Eucher de Lyon
Sénateur, Moine, Évêque, Saint
370-449

Personne, depuis saint Irénée, n'a plus fait d'honneur à l'église de Lyon, que saint Eucher. Sa famille était fort illustre selon le monde. Le père et le beau-père de Valérien, son proche parent, occupaient les premières dignités de l'empire. Mais Eucher dut sa principale grandeur au mépris qu'il fit des richesses et des honneurs que lui assuraient sa naissance et ses rares talents. La beauté et la pénétration de son génie, l'étendue et la variété de ses connaissances, la force et la majesté de son éloquence, lui attirèrent l'admiration de tous les orateurs de son temps, et l'estime de tout ce qu'il y avait de grands hommes dans l'empire. Il eut de Galla, son épouse, deux fils, Salonius et Véran, qu'il envoya, encore fort jeunes, au monastère de Lérins, pour qu'ils y fussent élevés sous les yeux de saint Honorât, et sous la conduite du célèbre Salvien, prêtre de Marseille : ils furent depuis élevés à l'épiscopat.

Eucher, dès son enfance, avait montré une piété extraordinaire, qui n'avait fait qu'augmenter avec l'âge. Dégoûté enfin des vanités du monde, et effrayé des dangers qu'il y courait pour son salut, il résolut de l'abandonner. Il se retira, vers l'an 422, dans le monastère de Lérins, du consentement de sa femme qui, de son côté, se consacra dans la retraite au service de Dieu. Cassien, alors abbé de Saint-Victor de Marseille, adressa quelques-unes de ses conférences à Eucher et à Honorat, qu'il appelle les modèles admirables de cette maison de Saints.

Eucher, qui désirait mener une vie encore plus solitaire, quitta Lérins pour se retirer dans l'île de Lérins, qui n'en est pas éloignée, et qui porte aujourd'hui le nom de Saint-Honorat. Ce fut là qu'il écrivit son livre de la vie solitaire, où il fait le plus bel éloge de l'état des solitaires en général et en particulier du désert de Lérins, qui était alors habité par un grand nombre de Saints. Il écrivit aussi dans le même lieu, vers l'an 427, son traité du mépris du monde, qu'il adressa à Valérien, son parent. C'est un des ouvrages les plus estimés de l'antiquité ecclésiastique, soit pour la forme, soit pour l'importance des vérités qu'il contient.

II y est prouvé que le monde ne donne à ses partisans que de fausses joies ; que ses honneurs, ses applaudissements, ses sociétés ne sont qu'une vaine pompe, qu'un véritable esclavage, et que personne ne pourrait s'y attacher, si on ne se laissait point aveugler par les passions. Le Saint représente d'une manière si frappante l'illusion, l'instabilité, le vide, le néant des "biens terrestres, que le lecteur s'imagine voir passer le monde devant ses yeux, comme un fantôme, comme un éclair, qui se sont à peine montrés, qu'ils disparaissent pour toujours. « J'ai vu, dit-il, des » hommes élevés au plus haut faîte des honneurs et des » richesses.... La fortune, prodigue en leur faveur, ava1t » accumulé tous les biens sur leurs têtes, sans leur donner » même le temps de les désirer ; leur prospérité parvenue » à son comble, ne laissait plus d'activité à leurs passions. » Mais ils ont disparu dans un moment; leurs vastes pos« sessions ont été dispersées, et eux-mêmes ne sont plus.»

Valérien, auquel l'exhortation sur le mépris du monde est adressée, vivait au milieu des grandeurs. Il ne quitta point son premier genre de vie, s'il est le même que Priseus Valérien, auquel saint Sidoine Apollinaire adressa son panégyrique de l'Empereur Avit, vers l'an 456. C'est le sentiment de quelques auteurs. D'autres pensent qu'il s'agit de saint Valérien, qui se fit moine à Lérins, qui devint évêque de Cémèle, avant que ce siège eût été uni à celui de Nice; qui assista au concile d'Orange, d'Arles et de Riez, et qui mourut vers l'an 460.

Saint Eucher, suivant Cassien brillait dans le monde comme un astre par la perfection de sa vertu, et il fut depuis, par l'exemple de sa vie, un modèle pour l'état monastique. On le tira malgré lui de sa retraite, pour le placer sur le siége de Lyon, vers l'an 434. On vit en lui un pasteur fidèle, soupirant sans cesse après la céleste patrie, humble d'esprit, riche en bonnes œuvres, puissant en paroles, accompli en tout genre de sciences, et de beaucoup supérieur aux plus grands évêques de son temps. C'est le témoignage que rend de lui Claudien Mamert. Il assista au premier concile d'Orange, en 441. On lui attribue à Lyon la fondation de plusieurs églises, et d'autres pieux établissemens. L'opinion la plus probable est qu'il mourut en 450.

Saint Paulin de Nole, saint Honorat, saint Hilaire d'Arles, Claudien Mamert, saint Sidoine Apollinaire, et tous les grands hommes du même siècle, recherchèrent l'amitié de saint Eucher. Ils s'accordent tous à faire de magnifiques éloges de sa vertu. Le saint évêque de Lyon se montra zélé défenseur de la doctrine de saint Augustin contre les semi-pélagiens.

SOURCE : Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux Saints… – Traduction : Jean-François Godescard.

 

 

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