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Au cours de la fête d’aujourd’hui,
comme au cours de l’après-midi du Vendredi Saint, l’Église appelle chacun de
nous au Calvaire, au pied de la Croix et nous invite au souvenir de cet
« événement », dans lequel se résume toute l’histoire pour renaître en tant que
« nouvelle ». En effet, de la contemplation de la Croix, nous
savons qu’un destin de gloire nous a été préparé dont personne ne pourra nous
priver, que le terme de l’histoire n’est pas le fruit du hasard, mais qu’il est
certain, car c’est Dieu Lui-même qui lui a indiqué sa destination définitive !
Et la destination définitive de l’histoire qui naît de la Croix, est une
« compagnie » inespérée de notre vie.
Il ne s’agit pas d’une vague
compagnie, ni d’un voisinage compatissant, capable aussi de gestes d’une
attention considérable, mais incapable de contenir le cœur vital de notre être.
Non, le destin de
la vie est une « compagnie » d’un genre très particulier dans laquelle seule se
trouve la paix véritable. Et si cette compagnie avait déjà vu le jour dans la
maison de Marie de Nazareth, peu après l’Annonciation, alors que la jeune
israélite concevait en son sein le Dieu fait homme, c’est sur la Croix,
cependant, qu’elle atteint les fondements de l’être et de l’histoire et qu’elle
les soustrait à l’abîme où ils se trouvaient.
Dans la « compagnie » qui naît de
la Croix la vérité et l’amour parviennent en effet à s’unir parfaitement.
Celle du Christ est une compagnie où la vérité resplendit, parce
qu’elle est affirmée et témoignée comme jamais on aurait osé l’imaginer.
Ce qui est témoigné et affirmé est avant tout la vérité de la dépendance
radicale de la réalité du Mystère – la réalité du cosmos, la réalité de la vie
et de notre personne même dépendent de ce fragment d’humanité, l’Emmanuel, le
Dieu-avec-nous –, puis toutes les vérités de notre existence particulière sont
reconnues et affirmées, telle que la grandeur du cœur que Dieu nous a donné et
la vertigineuse profondeur de ses désirs, mais également notre fragilité, notre
inadaptation, parfois si pénible, et notre péché. Une compagnie
dans laquelle nous sommes constamment mis à nu et qui affirme la portée réelle
de notre existence, sa vraie vocation et où notre péché est condamné sans appel.
Mais le Seigneur – nous avons lu
l’Évangile –, parlant à Nicodème affirme que Dieu « n’a pas envoyé son Fils dans
le monde pour qu’il condamne le monde, mais pour que le monde soit sauvé par
Lui » (Jean 3,17).
La Vérité, que le
Christ représente, n’est pas venue au monde pour le condamner dans le péché,
mais pour le sauver de ce néant qu’est le péché, et pour l’immerger en Dieu.
Dans la « compagnie » du Christ, la vérité, en effet, s’affirme toujours dans
un amour sans pareil, d’une grande profondeur, en mesure de guérir et de faire
renaître tout ce qu’il touche. Et dans cet amour qui est Dieu même, la vérité
n’est pas seulement cherchée, reconnue et affirmée, mais elle « s’épanouit »
afin que tout notre cœur soit exposé aux yeux de l’Amour.
L’Église, en nous invitant à
contempler le « Triomphe de la Croix » – c’est ainsi que l’on appelait cette
fête – nous permet de nous abreuver à la source de la Vie, d’une Création
nouvelle, œuvre de Dieu. Si les plaies du Crucifié nous
montrent, en effet, la honte de notre péché, porté par Notre Seigneur Jésus dans
sa soumission « jusqu’à la mort, et à une mort sur la Croix » (Phil. 2,8),
elles témoignent en même temps et mystérieusement de l’immensité de Son Amour,
capable d’embrasser l’humanité tout entière, jusqu’à la racine de notre cœur.
Mais où pouvons-nous trouver
aujourd’hui une telle compagnie, un tel amour de la vérité, une telle étreinte
capable d’accueillir et de redonner la vie ? Où pouvons-nous
faire l’expérience de la « compagnie » du Christ ?
Tout cela ne peut se réaliser que
dans cette compagnie qui a jailli du flanc percé de Jésus et dans laquelle
Lui-même Ressuscité et Vivant nous invite à rester : l’Église.
Dans les visages de nos frères que le Christ a rachetés, dans ces visages aussi
incroyablement concrets et uniques nous pouvons, en effet, faire l’expérience de
Sa Présence, de l’affection qu’Il porte à notre destin, de Sa Victoire sur le
monde et de ce destin de gloire qui nous est donné dès à présent et qui attend
son épanouissement dans le grand Jour de l’Eternité.
Que la très Sainte Vierge Marie,
qui sous la Croix a donné vie à cette nouvelle famille en devenant la Mère de
l’Apôtre Jean et de chacun de nous, nous permette d’accueillir la compagnie du
Seigneur et de Lui consacrer toute notre vie, afin de devenir un signe et un
lieu de Sa Présence. Amen !
Congrégation pour le Clergé
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