De l'ordre et de la manière de procéder à l'érection des
Séminaires, pour élever des
Ecclésiastiques
dés le bas âge. (Texte intégral)
Conditions requises pour l’admission des enfants dans les
séminaires
Les jeunes gens, s'ils ne sont bien élevés, et bien
instruits, se laissant aisément aller à suivre les plaisirs et les
divertissements du siècle; et n'étant pas possible, sans une protection de Dieu
très puissante, et toute particulière, qu'ils se perfectionnent, et persévèrent
dans la discipline Ecclésiastique, s'ils n'ont été formés à la piété et à la
Religion dès leur tendre jeunesse, avant que les habitudes des vices les
possèdent entièrement.
Le Saint Concile ordonne, que toutes les Églises Cathédrales,
Métropolitaines, et autres Supérieures à celles-ci, chacune selon la mesure de
ses facultés, et l'étendue de son Diocèse, seront tenues et obligées de nourrir,
et élever dans la piété, et d'instruire dans la profession et discipline
Ecclésiastique, un certain nombre d'enfants de leur Ville et Diocèse, ou de leur
Province, si dans le lieu il ne s'en trouve pas suffisamment, en un Collège que
l'Évêque choisira proche des Églises mêmes, ou en quelque autre endroit commode
pour cela.
On n'en recevra aucun dans ce Collège, qui n'ait au moins
douze ans, qui ne soit né de légitime Mariage, et qui ne sache passablement lire
et écrire, et dont le bon naturel, et les bonnes inclinations, ne donnent
espérance qu'il sera pour s'engager à servir toute sa vie dans les fonctions
Ecclésiastiques. Veut le Saint Concile qu'on choisisse principalement des
enfants de pauvres gens; mais il n'en exclut pas pourtant ceux des riches,
pourvu qu'ils y soient nourris, et entretenus à leurs dépens, et qu'ils
témoignent désir et affection pour le service de Dieu et de l'Église.
L'Évêque, après avoir divisé ces enfants en autant de Classes
qu'il trouvera bon, suivant leur nombre, leur âge, et leur progrès dans la
discipline Ecclésiastique, en appliquera en suite une partie au service des
Églises, lors qu'il le jugera à propos, et retiendra les autres pour continuer
d'être instruits dans le Collège, ayant toujours soin d'en remettre d'autres en
la place de ceux qu'il en aura tirés; de manière que ce Collège soit un
perpétuel Séminaire de Ministres pour le Service de Dieu.
Et afin qu'ils soient plus aisément élevés dans la discipline
Ecclésiastique, on leur donnera tout d'abord, en entrant, la Tonsure, et ils
porteront toujours l'habit Clérical. Ils y apprendront la Grammaire, le Chant,
le Calcul Ecclésiastique, et tout ce qui regarde les bonnes Lettres; Et
s'appliqueront à l'étude de l'Écriture Sainte, des Livres qui traitent de
matières Ecclésiastiques, des Homélies des Saints, et à ce qui concerne la
manière d'administrer les Sacrements, et sur tout, à ce qu'on jugera à propos de
leur enseigner, pour les rendre capables d'entendre les Confessions. Enfin ils
s'y instruiront de toutes les cérémonies et usages de l'Église. L'Évêque aura
soin encore qu'ils assistent tous les jours au Sacrifice de la Messe; qu'ils se
confessent au moins tous les mois. Et qu'ils reçoivent le Corps de Notre
Seigneur Jésus-Christ, selon que leur Confesseur le trouvera à propos, rendant
service les jours de Fêtes dans l'Église Cathédrale, ou dans les autres du lieu.
Toutes ces choses, et toutes les autres qu'il sera nécessaire
et à propos d'établir pour le succès de cet ouvrage, seront réglées par les
Évêques, assistés du Conseil de deux Chanoines des plus anciens, et des plus
expérimentés, et choisis par les Évêques mêmes, selon que le Saint Esprit leur
inspirera. Et ils tiendront la main, par leurs fréquentes visites des dits
Collèges, que ce qu'ils auront une fois établi, soit toujours observé. Ils
châtieront sévèrement les mutins, les discoles et rebelles, les incorrigibles,
et ceux qui sèmeront parmi les autres le vice, et le dérèglement, les chassant
même de la maison, s'il en est besoin. Enfin ils auront en une singulière
recommandation tout ce qu'ils jugeront qui pourra contribuer à conserver et à
affermir un établissement si saint, et si pieux, et éloigneront tout ce qui
pourrait y apporter obstacle.
Les moyens d’existence
Et d’autant qu'il sera nécessaire de faire fonds de quelques
revenus certains, pour le
bâtiment
du Collège,
pour les gages des Maîtres et des domestiques, pour la nourriture et
entretien de la jeunesse, et pour toutes les autres dépenses. Outre les revenus
déjà destinés en certaines Églises, et autres lieux, à l'instruction et
entretien des enfants, qui seront censés dés-là même réellement appliqués au
nouveau Séminaire, par le soin, et à la diligence de l'Évêque du lieu.
Les mêmes Évêques, assistés du conseil de deux du Chapitre,
dont l'un sera choisi par l'Évêque, et l'autre par le Chapitre même, et de deux
autres Ecclésiastiques de la Ville, dont l'un sera pareillement nommé par
l'Évêque, et l'autre par le Clergé du lieu, feront distraction d'une certaine
partie, ou portion de tous les revenus de la Manse Épiscopale, et du Chapitre,
et de toutes les Dignités, Personats, Offices, Prébendes, Portions, Abbayes, et
Prieurés, de quelque Ordre, même Régulier, ou de quelque nature et qualité
qu'ils soient; des Hôpitaux qui sont donnés en titre, ou régie, suivant la
Constitution du Concile de Vienne, qui commence, Quia contingit ; et
généralement de tous Bénéfices, même Réguliers, de quelque Patronage qu'ils
soient, même exempts, même qui ne seraient d'aucun Diocèse, et qui seraient
annexes d'autres Églises, Monastères, Hôpitaux, ou autres lieux de dévotion,
exempts même, quels qu'ils puissent être; Ensemble des Fabriques des Églises, et
autres lieux; et de tous autres revenus Ecclésiastiques, même des autres
Collèges, dans lesquels toutefois il n'y aura pas actuellement de Séminaires
d'Écoliers, ou des Maîtres appliqués à l'avancement du bien commun de l'Église.
Car le Saint Concile veut et entend que ceux-là soient
exempts, excepté à l'égard des revenus qui se trouveront superflus, après
l'entretien honnête déduit, de ceux qui composent lesdits Séminaires, ou les
dites Sociétés et Communautés, qui en quelques lieux s'appellent Écoles. Comme
aussi des revenus de tous les Monastères, à la réserve des Mendiants; même des
Dîmes possédées de quelque manière que ce soit par des Laïques, et sur
lesquelles on ait coutume de tirer la contribution pour les subsides
Ecclésiastiques, ou appartenantes à des Chevaliers, de quelque Ordre, ou Milice
que ce soit, excepté seulement aux Frères de Saint Jean de Jérusalem. Et sera
appliquée, et incorporée audit Collège, ladite part et portion de tous les
susdits revenus, ainsi distraite.
Et même on y pourra joindre et unir quelques Bénéfices
simples, de quelque qualité et dignité qu'ils soient, aussi bien que des
Prestimonies, ou portions Prestimoniales, ainsi qu'on les appelle, auparavant
même qu'elles viennent à vaquer, sans préjudice pourtant du Service Divin, et
des intérêts de ceux qui les posséderont: ce qui ne laissera pas d'avoir lieu,
et de s'exécuter, encore que lesdits Bénéfices soient réservés, et affectés à
autres usages, sans que l'effet desdites unions, et application des dits
Bénéfices puisse être empêché, ou retardé, par la résignation qui en pourraît
être faite, ni par quelque autre voie que ce soit. Mais elles subsisteront, et
auront lieu, de quelque manière que les Bénéfices puissent vaquer, même en Cour
de Rome, nonobstant toute Constitution contraire.
Pourra l'Évêque du lieu, par Censures Ecclésiastiques, et
autres voies de Droit, et en appelant même, s'il le
juge à propos, le secours du
bras séculier, contraindre au paiement de la dite part et portion de
contribution, les possesseurs de tous et chacun les Bénéfices, Dignités, Personats,et autres sus-mentionnés, non seulement pour ce qui le regarde, mais
pour la part de contribution qui devra être prise sur les Pensions qu'ils auront
peut-être à payer sur leur revenu; Leur laissant pourtant entre les mains tout
le fonds des dites Pensions, à la réserve de la dite portion de contribution,
dont ils videront leurs mains; Nonobstant, à l'égard de tout ce que dessus, tout
privilèges et exemptions, quand elles seraient telles, qu'elles dussent requérir
une dérogation spéciale; toute coutume, même de temps immémorial, appellation,
ni allégation quelconque, qui peut être mise en avant, pour empêcher
l'exécution.
En cas que par le moyen des dites unions, qui seraient
pleinement exécutées, ou par d'autres voies, le Séminaire se trouvât totalement
doté, ou en partie. Alors la portion de chaque Bénéfice qui aura été distraite
et incorporée par l'Évêque en la manière ci-dessus, sera remise totalement, ou
en partie, selon que l'état des choses le requerra.
Que si les Prélats des Églises Cathédrales et autres
Supérieures, se rendaient négligents à l'établissement et au maintien de tels
Séminaires, ou refusaient de payer leur portion, il sera du devoir de
l'Archevêque de reprendre vivement l'Évêque. Et ce sera au Synode Provincial à
reprendre l'Archevêque, ou autres Supérieurs en degré, et à les obliger à tenir
la main à tout ce que dessus. Et enfin à avoir un soin particulier de procurer
et avancer au plutôt, et par tout où il se pourra, un ouvrage si saint et si
pieux. A l'égard du compte des Revenus du dit Séminaire, ce sera à l'Évêque à le
recevoir tous les ans en présence de deux Députés du Chapitre, et de deux autres
du Clergé de la Ville.
De plus, afin qu'avec moins de dépense on puisse pourvoir à
l'établissement de telles Écoles, le Saint Concile ordonne que les Évêques,
Archevêques, Primats, et autres Ordinaires des lieux obligeront ceux qui
possèdent des Scolastiques, et tous autres qui tiennent des places, ou
Prébendes, auxquelles est attachée l'obligation de faire Leçon, et d'enseigner,
et les contraindront même, par la soustraction de leurs fruits et revenus, d'en
faire les fonctions dans les dites Écoles, et d'y instruire par eux-mêmes, s'ils
en sont capables, les enfants qui y seront. Sinon, de mettre en leur place des
gens qui s'en acquittent comme il faut, qu'ils choisiront eux-mêmes, et qui
seront approuvés par les Ordinaires. Que si ceux qu'ils auront choisis, ne sont
pas jugés capables par l'Évêque, ils en nommeront quelque autre qui le soit,
sans qu'il y ait lieu à aucune appellation; et s'ils négligent de le faire,
l'Évêque même y pourvoira.
Il
appartiendra aussi à l'Évêque de leur prescrire ce qu'ils devront enseigner dans
les dites Écoles, selon qu'il le jugera à propos. Et à l'avenir ces sortes
d'Offices, ou de Dignités, que l'on nomme Scholastiques, ne seront données qu'à
des Docteurs, ou Maîtres, ou à des Licenciés en Théologie, ou en Droit Canon, ou
à d'autres personnes capables, qui puissent s'acquitter par eux-mêmes de cet
emploi. Autrement, la provision sera nulle, et sans effet, nonobstant Privilèges
et Coutumes quelconques, même de temps immémorial.
Que si dans quelque Province les Églises se trouvent en une
si grande pauvreté, que l'on ne puisse établir de Collège en toutes, alors le
Synode Provincial, ou le Métropolitain, avec deux de ses plus anciens
suffragants, aura soin d'établir dans son Église Métropolitaine, ou dans quelque
autre Église de la Province plus commode, un ou plusieurs Collèges, selon qu'il
le jugera à propos, du revenu de deux ou de plusieurs des dites Églises, qui ne
sont pas suffisantes pour entretenir aisément chacune un Collège; et là seront
instruits les enfants des dites Églises.
Au contraire, dans les Églises qui ont de grands et puissants
Diocèses, l'Évêque pourra avoir en divers lieux, un, ou plusieurs pareils
Séminaires, selon qu'il le jugera à propos ; mais ils seront tous entièrement
dépendants de celui qui sera érigé et établi dans la Ville Épiscopale.
Enfin, si au sujet des dites unions, ou de la taxe,
assignation, et incorporation des dites parts et portions de contribution, ou
par quelque autre occasion que ce soit, il survenait quelque difficulté, qui
empêchât l'établissement du dit Séminaire, ou qui le troublât dans la suite,
l'Évêque, avec les Députés ci-dessus marqués, ou le Synode Provincial, selon
l'usage du Pays, pourra, suivant l'état des Églises, et des Bénéfices, régler et
ordonner toutes les choses en général et en particulier, qui paraîtront
nécessaires et utiles pour l'heureux progrès du Séminaire, modérer même, ou
augmenter, s'il en est besoin, ce qui a été dit ci-dessus.
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