FATIMA
PORTUGAL

Fatima, lumière de vérité
et d’espérance pour le monde

Environ 250.000 pèlerins prirent part aux célébrations du 91e  anniversaire de la première Apparition. Malgré le grand nombre d’étrangers, la majorité des pèlerins était des Portugais. Quelque 40.000 d’entre eux marchèrent silencieusement, depuis chez eux, tout en méditant et en offrant des sacrifices : une véritable retraite spirituelle. Après la grande célébration de foi, ils quittèrent cette oasis spirituelle, le cœur dilaté, et ils rentrèrent chez eux en apportant à leurs familles et à leurs amis les bénédictions de Notre Dame de Fatima.

La concélébration solennelle de ce 13 mai fut présidée par le cardinal José Saraiva Martins, préfet de la Congrégation pour les Causes des Saints. Concélébrèrent avec lui 24 évêques et 226 prêtres. Nous publions ici, dans son intégralité, l’homélie du cardinal José Saraiva Martins.

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Nous sommes arrivés à Fatima, appelés nous aussi par le Ciel, comme les Pastoureaux. C’est la Vierge Marie, Notre Dame, qui nous a invités à venir en ce lieu saint, véritable « autel du monde », d’où a jailli, il y a plus de 90 ans, la lumière évangélique de l’amour et de la miséricorde.

Fatima ouvre ses bras, comme des bras d’amour, pour chacun d’entre vous, très chers pèlerins venus jusqu’ici, même de lieux très éloignés, pour rencontrer Dieu dans les signes vivants et sacramentels de sa présence, pour entendre sa Parole, pour venir comme des enfants à l’école de Marie, la plus sainte et la plus affectueuse de toutes les Mères.

Comme des frères et des sœurs de la même famille, il est beau de contempler notre Mère à tous, qui nous parle de Dieu et nous enseigne, aujourd’hui encore, comment arriver à Dieu, notre unique espérance, notre total et définitif bonheur.

Les chemins de la foi, qui sont souvent difficiles mais qui nous engagent toujours, s’ouvrent devant nous, parce que Quelqu’un les a parcourus avant nous en les imprégnant de son Sang. À Fatima, nos pas ont été précédés par ceux de Lucie, de François, de Jacinthe et des innombrables milliers de frères et sœurs venus comme nous à la recherche du Seigneur pour parcourir courageusement les chemins de l’Évangile.

1. Le 13 mai 1917, Notre Dame a parlé du Ciel, parce qu’elle est spécialiste des réalités célestes. Sa demeure est Dieu, sa maison est l’éternité. En disant : « Je viens du Ciel », elle parle de sa Patrie, de la Terre promise, qu’elle a reçue en héritage de Dieu, par sa foi. En parlant du Ciel, elle parle donc de ce qui la concerne en propre, de ce qu’elle connaît parfaitement.

Marie sait s’adresser aussi, avec son autorité maternelle, à ceux qui, sur cette terre, sont encore en pèlerinage vers la Patrie définitive. Elle connaît bien nos lassitudes, elle comprend les anxiétés et les angoisses de notre temps, elle pénètre dans la profondeur de nos cœurs et elle a des paroles de consolation dans les tribulations de notre existence. En tant que spécialiste du Ciel, elle veut nous apprendre à bien cheminer sur la terre, afin que dans notre vie brille au moins un reflet du Ciel, afin qu’en ce monde, au milieu des épreuves et des souffrances du temps présent, ne s’éteigne pas la flamme de l’espérance chrétienne.

2. Quand Notre Dame est apparue à Lucie et à ses cousins François et Jacinthe, elle prévoyait, dans sa sollicitude maternelle, les blessures et les contradictions de notre époque. Ce n’est pas par hasard si elle est apparue au commencement d’un siècle ensanglanté par la folie de deux Guerres mondiales, marqué par des nationalismes exaspérés, par des idéologies athées et matérialistes qui ont cherché, au cours des générations successives, à étouffer la lumière de la foi dans le cœur des hommes.

Ce sombre et obscur soupçon au sujet de Dieu s’étend jusqu’à nos jours. Aujourd’hui encore on voit se continuer cette « apostasie de la foi » – comme l’a appelée le Pape Jean Paul II – qui compromet et contamine progressivement notre Europe chrétienne qui a toujours offert au monde, au long des siècles, une culture riche en humanité, créative, respectueuse de l’homme et de sa très haute dignité de fils de Dieu et de frère du Christ.

3. C’est précisément à notre époque, rassasiée et désespérée, que le Cœur de cette Mère continue à parler, en traduisant les choses de Dieu dans un langage familier, simple, facilement compréhensible pour tous. En partant de l’humble vie quotidienne, elle nous élève d’un coup à la contemplation des choses du Ciel, parce que là est notre origine, là est notre but et notre Patrie. Avec nous, comme une patiente catéchiste, elle répète les vérités et les dogmes de la foi, confirmés et présentés sous un nouveau jour. Les commandements de la loi de Dieu, l’Église, les sacrements, les fins dernières, la charité et le pardon : tout acquiert valeur et consistance, tout mérite d’être considéré et accueilli comme don de la grâce, comme don de notre chère Mère du Ciel, la blanche Dame qui est apparue ici à trois petits enfants.

4. Fatima nous parle d’enfants – pensez à vos propres enfants –, les fleurs les plus belles et les plus tendres de la création, mises par Dieu au sein de nos familles pour nous émerveiller devant leur innocence et leur pureté. Fatima parle de familles simples, modestes mais dignes, capables de solidarité envers le prochain, envers les voisins et les pauvres. Fatima parle de jeux d’enfants, soudain traversés par une lumière et une grâce imprévisibles – la vision d’un Ange et ensuite celle de Notre Dame – et montre avec quel sérieux ces petits cœurs ont accueilli les appels du Ciel. Dieu est triste à cause des péchés et il n’y a personne qui le console ! disait François, impressionné par la souffrance d’un Dieu offensé et outragé. Son cœur d’enfant s’est ainsi ouvert aux profondeurs de la contemplation et de la mystique devant Jésus caché dans le tabernacle.

Jacinthe a vu, avec une indicible douleur, la souffrance des pécheurs voués à la perdition éternelle et elle a offert sa vie en holocauste pour les sauver de l’enfer.

Lucie – Sœur Lucie de Jésus et du Cœur Immaculé – a aussi accueilli dans sa vie l’invitation de Notre Dame, en nous donnant l’exemple d’un service rendu à l’Église, dans la grande tradition de la vie consacrée et du Carmel, et en y restant fidèle jusqu’à la mort. Elle a vécu presque centenaire, mais son âme, ses yeux et son cœur sont restés ceux de l’enfant d’Aljustrel qui a parlé avec le Ciel et qui a conservé jusqu’à la fin dans son esprit, comme dans un précieux coffret, la grâce qu’elle avait reçue ici comme un grand trésor.

5. La Vierge Marie, en 1917, est venue une nouvelle fois réconforter, corriger, éclairer et orienter ses enfants sur les chemins de la vérité. Jésus a dit : « Mes paroles sont esprit et vie » (Jn. 6, 63) ; « Je suis le chemin, la vérité et la vie » (Jn. 14, 4). À la silencieuse et manifeste « apostasie de la foi » – il y a aussi une « apostasie de la raison » – la Vierge Marie n’oppose pas les nombreuses paroles du monde ou le mensonge d’une nouvelle idéologie, mais elle propose à nouveau le Christ, et le Christ crucifié (cf. 1 Cor 1, 23), scandale pour les bien-pensants de toutes les époques, folie pour les sages de la terre, mais lumière sainte et aimante pour qui croit et pour qui, en croyant, rend aussi le plus bel hommage à la raison assoiffée de vérité et ouverte à la connaissance de Dieu.

6. « N’ayez pas peur ! » a dit l’Ange aux femmes qui sont arrivées, remplies de crainte et de frayeur, au tombeau du Christ (cf. Mc 16, 6). « N’ayez pas peur » a répété l’Ange de la paix aux Pastoureaux, à la Loca do Cabeço. « N’ayez pas peur : ouvrez, et même ouvrez toutes grandes les portes au Christ ! » a souvent demandé le très aimé Pape Jean Paul II dès le début et tout au long de son fécond pontificat.

L’homme d’aujourd’hui, déçu et désabusé par la vie, semble avoir parfois cessé d’espérer. Elles sont tombées, les soi-disant certitudes des idéologies. Ils sont tombés, le bien-être et la société de consommation – qui ne font que satisfaire en apparence nos besoins et nos exigences. Ils sont tombés, tous ces systèmes qui révèlent de plus en plus leur inconsistance, leur radicale incapacité de rendre l’homme heureux.

C’est seulement en Dieu que l’homme s’accomplit pleinement lui-même. La foi n’est pas une fuite de ses responsabilités ou un stérile repliement sur soi-même. Elle est source de lumière et de cette force intérieure qui nous anime et nous permet d’affronter courageusement les problèmes et les défis de la vie.

7. La foi affronte et purifie nos illusions, en mettant à nu notre incapacité à nous créer nous-mêmes et à nous décider tout seuls. C’est précisément pour cela que Notre Dame accueille de nouveau à Fatima le commandement qu’elle a reçu de son Fils Jésus au pied de la croix, et se révèle Mère de nous tous. En chacun, elle découvre une ressemblance avec son Fils et patiemment la reconstitue avec les instruments de la grâce.

Fatima est une école de vérité, qui nous protège des fables et nous enseigne à envisager et à interpréter la réalité avec le cœur de Dieu, sans se taire sur le destin ultime de l’homme ni minimiser nos responsabilités, mais en indiquant les chemins qui nous conduisent au Mystère.

Fatima est une école de prière, en tant que chemin fondamental pour pénétrer dans le cœur de Dieu. Fatima est une école de pénitence et d’offrande généreuse de nous-mêmes, en suivant la grande tradition de l’Église : les fruits les plus beaux ne naissent et ne germent que de façon silencieuse et cachée, en mourant aux yeux du monde pour renaître dans le sillage de la volonté de Dieu.

8. Devant la perte du sens des valeurs et la désorientation des consciences, Notre Dame indique les principes non négociables qui doivent inévitablement servir de point de départ pour fonder une juste façon de vivre, sociale et chrétienne. La vie, la famille, le mariage comme union stable et fidèle entre un homme et une femme et non d’une autre manière, la charité concrète, la dignité personnelle étendue à tous les moments et à toutes les dimensions de l’existence. Voilà le fondement et le milieu – humain et chrétien – où se placent le message et les événements de la Cova da Iria.

Dans un monde assoiffé d’espérance et de bonheur, la Vierge Marie répond par un seul mot qui résume tout : Jésus ! En lui seul se trouve la paix. Lui seul nourrit l’espérance. En lui seul se trouve la vie qui est un don du Ciel. Et le Christ est venu pour que tous aient la vie et qu’ils l’aient en abondance (cf. Jn. 10, 10).

Fatima, le 13 mai 2008

+ José, Cardinal Saraiva Martins

 

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