Antoine Daniel, prêtre,
jésuite, missionnaire chez les Hurons, né à Dieppe le 27 mai 1601,
tué en Huronie le 4 juillet 1648, canonisé par le pape Pie XI, le 29
juin 1930.
Antoine Daniel avait
déjà commencé ses études de droit quand il entra au noviciat de la
Compagnie de Jésus, à Rouen, le 1er octobre 1621. Il fut professeur
des classes de grammaire au collège de Rouen (1623–1627), étudia la
théologie au collège de Clermont (1627–1630), enseigna les humanités
(1630–1631) et fut ministre au collège d’Eu (1631–1632). Le 1er
août 1626, le père Charles Lalemant écrivait de Québec à son frère
Jérôme : « Voicy un petit Huron qui s’en va vous voir, il est
passionné de voir la France. Il nous affectionne grandement & fait
paroistre un grand desir d estre instruict. [...] Il est fort
important de le bien contenter ; car si une fois cet enfant est bien
instruit, voila une partie ouverte pour entrer en beaucoup de
nations où il servira grandement ». Amantacha, dit Louis de
Sainte-Foy, fut baptisé à Rouen pendant que le père Daniel était
professeur au collège. Certains historiens ont affirmé que le père
Daniel avait préparé Amantacha au baptême. La chose n’est pas
prouvée avec certitude. Mais la présence du jeune Huron à Rouen n’a
pas échappé à la connaissance de Daniel ; et il se peut qu’elle
entre pour quelque chose dans sa vocation missionnaire.
En 1632, le père Daniel
arrive au Cap-Breton, dont l’habitation est commandée par son frère,
le capitaine Charles. L’année suivante, le 24 juin 1633, il est à
Québec et il est destiné avec Jean de Brébeuf à la mission huronne,
mais le départ n’a lieu qu’en 1634. Aucun missionnaire n’a connu
autant que le père Daniel les fatigues et les dangers que présentait
alors le voyage de la Huronie ; en 1634 comme en 1638, il est
abandonné en chemin par ses guides ; à l’isolement s’ajoute la
maladie, et il attribue à une protection spéciale du Ciel d’avoir pu
se rendre à destination. Le voyage de retour qu’il fit en 1636 fut
également pénible, et quand il arriva à Trois-Rivières, il était
littéralement épuisé.
Ses progrès dans la
langue furent rapides, et il eut tôt fait d’apprendre aux enfants à
chanter le Pater et le Credo en huron. Sa bonté, sa douceur, ses
talents pédagogiques le firent désigner à un apostolat nouveau que
les missionnaires, dans leur inexpérience des circonstances
concrètes, jugeaient possible et riche de promesses pour
l’avancement de la foi : la fondation à Québec d’un séminaire où les
jeunes Hurons viendraient se former à la science et aux vertus
chrétiennes. Si grands étaient les espoirs suscités par cette
fondation que la Huronie y sacrifiait un de ses meilleurs
missionnaires et les pères de Québec se privaient des services de
cinq domestiques fort utiles. Une expérience de deux ans allait
révéler que les enfants de la Huron étaient inadaptés et
inadaptables à ce mode européen d’éducation. Ce fut l’écroulement
d’un beau rêve et le retour du père Daniel à la vie active du
missionnaire.
Il se dévoua
inlassablement et avec succès pendant dix ans. Le 4 juillet 1648,
les Iroquois envahissent la mission Saint-Joseph Il (Téanaostaiaé,
près de Hillsdale, Simcoe Co., Ontario), au moment où le père Daniel
finissait sa messe. Il encourage les néophytes, il parle avec un tel
accent des vérités de la foi que les infidèles en grand nombre
demandent le baptême. Après avoir semé la désolation dans le
village, les Iroquois s’attaquent à la chapelle : « Fuyez, mes
Freres, dit le Pere à ses nouveaux chrestiens, & portez avec vous
vostre foy jusqu’au dernier soupir ». Quant à lui, il doit sa
vie aux âmes. Il sort de la chapelle, va droit à l’ennemi qu’un
pareil courage étonne. Ce premier moment de stupeur passé, le corps
du missionnaire est criblé de flèches. Une balle le frappe à la
poitrine qu’elle traverse de part en part, et il tombe en prononçant
le nom de Jésus. Après avoir profané son corps, on le jette dans le
feu qui consume la chapelle. Premier martyr de la Huronie, le père
Daniel garde, même après sa mort, des trésors de tendresse et
d’encouragement pour ses frères d’apostolat. La Relation de 1649
nous en a conservé deux exemples.
Les Hurons avaient
surnommé le père Daniel Anounnen.
Léon Pouliot
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