Jean était “habité” par l’Esprit de Dieu
Pour mieux comprendre la scène qui
nous est proposée aujourd’hui du baptême de Jésus par Jean le Baptiste, il est
bon de lire tout le chapitre 3 de l’Évangile de saint Matthieu, qui nous le
raconte.
En effet, l’évangéliste commence
par nous présenter le Précurseur et son action évangélisatrice sur les bords du
Jourdain.
« En ces jours-là parut Jean le
Baptiste », dit Matthieu. Le fils d’Élisabeth et de Zacharie devait avoir
alors une trentaine d’années ; il portait « un vêtement de poil de chameau,
et autour de ses reins une ceinture de cuir, et il se nourrissait de sauterelles
et de miel sauvage » et il prêchait alors « dans le désert de Judée »,
non loin des berges du Jourdain.
Que prêchait-il ? Que disait-il à
ces gens qui venaient à sa rencontre ?
« Repentez-vous, car le royaume
des cieux est proche ». Et c’est parce que le “royaume des cieux était
proche” que tous ces gens venaient en grand nombre, « confessant leurs
péchés, ils se faisaient baptiser par lui ».
Le royaume n’était pas seulement
proche, il était là, tout de suite en chacun d’eux ; tellement proche qu’ils
allaient pouvoir le “toucher”, le saisir à pleines mains. Et Jean insistait :
« Moi, je vous baptise dans l'eau pour le repentir; mais celui qui vient après
moi est plus puissant que moi, et je ne suis pas digne de porter ses sandales ;
lui, il vous baptisera dans l'Esprit-Saint et le feu ».
Mais tous n’étaient pas dignes,
tous n’étaient pas sincères dans leur démarche, c’est pourquoi Jean les
interpelait durement et sans ambigüité : « Race de vipères, qui vous a appris
à fuir la colère qui vient ? Faites donc de dignes fruits de repentir. Et ne
vous avisez pas de dire en vous-mêmes : Nous avons Abraham pour père ; car je
vous dis que de ces pierres mêmes Dieu peut faire naître des enfants à Abraham ».
Ces “saintes” colères de Jean se
terminaient par cet avertissement redoutable : « Tout arbre donc qui ne porte
pas de bon fruit sera coupé et jeté au feu » et encore : « Il brûlera la
paille dans un feu qui ne s'éteint point ».
Ce langage déplaisait fort aux
pharisiens qui se croyaient hors d’atteinte, des parfaits. Cette verve acerbe
finira même par causer la disgrâce et le martyr du Saint précurseur.
Ce fut au cours de l’une de ces
séances de baptême que « parut Jésus, venant de Galilée au Jourdain vers
Jean, pour être baptisé par lui ».
Jean était “habité” par l’Esprit de
Dieu et, immédiatement il reconnut dans ce nouvel arrivant “l’Agneau de Dieu qui
enlève le péché du monde”, celui dont il n’était “pas digne de porter les
sandales”, le Messie. Alors, son humilité le poussa tout d’abord à refuser
d’accomplir l’acte de baptême : « C'est moi qui ai besoin d'être baptisé par
toi, et tu viens à moi ! ».
Mais, cet acte il fallait
l’accomplir, pour que s’accomplisse également l’Écriture Sainte. Alors Jésus
insiste : « Laisse faire maintenant, car il convient que nous accomplissions
ainsi toute justice ».
Alors, le dernier des prophètes
s’exécuta sans rechigner de nouveau : il plongea Jésus dans les eaux du Jourdain
et l’aida ensuite à se relever.
« Jésus ayant été baptisé sortit
aussitôt de l'eau ― poursuit l’évangéliste Matthieu ―, et voilà que les
cieux s'ouvrirent pour lui, et il vit l'Esprit de Dieu descendre comme une
colombe et venir sur lui ».
Il est bien dit ici que Jean “vit”,
et non qu’il crut voir ou qu’il eût la sensation de voir : il “vit l’Esprit de
Dieu” descendre sur le nouveau baptisé et entendit ensuite la voix de Dieu qui,
du Ciel, clamait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis mes
complaisances ».
N’est-il pas extraordinaire de
“voir” l’Esprit de Dieu, ce Dieu invisible que nul n’a jamais vu à part le
Fils ?
Cette forme de “voir” reste pour
nous quelque chose d’incompréhensible, d’extraordinaire, d’inexplicable, que
seule la foi nous permets de croire, sachant « qu’à Dieu rien est
impossible » (Lc. 1, 37), comme rendre féconde une vieille femme qui n’avais
jamais engendré : Élisabeth, la mère de Jean.
Nous avons ici la représentation de
la Trinité divine dans toute sa splendeur et dans tout son mystère : le Fils qui
se fait baptiser par Jean, l’Esprit qui descend sur Jésus sous la forme d’une
colombe et le Père qui, du haut des Cieux annonce “son Fils en qui il a mis
toutes ses complaisances”.
Que se passa-t-il ensuite ?
« Jésus fut emmené par l'Esprit
dans le désert, pour être tenté par le diable » (Mt.4, 1).
Quant à Jean, il continua de
prêcher jusqu’au jour où il fut mis à mort par Hérode, devenant ainsi l’un des
premiers martyrs de l’Église dont il avait avait plongé la Tête dans les eaux du
Jourdain.
Alphonse Rocha
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