19e Concile
œcuménique, le Concile de Trente traite de la "contre-réforme" catholique et des
questions soulevées par la doctrine des réformateurs du XVIe siècle,
réaffirmant la foi catholique et précisant certains points.
Depuis le XVe siècle la nécessité d'une réforme
profonde de l'Église et de ses institutions se faisait grandement sentir, mais
Pie II avait écarté l'idée d'un concile général en 1460, position confirmée par
Jules II en 1512 au Concile du Latran. En effet, les Pères du Concile du Latran
hésitaient à aborder les vrais problèmes soulevés par la réforme protestante: la
volonté de l'Église était de ne pas précipiter les débats et d'éviter un concile
de crise, mais de mener au contraire des réformes réfléchies et profondes.
1-1 – Naissance du protestantisme
C'est
dans ce contexte qu'en 1517, Martin Luther, moine allemand, augustin et
professeur à l'université de Wittemberg, publia une déclaration en 95 points. Il
se disait d'abord révolté par les excès de Rome et en particulier le commerce
des indulgences destiné à financer la construction de la nouvelle basilique St
Pierre. Mais il proposait aussi une nouvelle conception de la religion, un
certain “retour aux sources”. Cette nouvelle vision de la religion
chrétienne, selon Luther, se fondait sur 3 principes:
Seules les Écritures représentent l'autorité de l'Église,
au-dessus de la Tradition et du pape.
– C'est la foi qui sauve et non les actions des
hommes (i.e. oeuvres), si bonnes soient-elles.
– Le baptême rend les chrétiens égaux devant
Dieu. L'unique médiateur des hommes est le Christ. Il n'y a pas, il ne doit pas
y avoir de différence entre les clercs et les laïcs.
Le protestantisme, nom du mouvement né de la révolte de
Luther, connut rapidement un bel essor, grâce aux princes allemands qui
adhérèrent à la Réforme.
Pour réagir à ce qu’il faut bien appeler des hérésies, le
Vatican utilisa la condamnation. L'effet fut nul, si ce n'est qu'il provoqua
quelques violences dont le monde chrétien aurait bien pu se passer. Restait
alors la solution d'une “contre-réforme” ou Réforme catholique”.
Des voix nombreuses s'élevaient dans l'Eglise pour réclamer des réformes
profondes, mais on attendait...
1-2 – Convocation d‘un concile
L’Église attendait... mais c’était ne pas tenir compte de
l’impatience de Charles Quint. Ce dernier, en effet, voyant son empire commencer
à imploser sous l'effet des querelles religieuses, annonça, vers 1530, à la
Diète d'Augsbourg, la tenue prochaine d'un concile... Craignant de se laisser
dépasser, le pape Clément VII le convoqua peu après, mais sans en préciser ni le
lieu ni la date. Clément VII mourut en 1534, et ce fut son successeur Paul III
(1534-1549) qui décida que le concile se tiendrait à Mantoue, à partir du 27 mai
1537. Cependant, le duc de Mantoue ayant imposé des conditions trop
contraignantes, on reporta les réunions du concile tout d'abord à Vicence, puis
finalement à Trente, petite ville épiscopale du Tyrol italien. Ce sera le
Concile de Trente.
1-3 – Les obstacles au déroulement du Concile
1-3-1 – L‘ouverture du Concile
Le temps passait... Il fallut toute la persévérance de Paul
III pour aboutir à la convocation du concile, alors que plus personne n'y
croyait. Le Concile s'ouvrit finalement le 13 décembre 1545 dans la ville de
Trente (territoire à la fois italien et impérial) après la signature de la paix
de Crépy-en-Laonnois entre l'Empereur Charles Quint et François 1er.
Une déception pourtant: à son ouverture, le Concile ne comptait que 29 évêques
et 3 supérieurs d'ordres religieux; serait-ce l'échec ? Beaucoup le pensaient.
Heureusement, le Concile de Trente se tiendra. Ce sera même un très grand
concile, dont l'oeuvre sera considérable.
1-3-2 – Les obstacles
Le Concile de Trente se déroula au milieu de difficultés sans
cesse renouvelées, lesquelles entravèrent constamment sa progression et firent
craindre à plusieurs reprises sa paralysie définitive. Il faudra dix-huit ans
pour venir à bout de la tâche... En 1547, deux ans après l’ouverture du Concile,
Paul III dut le transférer à Bologne, théoriquement pour échapper à la peste qui
avait éclaté à Trente, en fait pour se soustraire aux pressions impériales. La
réaction de Charles Quint fut vive, le Concile dut être interrompu une première
fois.
Quatre ans plus tard, le successeur de Paul III, Jules III
(1550-1555), parvint à le relancer malgré les obstacles dressés cette fois par
le roi de France. Un an après, le Concile dut être de nouveau interrompu, en
raison de l'approche des princes protestants allemands coalisés contre
l'Empereur (et soutenus par la France).
Cependant, la ténacité, la diplomatie, et peut-être la foi du
pape Pie IV (1559-1565), permirent de lui redonner vie en 1562, après dix années
d'interruption, et de le conduire à bonne fin en 18 mois. Il convient de noter
ici que Pie IV fut remarquablement secondé par son jeune neveu Saint Charles
Borromée.
2-1 – Les vicissitudes
Comme
on l’a dit plus haut, le Concile fut convoqué par le pape Paul III suite aux
demandes insistantes de Charles Quint, en 1542, pour entreprendre la réforme de
l'Église catholique face à la Réforme protestante. Mais, en raison des guerres
et du contexte politique, le Concile comporta trois grandes périodes: de 1545 à
1549,(le Concile fut transporté provisoirement à Bologne en 1547), puis de 1551
à 1552 sous le pontificat de Jules III, (mais sans représentant français). De
nouveau suspendu, pendant dix ans de 1552 à 1562 à la suite de l'invasion de
l'Allemagne méridionale par les troupes protestantes, sa dernière période, de
1562 à 1563, eut lieu sous le pontificat de Pie IV.
2-2 – Première période
Les huit premières sessions, du 13/12/1545 au 17/09/1547,
furent un échec, en raison du décalage entre ce à quoi aspiraient les peuples et
leurs souverains, et les sujets abordés par le Concile. L'Église cherchait à
préciser sa position face à la doctrine protestante d'une façon très tranchée,
mais sans effectuer son autocritique tellement souhaitée. Aussi, en 1547, les
protestations répétées et violentes des prélats allemands envers l'autorité
papale amenèrent-elles les légats à faire courir le bruit que la peste était aux
portes de la ville, et qu'il fallait déplacer le concile à Bologne, plus au
centre de l'Italie. II convient de noter ici que l'assemblée était composée, en
majorité, d’évêques italiens.
Charles Quint interdit à ses évêques de suivre le
déménagement, et faute de participants suffisamment nombreux, le pape dut
prononcer la suspension du Concile le 17 septembre 1549. Il mourut peu après.
2-3 – Deuxième période
Les huit sessions suivantes se tinrent du 1/5/1551 au
28/04/1552. Jules III, successeur de Paul IV fut prié par Charles Quint de
rouvrir rapidement le Concile, ce qu'il fit le 1er mai 1551. Les discussions
portèrent sur l'Eucharistie, la pénitence, l'extrême-onction, et sur des
questions juridiques, sans oublier toutefois, de jeter l'anathème contre les
thèses de Zwingli et de Luther.
A la demande de l'Empereur, quelques protestants avaient été
invités, et certains participèrent aux débats. Malheureusement, l'électeur
Maurice de Saxe attaqua subitement les armées de l'Empereur qui dut prendre la
fuite. Le Concile fut dispersé et Charles Quint dut signer la paix de Passau,
défavorable aux catholiques.
2-4 – La fin du Concile
Les dernières sessions se tinrent du 18/1/1562 au 4/12/1563.
Vue l’intransigeance du pape Paul IV, le Concile avait dû attendre l'arrivée de
Pie IV pour reprendre. De plus, le refus des protestants et des Français de
participer à un concile qu'ils trouvaient trop lié à Rome, retardèrent à nouveau
le début des séances qui ne reprirent que le 18 janvier 1562. Les désaccords
étaient tels que les séances traînèrent en longueur. L'ennui et le découragement
des participants permirent l'adoption facile de décrets importants, notamment
sur le célibat des prêtres et le Purgatoire... La fin du concile fut proclamée
le 4 décembre 1562, et ses décisions furent confirmées par le pape en janvier
1564.
À l’origine, le but de ce Concile avait été de permettre à
l'Église d'opérer sa propre réforme et de réunir à nouveau les chrétiens
séparés. Le Concile eut effectivement le mérite d'abolir un certain nombre des
abus de l'Église catholique et de réviser ses institutions, mais il aboutit,
malheureusement, à la séparation quasi définitive des catholiques et des
protestants.
Cependant, l'attitude et la situation de l'Église après le
Concile incitaient à l'espérance: malgré tous les obstacles rencontrés, le
Concile avait restauré aux yeux des catholiques le crédit de la papauté, tombé
au plus bas. La gravité des périls avait contribué à resserrer les rangs au sein
de l'Église romaine, renforçant même son caractère hiérarchisé.
Les dispositions adoptées par le Concile dessinaient les
traits d'une Église renouvelée: volonté de réforme de la part de l'ensemble du
corps épiscopal, guerre déclarée aux abus, action engagée pour un clergé de
qualité, effort en faveur de l'instruction religieuse des fidèles, etc... L'élan
était donné.
Enfin, le Concile, appelé Concile de Trente, proclama
solennellement le droit de l'Église à l'indépendance vis-à-vis du pouvoir civil,
et l'anathème fut lancé contre la Réforme et ses défenseurs. Son influence se
prolongea pendant les siècles qui suivirent, jusqu’au Concile Vatican 2. (Voir
annexe 1)
De nombreux religieux, en particulier les jésuites, avaient
joué un rôle important dans
l’organisation
du Concile, ses décisions et ses prolongements. Le Concile de Trente officialisa
la plupart des éléments de la Tradition dénoncés par les protestants:
transsubstantiation, communion sous une seule espèce, interprétation de la
Révélation réservée au magistère, etc. La réforme du Concile porta également sur
le sacrement de l'Ordre, avec les devoirs des évêques, la discipline
ecclésiastique et la formation des prêtres, la création de séminaires, etc...
4-1 – Bilan global
Les résultats du Concile ne furent pas ceux souhaités par
l'Empereur Charles Quint et les peuples de l'Europe. Le retour des protestants
au sein de l'Église était manqué, et au contraire l'opposition entre les
religions: catholique et protestantes, s'était précisée. Mais le Concile eut le
mérite de fixer la doctrine du catholicisme et d'abolir un bon nombre d'abus.
Ses décrets furent acceptés presque sans réserve dans tous les pays d'Europe.
4-2 – Les décisions importantes du Concile de Trente
Survol rapide de ses principales
décisions
Grâce au Concile de Trente, l'Église catholique put revoir
entièrement ses fondements et préciser le contenu de sa foi. Et c’est sur les
décisions de ce concile que l’Église s'appuiera, pendant plusieurs siècles. Il
faudra attendre le Concile Vatican II pour retrouver une telle ampleur de
travail et de réformes.
Le travail du Concile de Trente permit à l’Église catholique,
face aux propositions de la Réforme protestante, de redéfinir ses dogmes. Les
abus qui minaient l’Église à cette époque furent dénoncés, et des réformes
importantes proposées.
Le Concile de Trente formula également un certain nombre de
décrets, dits de réformation qui concernent essentiellement:
4-2-1 – les responsabilités épiscopales et ecclésiastiques
– Tout d’abord, les responsabilités des évêques
concernant l’ordination des prêtres, et les qualités exigées des
ecclésiastiques, notamment leur honnêteté. Voici quelques têtes de chapitres:
De la Résidence des Prélats dans
leurs Églises, sous les peines du Droit ancien, et autres ordonnées de nouveau.
De la Résidence à l'égard des autres
Ecclésiastiques, des Réguliers mêmes, qui se trouvent hors de leurs Monastères.
– Au sujet des bénéfices ecclésiastiques:
Que les Bénéfices, particulièrement
ceux qui ont charge d'Ames, ne soient conférés qu'à des personnes capables.
Que ceux qui tiendront plusieurs
Cures, ou Bénéfices incompatibles, en doivent être privés de Droit même.
On remarquera que la discipline ecclésiastique fut un thème
largement étudié. Les réformes en profondeur étaient devenues urgentes dans
l’Église où des abus de toutes sortes s’étaient malheureusement introduits.
4-2-2 – Les sacrements:
Tous les sacrements furent passés en revue et redéfinis; leur
discipline fut précisée. On peut citer les principales décisions entrant dans le
Décret des Sacrements:
Canons des Sacrements en général.
Canons du Baptême.
Exposition de la Doctrine des Sacrements
Très Saints de Pénitence et d'Extrême-Onction.
Canons de la Confirmation.
Exposition de la Doctrine touchant le Sacrement
de Mariage et
Canons du Sacrement de Mariage.
Exposition de la Doctrine véritable et Catholique
touchant le Sacrement de l'Ordre, définie, et publiée par le Saint Concile de
Trente dans la septième Session, pour la condamnation des erreurs de notre
temps, et De l'institution du Sacerdoce de la nouvelle Loy. (voir Annexe 2)
4-2-3 – L’Eucharistie
C’est toute la théologie de l’Eucharistie qui fut étudiée,
comme le prouvent les titres du décret concernant le Très Saint-Sacrement de
l'Eucharistie:
De la présence réelle de Notre Seigneur
Jésus-Christ dans le Très Saint-Sacrement de l'Eucharistie.
De la manière de l'Institution du Très Saint-Sacrement.
De l'excellence de la Très Sainte Eucharistie
pardessus tous les autres Sacrements.
De la Transsubstantiation.
Du culte, et de la vénération qu'on doit rendre
au Très Saint-Sacrement.
De la coutume de conserver le Sacrement de la
Sainte Eucharistie, et de le porter aux malades.
De la préparation qu'il faut apporter, pour
recevoir dignement la Sainte Eucharistie.
De la manière de recevoir cet admirable
Sacrement.
Les canons du Très Saint-Sacrement.
4-2-4 – La communion
Le décret sur la Communion examine les manières de communier,
et les circonstances liées à la communion. Nous ne donnons ici que quelques
exemples
– Communion sous les deux Espèces, communion des
petits Enfants.
– Exposition de la Doctrine touchant le Sacrifice
de la Messe.
– L'Institution du Saint Sacrifice de la Messe.
– Des Messes qui se disent en l'honneur des
Saints.
– Du Canon de la Messe.
– Les canons du Sacrifice de la Messe.
4-2-5 – Les séminaires (voir Annexe 3)
Le Concile de Trente insista beaucoup sur la nécessité
d’ouvrir des séminaires. Il rédigea un décret concernant l'ordre, et la manière
de procéder à l'érection des Séminaires, pour élever des Ecclésiastiques dés le
bas âge.
4-2-6 – Autres thèmes traités
Un point très important fut également étudié en profondeur:
la justification, afin de répondre aux thèses protestantes. Parmi les décrets
liés à la justification, on peut énumérer:
Ce que c'est que la Justification, et quelles en
sont les causes.
Comment il faut entendre que l'homme est justifié
par la Foy, et gratuitement.
Du fruit de la Justification, c'est-à-dire du
mérite des bonnes oeuvres, et en quoi il consiste.
Furent également abordés les sujets concernant les Écritures
Canoniques, le Péché Originel, le Purgatoire, la Vénération des Saints et des
Saintes Images. Un décret fut consacré aux indulgences qui avaient été le déclic
de la révolte de Luther
Enfin, fut redéfini le Canon des Écritures avec l’inclusion
officielle de nouveaux livres pour l'Ancien Testament. (choix des livres
deutérocanoniques)
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