Sainte Gemma Galgani[1]
(1878-1903)

 La Passion de Jésus continuée

5 - La prière de Gemma

5-1-Comment médite Gemma 

Gemma continue à répondre aux questions du Père Germano: “Me mettre à méditer ne me demande aucun effort: mon âme se sent immédiatement plongée dans les immenses bienfaits de Dieu. Tantôt elle se perd en l’un, tantôt en l’autre. mais je commence à représenter à mon âme, qu’étant faite à l’image et à la ressemblance de son Dieu, lui seul doit en être sa fin. À ces moments-là, il me semble que mon âme s’envole avec Dieu, que mon corps perd sa pesanteur, et que, me trouvant devant Jésus, je me perds toute en lui. Je me sens aimer le céleste amoureux des créatures. Plus je pense à lui, plus je le connais doux et aimable. Comme Jésus se montre envers moi, ainsi dois-je me montrer envers lui, humble, douce... 

Parfois il me semble voir en Jésus une lumière divine, un Soleil d’éternelle clarté. Un grand Dieu auquel il n’est rien sur la terre et au ciel qui ne lui soit soumis. Un Dieu dont la puissance réside dans sa volonté. Quoi qu’il en soit, il m’est toujours doux de me souvenir de Jésus...” 

À une amie, Gemma ne put cacher l’amour qui emplissait son cœur: “Je voudrais que mon cœur ne palpite, ne vive, ne soupire que pour Jésus. Je voudrais que ma langue ne sache proférer que le nom de Jésus, que mes yeux n’aient de regards que pour lui, que ma plume ne sache écrire que Jésus, que mes pensées enfin ne s’envolent que vers lui...” (Lettre du 8 août 1899 à Annetta Giannini) 

5-2-Quelques oraisons jaculatoires 

Gemma priait tout au long de la journée. Ne pouvant être constamment recueillie, en raison de ses occupations, elle exprimait, souvent, par des phrases courtes, toutes les préoccupations de son cœur. En voici quelques-unes, choisies au hasard: 

Deux choses, ô Jésus, désire mon cœur: vivre mourante, puis mourir d’amour. 

Si tous les hommes s’efforçaient d’aimer et de connaître le vrai Dieu, ce monde serait changé en paradis. 

Que toujours, ô Jésus, me guide votre main, pour que jamais je ne me trouve loin. 

Ô Jésus, faites que je donne si bien l’exemple que les bons deviennent meilleurs, et que les impies se convertissent. 

Faites, ô Jésus, que devant Vous je m’incline avec l’humble ferveur des séraphins. 

Ô Jésus bénissez mon âme: qu’elle soit constante en amour. 

À vous seul mon Dieu, en toute action je porte mon attention. 

Lorsque j’éprouve peine et douleur, je souffre tout pour vous, Seigneur. 

De vous avoir offensé, ô Dieu, à tout moment, non par crainte, mais par amour, je me repens. 

Jésus, que le flambeau de votre foi resplendisse toujours en moi. 

Sur votre sein, ô mon Jésus, je me repose. Ah! Réveillez-moi plus fervente envers vous. Je veux que tout mouvement de mon cœur soit un soupir pour vous, Jésus et Marie. 

Adorons et prions Jésus... Adorons et prions le Dieu immense et immortel, infini. Adorons l’infinie majesté de notre Dieu. Louange à toi, ô Père qui nous as sauvés; à toi, le Fils, qui nous as rachetés; à toi, ô Esprit-Saint, qui nous as sanctifiés... 

5-3-Les plaintes de Gemma [1]  

“Jésus, pense à ma pauvre âme, viens à mon aide dans les moments d’épreuve. Mon Jésus, tu vois à quel point je suis pauvre en vertus... Je voudrais mourir d’amour ici et que personne ne le sache... Jésus, tu résistes encore en voyant mon cœur qui désire tant... et ne peut se satisfaire. Jésus, sur la terre tout m’ennuie. Je ne désire qu’une chose, Jésus, t’aimer... cesse de me faire soupirer: je veux mourir d’amour et m’en aller avec toi. 

J’ai toujours envie de pleurer et j’ignore pourquoi... 

Jésus, ne me fais pas de reproches: je suis ta victime sur la croix et sur l’autel... Jésus, ne vois-tu pas que, même dans les moments les plus douloureux, Jésus, je vis avec toi? Ou bien, est-ce toi qui vis avec moi? 

Ô Jésus, serait-il possible que l’on pût dire un jour que ton amour m’a consumée? Sais-tu ce que je voudrais être, Jésus? La victime de ton amour. 

5-4-Les supplications de Gemma 

Gemma fut souvent obsédée par son passé et ses “innombrables” péchés. Elle supplie le Seigneur de l’aider: “De grâce! Jetez un regard sur vos souffrances, voyez le prix de sang qui coule de vos veines. Mon Dieu, en cet instant, fermez les yeux sur mon indignité et ouvrez-les sur vos mérites infinis. Et puisqu’il vous a plu de mourir pour mes péchés, pardonnez-les moi tous, afin que je n’en sente plus jamais le poids. Oh! Jésus, ce poids m’oppresse trop fort. 

Mon Jésus, aidez-moi: je désire à tout prix devenir meilleure. Ôtez, détruisez, anéantissez tout ce qui en moi n’est pas conforme à votre volonté. Je vous prie aussi, Jésus, de m’éclairer, afin que je puisse marcher dans votre sainte lumière. 

Tu sais, mon Dieu, ce qui peut décourager une âme amoureuse? C’est de ne pouvoir T’aimer suffisamment. 

Mon Dieu, je t’adore, je meurs d’amour pour vous; votre nom si doux, je l’aurai sans cesse à l’esprit, dans mon cœur, sur mes lèvres. Jésus, Jésus, maintenant et toujours! Jésus, ma lumière, mon cœur et mon âme! Jésus! Jésus!...” (26 janvier 1901) 

La mort 

Oh! Comme je serais contente si ma vie s’achevait un jour en totale union à la volonté de Dieu! Un jour que je nourrissais cette pensée, Jésus me dit: “Ce ne serait pas mourir, ce serait vivre  éternellement.” (12 juin 1901) 

5-5-Prière au Saint-Esprit 

Gemma écrit à une amie: “Nous voici enfin arrivés à la belle fête du Saint-Esprit! Dieu fasse que ce divin feu nous consume toutes deux ensemble. Que cette pure flamme nous rendrait heureuses! Ô flammes bien-aimées qui béatifiez les âmes que vous embrasez, venez donc en nos cœurs aujourd’hui, rendez-les dignes de vous, enflammez-nous, brûlez-nous, consumez-nous!... Que l’Esprit-Saint, véritable lumière de tous les esprits, daigne nous communiquer ses divines ardeurs. Qu’il consume en moi toute affection blâmable et rende mon pauvre cœur semblable au sien.” (Lettre du 21 mai 1901, à Mère Giuseppa du Sacré-Cœur) 

6 - L’heure des ténèbres 

Comme tous les grands saints, Gemma connut les heures douloureuses de l’apparente absence de Dieu, les heures de doute, les heures de l’incompréhension des proches. Ainsi, pendant longtemps même son confesseur douta de la réalité des stigmates. Durant une extase Gemma laissa son cœur parler: elle-même en était arrivée à douter de la réalité des faits extraordinaires qui survenaient en elle: 

6-1-Quand tout le monde doute d’elle 

“Ô Jésus, je n’en puis plus. Ô Maman, Maman! J’ai envie de dire: Y crois-tu Jésus? Eux n’y croient pas. (On la croyait hystérique) Jésus, dis-moi exactement ce qu’il en est. Oui, Jésus... Va lui dire, toi! Pas moi: mon confesseur ne me croit pas.”  

6-2-Silence de Dieu et nuit de l’esprit 

Extrait d’une lettre de Gemma au Père Germano 

“Je me suis bien persuadée que seul Dieu peut me satisfaire et j’ai mis en lui toutes mes espérances. Que Jésus ne veuille plus de moi, qu’il me repousse, moi, je le chercherai toujours.” (12 novembre 1900) 

À une amie, Gemma écrit: “Je m’ennuie à vivre encore ici-bas, c’est là pour moi une torture si amère de vivre et de rester en ce monde, séparée de Jésus, que je n’en peux vraiment plus. Et puis quelle est mon anxiété à la pensée qu’à tout moment je puis perdre Jésus, je ne saurais le dire. Celui-là seul le comprend qui l’aime éperdûment. Souvent, lorsque je me sens auprès de lui, je lui redis: Jésus, après toi seul je soupire, tu peux me donner tout ce que tu veux, alors donne-moi le paradis... J’ai peur, ma vie passée me fait trembler...” (Lettre du 21 mai 1901 à Mère Giuseppa du Sacré-Cœur) 

Le silence de Dieu, Gemma l’exprime même pendant ses extases. Voici quelques-unes de ses plaintes à Jésus: 

“Ô Jésus, je te cherche toujours. Je cherche à promouvoir sans cesse ta gloire, à n’aimer rien d’autre que ton amour. Mais Jésus, réponds-moi: pourquoi ce silence?... Pourquoi ne réponds-tu pas? Dis-moi quelque chose. Si tu désires que je corresponde à tes dons, dispense-les moi en douceur et non point avec tant de hâte. 

Ô Jésus, ô Lumière, où es-tu?... Illumine mes yeux. Ô mon Dieu, ne me laisse pas vivre dans les ténèbres... Ô Jésus, quand donc te reverrai-je? Mais peut-être m’as-tu dit que je ne te reverrai plus? Je ne me rappelle pas si tu me l’as dit... Mais je ne te vois pas... pas du tout... Lorsque j’étais petite, on me disait que tu étais toujours là. Mais je ne te vois pas... Où es-tu?... Où es-tu parti?... Sans même me dire adieu!... 

Mon Dieu, mon secours... ma force... mon soutien... ma lumière! Éclaire mes pas... Où es-tu parti, mon amour?... Où t’es-tu caché?... Pourquoi ne te montres-tu plus?... Mon Jésus, où es-tu parti? Infinie Beauté, où t’es-tu cachée. Ô Jésus, où dois-je te chercher? Montre-toi au moins une fois... 

Ô saint amour, embrase-moi! Ô Jésus, tout m’ennuie, tout m’est pénible. Il n’est en ce monde pas une seule chose que je désire: je n’aspire qu’après l’Amour céleste, lui seul je l’aime et n’aime que lui... Ô Saint Amour, embrase-moi! Je ne désire que toi. Puis, lorsque je serai morte, je voudrais que tout le monde dise: “Gemma a été victime d’amour, elle est morte uniquement victime d’amour.” Cela, afin que tout le monde aime Jésus... 

Regarde, Jésus: tu es un Roi puissant et généreux  qui suscite des batailles, mais qui veut toujours la victoire. Accorde-moi la grâce de céder à tous tes appels et de t’aimer avec tendresse. 

Jésus, je t’aime. Supplée toi-même à ce qui manque à mon amour. Bon Jésus, je te bénis; mais supplée toi-même à ce qui manque. Bon Jésus, je te loue pour aujourd’hui et pour demain. Supplée toi-même à ce qui manque à ma louange. 

Sois béni, Jésus, d’avoir pour ainsi dire ordonné aux créatures de m’abandonner, afin que je te sois toujours plus proche. Ah! toi, tu consoles, toi seul consoles. Jésus, que m’importe de ne pas trouver de consolation dans le monde? Toi seul me suffis. Que m’importerait d’être méprisée? C’est toi qui consoles. Si tu m’avais fait comprendre cela plus tôt, je me serais abandonnée entre tes bras. Et si c’est ainsi que tu traites une pécheresse, qu’en est-il des âmes pures et saintes qui sont tiennes? 

Ô Seigneur, si j’avais du moins quelque certitude d’être en état de grâce... 

6-3-Jésus s’explique 

“Avant de partir, Jésus m’avait consolée en disant: “Ne t’afflige pas si je fais semblant de t’abandonner. Ne crois pas qu’il s’agisse d’une punition, c’est une invention de ma part pour te détacher entièrement des créatures et t’unir à moi. Quand tu auras le sentiment que je te repousse, c’est que je t’attire encore plus fortement à moi. Lorsque je te paraîtrai loin, c’est alors que je serai le plus près... Ma fille, la fidélité et l’amour te sont nécessaires. Aussi, prends donc patience si je te laisse seule. Souffre, résigne-toi, console-toi. N’imite pas certaines âmes  attachées aux consolations et joies spirituelles et qui aiment peu la croix. Dans l’aridité spirituelle, elles abrègent peu à peu leurs prières parce qu’elles n’y trouvent plus les consolations qu’elles y éprouvaient auparavant. Toi, au contraire, agis de la sorte: unis tes peines aux miennes, considère comme un grand bienfait ce dont je t’ai privée, embrasse joyeusement cette croix, si tu veux m’être agréable...” Après ces paroles, Jésus m’a chargée de vous rappeler ceci: lorsqu’il désire élever une âme, il commence par beaucoup l’humilier...” (Lettre à Mg Volpi, de mai 1901) 

6-4-Les attaques du démon 

Gemma eut souvent à faire avec le démon. Son Ange, pour lui rappeler que l’obéissance est le plus sûr moyen de pouvoir résister au démon, lui donna le conseil suivant: “Ma fille, souviens-toi que lorsque tu manques à l’obéissance, quelle qu’elle soit, tu commets toujours un péché. Pourquoi donc es-tu toujours aussi rétive pour obéir à ton confesseur? Rappelle-toi aussi qu’il n’y a pas de chemin plus court et plus vrai que celui de l’obéissance.” 

Après une terrible attaque du démon, Gemma écrit: “L’assaut a été violent, je dirais même terrible. Aucune bénédiction, aucun scapulaire n’ont suffi à modérer la tentation la plus laide qu’on puisse imaginer. Le démon était si affreux que j’ai fermé les yeux et ne les ai rouverts qu’une fois complètement délivrée. Mon Dieu, si je suis sans péché aucun, c’est à Toi seul que je le dois. Sois-en remercié. Que dire en de pareils moments? Chercher Jésus sans le trouver est une souffrance plus grande que la tentation elle-même...” 

Comme Gemma se plaignait douloureusement à Jésus, elle obtint la réponse suivante: 

“... Quant à toi, sois heureuse de ce que je te conduise comme je le préfère, par des voies âpres et douloureuses. Tu as l’impression que la terre se dérobe sous tes pieds et le ciel à tes yeux, mais toi, ne manque pas de foi, ni d’amour, ni d’espérance. Ne cherche qu’à gagner des mérites en pratiquant les vertus, méprise les propos du monde, et, en dépit de tes ennemis, cours dans les voies de ma volonté divine. Tiens-toi étroitement unie à Jésus, humilie-toi en sa présence, aie recours en tout à son infinie bonté, sache tirer parti de ce que le démon utilise pour te perdre. 

Ma fille, a-t-il ajouté, si vraiment tu m’aimes, aime-moi aussi dans les ténèbres. Le Seigneur prend plaisir à jouer avec les âmes qui lui sont les plus chères, c’est par amour qu’il joue: tantôt il les console et les met en honneur auprès des hommes, tantôt il permet qu’elles deviennent la risée du monde.” (Lettre à Mg Volpi, de mars 1900) 

7 - Cœur Eucharistique de Jésus 

7-1-Gemma et l’Eucharistie 

L’Eucharistie est pour Gemma la rencontre quotidienne de son cœur avec le Cœur de Jésus présent dans l’Hostie consacrée. Les paroles qu’elle exprima au cours de ses nombreuses extases révèlent parfaitement les aspirations de son cœur: Mon Dieu, ouvre-moi ton cœur. Ô Jésus, ouvre-moi ton Cœur Eucharistique: je veux y déposer toutes mes affections. Ô Jésus, toi, ne m’as-tu pas souvent dit que tu m’accueillerais généreusement: n’est-ce pas, mon Jésus? 

Mon Dieu! Ô Jésus, mon amour, Bien incréé! O Jésus que serais-je devenue si ta sollicitude ne m’avait conduite à toi?... Jésus, ouvre-moi ton Cœur, ouvre-moi ton Cœur Eucharistique... Je t’ouvre le mien... Ô feu divin, pénètre-le... Brûle-moi, ô Jésus, consume-moi... Ô Jésus, je sens en moi un feu... Ô Jésus, s’il te plaît que j’en sois toute embrasée!... 

Mon Jésus, je me consume... je meurs... je meurs pour toi... Ô Jésus, j’ai soif de toi. Ne vois-tu pas combien je souffre le matin avant de me nourrir de toi?... Fais qu’après t’avoir reçu, je sois au moins rassasiée!... 

C’est quasiment pour moi un bel héritage que d’être née pécheresse, puisque les veines de mon Seigneur restent à jamais ouvertes et remplies de ce sang eucharistique. 

Ô Jésus, ô Jésus, Jésus, mon Bien!... Je suis affamée de ton pain de vie, je suis assoiffée de ton sang eucharistique. 

Ô Seigneur pourquoi me fais-tu entièrement brûler de ton feu divin, le feu de ton amour? Je voudrais enflammer toutes les créatures... 

Si le paradis était une académie, on ne devrait y enseigner que l’amour. Le Cénacle en serait l’école, Jésus le Maître, sa chair et son sang, la doctrine enseignée. 

Je me rends compte que tu ne m’as pas dotée de richesses temporelles et périssables; mais tu m’as donné la véritable richesse: tu m’as nourrie de ton Verbe Eucharistique. Que deviendrais-je si je n’avais pas voué toutes mes tendresses à la Sainte Hostie?... 

Tu es une flamme, Jésus, et je désire que mon cœur se change en flamme. 

Courons à Jésus, ce Cœur d’amour, ce Cœur plein de tendresse. 

Car Jésus ne demande que de l’amour. 

Jésus ne me demande que de l’amour. À tous il ne demande que de l’amour. Aimons-le donc beaucoup, d’un amour infini. Rappelons-nous toujours combien il a souffert pour nous, alors nous n’oublierons jamais de l’aimer... (9 février 1901)

7-2-Jésus révèle son Cœur Eucharistique 

          7-2-1-Souffrance et solitude de Jésus 

Père, si vous saviez à quel point Jésus est affligé par moments, certaines fois! Jésus se trouve pour ainsi dire toujours seul. Vous savez, c’est si douloureux de voir Jésus en proie à la souffrance. (9 juillet 1900) 

Oh! Papa, comme elles sont nombreuses ces créatures privilégiées qui, après avoir reçu de Jésus tant de grâces, sont peu à peu devenues indifférentes! Et Jésus pleure en voyant ces âmes. (26 janvier 1901) 

Lorsque je vois Jésus pleurer, mon cœur est littéralement transpercé. Je songe... Je songe que mes péchés ont augmenté l’angoisse qui l’a submergé durant sa prière au Jardin... Alors, Jésus a vu tous mes péchés, tous mes manquements et en même temps la place que j’aurais occupée en enfer si le Cœur de Jésus ne m’avait obtenu le pardon... (22 avril 1901) 

          7-2-2-Les plaintes de Jésus Eucharistie [2]  

Jésus soupirait: “Ma fille, que d’ingratitude et de malice dans le monde! Les pécheurs continuent à vivre opiniâtrement obstinés au péché! Mon Père ne veut plus les supporter. Les âmes avilies et amollies ne font aucun effort pour réprimer la chair. Les âmes affligées tombent dans l’effroi et le désespoir. Les âmes ferventes s’attiédissent peu à peu. Les ministres de mon sanctuaire...” Là, Jésus se tut et, un moment après, il reprit: “Eux que j’ai chargés de continuer la belle œuvre de la Rédemption...”  

Jésus se tut de nouveau... puis, il continua: “Et eux, en retour... Eux que j’ai toujours regardés avec prédilection. Eux que j’ai toujours considérés comme la pupille de mes yeux...” Jésus se tut en soupirant. Et enfin: “Des créatures, je ne reçois continuellement qu’ingratitude et oubli. L’indifférence croît de jour en jour, et personne ne se repent...” 

Ô Jésus!... s’exclame Gemma qui poursuit sa relation des paroles de Jésus: “Personne ne se soucie plus de mon amour, on oublie mon Cœur, c’est comme si je ne les avais jamais aimés, comme si je n’avais rien offert pour eux, comme si j’étais méconnu de tous. Mon Cœur est continuellement attristé. Je reste presque toujours seul dans les églises, et si beaucoup s’y rassemblent, c’est pour bien d’autres motifs, et je dois souffrir de voir mon église transformée en théâtre de divertissements. J’en vois beaucoup qui, sous d’hypocrites apparences, me trahissent par des communions sacrilèges...”  

Jésus s’interrompit, puis reprit doucement: “Ma fille, j’ai besoin d’âmes qui m’apportent autant de consolation que de nombreuses autres me causent de souffrances. J’ai besoin de victimes et de victimes fortes. Pour calmer la juste et divine colère de mon Père céleste, il me faut des âmes qui, par leurs souffrances, leurs tribulations et leurs privations, suppléent aux pécheurs et aux ingrats. Oh! Si je pouvais faire comprendre à tous à quel point mon Père est indigné contre le monde!... “ (13 octobre 1901) 

Si Jésus est la douceur même, c’est surtout par le Saint-Sacrement qu’il la répand.(27 juillet 1902) 

7-3-La réponse de Gemma [3]  

Seul Jésus peut nous permettre de répondre à l’Amour de son Cœur. Nous ne pouvons lui rendre que l’Amour qu’Il nous a d’abord donné. Cela, Gemma l’a bien compris: “Je voudrais te recevoir, je voudrais te voir... Non, je voudrais te posséder pour l’éternité. Ô mon Dieu, je voudrais tant de grâces... Je voudrais ton amour. Tu réclames mon amour, mais moi je ne puis te le donner, si tu ne me le donnes pas. 

Fais que je t’aime, Jésus, que je t’aime toujours, que je t’aime toujours davantage... Quelle consolation pour moi si j’étais la flamme de ton pur amour! 

Ah! Jésus!... Pourquoi ne suis-je pas toute embrasée d’amour pour toi? Pourquoi mon cœur ne se consume-t-il pas en flammes amoureuses? Pourquoi n’est-ce pas mon amour qui répond à ta charité? Ô Jésus, que de temps j’ai perdu! Tant d’années où j’aurais pu beaucoup t’aimer et où je n’ai fait que te mépriser! Grâce à ta bonté, cependant, j’espère pouvoir rattraper le temps perdu. 

Jésus sur la terre, Jésus dans ma vie, Jésus au ciel: voilà tout mon soutien. Ô Jésus, qui saurait dire ce qui se passe dans un cœur tout embrasé d’amour?... Ô Jésus, savoir que je te possède m’est une telle consolation!... 

Mon cœur, oh! mon cœur, pourquoi n’es-tu pas tout de feu, pourquoi ne te consumes-tu pas dans les flammes de Jésus? Je t’aime tant, Jésus, et désire t’aimer toujours. Sais-tu pourquoi, Jésus?... Dans le monde je n’ai jamais trouvé un amour sincère comme le tien, parce que ton amour est immense. Par amour pour toi, Jésus, il me plaît de n’aimer personne d’autre. Me voici, me voici à toi. Oui, Jésus, donne-moi des ailes, des ailes... la force et le repos. Toi seul peut me rendre heureuse en m’attirant à toi. Ô Jésus, quelle joie lorsque je ne m’appartiendrai plus et que je serai toute à toi! 

Lumière de la Lumière, le Soleil de Justice, celui qui éclaire le paradis. C’est son Cœur immaculé qui te donnera la clarté du soleil... parce que la consolation consiste précisément dans la contemplation de Dieu, le Rois des rois qui demeure au centre du paradis. Ô bonheur!... Mon Dieu!... Laisse-moi m’enfoncer dans la charité de ton amour... 

Pourquoi être ainsi affligée, mon âme?... Tu offenses ton Amour si Tu n’embrasses pas la croix de bon cœur. 

Mais Gemma ne comprend pas toujours le langage de Jésus. Aussi s’adresse-t-elle à son Père spirituel: Ce matin, Jésus m’a répété, par deux fois: “L’Amour réclame l’Amour, le feu réclame le feu.” Que signifient ces paroles? Ce Jésus béni ne se fait jamais comprendre de moi. (20 janvier 1901) 

8 - Marie

On se doute bien que Gemma bénéficia également de la présence fréquente de la Vierge Marie qu’elle appelle Maman. Voici quelques phrases relevées par des personnes ayant pu assister aux extases de Gemma. On notera la tendresse et la confiance de Gemma pour sa Maman du Ciel. 

“Qu’y a-t-il aujourd’hui, Maman? Oh! Où suis-je?... Ô Maman!... Oh! Que tu es belle!... Ô Maman, mais qu’y a-t-il aujourd’hui? 

Oh! Maintenant... Ô Maman... Maman, je n’ai plus... je n’ai plus  rien à désirer... Maintenant, je suis... je suis heureuse, ô Maman... Maman! Maman, laisse-moi te dire une chose: j’en ai tant à te dire!... Oh! Comme il fait bon reposer auprès de toi!... 

Je ne trouve rien à te dire: je suis trop heureuse!... Ô Maman, mon cœur ne te parle-t-il pas suffisamment?... Maman... Maman... Pense à cette dame que tu aimes tant... et pense à sauver son âme... 

Ô Maman, ma mère, tu es la fleur pure qui a donné naissance au lys d’une blancheur éclatante. Reine du Ciel... toi qui prends aux créatures la plus noble partie de leur amour, à moi aussi tu me l’as prise.” 

Au Père Germano, Gemma confie: “Ma Maman du Ciel m’a prise dans ses bras... Elle m’a trouvée tellement, mais tellement pauvre et m’a incitée à pratiquer les vertus, surtout l’humilité et l’obéissance.” (Lettre au Père Germano, du 12 septembre 1902) 

Annexe 1

Le mystère de l’Incarnation 

Le 25 mars 1901, l’Ange gardien de Gemma vint lui parler de l’Incarnation: “Sache, ma fille, que je te parlerai de la Très Sainte Vierge Marie, petite jeune fille si humble aux yeux du monde, mais d’une grandeur infinie devant Dieu. Je te parlerai de la plus belle, de la plus sainte de toutes les créatures, de la fille de prédilection du Très-Haut, de celle qui était appelée à l’incomparable dignité de Mère de Dieu.... La Très Sainte Vierge devait, par le fruit de son sein, apporter à tous les hommes la libération et le salut. 

Ma fille, à peine Dieu le Père eut-il décrété d’envoyer à l’humble Marie sa grandiose ambassade qu’il dut choisir aussi le porteur d’une telle annonce. C’est pourquoi fut choisi celui qui se tenait le plus près du trône du Très-Haut, c’est-à-dire l’Archange Gabriel (qui signifie Force de Dieu). Marie devait donc devenir la Femme forte, la Femme terrible aux puissances des ténèbres. Oh! comme l’Archange devait être heureux d’avoir été choisi pour un mystère aussi sublime et de se présenter comme le messager d’une si heureuse annonce à la Vierge qui, plus tard, serait saluée comme Reine du paradis! 

La nuit était déjà avancée, la Très Sainte Vierge était seule dans sa chambre: elle priait toute ravie en Dieu. Soudain, dans cette pauvre petite chambre, se fait une grande lumière: l’Archange, ayant pris une apparence humaine et entouré d’une multitude d’anges, s’approche de Marie avec révérence et majesté tout à la fois. Elle, elle s’incline comme femme; lui, sourit comme messager d’une heureuse nouvelle et lui adresse ces douces paroles: “Salut, ô Marie, le Seigneur est avec toi. Tu es bénie entre toutes les femmes.” Oh! belle, oh! grande, oh! sublime salutation, jamais encore entendue sur la terre et que la terre n’entendra plus jamais! Seul un archange, annonçant à la plus élevée des créatures la sublimité d’un si grand mystère, pouvait être digne de proférer un éloge aussi splendide et des paroles aussi sublimes. Et seule l’auguste Mère du Fils de Dieu était digne d’être saluée de si sublimes et surhumains accents. 

Après que l’Archange céleste eût prononcé ces paroles, il se tut, comme s’il attendait d’elle un signe pour lui expliquer sa divine ambassade. 

Cependant, surprise par cette salutation, Marie se troubla; elle se taisait et réfléchissait... Elle se trouble parce qu’elle se croit indigne de la salutation angélique... 

Marie n’avait donné aucune réponse à l’ange. Afin qu’elle n’ait plus peur, l’ange lui dit alors: “Ne crains pas, Marie, tu es l’unique à avoir trouvé grâce devant le Très-Haut. Tu vas concevoir en ton sein un fils, tu lui donneras le nom de Jésus, il sera appelé par tous le Fils du Très-Haut. On lui donnera le trône de David, il régnera pour l’éternité et son règne n’aura pas de fin.” C’est par ces paroles sublimes que l’Archange expliquait entièrement sa mission à Marie. Crions hourra! Désormais Marie est déclarée Mère du Libérateur promis, du Rédempteur du monde, du Fils de Dieu. Oui, Marie fut la grande Vierge attendue depuis si longtemps. Ce fils devait être grand, donc la mère sublime. Ce fils devait être le Fils du Très-Haut, c’est pourquoi Marie devait être élevée à la plus intime relation avec la Très Sainte Trinité...” 

L’Ange continue sa relation à Gemma. Le mystère est expliqué et “Marie finit par donner le grand consentement au messager divin, en répondant: “Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta parole.” Le grand assentiment est prononcé, Marie est la Mère du Fils du Dieu Très-Haut. À ces paroles, le ciel exulte, le monde entier est consolé. L’ange s’incline respectueusement devant sa Maîtresse, puis il prend son vol et s’en retourne au Paradis.” 

Gemma poursuit sa relation: “Marie prononça ces paroles et Dieu ajouta: ‘Qu’il en soit ainsi.’ De même que cette parole avait tiré du néant toutes les œuvres de la création et leur avait donné l’existence, de même, à peine Marie eut-elle prononcé le FIAT, que commença l’œuvre admirable de la Rédemption du monde... À l’instant même, l’Esprit divin forma en son sein, de sa très pure substance virginale, un tout petit corps tendre et parfait, auquel il donna une âme humaine, et à l’un et à l’autre, il unit la personne divine du Verbe en une étroite union hypostatique... 

Une joie ineffable inonda Marie lorsqu’elle se fixa dans la lumière infinie et put admirer les splendeurs cachées de la divinité.” 

Annexe 2

Les événements prodigieux dans la vie de Gemma 

Les événements prodigieux ne font pas la sainteté, mais lorsqu’ils confirment la présence réelle de Jésus dans l’Eucharistie, on ne peut pas les passer tous sous silence. Ainsi Gemma mit un jour sa “tante” (Mme Cecilia) au courant d’un fait peu commun: un matin de bonne heure, à Lucques qu’elle ne quittait jamais, Gemma se retrouva en train de communier au calice du Père Germano tandis qu’il célébrait la messe, à Rome. Cecilia Giannini écrivit au Père Germain: “C’est dimanche, et je voudrais savoir deux choses de vous, mais rapidement: l’heure précise à laquelle vous avez dit la messe; et si, en ce dimanche, vous avez ressenti assez fortement la présence de Gemma, et à quelle heure?” [4]  

Le Père Germano répondit: “Samedi, j’ai dit la messe après dix heures, et le dimanche vers cinq heures, et j’ai donné à Gemma le calice pour qu’elle boive, et elle y a approché ses lèvres. Oui, j’ai senti sa présence... Pauvre philosophie! Et vive Jésus présent dans l’Eucharistie! Oh! Jésus Eucharistique n’est pas connu, n’est pas honoré, ni aimé non plus. C’est à nous de le faire.” [5]  

Ce phénomène se renouvela plusieurs fois. Une autre fois Gemma s’inquiéta auprès de son Directeur: “Est-ce vous qui m’avez donné beaucoup de sang à boire le matin? Après la communion, j’ai senti ma bouche remplie de sang...” (3 février 1901)  

Annexe 3

Gemma et les âmes du purgatoire 

Un jour l’Ange gardien de Gemma lui reprocha de ne pas prier assez pour les âmes du Purgatoire. Elle raconte, dans son autobiographie: “Mes prières terminées, j’allai au lit. Lorsqu’il eut obtenu de Jésus la permission de venir, mon Ange revint et me demanda: “Combien de temps cela fait-il que tu n’as pas prié pour les âmes du Purgatoire? Oh! Ma fille, tu y penses si peu! Sais-tu? Mère Maria Teresa[6] souffre toujours.” Je n’avais pas prié pour elle depuis le matin. Il me dit que cela lui ferait plaisir si j’offrais pour les âmes du Purgatoire les moindres petites choses que je souffrais. “Toute petite peine les soulage, même celles d’hier et d’aujourd’hui, si tu les avais offertes pour elles.” Un peu étonnée je répliquai: Les douleurs physiques soulagent donc les âmes du Purgatoire? “Oui me dit-t-il, oui, ma fille, la moindre souffrance les soulage.” 

Annexe 4

Humilité de Gemma[7]  

Pendant que Gemma écrivait, son ange se tenait auprès d’elle. Un jour il lui dit: “Ma fille, je te conseille de toujours obéir en tout. Dis tout à ton confesseur. Dis-lui de ne pas te négliger, mais de te garder cachée.” Puis il ajouta: “Dis-lui que Jésus veut qu’il prenne toujours plus soin de toi, qu’il se soucie davantage de toi, car tu es trop inexpérimentée.” 

À son Père spirituel, elle demande: “Veuillez me recommander à Jésus, afin qu’il m’accorde la grâce de connaître mes péchés et d’en avoir une vraie douleur. À tout instant, je me découvre un défaut. 

Comme je m’ennuie dans le monde! Il est bien vrai qu’il n’y a pas de bonheur sur cette terre! Pour moi, si par la miséricorde de Dieu, je connais des moments heureux, c’est lorsque je me vois méprisée et humiliée. À vrai dire, les occasions ne manquent pas et même Jésus les multiplie chaque jour. Oh! Comme il est bon!” (Juillet-août 1900) 

“Ce n’est pas le poids de la croix qui fait tant souffrir Jésus, mais c’est le poids de mes péchés; Ô Papa[8], c’est une grande grâce que je ne sois pas encore en enfer. Oh! Si les années de ma vie passée revenaient, je voudrais... Mais elles ne reviendront pas. Mais s’il me reste encore un peu de temps, que vais-je faire? Je me souviens fort bien que Jésus a dit qu’il ne méprise jamais un cœur repentant. Je courrai donc à lui et l’aimerai de toute la force de mon faible cœur. Je l’aimerai même, s’il le faut, en donnant pour lui mon sang et ma vie. Mais quel rapport entre mon sang et le sang d’un Dieu, Entre une vie remplie de péchés comme la mienne et la vie d’une Majesté infinie?” (septembre 1900) 

“Jésus, ne me quitte pas encore, j’ai quelque chose à te dire... Ô Jésus... j’ai si peur d’être trompée... Je ne désire pas ces choses, je ne désire rien, Jésus. La seule chose que je veux, c’est que tu m’inspires une très grande douleur de mes péchés. Je ne veux rien d’autre: Jésus, j’ai peur de me tromper.[9]  

Jésus, est-il possible que la vaine gloire puisse avoir prise sur mon âme, alors que j’ai péché et que je suis si dénuée de vertus? Mais qu’en sera-t-il de moi qui allie une telle pauvreté en vertus à de si hautes prétentions?“ [10] 


[1] Phrases relevées pendant les extases de Gemma.

[2] Extraits des lettres au Père Germano.

[3] Parole dite pendant une extase.

[4] Lettre de Cecilia Giannini au Père Germain, du 17/2/1901.

[5] Lettre de février 1901, du Père Germain à Cecilia Giannini.

[6] Une religieuse décédée depuis peu.

[7] Extraits des Lettres au Père Germano.

[8] Gemma appelle ainsi son Père spirituel.

[9] Phrases relevées pendant les extases de Gemma.

[10] Phrases relevées pendant les extases de Gemma.

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