La foi,
dit-on, est un don de Dieu. Alors, pourquoi, depuis cinquante
ans et même davantage, tant de personnes se moquent-elles de la
foi du charbonnier? Pourtant, se moquant de la foi du
charbonnier, en fait, elles se moquent du don de Dieu.
Examinons
d'abord ce qu'est un charbonnier. Avant 1950, un charbonnier
c'était un homme dont le travail consistait à transporter du
charbon. Tous les ménages avaient besoin de charbon pour
chauffer les maisons, faire la cuisine, chauffer l'eau, etc. Les
mineurs extrayaient le charbon et les charbonniers le
transportaient jusque chez les utilisateurs. Les charbonniers
étaient des travailleurs qui devaient retirer de leurs
charrettes ou de leurs camions, encore assez rares, et
transporter les sacs de charbon d'au moins 25 kilos, sur leur
dos, pour le descendre jusque dans les caves. C'était un travail
dur, fatigant, réalisé par des hommes le plus souvent peu
instruits. Quand Dieu leur envoyait le don de la foi, ils ne le
discutaient pas: ils croyaient tout simplement en Dieu, notre
créateur, notre Père et en Jésus, le Fils de Dieu qui nous avait
sauvés.
Les
charbonniers n'étaient pas des cas particuliers: la plupart des
ouvriers français se trouvaient exactement dans la même
situation: peu d'instruction, travail dur pour nourrir la
famille; parfois, ils avaient la foi. Je dis "parfois" parce que
depuis la Révolution française, en France, on se moquait de ceux
qui avaient la foi. Et pour ne pas être moqués, les gens se
taisaient, et peu à peu, n'étant plus suffisamment transmise, la
foi se perdait. Car la foi doit se transmettre, mais comment?
Dieu a
voulu, que la foi, ce don merveilleux qu'il nous donne, soit
transmise tout au long des générations. D'abord, la foi doit
être transmise par les parents. Et ceux qui connaissent un peu
la vie des saints constatent que la plupart des grands saints
sont issus des familles chrétiennes souvent très pieuses. La foi
est (ou devrait être) fortifiée ensuite par l'éducation, donc
dans les écoles. La foi peut aussi se transmettre par la vision
du bonheur de ceux qui ceux qui aiment leurs frères et viennent
à leur secours lorsque c'est nécessaire. Il faut ajouter aussi,
que dans le monde athée qui est le nôtre, la foi emplit soudain
le cœur d'un être malheureux qui avouera plus tard "avoir
rencontré Dieu." Ce phénomène devient de plus en plus fréquent.
Révisons un
peu notre histoire de France. La France fut, pendant très
longtemps, un pays rural. Sauf dans les villes ou dans quelques
milieux privilégiés, la formation intellectuelle n'existait pas.
Mais la foi se transmettait, ce don de Dieu, don de l'Église
étant devenu don de la famille. Les gens recevaient ce don dans
la famille puis au catéchisme… c'était à peu près tout car il
était impensable d'aller au delà: le peuple, qui ne pouvait pas
faire d'études, conservait sa "foi de charbonnier". Et cela dura
pendant des siècles.
Peu à peu,
afin de remédier à la misère croissante et de pouvoir répondre
aux exigences du progrès matériel, des écoles s'ouvrirent, le
plus souvent créées et tenues par l'Église via ses religieux et
ses religieuses. On expliqua davantage la foi et la doctrine
chrétienne, mais la foi restait la foi, la foi restait don de
Dieu. Était-ce encore "la foi du charbonnier", cette foi qui
incitait à une vie réglée par la morale chrétienne? Très
probablement, car les charbonniers, donc en fait les gens du
peuple, gens pauvres et peu instruits, n'étaient pourtant pas
des imbéciles; ils avaient même compris que la paix et le
bonheur ne peuvent se construire que sur la morale voulue par
Dieu, donc la Loi de Dieu, le mode d'emploi de la vie.
Mais avec
l'arrivée de l'ère industrielle, des richesses, mal partagées,
commencèrent à émerger. Une science commença à se développer, et
ceux qui avaient la chance de pouvoir faire quelques études
s'imaginèrent que la science allait tout expliquer; dès lors,
Dieu était inutile. Ce furent les Lumières, les révolutions
françaises et bientôt la laïcité, en fait un athéisme déguisé.
Il fallait coûte que coûte se débarrasser de Dieu et de sa
morale encombrante. Il fallait arracher des cœurs humains la
"foi du charbonnier", en réalité tout simplement la foi, le don
de Dieu. Notre Église se montra parfois maladroite dans
certaines circonstances, mais la majorité des chrétiens conserva
sa foi. Malheureusement d'autres hommes voulurent la vie facile
tout de suite: comme Dieu les gênait, ils le chassèrent et ils
s'arrangèrent pour ne plus transmettre la foi. Mais voici que,
peu à peu, la science prenant une ampleur inattendue commence à
révéler Dieu. La foi, don de Dieu se réveille.
Il paraît
utile de donner quelques précisions: pourquoi, aujourd'hui,
notre monde contemporain a-t-il perdu la foi? Parce qu'elle
n'est plus transmise, ni par les parents, ni par l'éducation. Il
en est résulté une immoralité telle que notre monde ayant perdu
la foi, a perdu aussi la paix et le bonheur. Les vrais
scientifiques, affrontés aux réalités scientifiques ne peuvent
plus, s'ils sont honnêtes avec eux-mêmes, refuser Dieu. Et même
si la foi ne renaît pas encore, les persécutions antichrétiennes
qui commencent en France semblent réveiller une foi bien
endormie. Mais le sang des martyrs est semence de chrétiens. En
France, on ne peut pas encore parler de "sang des martyrs", mais
de tant de souffrances dans les cœurs qui saignent!
Heureusement, nous savons que
"là où le péché s'est multiplié, la grâce a surabondé."
En conséquence, malgré notre souffrance, nous devons nous
redresser, et témoigner de notre foi.
Je reviens à
la foi du charbonnier. La foi est un don de Dieu, un don
gratuit. En conséquence, des scientifiques peuvent être troublés
par leurs découvertes, mais leur esprit peut ne pas encore
accepter ce trouble comme un prélude à la foi. Ils raisonnent
trop, mais d'un raisonnement qui s'est coupé de la foi, car nous
savons que c'est de la foi qu'est né le raisonnement. Par
contre, quand des scientifiques troublés par leurs découvertes
sentent jaillir en eux un "sentiment" nouveau, étrange mais
qu'ils ne peuvent ni définir, ni supprimer, un début de foi
commence à naître en eux et c'est un don de Dieu. C'est toujours
la foi du charbonnier, la foi d'un homme qui, dépassé par ce
qu'il découvre, tremble à cause de son impuissance, de sa
petitesse. Il s'aperçoit qu'il est "en face" d'un être
supérieur, encore indéfinissable pour lui, mais qu'il finira
obligatoirement par appeler Dieu. C'est toujours la foi du
charbonnier, le don de Dieu par excellence. Faut-il continuer à
mépriser la foi du charbonnier ou reconnaître, humblement, que
c'est le plus grand des cadeaux que Dieu veuille nous faire.
Paulette
Leblanc |