JE CROIS AU SAINT-ESPRIT
§ I. — NÉCESSITÉ DE LA FOI AU SAINT-ESPRIT.
Jusqu’ici nous avons
parlé de la première et de la seconde Personne de la Sainte Trinité,
et nous avons donné sur ce double sujet les explications
convenables. Il s’agit maintenant d’exposer ce que le Symbole nous
enseigne sur la troisième Personne qui est le Saint-Esprit.
C’est un point qui réclame tout le zèle et toute l’application des
Pasteurs.
Car il n’est pas plus
loisible aux Chrétiens d’ignorer ou de mal connaître cet Article,
que les Articles précédents. Aussi l’Apôtre ne voulut-il point
laisser un certain nombre d’Ephésiens dans l’ignorance où ils
étaient par rapport au Saint-Esprit. Leur ayant demandé s’ils
L’avaient reçu, ils lui répondirent qu’ils ne savaient même pas s’il
y avait un Saint-Esprit. Aussitôt il leur fit cette question:
Quel Baptême avez-vous donc reçu ? Ces paroles nous montrent que
les Fidèles sont rigoureusement obligés d’avoir une connaissance
spéciale de cet Article. Et le premier fruit qu’ils en retireront
c’est que s’ils considèrent sérieusement que tout ce qu’ils
possèdent, ils le doivent à la libéralité et à la bonté de
l’Esprit-Saint ils deviendront plus humbles et plus modestes dans
leurs pensées et leurs sentiments sur eux-mêmes, et ils placeront
toute leur espérance dans le secours de Dieu. Or, n’est-ce pas là,
pour le Chrétien, le premier pas vers la Sagesse, et par suite vers
le Bonheur éternel ?
§ II. — CE QUE C’EST QUE LE SAINT-ESPRIT.
Pour commencer, il faut
bien expliquer d’abord quelle idée et quel sens on attache ici au
mot Saint-Esprit. C’est qu’en effet il peut s’appliquer aussi
bien au Père et au Fils. (Tous deux sont esprits, et tous deux sont
Saints, et nous faisons profession de croire que Dieu est esprit.)
D’autre part, on donne également ce nom aux Anges et aux âmes des
justes. Il faut donc prendre garde qu’il n’y ait ni équivoque, ni
erreur dans l’esprit des Fidèles. Par conséquent il est nécessaire
de leur apprendre que par le Saint-Esprit on entend ici la troisième
Personne de la Sainte Trinité. C’est ainsi qu’on L’appelle
quelquefois dans l’Ancien testament, et très souvent dans le
nouveau. David dit à Dieu dans sa prière: n’éloignez pas de moi
votre Saint-Esprit. Le Sage s’écrie: qui connaîtra vos
desseins Seigneur, sinon celui à qui Vous donnerez la Sagesse, et à
qui Vous enverrez d’en haut votre Esprit-Saint ? — Dans un autre
endroit, il dit: Dieu a créé la Sagesse dans le Saint-Esprit.
— Dans le nouveau testament Jésus-Christ ordonne de baptiser les
nations au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Nous y
lisons que la très Sainte Vierge a conçu par le
Saint-Esprit. Enfin Saint Jean nous renvoie à Jésus-Christ
pour qu’Il nous baptise dans le Saint-Esprit ; sans parler d’un
grand nombre d’autres textes de nos Saints Livres où nous
rencontrons la même expression.
Et personne ne doit
trouver étrange qu’on n’ait pas donné de nom particulier à la
troisième Personne de la Sainte Trinité, aussi bien qu’à la première
et à la seconde. Si la seconde Personne a un nom qui Lui est propre,
si elle s’appelle le Fils, c’est que sa naissance éternelle du Père
s’appelle proprement génération, comme nous l’avons dit dans les
précédents articles. Et du moment que cette naissance peut porter le
nom de génération, nous avons le droit d’appeler Fils la Personne
qui émane, et Père, celle de qui elle émane. Mais comme l’émanation
de la troisième Personne n’a pas de nom qui Lui soit propre, et
qu’on L’appelle simplement aspiration et procession (qui sont des
noms communs), par cela même, la Personne ainsi produite manque
nécessairement de dénomination particulière. Et la raison en est que
tous les noms que nous donnons à Dieu, nous sommes forcés de les
emprunter aux choses créées. Et comme d’autre part nous ne
connaissons pas, dans les créatures, d’autre communication de nature
et d’essence que celle qui se fait par voie de génération. il nous
est impossible d’exprimer par un nom propre cette communication que
Dieu fait de Lui-même et de son Etre tout entier par voie d’amour.
C’est pourquoi la troisième Personne de la Sainte Trinité porte la
dénomination commune d’Esprit-Saint ; dénomination d’ailleurs qui
Lui convient parfaitement, parce que, d’une part, c’est elle, la
troisième Personne, qui répand dans nos âmes la vie spirituelle (la
vie de l’Esprit) et parce que, d’autre part, sans le souffle et
l’inspiration de cet esprit très Saint, nous ne pouvons rien faire
qui mérite la Vie Eternelle.
Le sens du mot
Saint-Esprit étant bien expliqué, il faut ensuite enseigner au
peuple que le Saint-Esprit est Dieu, comme le Père et le Fils, qu’Il
leur est égal en toutes choses, Tout-Puissant comme eux, éternel
comme eux, et comme eux d’une perfection, d’une grandeur, d’une
bonté, d’une sagesse infinie, en un mot qu’Il a la même nature.
Cette égalité est suffisamment indiquée par ce petit mot: en, que
nous employons, quand nous disons: Je crois en l’Esprit-Saint. Ce
mot nous le plaçons en effet devant le nom de chaque Personne de la
Sainte Trinité: (Je crois en Dieu, et en Jésus-Christ) c’est une
manière d’exprimer la plénitude et la force de notre Foi.
Du reste cette Vérité a
pour elle les témoignages les moins douteux de la Sainte Écriture.
Par exemple, lorsque Saint Pierre dans les Actes des Apôtres, dit:
Ananie, pourquoi Satan a-t-il tenté votre cœur, au point de vous
faire mentir au Saint-Esprit ? il ajoute aussitôt: ce n’est
point aux hommes que vous avez menti, mais à Dieu ; donnant
ainsi le nom de Dieu à Celui qu’il venait d’appeler le Saint-Esprit.
De même l’Apôtre écrivant aux Corinthiens applique au Saint-Esprit
le nom de Dieu qu’il venait de prononcer. Il y a, leur dit-il,
diversité d’opérations, mais c’est le même Dieu qui opère tout en
tous. Et il ajoute: oui, c’est un seul et même esprit qui opère
toutes ces choses, distribuant à chacun ses dons comme il Lui plaît.
De plus, le même Apôtre attribue au Saint-Esprit, dans le Livre des
Actes, ce que les Prophètes rapportent à Dieu seul. Isaïe avait
dit: J’ai entendu cette voix du Seigneur: qui enverrai-je ?
Puis, Il me dit: Va, dis à ce peuple: votre cœur s’appesantit, et
vos oreilles deviennent sourdes, et vous bouchez vos yeux pour ne
pas voir, et vous fermez vos oreilles pour ne pas entendre. Or,
l’Apôtre, citant ces paroles, (et s’adressant aux Juifs) s’exprime
ainsi ce que le Saint-Esprit a dit par la bouche du Prophète
Isaïe est bien vrai.
D’un autre côté,
lorsque nous voyons la Sainte Écriture joindre la Personne du
Saint-Esprit à la Personne du Père et du Fils, comme dans l’endroit
où elle ordonne de conférer le Baptême au nom du Père, et du Fils,
et du Saint-Esprit, aucun doute n’est plus possible sur la vérité de
ce mystère ; car si le Père est Dieu, et si le Fils est Dieu, nous
sommes obligés de reconnaître que le Saint-Esprit l’est aussi,
puisque l’Ecriture Le met sur le même rang que le Père et le Fils.
De plus, le fait d’être
baptisé au nom d’une créature quelconque ne peut procurer aucun
avantage. Est-ce au nom de Paul que vous avez été baptisés, dit
l’Apôtre ? et en parlant ainsi, il voulait faire entendre
évidemment qu’un baptême de ce genre serait inutile pour le Salut.
Si donc nous sommes baptisés au nom du Saint-Esprit, nous devons
confesser qu’Il est Dieu.
Ce même ordre des trois
Personnes divines, qui nous fournit la preuve de la divinité du
Saint-Esprit, se remarque également dans cette Épître de Saint Jean,
où nous lisons Il y en a trois qui rendent témoignage dans le
ciel le Père, le Verbe et l’Esprit-Saint, et ces trois ne sont
qu’une seule et même chose. Cet ordre se retrouve aussi dans cet
éloge magnifique de la Sainte Trinité qui termine les Psaumes et les
Cantiques sacrés: Gloire au Père, et au Fils, et au
Saint-Esprit !
Enfin ce qui confirme
puissamment cette Vérité, c’est que l’Ecriture Sainte attribue d’une
manière formelle au Saint-Esprit tout ce qui, selon les données de
la Foi, n’est propre qu’à Dieu seul. Ainsi elle lui reconnaît des
temples: Ne savez-vous pas, dit l’Apôtre, que vos membres
sont les temples du Saint-Esprit ? elle lui attribue le pouvoir
de sanctifier , de vivifier et de scruter les
profondeurs de Dieu , de parler par les Prophètes ,
d’être partout ; autant de perfections qui ne conviennent qu’à
Dieu.
Ce n’est pas tout. Il
faut de plus expliquer aux Fidèles, et avec beaucoup de soin, non
seulement que le Saint-Esprit est Dieu, mais encore qu’il est la
troisième Personne dans l’Essence divine, parfaitement distincte du
Père et du Fils, et produite par la Volonté de l’un et de l’autre.
C’est l’enseignement même de la Foi. Car sans parler des autres
témoignages de l’Ecriture, la forme du Baptême que notre Sauveur
nous a apprise, montre très clairement que le Saint-Esprit est une
troisième Personne qui subsiste par elle-même dans la nature divine,
et qui est distincte des deux autres. Ainsi le déclare l’Apôtre,
quand il dit: que la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et la
Charité de Dieu, et la communication du Saint-Esprit soient avec
tous. Amen ! Mais ce qui plus que tout le reste met cette vérité
en pleine lumière, c’est la déclaration formelle du premier Concile
œcuménique de Constantinople. Pour réfuter l’hérésie absurde et
impie de Macédonius, les Pères de ce concile ajoutèrent au symbole
de Nicée ces mots si importants: je crois au Saint-Esprit
Notre-Seigneur, qui donne la vie, qui procède du Père et du Fils,
qui est adoré et glorifié avec le et le Fils, qui a parlé par les
Prophètes. En confessant que le Saint-Esprit est notre Seigneur,
ils montrent par le fait combien Il est au dessus des Anges, qui
sont cependant les plus nobles esprits que Dieu ait créés, tous, au
témoignage de S Paul, des esprits administrateurs, envoyés pour
exercer leur ministère en faveur de ceux qui doivent être les
héritiers du salut. Ils disent encore qu’Il donne la vie,
parce que de son union avec Dieu l’âme tire une vie plus réelle, que
celle dont jouit le corps par son union avec l’âme. Et comme l’Ecriture
Sainte attribue au Saint-Esprit cette union de l’âme avec Dieu, il
est clair qu’on a parfaitement raison de lui donner le nom d’Esprit
vivifiant.
Pour expliquer les
paroles qui suivent: Qui procède du Père et du Fils, il faut
bien faire entendre aux Fidèles que le Saint-Esprit procède de toute
éternité du Père et du Fils comme d’un principe unique. Cette vérité
est proposée à notre Foi par les définitions mêmes de l’Église, dont
un Chrétien n’a jamais le droit de s’écarter, et elle est confirmée
par l’autorité de nos Saints Livres et des Conciles. En effet,
Notre-Seigneur Jésus-Christ parlant du Saint-Esprit, dit: Il Me
glorifiera parce qu’Il recevra de ce qui est à Moi. Et lorsque
nous voyons dans la Sainte Écriture qu’il est appelé tantôt
l’Esprit du Christ, tantôt l’Esprit du Père ; qu’Il
est envoyé, tantôt par le Père, tantôt par le Fils,
c’est bien la preuve manifeste qu’il procède également de l’un et de
l’autre. Celui qui n’a pas l’Esprit de Jésus-Christ, dit
Saint Paul, n’est point à Lui. et dans l’Épître aux Galates,
il appelle encore le Saint-Esprit, l’Esprit de Jésus-Christ:
Dieu, dit-il, a envoyé dans vos cœurs l’Esprit de son Fils,
qui crie, mon Père, mon Père. De son côté, Notre-Seigneur, dans
Saint Matthieu, l’appelle l’Esprit du Père: Ce n’est pas Vous
qui parlez, mais l’Esprit de votre Père. Et dans la Cène, Il
s’exprime ainsi: le Consolateur que Je vous enverrai, C’est
l’Esprit de vérité qui procède du Père, et qui rendra témoignage de
Moi. Ailleurs, Il nous annonce en ces termes que le même
esprit-Saint sera envoyé par le Père: le Père L’enverra en mon
nom. toutes ces expressions s’entendent évidemment de la
procession du Saint-Esprit, il est donc bien clair et bien certain
qu’Il procède du Père et du Fils.
Voilà ce qu’il faudra
dire de la Personne du Saint-Esprit.
§ III. — DES CHOSES QUI SONT SPÉCIALEMENT
ATTRIBUÉES AU SAINT-ESPRIT.
Mais de plus les
Pasteurs devront expliquer avec soin certains effets admirables,
certains dons excellents que la Foi lui attribue, et qui sortent et
découlent de Lui comme de la source éternelle de la Bonté. Il est
vrai que toutes les opérations extérieures de la Sainte-Trinité sont
communes aux trois Personnes. Cependant il en est quelques-unes que
l’on attribue plus particulièrement au Saint-Esprit, pour nous faire
comprendre qu’elles viennent de l’immense Charité de Dieu envers
nous. Le Saint-Esprit en effet procède de la Volonté de Dieu, comme
par un embrasement d’amour, et dès lors il est facile de concevoir
que les effets qui Lui sont spécialement attribués doivent découler
de l’Amour infini de Dieu pour nous.
C’est pour la même
raison que le Saint-Esprit est appelé don. Car on appelle don
ce qui est accordé libéralement gratuitement et sans espoir de
récompense. Ainsi tous les biens, toutes les grâces que nous avons
reçues de Dieu, et qu’avons-nous que nous n’ayons reçu de Lui,
dit l’Apôtre ? ? nous les tenons de la libéralité du Saint-Esprit.
Et cela nous devons le reconnaître avec une sincère et pieuse
gratitude.
Les effets produits par
le Saint-Esprit sont nombreux. Car sans parler ici de la création,
de la propagation des créatures, du gouvernement du monde ? sujets
que nous avons traités dans le premier article du Symbole ? nous
venons de démontrer à l’instant qu’on Lui attribue proprement la
vivification spirituelle, et les paroles suivantes d’Ézéchiel sont
un véritable témoignage en faveur de cette Vérité: Je vous
donnerai mon esprit, et vous vivrez.
Voici comment Isaïe
énumère les effets (ou les dons) principaux du Saint-Esprit, et ceux
qui Lui conviennent plus spécialement: Il L’appelle: l’Esprit de
Sagesse et d’intelligence, l’Esprit de Conseil et de Force, l’Esprit
de Science et de Piété, l’Esprit de crainte du Seigneur. Effets
que l’on nomme communément les Dons du Saint-Esprit, et auxquels on
donne aussi quelquefois le nom même de Saint-Esprit. C’est pourquoi,
remarque judicieusement Saint Augustin, « lorsque nous
rencontrons le mot de Saint-Esprit dans la Sainte Écriture, il faut
bien voir s’il s’agit de la troisième Personne de la Sainte Trinité,
ou seulement de ses effets et de ses opérations. Car ces deux choses
diffèrent autant l’une de l’autre que Dieu Lui- même diffère de la
créature. »
Il convient de faire
ressortir ces commentaires avec un soin particulier, car ces dons du
Saint-Esprit sont pour nous comme une source divine où nous puisons
les préceptes de la Vie chrétienne, et par eux encore nous pouvons
savoir si le Saint-Esprit habite vraiment en nous.
Entre ces dons
magnifiques celui qui, dans notre esprit, doit passer avant tous les
autres, c’est la Grâce qui nous justifie, et qui nous marque du
sceau de l’Esprit-Saint, qui a été promis, et qui est le gage de
notre héritage. C’est cette grâce en effet qui nous attache à
Dieu par les liens les plus étroits de l’amour, qui allume dans nos
cœurs le zèle ardent de la piété, qui nous fait entreprendre une vie
nouvelle, qui nous rend participants de la nature divine,
et nous fait mériter le nom et la qualité réelle d’enfants de Dieu
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