JE CROIS LA RÉMISSION DES PÉCHÉS.
Il n’est personne qui,
en voyant ce dogme de la Rémission des péchés au nombre des articles
du Symbole, puisse douter un seul instant qu’il se trouve en face
d’un mystère tout divin, et absolument nécessaire au Salut. nous
l’avons démontré précédemment: sans une Foi ferme à tout ce que le
Symbole nous propose à croire, il n’y a point de piété possible.
Cependant, si cette vérité, qui est déjà bien assez claire par
elle-même, avait encore besoin de quelques preuve, il suffirait de
rapporter les paroles que prononça notre Seigneur, peu de temps
avant son Ascension, lorsqu’il ouvrit l’intelligence de ses Apôtres,
pour leur faire comprendre les Ecritures: Il fallait,
dit-il, que le Christ souffrît, et qu’Il ressuscitât le troisième
jour d’entre les morts, et que la Pénitence et la Rémission des
péchés fussent prêchées en son nom, dans toutes les nations à
commencer par Jérusalem.
En méditant ces
paroles, les Pasteurs n’auront pas de peine à voir que s’ils sont
obligés de transmettre aux Fidèles toutes les Vérités de la
Religion, le Seigneur leur fait un devoir strict et rigoureux
d’expliquer avec le plus grand soin ce chapitre de la Rémission des
péchés.
§ I. — IL Y A DANS L’ÉGLISE UN POUVOIR DE
REMETTRE LES PÉCHÉS.
Le devoir du Pasteur
sera donc d’enseigner ici que non seulement on trouve la Rémission
des péchés dans l’Eglise Catholique, selon cette prophétie d’Isaïe:
Le peuple qui habitera dans son sein sera purifié de ses péchés,
mais encore que l’Eglise elle-même a le pouvoir de remettre les
péchés. Et lorsque les prêtres usent légitimement de ce pouvoir, et
selon les règles prescrites par Notre-Seigneur Jésus-Christ, nous
devons croire que les péchés sont remis et pardonnés.
Au moment où nous
faisons notre première profession de Foi, en recevant le saint
Baptême qui nous purifie, le pardon que nous recevons est si plein
et si entier, qu’il ne nous reste absolument rien à effacer, soit de
la faute originelle, soit des fautes commises par notre volonté
propre, ni aucune peine à subir pour les expier. Mais néanmoins la
grâce du Baptême ne délivre personne des infirmités de la nature.
Au contraire nous avons encore à combattre les mouvements de la
concupiscence qui ne cesse de nous porter au mal ; et dans cette
lutte, à peine pourrait-on trou ver un homme dont la résistance fût
assez rigoureuse, et le soin de son salut assez vigilant, pour
échapper à toute blessure. Si donc il était nécessaire que l’Eglise
eût le pouvoir de remettre les péchés, il fallait aussi que le
Baptême ne fût pas pour elle l’unique moyen de se servir de ces
clefs du Royaume des cieux qu’elle avait reçues de Jésus Christ ; il
fallait qu’elle fût capable de pardonner leurs fautes à tous les
vrais pénitents, quand même ils auraient péché jusqu’au dernier
moment de leur vie. nous avons dans nos Saints Livres les
témoignages les plus positifs en faveur de cette vérité. Ainsi dans
Saint Matthieu le Seigneur dit à Pierre: Je te donnerai les
clefs du Royaume des cieux ; tout ce que tu lieras sur la terre sera
lié dans le ciel, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié
dans le ciel. Il dit de même à tous les Apôtres: Tout ce que
vous lierez sur la terre, sera lié dans le. ciel, et tout ce que
vous délierez sur la terre, sera délié dans le ciel. Saint Jean,
de son côté, nous assure que Jésus-Christ, après avoir soufflé sur
les Apôtres, leur dit: Recevez le Saint-Esprit: les péchés
seront remis à ceux à qui vous les remettrez, et ils seront retenus
à ceux à qui vous les retiendrez.
Et il ne faut pas
s’imaginer que ce pouvoir de pardonner s’applique seulement à
certaines espèces de fautes. non. Il n’en est aucune, si criminelle
qu’elle soit, ou qu’on la suppose, que la Sainte Eglise ne puisse
remettre. Il n’est personne, si méchant et si coupable qu’il soit,
qui ne doive espérer avec assurance son pardon, pourvu que son
repentir soit sincère. Ce pouvoir non plus n’est point limité de
telle sorte, que l’on puisse en user seulement dans un temps
déterminé. Quelle que soit l’heure à laquelle le pécheur veuille
revenir au bien, il ne faut pas le rejeter. C’est le précepte formel
de Notre-Seigneur Lorsque le prince des Apôtres lui demanda s’il
fallait pardonner plus de sept fois, Il lui répondit: non pas
sept fois, mais soixante-dix-sept fois sept fois.
§ II. — A QUI A ÉTÉ CONFIÉ, DANS L’ÉGLISE, LE
POUVOIR DE REMETTRE LES PÉCHÉS.
Si nous envisageons ce
pouvoir dans ceux qui doivent l’exercer, nous lui trouvons des
limites. En effet Notre-Seigneur n’a pas voulu confier à tous les
Chrétiens une fonction si haute et si sainte, Il en a chargé
uniquement les Evêques et les Prêtres. — Si d’autre part nous
considérons ce pouvoir dans la manière de l’exercer, il est
également limité. Ce n’est que par les Sacrements administrés chacun
selon la forme requise, que les péchés peuvent être remis. L’Eglise
n’a pas reçu le droit de les pardonner autrement. Ainsi dans la
Rémission des péchés, les Prêtres et les Sacrements sont de purs
instruments dont Notre-Seigneur Jésus-Christ, unique Auteur et
Dispensateur de notre Salut, veut bien se servir, pour effacer nos
iniquités et nous donner la grâce de la justification.
§ III. — LE POUVOIR DE REMETTRE LES PÉCHÉS
EST UN GRAND BIENFAIT.
Afin que les Fidèles
soient en état d’apprécier, comme il convient, ce grand Bienfait de
l’infinie Miséricorde de Dieu envers son Eglise, et par suite d’en
profiter avec tout l’empressement du zèle et de la piété, les
Pasteurs s’efforceront de mettre en pleine lumière l’excellence et
l’étendue d’une pareille Grâce. Et ils n’auront pas de peine à
atteindre ce but, s’ils ont soin de bien montrer quelle est la
puissance capable de remettre les péchés, et de faire passer les
hommes du mal au bien. Il est certain que pour produire un tel
effet, il ne faut rien de moins que la Vertu de Dieu, cette Vertu
immense et infinie que nous croyons nécessaire pour ressusciter les
morts, et pour créer le inonde. Et même, au sentiment de Saint
Augustin , faire d’un impie un juste doit passer pour une œuvre
plus brande que de créer de rien le ciel et la terre. Si donc il
faut une puissance infinie pour créer, à plus forte raison, une
puissance infinie est nécessaire pour opérer la rémission des
péchés.
Nos pères ont donc eu
grandement raison d’affirmer que Dieu seul peut remettre aux hommes
leurs péchés, et qu’un si grand prodige ne peut être que l’ouvrage
de sa Bonté et de sa Puissance souveraines. C’est Moi, dit le
Seigneur Lui-même par un Prophète, c’est Moi-même qui efface les
iniquités. En effet la Rémission des péchés semble soumise à la
même loi que l’acquittement d’une dette. Une dette ne peut être
remise que par le créancier lui-même. Or, c’est envers Dieu que nous
contractons une obligation par le péché. ne lui disons-nous pas tous
les jours dans notre prière: Remettez-nous nos dettes ? Il est donc
bien clair que c’est Lui, et Lui seul, qui peut nous pardonner nos
péchés.
Avant l’Incarnation du
Fils de Dieu, ce pouvoir admirable et vraiment divin n’avait jamais
été donné à une créature. Jésus-Christ notre Sauveur, vrai Dieu et
vrai homme, est le premier qui l’ait reçu, comme homme, de Dieu son
Père. Afin que vous sachiez, dit-Il, que le Fils de
l’homme a sur la terre le pouvoir de remettre les péchés,
levez-vous, dit-Il au paralytique, prenez votre lit et allez dans
votre maison. Il s’était fait homme pour accorder aux hommes le
pardon de leurs péchés.
Mais avant de remonter
au Ciel, pour y être assis à jamais à la droite de son Père, Il
laissa ce pouvoir dans son Eglise aux Evêques et aux Prêtres.
toutefois, comme nous l’avons déjà remarqué, Notre-Seigneur
Jésus-Christ remet les péchés, de sa propre autorité, tandis que les
autres n’exercent ce pouvoir que comme ses ministres. Si donc tout
ce qui porte le cachet de la Puissance infinie doit nous remplir
d’admiration et de respect, comment pour rions-nous ne pas sentir
tout le prix de ce Bienfait si pré cieux que Jésus-Christ dans sa
bonté a voulu nous accorder ?
Le moyen même que Dieu
notre Père a choisi dans sa Clémence, pour effacer les péchés du
monde, est aussi très propre à nous faire comprendre l’étendue d’une
pareille faveur. Car si son fils unique a versé son Sang, c’était
pour nous purifier de nos crimes ; Il a subi Lui-même de sa pleine
et propre Volonté le châtiment que nous avions mérité par nos
iniquités ; le Juste a été condamné pour les pécheurs ; l’Innocent a
souffert pour les coupables la mort la plus affreuse. Réfléchissons
en nous-mêmes que nous n’avons pas été rachetés par l’or ni par
l’argent qui sont sujets à la corruption, mais par le Précieux Sang
de Jésus-Christ, le véritable Agneau sans tache et sans souillure,
et nous n’aurons pas de peine à voir que rien de plus salutaire ne
pouvait nous être accordé que cette faculté de remettre les péchés.
C’est qu’en effet il y a dans ce pouvoir que Dieu nous a donné une
preuve de son admirable Providence et en même temps de son amour
infini pour nous.
Voici également une
pensée très précieuse en fruits de salut pour tous ceux qui voudront
s’y arrêter. Celui qui a le malheur d’offenser Dieu par un péché
mortel perd immédiatement tous les mérites qu’il avait pu acquérir
par la Mort et la Croix de Jésus-Christ, et l’entrée du Ciel qui
déjà lui avait été fermée une fois, mais que la Passion du Sauveur
avait de nouveau ouverte à tous, lui est dès lors interdite. Comment
ne pas être frappés de la plus vive frayeur à la vue de notre misère
lorsque notre esprit s’arrête sur cette triste réalité ? C’est alors
qu’il faut reporter notre pensée sur ce pouvoir admirable que Dieu a
donné à son Eglise. Et si nous croyons fermement, d’après cet
article du Symbole, que la faculté a été accordée à tous de rentrer
avec le secours de la Grâce, dans la dignité de leur premier état,
il est impossible de ne pas concevoir la joie la plus vive,
l’allégresse la plus entière, et de ne pus rendre à Dieu
d’immortelles actions de grâces. Et certes,’si nous avons l’habitude
de trouver bons et désirables les remèdes que l’art et la science
des médecins nous préparent, quand nous sommes attaqués de quelque
maladie grave, combien ne devons-nous pas trouver plus agréables
encore les remèdes que Dieu dans sa Sagesse a bien voulu mettre à
notre disposition pour guérir nos âmes et leur rendre la vie de la
Grâce ? D’autant que ces divins remèdes ne donnent pas seulement une
espérance douteuse de guérison, comme ceux des hommes, mais qu’ils
procurent infailliblement la santé spirituelle à tous ceux qui la
désirent.
§ IV. — COMMENT LES FIDÈLES DOIVENT FAIRE
USAGE DE LA RÉMISSION DES PÉCHÉS.
Après avoir fait
connaître aux Fidèles l’excellence d’un pouvoir si étendu et si
admirable, il y aura lieu de les exhorter à en profiter avec
beaucoup de soin pour le plus grand bien de leurs âmes. Il est
difficile que celui qui ne fait pas usage d’une chose utile et
nécessaire, ne semble pas la mépriser. Il ne faut pas oublier que
Notre-Seigneur Jésus-Christ n’a donné à son Eglise le pouvoir de
remettre les péchés, que pour mettre à la disposition de tous ce
Remède salutaire. Comme personne ne peut se purifier sans le
Baptême, de même, après avoir perdu la grâce baptismale par le péché
mortel, nul ne peut la recouvrer, qu’en recourant à cet autre moyen
d’expiation qui s’appelle le sacrement de Pénitence.
Mais il faut bien
avertir les Fidèles qu’une si grande facilité de pardon, si étendue
du côté des fautes, et si illimitée au point de vue du temps, ne
doit point les rendre plus libres pour se livrer au péché, ni plus
lents pour se repentir. Dans le premier cas ils seraient évidemment
convaincus de mépris injurieux pour cette Divine Puissance, et par
conséquent ils seraient indignes de la Miséricorde de Dieu. Dans le
second il y aurait grandement à craindre qu’ils ne fussent surpris
par la mort, et par conséquent que leur foi à la Rémission des
péchés ne devint inutile, parce que leurs retards et leurs
atermoiements leur en auraient justement fait perdre tous les
avantages. |