La fille de Marcantonio
de’ Mariscotti et de Ottavia Orsini naquit à Vignanello en 1585. Sa
grande sœur était déjà religieuse, au couvent de Saint Bernardin à
Viterbe, mais la jeune fille ne manifestait aucune inclinaison
pour
la vie de clôture. Bien au contraire, elle aimait les fêtes, où elle
pouvait donner libre cours à sa beauté personnelle et à son
élégance.
Le papa, préoccupé par
ces tendances mondaines, eut l'idée de l'enfermer au couvent, avec
sa sœur clarisse. Dans ces conditions, on se serait cru immergé dans
un de ces drames habituels de la "religieuse forcée" et l'on
pourrait craindre que notre moniale de Viterbe devienne la sœur de
la fameuse Religieuse de Monza.
En entrant au couvent,
la jeune Clarice se choisit un joli nom de fleur et s'appela sœur
Giacinta (Jacinthe). Elle n'en fit pas une tragédie, mais elle ne
promit pas non plus de changer vraiment son style de vie.
“Me voici
religieuse, dit-elle à son père la première fois que celui-ci lui
rendit visite au parloir, mais j'ai bien l'intention de vivre selon
ma condition sociale”.
Elle exigea une chambre
pour elle toute seule, avec des meubles de luxe. Elle eut besoin de
repas spéciaux, de récréations certes honnêtes, mais pas du tout
dignes du cloître. Pendant dix ans, elle vécut dans le monastère
comme une jeune fille noble ; bonne, mais pas ascétique ; pieuse,
mais pas mystique. Et voilà qu'un jour elle ressentit une petite
indisposition. On lui envoya le confesseur dans sa chambre. Le
religieux, voyant un tel luxe, refusa d'entendre la confession de
cette religieuse mondaine. “Le Paradis, lui dit-il, n'est
pas fait pour les orgueilleuses et les vaniteuses”.
“Et alors, répliqua
la jeune religieuse, on m'aurait envoyée au couvent pour ma
damnation ?”
“Vous devez changer
de comportement, dit le religieux, et réparer le mauvais
exemple que vous avez donné à vos Consœurs”.
Blessée par ces
paroles, Sœur Giacinta versa des larmes abondantes. Puis, elle pris
à la lettre ce que lui avait dit le religieux. Elle voulut réparer
le mauvais exemple, en devenant non seulement une religieuse
parfaite, mais aussi une sainte Clarisse.
Son orgueil fit place à
la patience, l'ambition à l'humilité. Sa dévotion devint vive et
fervente. Sa charité, pleine de délicatesse infiniment douce, se
déversa non seulement sur les Consœurs, mais aussi sur la population
de Viterbe, qui reçut des secours de la Sœur Giacinta en toute
circonstance.
C'est elle qui institua
la dévotion des Quarante heures (ndt : Adoration du Saint
Sacrement), durant les trois derniers jours du carnaval, et ce pour
invoquer la grâce divine sur toutes les créatures déviées par les
divertissements, comme elle l'avait été précédemment, elle qui
finalement avait trouvé sa pleine signification à sa vie et la joie
parfaite de son existence.
Autour de Sœur Giacinta
fleurirent, outre les fleurs de la charité, celles du miracle. Elle
fut favorisée du don de prophétie. A Viterbe, la cité de sainte
Rose, notre sœur devint "Sainte Giacinta", et à sa mort, en 1640,
toutes les cloches de la ville sonnèrent à toute volée, et tous les
cœurs furent remplis d'émotion à l'idée de la naissance au ciel de
cette nouvelle fleur de sainteté. |