Né au nord de l'Angleterre, Alfred se fit remarquer par
tous
les avantages de la
naissance, de l'éducation et des talents. Son histoire
rapporte qu'un jour qu'il reposait dans son berceau, un de ses parents vit son
visage brillant comme le soleil. Jeune encore, il fut nommé gouverneur du palais
par David, roi d'Écosse, et il remplit cette charge importante avec une
supériorité qui lui attira l'estime du prince et de toute la cour.
Un jour, un personnage de qualité lui ayant fait des
reproches injurieux en présence du roi, il l'écouta avec patience et le remercia
de ce qu'il avait la charité de l'avertir de ses fautes. Cette conduite
impressionna si heureusement son ennemi, qu'il lui demanda aussitôt pardon. Ce
trait, parmi d'autres, révéla son humilité profonde. Mais Alfred se sentait fait
pour une vie plus parfaite.
A vingt-quatre ans, il quitta les honneurs de la cour pour
prendre l'habit monastique et porter le joug du Seigneur. Nommé malgré lui abbé
de son monastère, il se montra le modèle de tous. Un de ses religieux nous a
laissé de sa vertu le tableau suivant : « Quelle vie plus pure que celle
d'Alfred ? Qui fut plus sage dans ses discours? Les paroles qui sortaient de sa
bouche avaient la douceur du miel; son corps était faible et languissant, mais
son âme vive et alerte. Il souffrait patiemment ceux qui l'importunaient et ne
se rendait jamais importun à personne. Il écoutait volontiers les autres et ne
se pressait point de répondre à ceux qui le consultaient. On ne le vit jamais en
colère; ses paroles et ses actions portaient la douce empreinte de cette onction
et de cette paix dont son âme était remplie ».
Les quatre dernières années de sa vie, il augmenta ses
mortifications au point que son corps devint d'une maigreur extrême, et qu'on
l'aurait pris pour un esprit plutôt que pour un homme. Souvent il se mettait
dans une fosse creusée dans le sol de son oratoire, et de là on l'entendit plus
d'une fois s'entretenir avec les esprits célestes. Familiarisé depuis longtemps
avec la pensée de la mort, il la vit venir avec joie, le 12 janvier 1167, à
l'âge de cinquante-sept ans.
Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours
de l'année, Tours, Mame, 1950. |