Dédicace des Églises
Saint Pierre et Saint Paul
à Rome

L'Église du Vatican, dédiée sous l'invocation de saint Pierre, est la seconde église patriarcale de Rome. On y conserve la moitié des reliques de saint Pierre et de saint Paul.

Les tombeaux des conquérants et des maîtres du monde sont depuis longtemps détruits et ignorés ; il n'en est pas de même de ceux des martyrs. La vénération des fidèles, en les consacrant, en éternise la mémoire. Parmi les lieux que ces généreux soldais de Jésus-Christ ont rendu célèbres, on distinguera toujours cette partie du Mont-Vatican qui a été arrosée du sang du Prince des apôtres, et qui est enrichie de ses précieuses dépouilles. On porta ses reliques dans le cimetière de Calixte, d'où elles furent depuis rapportées au Vatican. Celles de saint Paul furent déposées sur le chemin d'Ostie, à l'endroit où est présentement l'église du nom de cet apôtre.

« Les tombeaux de ceux qui ont servi Jésus crucifié, dit saint Chrysostome, l'emportent sur les palais des Rois, non pas toujours par la grandeur et la magnificence des bâtiments, quoique sous ce rapport ils les surpassent quelquefois, mais en des choses infiniment plus importantes, et nommément par la multitude de ceux que la piété y attire. L'Empereur, quoique revêtu de la pourpre vient les visiter, et les honore par un respectueux baiser. Humblement prosterné, il invoque les martyrs et les conjure de prier Dieu pour lui. Enfin, celui qui porte le diadème, regarde comme une grande faveur du Ciel, d'avoir pour protecteur un pêcheur et un faiseur de tentes, et il sollicite cet avantage avec la plus vive instance. » Saint Augustin, ou l'ancien auteur d'un sermon qui lui a été attribué, s'exprime a peu près de la même manière. « On voit maintenant l'Empereur se prosterner devant l'autel d'un pêcheur, et les pierres précieuses de la couronne brillent surtout là où l'on ressent avec plus de profusion les bienfaits du pêcheur. »

On dit que saint Pierre fut enterré, immédiatement après sa mort, à. l'endroit où il avait été martyrisé sur le Mont Vatican, qui dans ce temps-là était hors des murs de Rome.

Dès les premiers temps, les chrétiens visitaient les tombeaux de saint Pierre et de saint Paul avec une dévotion extraordinaire, et avec plus d'empressement encore que ceux des autres martyrs. Caïus, prêtre de Rome, célèbre par son savoir et son éloquence, qui florissait en 210, en parle ainsi dans son dialogue avec Proclus, Montaniste : « Je puis vous montrer les trophées des apôtres. Soit que vous alliez au Vatican, ou sur le chemin d'Ostie, vous « verrez les tombeaux de ceux qui, par leurs prédications et leurs miracles, fondèrent cette église. » Dans le temps même des persécutions, les chrétiens allaient souvent prier aux tombeaux des martyrs, ou dans les oratoires bâtis sur ces tombeaux, et ils avaient grand soin de les orner.

Constantin-le-Grand, après avoir fondé l'église de Latran, en fit bâtir sept autres à Rome, et un nombre plus considérable dans les autres parties de l'Italie. La première des sept de Rome, située sur le Mont-Vatican, fut dédiée sous l'invocation de saint Pierre. Il y avait eu précédemment au même endroit deux temples païens, l'un d’Apollon, et l'autre de Cybèle, appelée la mère des dieux. L'Empereur choisit ce lieu, parce que, comme nous l'avons observé, le Prince des apôtres y avait souffert le martyre, et y avait été enterré. L'église de Saint-Paul fut aussi bâtie sur son tombeau, qui était sur le chemin d'Ostie.

Toutes ces églises eurent des revenus annuels, qui montaient à dix-sept mille sept cent soixante-dix sous d'or, ce qui faisait alors une somme considérable. Elles avaient, outre cela, d'autres fonds qui provenaient des aromates d'Egypte et d'Orient. L'église de Saint-Pierre avait des maisons à Antioche, et des terres aux environs de cette ville, ainsi qu'à Tarse, en Cilicie, à Tyr, en Egypte, près d’Alexandrie, dans la province de l’Euphrate, etc. Une partie de ces terres fournissait annuellement de quoi entretenir les lampes, avec de l'encens et d'autres aromates, pour brûler dans les encensoirs. Anastase parle au long des vases d'or et d'argent que donna Constantin pour le service des mêmes églises : peut-être cependant confond-il les présents de cet Empereur avec ceux qui furent faits depuis.

Les églises bâties par Constantin étaient de la plus grande magnificence et ne le cédaient point à ce que l'architecture avait produit de plus parfait dans l'empire. On en peut juger par la description que donne Eusèbe de l'église de Tyr, puisque ce fut sur ce modèle, qui était conséquemment d'une grande antiquité, qu'on construisit toutes les autres. L'église de Saint-Pierre du Vatican menaçant ruine, on commença à la rebâtir sous Jules II, en 1506; et Urbain VIII la dédia en 1626, le 18 de Novembre, jour auquel se célébrait la dédicace de l'ancienne église.

On garde, soit sous les autels, soit dans l'église souterraine qui est fort vaste, les reliques d'un grand nombre de Papes, de martyrs et d'autres Saints. Mais le plus précieux trésor qu'on y conserve, ce sont les reliques de saint Pierre et de saint Paul. Elles sont placées sous un magnifique autel, où le Pape seul peut dire la messe. Tout autre prêtre ou prélat n'y célèbre qu'avec une commission spéciale du Souverain-Pontife. Le souterrain qui renferme les reliques des deux apôtres, est connu sous le nom de Confession de saint Pierre, de Limina apostolorum. On y va en pèlerinage avec dévotion, dès les premiers siècles du christianisme.

Les églises ne sont dédiées qu'à Dieu, mais souvent sous l'invocation de quelque Saint : c'est pour exciter les fidèles à réunir leurs prières, afin d'implorer la miséricorde divine par l'intercession de tel Saint, et pour que les églises soient distinguées par différents titres. « Ce n'est point aux martyrs, dit saint Augustin, que nous érigeons des églises ou des autels, et que nous offrons le sacrifice, parce que ce ne sont pas les martyrs, mais le Dieu des n martyrs que nous adorons Entendit-on jamais le prêtre, à l'autel élevé sur le corps d'un martyr, lui adresser » les mêmes prières qu'à Dieu ? Dit-il, Pierre, Paul, Cyprien, nous vous offrons le sacrifice, lorsqu'il prie à l'autel de ces Saints ? Ne l'offre-t-on pas au Dieu qui a fait ces Saints, hommes et martyrs, et qui a bien voulu les associer dans le ciel au bonheur de ses anges ? Nous ne bâtissons point d'églises aux martyrs, comme à des dieux : nous leur érigeons de saints monuments, comme à des hommes qui sont sortis de ce monde, et dont les âmes vivent avec Dieu. Nous n'élevons point d'autels pour y sacrifier aux martyrs ; nos sacrifices sont offerts au Dieu des martyrs, à notre Dieu. »

Constantin donna des preuves de sa religion et de sa piété, en fondant ce grand nombre d'églises dont nous venons de parler, et dans lesquelles il désirait que le nom du Seigneur pût être glorifié jusqu'à la fin des temps. Annonçons-nous les mêmes sentiments par notre recueillement et notre modestie dans nos saints temples, et par notre assiduité à les fréquenter ? Dieu est partout, et partout nous devons l'honorer par l'hommage de notre cœur : mais dans les lieux qui lui sont consacrés, où ses ministres exercent les plus augustes fonctions, où ses fidèles serviteurs unissent leurs prières, nous le glorifions d'une manière plus éclatante, nous le disposons plus favorablement à nous exaucer, et cette union de prières que nous lui adressons, lui fait une sainte violence.

SOURCE : Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux Saints… – Traduction : Jean-François Godescard.

 

 

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