Vous. Je me trouve seule au milieu de la tempête qui ne se calme pas. Je Vous ouvre mon cœur. Il n’y a que Vous qui puissiez lire tout ce qui s’y trouve écrit avec douleur et sang. Vous seul pouvez évaluer mon sacrifice. Le monde l’ignore ; les hommes ne le comprennent pas.

Laissez-moi Vous dire ce que Vous avez dit à votre Père : “Pardonnez-leur car ils ne savent ce qu’ils font”. Ils sont aveugles, il leur manque votre divine lumière. Éclairez-les; donnez à tous votre amour.

O Jésus, mes pressentiments ce sont réalisés !

Pourront-ils m’interdire de Vous recevoir sacramentellement ? Pauvre de moi ! Ils me tueraient si Vous, avec votre pouvoir divin ne me conserviez pas la vie. Qu’ils disent et qu’ils fassent ce qu’ils veulent. Ils ne réussiront jamais à me priver de l’union intime avec Vous.

Me voler Jésus eucharistique ! Cela ne m’étonnerait pas qu’ils le fassent. Mas arracher de mon cœur le Trésor si riche que j’adore et que j’aime plus que toutes choses, « le Père, le Fils et le Saint-Esprit », les hommes ne le pourront jamais. Pûssent-ils me faire vivre sans cœur et sans âme. Impossible !

Que vienne le monde entier avec toute sa force ; que tout s’oppose à moi : seul le péché pourrait me séparer de cette grandeur infinie, de cet amour sans fin.

Mais j’ai pleinement confiance en Vous, mon Jésus. J’attends tout de Vous, même si les sentiments de mon âme arrivent presque à me persuader que je me trompe moi-même.

(...)

Quel mal ai-je fait ? Quel crime ai-je commis ?... Mon Jésus, si ce n’était pas par amour pour Vous, si ce n’était le désir de Vous ramener des âmes, je me refuserais à tout... [14]

« Je brûle du désir du ciel... »

Je brûle du désir du ciel, mais je ne voudrais pas mourir de la sorte. J’aimerai la mort que Jésus me donnera, mais pas celle que me donnent les hommes! Je n’aimerais pas les laisser avec les remords de me l’avoir donnée... Je ne sais pas comment je peux vivre ainsi.

Pour le moment je vous ai, vous qui me soutenez dans un si pénible calvaire. Pourront-ils dire aussi que les choses du Seigneur me viennent à la suite des visites du médecin ? Je n’en doute pas. Mais dans ce cas, il serait mieux de m’enfermer dans un cachot où personne ne puisse me voir; ainsi je souffrirai toute seule et ne serai la cause des souffrances d’autrui.

Il ne manquerait plus qu’ils me prennent aussi mon médecin ! Grâces à mon bon Jésus, je ne suis pas attachée aux choses de la terre, mais je ressens le besoin que l’on m’aide à parcourir mon calvaire: toute seule je ne le peux pas... [15]

Le départ du Père Mariano Pinho...

Quelques heures après ma “Passion” mon médecin m’a dit que ces derniers jours l’état de mon cœur avait davantage empiré. Il m’inculqua courage et fidélité. Je me suis épanchée à lui parce que je sens que le Seigneur se sert de lui pour m’aider à poursuivre dans les chemins épineux et difficiles. Je me suis sentie bien plus forte.

Vers les six heures du, soir on m’apporta le courrier et immédiatement j’ai découvert votre lettre. Aussitôt que je l’ai eue en main, les bras me sont tombés et mon sang s’est glacé dans mes veines. Je n’avais pas la force de l’ouvrir. Je me suis dite à moi-même : “Quoi qu’il arrive, en avant ! Mon Jésus, j’accepte tout pour amour pour Vous et pour Vous donner des âmes”.

J’ai commencé à la lire, mais les larmes m’en empêchaient : c’étaient des larmes de parfaite résignation. On dirait que l’on me perçait le cœur avec une lance. Quelques jours se sont déjà écoulés et je me sens pourtant encore dans le même état. C’est comme si je n’avais plus de cœur et que la mort me guette. Dans mon fond intérieur, je disais : 

“Pardon pour tous ceux qui sont la cause de cette mort.

Il est vrai que Deolinda, plus d’une fois, goutte à goutte, m’avait administré le “poison” que la lettre contenait, mais maintenant c’est arrivé au comble : la dernière goutte de ce “fiel” si désagréable.

Mes larmes et ma prière à Jésus pour obtenir le pardon pour tous: voilà ma vengeance.

Dans cette triste lettre que je n’oublierai jamais, vous me dites que cela est conforme à ce que vous supérieurs ont décidé ; que vous devez obéir parce que le Seigneur le veut.

Je suis d’accord. Obéissance, sainte obéissance, combien je t’aime ! Vous ne voulez pas désobéir et moi-même, je veux que vous obéissiez. Plutôt toutes les souffrances que la moindre offense envers Jésus. Celui qui obéi fait sa sainte Volonté, mais malheureux ceux qui ne commandent pas selon ses divins désirs! C’est pourtant qui arrive maintenant. Les hommes s’opposent à la volonté de Jésus. C’est ce que ressent mon âme remplie de douleur. Mon cœur vole comme un oiseau qui ne sait pas ou se poser; je me trouve dans le supplice le plus douloureux.

Je me suis confessée au Père Alberto Gomes [16] dans lequel j’ai entière confiance et en qui je vois toute la sainteté. Je sens qu’il me comprend bien, mais ce n’est pas lui cette lumière que Jésus m’a choisie, et non plus la source qui peut me rassasier. C’est pour cela que je dis : “Malheureux ceux qui ne commandent pas selon la volonté de Jésus !”

Je continuerai de vous appeler mon Père spirituel sur la terre comme au ciel. Quoi que les hommes disent ou fassent, cela ne sert qu’à m’écraser de plus en plus et à m’ôter la vie...

Ne vous souvenez-vous pas qu’il y a quelque temps j’avais eu le pressentiment de ce qui arrive maintenant ? On vous interdit de venir ici ! De m’écrire ! Volonté divine de mon Dieu, je t’aime plus que tout... [17]

« Les lettres de mon Père spirituel... »

O mon Jésus, donnez-moi votre divine force ! Je veux cacher ma douleur. Toute seule je n’y réussis pas. Que mon cœur pleure nuit et jour, si vous le voulez, mais que mon regard soit joyeux et mes lèvres souriantes. Que votre saint amour et les âmes soient le motif de ma souffrance !

Je suis comme la colombe qui, dans son envol, secoue les ailes nuit et jour, et ne trouve pas où se poser si vous ne venez pas à son secours. Les forces lui manquent, elle est incapable de poursuivre son vol: c’est moi qui navigue dans les airs, c’est moi qui suis tout près d’être anéantie par la tempête ; je suis la plus indigne de vos petites filles, sans lumière et sans soutien.

O Jésus, je ne savais pas que j’avais encore tant à vous donner ! Combien grande est mon ignorance ! Je pensais vous avoir tout donné. Je me trompais: vous êtes venu faire la dernière moisson. Prenez tout, hâtez-vous de tout prendre: moissonnez pour vous. Le vingt, je vous ai donné mon Père spirituel jusqu’au jour on l’on voudra bien me le rendre ; je vous ai donné ses lettres qui m’ont servi de lumière et acheminée ers Vous.

Vous avez bien vu, ô Jésus, combien grand a été le sacrifice ! Non point pour l’attachement à celles-ci, mais parce qu’elles m’ont été demandées lors d’une journée remplie de tant de souffrances. Quand je les ai eues en main pour les ficeler ensemble, vous, ô mon Seigneur, vous avez entendu que je me répétais : “Jésus me les a données, Jésus me les reprend.”

Et même en les rendant, je n’ai fait que répéter : “Jésus ne mérite-t-il pas encore davantage ?... Tout cela est encore bien peu pour Lui sauver des âmes...” Ce qui me peinait c’était de devoir servir  d’instrument pour faire souffrir les autres !... [18]

Obscures ténèbres...

O Jésus... mon calvaire ne s’arrête pas. Les obscures ténèbres de la nuit, ne finiront-elles jamais ? [19] Je n’aperçois même pas le chemin ; je ne puis ni avancer ni reculer ! Je n’ai pas de guide; je n’ai pas de vie. Le cœur et l’âme s’en vont en morceaux. Par l’amour de qui j’accepte tout cela ? Pour Vous, ô Jésus, uniquement pour Vous et pour les âmes. Servez-vous de ma tristesse et de mon agonie, servez-vous du sacrifice qui m’a amenée à l’extrême limite, pour donner la paix au monde et afin que Votre divin Cœur puisse avoir de moi toute la joie, consolation et amour possibles.

(...)

Si je ne vis pas pour sauver les âmes, si mes souffrances ne sont pas suffisantes pour leur éviter l’enfer, oh ! alors, mon Amour, prenez-moi avec Vous. Il n’est pas possible de vivre ainsi. Qu’il me reste au moins l’espérance que mon agonie console votre divin Cœur. [20]

Hâtez-vous, Jésus, de me secourir. Faites que je sois ferme dans mes propos. Placez sur mes lèvres un sourire “trompeur”, [21] sous lequel je puisse cacher toute la souffrance de mon âme. Il suffit que Vous seul connaissiez ma souffrance.

Examinez, ô Jésus, tout mon corps, tout mon cœur, toute mon âme: voyez si Vous y trouvez encore quelque chose qui puisse vous être utile ; je veux tout Vous donner.

La privation de mon directeur spirituel et tous les sacrifices qui sont venus par la suite m’ont portée à la plus grande souffrance. Et maintenant, mon Jésus, le fait de le savoir aussi proche [22] pendant que moi, comme un oiseau pendant les jours d’hiver, je reste là, affamée de ne pas pouvoir lui parler, de ne pas pouvoir recevoir de lui aliment et vie pour mon âme... il y a de quoi mourir de douleur !

Quel seul votre amour règne: seul l’amour peut vaincre !

Je Vous ai promis, ô Jésus, de souffrir en silence, de ne pas me permettre un seul soupir afin que je puisse contenir toute la douleur de ma triste épreuve. Et pourtant, maintenant je n’en peux plus, mon Jésus : les humiliations, les mépris les abandons, m’écrasent...

Mon âme ne ressent que peur et détresse.

Mon triste cœur est angoissé de contenir le sang du monde entier afin de paver tous les sentiers du Calvaire avec ces paroles de sang : l’amour, l’amour de Jésus !

Malheureusement je n’ai rien et je n’arrive même pas, dans ma détresse, à Le consoler et à L’aimer. [23]

Les lettres rendues...

Mon Jésus, les lettres de mon directeur m’ont été restituées. Pourquoi tout cela ? Le sacrifice a été fait. Ce fut comme si on les plaçait sur un cadavre qui ne ressent plus rien. Mais l’obéissance le veut et, moi je l’accepte... [24]

« Jésus, m’entendez-vous ?... »

Jésus, m’entendez-vous? On dirait que mes paroles sont suffoquées par le poids de la mort. Je veux vous dire une fois encore :

“Je suis vôtre dans le temps et je serai vôtre dans l’éternité. Je me donne seulement à vous, je ne veux appartenir qu’à vous”.

C’est avec l’âme en agonie et le cœur écrasé par la douleur que mes lèvres balbutient ces paroles: “uniquement par amour”.

De noires ténèbres m’entourent : je marche au milieu de buissons épineux. Je suis tout entière blessée: je sens le sang couler tout le long de mon pauvre corps.

Je me sens seule: on m’a volé le réconfort, le soulagement de l’âme, mon soutien sur la terre. Quelquefois je ne supporte même pas la nostalgie que j’ai de la Messe dans ma chambre...

Pardonnez, mon Jésus, à qui a été la cause de tout cela. Pour tous, je vous demande compassion ; je Vous demande lumière pour leur cécité.

Sur cette mer de souffrance, dans cette lutte contre de noires ténèbres, dans cette nuit très opaque, mon âme jouit de la plus grande paix ; je ne crains pas de comparaître en votre divine présence. Quelquefois il me vient à l’esprit si cela ne serait pas de l’orgueil. Que jamais je ne le connaisse. Serait-il né de mon ignorance ?

Vous m’avez accordé la grâce de connaître l’abîme de ma misère, mais en même temps je vois très bien je vois très clairement que l’abîme de votre amour et de votre miséricorde est infiniment plus grand. Je confie aveuglément en vous et j’espère en vous. [25]

Nouvelle forme de crucifixion

(Moments de la Passion)

Le vendredi saint, 27 mars 1942, Jésus m’a dit :

— Ne crains pas, ma fille ; tu ne seras plus crucifiée ; la crucifixion que tu souffres est des plus douloureuses que l’histoire a pu enregistrer. [26]

Ne me dérobez pas vos forces, Jésus, afin que je puisse décrire de la meilleure manière possible ce que j’ai souffert pendant la sainte Passion. Que votre protection et votre amour ne me manquent pas non plus à cette pauvre créature que je suis. Que tout soit pour votre plus grande gloire et pour le salut des âmes.

Mes yeux semblaient ne pas voir l’approximation de la passion. Mon abattement m’épouvantait ; l’abandon dans lequel je me trouvais semblait me conduire à la sépulture. Quel tourment ! Devoir lutter contre un monde sans vie! Votre Vie et votre Amour sont descendus sur moi, j’ai entendu votre Voix, douce et tendre :

— Ma fille, amour de Jésus, courage ! Ne crains pas. Le chemin du calvaire est presque terminé. Allons, viens, traverse les dernières épines : des blessures causées par ces épines sortiront des sources de salut. Les âmes ont besoin de tout.

Jésus est heureux de ta crucifixion ; Il trouve en toi toute la réparation que l’on peut trouver sur la terre. Courage ! Jésus, avec sa Mère bénie, ne t’abandonneront jamais.

J’ai cheminé vers le Jardin des Oliviers. Dans un total abandon, je remémorais vos douces paroles, lesquelles, pendant un certain temps, sont restées gravées dans mon cœur. Ensuite, à cause des coups et des mauvais traitements de la part de l’humanité, tout a disparu. Et, dans le Jardin des Oliviers, toute seule, dans un profond silence, dans la plus grande obscurité, moribonde, je cherchais à me cacher pour toujours, comme, si la terre aurait pu m’occulter à la justice du Père éternel.

Mon Dieu, mon Dieu... combien je me sens seule !

Pas la moindre brise ne soufflait. Même les feuilles des oliviers restaient immobiles, bien que les branches se courbassent jusqu’à terre en signe d’adoration.

O douleur, ô agonie de Jésus, ô amour de Jésus pour les âmes !

Mes souffrances, ô Jésus, ne m’appartenaient point ! Elles n’étaient qu’à vous, rien qu’à vous, mon Jésus.

J’ai suivi les étapes de la Passion ; ici et là je tombais écrasée par la souffrance. Très souvent j’ai invoqué : “Jésus, Petite-Maman, donnez-moi de vos forces afin que les miennes se ressourcent”.

Merci, Jésus ! Avec vous j’ai résisté.

Lors de la flagellation, protégée par votre divin Cœur, j’ai vu devant moi les bourreaux tenant en main des fouets pour châtier mon corps. À l’ombre de votre divin amour, je ne les craignais pas.

Au couronnement d’épines j’ai vu entrelacer d’aiguës épines et fabriquer le casque, afin qu’il soit enfoncé sur ma tête.

Je me suis élancée sur le chemin du Calvaire, sans vitalité suffisante pour arriver jusqu’au bout. Je ne pouvais pas avancer davantage : les forces m’abandonnaient petit à petit.

J’ai été clouée sur la croix : à chaque coup de marteau je m’évanouissais.

Le Calvaire s’était obscurci. On n’entendait plus que les soupirs de la chère Maman, étouffés par les blasphèmes : je les ressentais plus que ces derniers dans mon cœur. [27]

Une nouvelle vie...

Depuis le Vendredi-Saint [28] j’ai commencé à me sentir morte sur le Calvaire, entourée de ténèbres et dans un grand abandon.

Tous les lions sont tombés sur moi. [29]

Mon corps n’a pas reçu de sépulture. Des oiseaux de nuit, malgré les épaisses ténèbres, voyaient bien mon corps, pour le manger. Je suis restée ainsi dans cette souffrance. Maintenant je sens que ces oiseaux, de leur bec, pénètrent mes os, les réduisant en cendres. [30]

La croix où j’ai été crucifiée est tombée à terre, mais, malgré cela, je sens qu’une partie de mon corps y reste fixé par les clous. Ces oiseaux-là ont encore beaucoup à dépouiller dans mon corps, qui n’a pas la vie terrestre ; seul mon cœur sent une vie qui n’est pas humaine; c’est une vie divine. Cette vie lui procure du sang, et l’humanité entière, comme une volée d’oiseaux, boit cette vie. Je sens que ce n’est qu’après que ces oiseaux de nuit auront réduit mes os en cendres, que je pourrai partir.

Je ne sens plus sur la croix, mais la souffrance est la même ; il n’est pas moins douloureux. Les lions profitent maintenant davantage de ma chair, qui est déjà en putréfaction et nauséabonde ; pendant que les oiseaux s’attaquent à mes os et les taraudent. Vous ne pouvez pas comprendre combien je soufre et, moi-même, je ne sais pas m’expliquer. Ils ont laissé mon âme en pleine montagne, en butte au plus grand tourbillon, noire, très triste, aride : ils m’ont abandonnée. Tous les lions sont tombés sur moi! Combien est amère l’ingratitude des hommes!

(...)

Hier, 20 avril, quand j’ai reçu l’ordre de l’archevêque de me laisser transporter à Coimbra pour être examinée par le docteur Elísio de Moura, cette pensée m’a assaillie : Combien la souffrance est incomprise ! Je suis sûre que si l’on goûtait, pendant quelques moments, ce qui arrive dans mon corps, personne au monde n’aurait plus le courage de faire une telle proposition.

Le regard fixé dans le ciel, je peux dire : Que tout soit pour l’amour de Jésus ! Lui, il est digne de tout. Les âmes méritent tout, parce qu’elles sont le prix de son Sang.

L’agonie de mon âme continue de s’aggraver de plus en plus. Toutefois le ciel peut mettre fin à tout cela.

Que le Seigneur soit avec moi, car ce n’est qu’avec son aide que je peux vaincre.

Je demande à Jésus avec beaucoup de foi de mourir le 1er vendredi de mai, afin de passer le 1er samedi au ciel. [31]

« Quelle gloire pour le Portugal !... »

Jésus m’a dit le 2 mai (samedi) :

— Bienheureux les humbles et les persécutés pour l’amour de Jésus. Ce sont ceux-là les élus du Seigneur et les aimés de son divin Cœur. La mission de la crucifiée de Jésus sur la terre est presque terminée. Jésus lui donnera la mort la plus touchante, la plus remplie d’amour. Quelle gloire pour le Portugal et pour le monde entier ! Quelle fête et quel triomphe au Paradis !

Mais l’agonie indicible de mon âme augmentait en sachant toutes les avanies que l’on disait sur moi. Il me semblait que cela continuerait après ma mort, causant ainsi de la peine à mes chers familiers. Mon désir serait que toutes ses vexations meurent avec moi. [32]

« Mon cœur est tellement blessé... »

Mon cœur est tellement blessé que l’on dirait qu’il n’a même plus la forme d’un cœur humain. Toutefois, il est une source abondante de sang. C’est la vie divine qui le fait ruisseler. Je sens que toute l’humanité y boit avidement, de peur que le sang cesse de couler. [33]

« Combien je suis triste... »

L’âme affligée, je répétais : Combien je suis triste et combien sont amères les derniers jours de ma vie ! De mon amertume tirez, o Jésus, douceur et joie pour vous et bénéfice pour les âmes... [34]

« Gloire à Jésus; gloire à Marie !... »

      (...)

Jésus est venu en disant :

— Gloire, gloire, gloire à Jésus ! Honneur et gloire à Marie ! Le cœur du Pape, cœur d’or, est décidé à consacrer le monde au Cœur de Marie ! Quel bonheur ! Quelle joie pour le monde d’être consacré, d’appartenir plus que jamais à la Mère de Jésus. [35] Le monde entier appartient déjà au Cœur de Jésus ; il va appartenir, désormais, tout entier au Cœur Immaculé de Marie. [36]

« Je me sens abandonnée de tous... »

Mon cher Jésus, ma chère Petite-Maman, je suis privée de mon Père spirituel, justement en ces jours où j’en ai le plus besoin ! Je me sens abandonnée de tous, excepté si, miraculeusement, même si peu souvent, vous me donnez ce qui peut me réconforter. [37] Pardonnez à ceux qui m’ont blessée ; pardonnez toute leur cécité; car moi-même je leur pardonne.

Dans mon cœur il n’y a plus de place pour d’autres épées ; j’en ai souffert dans tous les sens ; j’ai même reçu des chagrins de qui je m’y attendais le moins.

O mon Jésus, accordez à tous votre pardon, votre amour, votre compassion. Purifiez, sanctifiez, brûlez dans votre divin amour et appelez vite auprès de Vous votre petite fille agonisante... [38]

« Le Ciel est rempli de gloire !... »

— Le Ciel, le Ciel est comblé de gloire ! Le Ciel est comblé de triomphe !...

Une couronne merveilleuse, plus resplendissante que le soleil et que les étoiles, est préparée pour la petite folle de Jésus. Jésus est le tout de sa crucifiée. Jésus lui donne tout, afin de tout recevoir d’elle !... [39]

« Le ciel est tout proche... »

(...)

Depuis le 24 mai — jour de Pentecôte — et journée pendant laquelle j’ai demandé à l’Esprit-Saint toute la lumière et toute la flamme de son divin amour, amour sanctifiant — l’état de mon âme s’est modifié...

Le 25 mai [ceux qui fréquentaient la maison] se sont aperçus qu’il y avait en moi quelque chose de changé, mais ce changement n’était que la transformation de mon âme. Je ne ressentais que rarement, les grandes désolations, les ténèbres, les sécheresses et les épuisements, mais par contre, je ressentais de grandes envies de m’envoler vers le ciel ; ces désirs me donnaient des impulsions qui me faisaient lever comme si j’avais des ailes pour prendre mon envol.

Je ne peux pas rassasier mes aspirations et la nostalgie que j’ai des aliments de la terre ; je soupire et je brûle du désir d’aller me rassasier des aliments célestes...

Le fil divin qui retient mon cœur dans sa demeure va bientôt se rompre : je crois que sa solidité a été limitée. Ce qui lui a permis de ne pas se rompre c’est que la tempête ne lui a causé que de petits dégâts, de temps en temps.

Si, maintenant je peux dire :

Le ciel est tout proche, je vais aller voir mon Jésus ! Je vais aller voir ma chère Petite-Maman ! Je vais aller voir le Paradis ! Je vais aimer éternellement mes amours: le Père, le Fils, le Saint-Esprit.

Je quitte le monde sans regrets: je ne lui appartiens pas.

Le 25 mai j’ai prié ainsi :

Ave Maria, Mère de Jésus! Honneur, gloire, triomphe pour votre Cœur immaculé ! Ave Maria, Mère de Jésus, Mère de tout l’univers ! Qui ne voudrait pas appartenir à la Mère de Jésus, à la Dame de la victoire ? Le monde va bientôt être consacré tout entier à votre Cœur maternel ! Accueillez, Vierge pure, accueillez, Vierge Mère, dans votre Cœur très saint tous vos enfants. [40]

Il me semble que la détermination du Saint-Père à vouloir consacrer le monde fut ce qui m’oblige à rester encore sur la terre; triste exil que je ne peux plus supporter... [41]

« Un corps pour souffrir.... »

Ma vie !... Qu’un tout petit souffle de vie ! Tout juste un corps pour souffrir et rien d’autre !... Des rayons divins m’ont entraînée tout près des portes du Paradis... Mais, un je ne sais quoi d’humain m’oblige à vivre sur terre, m’oblige à une continuelle immolation. Pauvre de moi ! Et je ne peux plus attendre ! Je m’inquiète et je regarde mon corps, pour voir s’il existe encore; ce qui se passe en lui, Dieu seul le sait. On dirait même que je ne peux pas m’unir à Jésus ni à l’amour qui me tuera. Voila ce que c’est que la vie de victime ! Malgré cela, je n’ai pas de regrets de m’être offerte à Jésus, pour les âmes ! [42]

« Je creuse ma sépulture... »

Je creuse ma sépulture. Le terrain où je la creuse n’est pas sûr ; il est même répugnant ; il est rempli de pourriture : c’est le terrain, c’est la sépulture mondiale. Quelle horreur !

Je sens comme, si à l’intérieur de moi, il y avait quelqu’un en larmes, poussant de grands soupirs, dans une tristesse sans égale. En observant toute cette putréfaction je sens toujours mon corps blessé, la tête couronnée d’épines, les plaies ouvertes et, celle de mon cœur toujours renouvelée par la lance. [43]

« Seul le ciel sera ma vie... » [44]

Sur la terre je n’ai pas de vie ni rien qui me satisfasse: seul le ciel ! Seul le Ciel ! Seul le ciel sera ma vie; ce n’est qu’au ciel que mes désirs seront comblés. [45]

« Je me vois au bord d’un abîme... »

Je peux presque déjà entrer au ciel au prix de tant de douleur. La tempête semble s’apaiser. Mais quelle grosse averse ! Quelle fureur, quelle fureur qui a tant blessé mon pauvre cœur ! Mon Jésus, puis-je entrer ! Je ne sais pas quel est l’état de mon âme ! C’est comme si je me trouvais entre le Purgatoire et le Ciel : la plus part du temps, je ne ressens pas une très grande douleur, mais non plus une grande jouissance. Toutefois, par moments — pauvre de moi, ô Jésus ! — je me vois au bord d’un abîme, sans rien à quoi je puisse me soutenir. Vais-je y tomber ? Venez, mon Jésus, venez me libérer d’une pareille horreur; soutenez-moi, écartez-moi de lui ! [46]

« Mon état est grave... »

(...)

Mon état est grave; mes souffrances sont très douloureuses. Mais à l’intérieur de moi est né un désir irrésistible de dicter quelques paroles pour vous, mon Père. Les forces qui vous parlent ne sont pas les miennes : je n’en ai plus, car je suis exsangue. Mais c’est le cri de ma volonté ; c’est un léger souffle de vie qui vous parle. Mon corps ne sert à rien d’autre que pour souffrir; je n’éprouve rien d’autre. Je ne suis plus qu’une petite bulle d’écume qu’un rien fait disparaître.

Les sentiments de mon âme sont étranges. Je me trouve comme dans un endroit où l’on ne ressent ni joie ni peine. Je sens comme si les hommes m’avaient attachée à la terre, m’obligeant à suspendre mon voyage. Je vis arrêtée, voisine du ciel, mais sans pouvoir entrer. De temps à autre il me venait une très grande nostalgie de ma patrie céleste, capable de m’enlever mil vies; cette nostalgie est presque insupportable ; j’ai envie de pleurer, de beaucoup pleurer. Il me semble que la mission que Jésus m’a confiée soit accomplie. Je reste là, mais je ne fais rien. Je suis, toutefois convaincue que Jésus rompra ces liens qui empêchent mon envol vers le ciel...

Je continue le jeûne et je ne peux même pas rassasier avec goût la soif brûlante qui me consume. Je peux boire quelques gouttes qui ne me soulagent que très peu. [47] Je ne sais pas expliquer la nostalgie que j’ai des aliments. Je ressens le désir de tout porter à ma bouche ; j’aimerais me nourrir des aliments qui me plaisent, mais je ne le peux point.

Grâce à Dieu, mon intelligence est très vive. J’offre à Jésus, par amour pour Lui, mon martyre et aussi pour obtenir la lumière pour ceux qui sont privés sur la terre, de lumière et de confort... [48]

« Triomphe ! Triomphe !... »

Triomphe ! Triomphe ! Gloire, gloire à Jésus et Marie ! Paix pour l’humanité ! Jésus se réjouit, Jésus est heureux. La Reine du ciel, la Reine du monde triomphe en lui ! [49]

La Mère de Jésus et les victimes apportent la paix dans le monde. C’est la Mère de Jésus, avec la petite folle de l’Eucharistie !

Pénitence ; faites pénitence et remerciez le Ciel ! Pénitence pour réparer, remerciements en reconnaissance des moyens utilisés par Jésus pour sauver ses enfants.

[La paix] ne tardera pas, oui, elle ne tardera pas, ma bien-aimée ! Mais, malheur au monde, s’il ne se convertit pas ! Pauvre de lui, s’il n’abandonne pas ses crimes qui ont tant déchiré le divin Cœur de Jésus ! [50]

L’annonce de la Consécration...

(...)

Quand, par télégramme, j’ai eu la nouvelle de la consécration du monde à la chère Maman du ciel, [51] Jésus m’accorda de cours instants de consolation. Au comble de ma joie, je ne savais comment remercier Jésus et Marie. Les mains levées vers le ciel, je me suis exclamée :

Béni soit Jésus ! Bénie soit la Petite-Maman !

J’avais envie, à ce moment-là d’introduire moi-même le Saint-Père dans les Cœurs de Jésus et Marie: quelle joie !

D’une façon imprévue, j’ai ressenti une très grande humiliation : je me suis sentie méprisée ; et le léger souffle de vie qui me restait commença d’être un néant qui peu à peu s’enfonçait dans la terre, jusqu’à disparaître. Toutefois, même dans cet état j’ai continué de remercier. J’ai récité le “Magnificat” et j’ai fait allumer une lampe en l’honneur de la Maman du ciel.

Mon Père, mon jeûne continue ; je n’ai pas faim, mais je ressens une très grande envie de tout porter à la bouche. Si vous saviez combien m’est coûteuse cette souffrance! Je l’offre à Jésus pour les âmes !... [52]

En voyant la Vierge de Fatima...

Mon cœur semblait ne plus tenir dans ma poitrine, à cause de la violence de ses battements.

Je me sentais attirée par Elle: [53] j’ai eu l’impression de sortir de moi-même et d’être transportée dans une autre région : je ne vivais déjà plus sur la terre.

Je ne sais pas combien de temps j’y suis restée. [54]

● ● ●

NOTES

[1] Lettre du 2 janvier 1942 au Père Mariano Pinho.

[2] Lettre du 3 janvier 1942 au Père Mariano Pinho.

[3] Ce fut la dernière visite du Père Mariano Pinho à Alexandrina. La lettre par laquelle le provincial des jésuites ordonne au Père Mariano Pinho de cesser toute relation avec la servante de Dieu est datée du 6 janvier 1942.

Toutefois, il lui permets, encore pour quelque temps, de recevoir les lettres d’Alexandrina, mais à condition que celles-ci transitent par lui. Voir explication du Père Abel Guerra dans les “Témoignages”.

  Le Père Mariano Pinho, par délicatesse, n’a pas voulu en informer Alexandrina immédiatement. Il chargea Deolinda de le faire auprès de sa sœur, petit à petit.

[4] Lettre du 9 janvier 1942 au Père Mariano Pinho.

[5] Lettre du 15 janvier 1942 au Père Mariano Pinho.

[6] Lettre du 16 janvier 1942 au Père Mariano Pinho.

[7] Lettre du 17 janvier 1942 au Père Mariano Pinho.

[8] Le Père Mariano Pinho n’a jamais révélé la lutte sournoise qui s’est déchaînée contre lui au sein de son Ordre.

[9] La perte de son Père spirituel est pour Alexandrina un vrai martyre. Son cœur se trouve blessé et même découragé. Cette situation la fait envisager tant de scénarios, inspirés par sa douleur habituelle, augmentée par celle de perdre l’appui dont elle avait tant besoin et qui lui était si nécessaire. Mais les voies du Seigneur restent impénétrables...

[10] Lettre du 21 janvier 1942 au Père Mariano Pinho.

[11] Lettre du 26 janvier 1942 au Père Mariano Pinho.

[12] Lettre du 30 janvier 1942 au Père Mariano Pinho.

[13] Lettre du 13 février 1942 au Père Mariano Pinho.

[14] Journal du 19 février 1942.

[15] Lettre du 21 février 1942 au Père Mariano Pinho.

[16] Ce fut le Père Mariano Pinho qui demanda à ce prêtre de devenir son confesseur. Il le resta jusqu’à la mort de la Servante de Dieu.

[17] Lettre du 23 février 1942 au Père Mariano Pinho.

[18] Journal du 27 février 1942.

[19] Pour adhérer à Dieu et devenir esprit avec Lui des purifications énergiques et terribles sont nécessaires. Celles-ci sont bien plus douloureuses que celles de la nuit des sens; c’est ce qui advient dans la nuit de l’esprit. Saint Jean de la Croix les décrit et affirme qu’elles peuvent être comparées à celles du purgatoire et de l’enfer. (Nuit II, chap. 6-8).

[20] Pendant cette période Alexandrina ayant la sensation de mourir, dicte son testament spirituel, reporté au chapitre sur sa mort qui eu lieu le 13 octobre 1955.

[21] Elle écrira plus tard dans son journal du 31 mai 1946: “Mon sourire est faux mais non pas dans le sens malhonnête; en effet, le sourire de mon âme aux douleurs et à la croix est véridique et continu”.

[22] Le Père Mariano Pinho se trouvait, en effet, à Macieira de Cambra qui est une petite ville assez proche de Balasar. Il y fut envoyé par ses supérieurs et privé d’une partie de son ministère sacerdotal.

[23] Journal du 6 mars 1942.

[24] Journal du 13 mars 1942.

[25] Journal du 27 mars 1942.

[26] La dernière Passion physique soufferte par Alexandrina eut lieu le vendredi précédent, fête de Notre-Dame des Douleurs.

  La vénérable sœur Barbara de Saint Dominique est passée en trois ans de la nuit des sens à celle de l’esprit (Vie, pages 229 à 230). Elle souffrit les horreurs de l’esprit, subissant toutes les semaines les tourments de la Passion du Sauveur jusqu’à être crucifiée avec Lui et à exhaler son dernier soupir.

Alexandrina entra dans la nuit des sens vers 1937. A partir de 1938 elle souffrit la Passion physique du Seigneur jusqu’à fin mars 1942. Pendant ce temps-là les fiançailles mystiques se consumèrent. A partir de mars 1942 et jusqu’à sa mort (en 1955) elle souffrit la Passion intime et traversa la nuit de l’esprit, pendant laquelle le mariage mystique se réalisa (1944).

  Sainte Angèle de Foligno  explique: « La transformation de l’âme en Dieu a trois modes d’accomplissement. La première transformation unit l’âme à la volonté de Dieu (union de conformité), la seconde l’unit avec Dieu (union mystique et fiançailles), la troisième en Dieu et Dieu en elle (union mystique et mariage).

  La première transformation est une imitation de Jésus-Christ crucifié, car la croix est une manifestation de la volonté divine.

  La seconde transformation unit l’âme avec Dieu. Son amour n’est plus seulement alors un acte de sa volonté; car la source est ouverte, la source des sentiments immenses, la source des immenses délices; cependant il y a encore place ici pour la parole et la pensée.

  La troisième transformation fond tellement l’âme en Dieu et Dieu en elle, qu’à la hauteur immense où le mystère s’accomplit, les paroles meurent avec les pensées: celui-là sait ces choses qui les sent ». “Visions et Instructions” - Éditions Christiana - STEIN AM RHEIN; Suisse.

[27] Journal du 27 mars 1942.

[28] 27 mars 1942.

[29] Pendant que l’âme est absorbée en Dieu, dans la mansion la plus élevée, la pensée s’agite aux alentours du château, souffrant et luttant, à son grand mérite, au milieu d’une grande quantité de bêtes féroces. (Voir sainte Thérèse d’Avila; Quatrième Mansion).

  Cf. saint Jean de la Croix “Cantique Spirituel”; strophe III

[30] Sainte Thérèse, dans le “Château Intérieur”, septième Mansion, chapitre IV, dit que l’âme, après être complètement brûlée, resurgit à une nouvelle vie à la manière du phénix qui, selon la fable, renaissait de ses propres cendres.

[31] C’est, certainement de cette période, la lettre sans date du docteur Azevedo lequel, comme tous, étant donné que le jeûne se prolongeait, pensait qu’Alexandrina mourrait bientôt.

  Journal du 21 avril 1942.

[32] Journal du 3 mai 1942.

[33] Journal du 6 mai 1942.

[34] Journal du 7 mai 1942.

[35] Depuis le mois de juin 1899. En effet, à cette date, à la suite de l’intervention de Jésus auprès de la Mère Marie du Divin Cœur, Supérieure du Bon Pasteur de Porto, le Pape Léon XIII consacra le monde entier au Cœur de Jésus.

[36] Journal du 22 mai 1942.

[37] Quelques rares colloques avec Jésus ou Marie.

[38] Journal du 24 mai 1942.

[39] Journal du 30 mai 1942.

[40] Cette prière a été écrite par Deolinda et par le docteur Azevedo lors d’une extase.

[41] Journal du 31 mai 1942.

[42] Journal du 26 juin 1942.

[43] Journal du 25 juillet 1942.

[44] La prison dans laquelle je me vois, c’est le monde; la chaîne, c’est le corps. L’âme illuminée par la grâce, c’est elle qui connaît l’importance d’être retenue ou retardée d’atteindre sa fin, par quelque empêchement que ce soit.”

— Sainte Catherine de Gênes “Traité du Purgatoire” - Chapitre 17

[45] Journal du 27 juillet 1942.

[46] Journal du 20 septembre 1942.

[47] Voir, sainte Thérèse d’Avila; “Vie par elle-même”, chapitre 15.

[48] Lettre du 22 août 1942 au Père Mariano Pinho.

[49] Il est intéressant de faire remarquer ici, comme dans tant d’autres colloques, le titre de Reine que Jésus utilise en parlant de sa Sainte Mère. Le Pape Pie XII les utilisera lors de la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie.

[50] Journal du 6 novembre 1942.

[51] Pie XII fit la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie le 31 octobre 1942. Le Père Mariano Pinho envoya, à cette occasion, un télégramme à Alexandrina, pour lui annoncer la joyeuse nouvelle.

[52] Lettre du 7 novembre 1942 au Père Mariano Pinho.

[53] Le 13 décembre 1942, alors qu’Alexandrina priait Notre-Dame de Fatima pour diverses intentions, elle eut la vision de la Mère de Dieu, qui était “suspendue” à une grande hauteur. En bas, autour d’Elle, une immense foule, qu’Elle regardait avec tendresse et amour.

[54] Journal du 13 décembre 1942.
 

   

 

 

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