Amé de Sion
Évêque, Patron de Douai, Saint
† ca. 690

Saint Amat, vulgairement appelé saint Amé, sortait d'une famille où les richesses se trouvaient réunies à la piété. Aussi puisa-t-il dès le berceau l'amour de la vertu dans les exemples et les instructions de ceux dont il avait reçu le jour. La vivacité de son esprit et la solidité de son jugement, lui firent faire de rapides progrès dans ses études. Il suivit, par rapport aux sciences profanes, la maxime de saint Jérôme, qu'il ne faut point apprendre ce que l'on ne peut savoir sans danger. Il ne négligea point, à l'exemple de ceux de son âge, la plus précieuse comme la plus utile de toutes les connaissances, celle de Dieu et de soi-même. Il s'exerçait aussi avec ardeur dans la pratique de l'humilité et de la divine charité. Ses parents de leur côté travaillèrent à le prémunir contre les vices si ordinaires à la jeunesse. Ils éloignaient de lui tout ce qui eût été capable de lui inspirer l'amour du monde, ou de souiller la pureté de son âme. Ils l'excitaient non-seulement à la persévérance, mais encore à la perfection, persuadés que la moindre infidélité à la grâce, peut avoir les suites les plus funestes.

Amé, formé d'après ces principes, fut de bonne heure un chrétien parfait. Lorsqu'il fut en âge de prendre un état de vie, il pria Dieu avec ferveur de lui faire connaître sa volonté. Se croyant appelé d'une manière spéciale à la sainteté, il entra dans le clergé, du consentement et de l'avis de ceux que la prudence et le devoir l'obligeaient d'écouter. La prière, l'étude de la religion, et la pratique de la charité devinrent son unique occupation. Il s'estimait heureux de se voir affranchi de tous les assujettissements du monde, qui, quoique compatibles avec la piété lorsqu'on les rapporte à Dieu, sont cependant toujours dangereux, et absorbent une partie considérable d'un temps que nous devrions employer tout entier pour l'éternité. On ne le trouvait donc jamais dans ces assemblées profanes où il est si facile de perdre l'esprit ecclésiastique et dans lesquelles le monde lui-même croit les ministres de Jésus-Christ déplacés. Il vivait dans la retraite la plus exacte, et s'y préparait à l'exercice des fondions sublimes auxquelles il était destiné. Animé du désir d'une plus haute perfection, il se retira dans le monastère d'Agaune, que l'amour des saintes lettres et de la régularité avait rendu célèbre. Il obtint de son abbé la permission de demeurer dans une petite cellule taillée dans le roc, auprès de laquelle il y avait un oratoire, et que l'on appelle aujourd'hui Notre-Dame du Roc. Quelque temps après, on le tira de sa solitude pour l'employer au service de l'église, et on le plaça vers l'an 669, sur le siège épiscopal de Sion, en Valais. Cette dignité, en faisant briller sa vertu d'un nouvel éclat, lui donnait en même temps plus d'autorité. Il répandait dans le sein des pauvres des aumônes abondantes ; il instruisait avec une ardeur infatigable ; il proportionnait aux circonstances les secours spirituels et temporels ; en un mot, il remplissait avec la plus parfaite exactitude tous les devoirs d'un pasteur accompli. Il y avait cinq ans qu'il gouvernait son diocèse en paix, lorsqu'il plut à Dieu de l'éprouver par des tribulations.

Thierri III, fils de Clovis II, qui réunit en sa personne toute la monarchie française, fut pendant plusieurs années livré au vice, et maîtrisé par des ministres corrompus. Il est le premier de nos Rois qui aient gouverné par les maires du palais, et auxquels on donne le titre de fainéants, Ebroïn, qui exerçait cet emploi, était un des plus méchants hommes qui aient jamais été chargés de l'administration du royaume de France. Il suffit, pour se former une idée de lui, de se rappeler qu'il fut le meurtrier de saint Léger ; qu'il persécuta et fit condamner à l'exil un grand nombre de Saints et d'évêques recommandables par leur vertu. Les ennemis de saint Amé profitèrent des dispositions d'un tel Roi et d'un tel ministre pour le perdre ; ils l'accusèrent de divers crimes dont il était innocent. Thierri, sans examiner si l'accusation était fondée, et sans permettre à l'évêque de Sion de se justifier, l'exila dans le monastère de Saint-Fursy à Péronne. Saint Ultan, qui en était abbé, traita le Saint avec beaucoup de vénération. Amé souffrit avec joie cette disgrâce ; il la regarda comme un moyen que Dieu lui fournissait de goûter les douceurs de la retraite, et de suivre son attrait pour les austérités de la pénitence. Jamais il ne fit entendre de plaintes, quoiqu'on eût violé à son égard toutes les lois de la justice. Une seule chose l'affligeait, c'était de voir son troupeau livré à un intrus, qui cachait la méchanceté d'un loup sous l'habit d'un pasteur.

Après la mort de saint Ultan, saint Mauront fut chargé du soin de garder l'évêque de Sion. L'ayant pris quelque temps avec lui dans le monastère de Hamaye, il le conduisit ensuite à celui de Breuil ou de Merville, qu'il venait de fonder. Il se félicitait tous les jours de posséder le serviteur de Dieu, et il se démit en sa faveur du gouvernement de son abbaye. Saint Amé, encore plus par ses exemples que par ses discours, portait ses moines à la perfection. Lorsqu'il vit la régularité parfaitement établie, il s'enferma dans une petite cellule attenante à l'église, où il mourut vers l'an 690.

Ebroïn, ce cruel persécuteur de tant de Saints, subit dès cette vie la peine due à ses crimes ; il fut massacré en 679. Le Roi Thierri mourut en 691 ; mais il était rentré en lui-même depuis quelques années. Il se reprocha jusqu'à sa mort l'injuste traitement qu'il avait fait souffrir à S- Amé ; et ce fut dans l'intention d'expier ce crime, qu'il fit plusieurs donations à l'abbaye de Breuil. Cette maison, suivant Gramaye, n'était qu'une communauté de prêtres séculiers. Mais il est certain que cet auteur se trompe, puisqu'en creusant la terre, on y a trouvé des corps anciennement enterrés avec des habits de moine.

Durant les incursions des Normands, les moines de Breuil emportèrent avec eux les reliques de saint Aîné, et se retirèrent d'abord à Soissons, puis à Douai. Cette translation se fit le premier Mai 870, par le ministère d'Eruannic, abbé de Breuil, et de saint Bain, cinquième évêque de Térouenne. Les moines obtinrent la permission de se fixer à Douai. Le monastère qu'ils y établirent fut sécularisé et changé en collégiale en 940. Il y a eu longtemps un prieuré et une chapelle à Breuil, dans l'endroit où saint Mauront avait reçu saint Amé, et où ils avaient mené ensemble la vie anachorétique. La terre de Breuil appartient encore aujourd'hui à l'église de saint Amé de Douai. En 1485, on transféra de Marchiennes, dans cette église les reliques de saint Mauront.

On trouve dans le martyrologe romain, sous le même jour, un autre saint Amé vulgairement appelé saint Amet. Il sortait d'une famille distinguée, établie dans le territoire de Grenoble. Il se retira, étant encore fort jeune, dans le monastère d'Agaune, dont il fut l'exemple par la pratique des plus sublimes vertus. Il alla depuis à Luxeuil avec saint Romaric. On l'en tira en 620, pour le faire abbé de Remiremont, dignité qu'il n'accepta que par obéissance. Sa fidélité à la grâce, et son zèle pour la perfection avaient quelque chose d'admirable. L'uniformité de la vie religieuse ne devenait point pour lui un principe de relâchement; sa ferveur au contraire croissait de jour en jour, ce qui donnait un nouveau degré de mérite à tous ses exercices. Il alla jouir de l'éternité bienheureuse vers l'an 627. On garde ses reliques à Remiremont, dans le diocèse de Toul.

 

 

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