Hommebon de Crémone
Commerçant à Crémone, Saint
† 1197

Saint Hommebon était fils d'un marchand de Crémone, en Italie. Le nom de sa famille était Tucinge. Celui de Homobonus ou de Hommebon qu'il reçut au baptême, présageait ce qu'il devait être un jour. Destiné au commerce, il eut une éducation conforme à cette profession ; il trouva dans les instructions et les exemples de son père, des motifs de probité , de religion et de vertu. Dès son enfance, il montrait une grande horreur pour l'apparence même de l'injustice, et il aurait mieux aimé perdre toute sa fortune, que de commettre le moindre péché. Il voyait dans son état une occupation que Dieu lui avait donnée ; il en remplissait les devoirs par obéissance à la volonté du Ciel, par justice pour lui-même , pour sa famille et pour la société dont il était membre. Ses parents lui ayant proposé de se marier, il leur obéit, et s'unit à une femme vertueuse et capable de l'aider dans le gouvernement de sa maison. La régularité de tous ceux qui la composaient, était une preuve de la vigilance et de la sainteté du maître.

Ce fut par ces différents moyens que le serviteur de Dieu se sanctifia dans sa profession. Il ne laissait échapper aucune occasion de pratiquer toutes les vertus chrétiennes dans un degré héroïque. Les contradictions qu'il avait à essuyer, ne troublaient point la tranquillité de son âme ; il les supportait avec douceur et avec humilité. Il ne pondait aux injures que par le silence, ou des représentations pleines de bonté, auxquelles on ne résistait point. II était si parfaitement mort à lui-même, qu'on disait dans Crémone qu'il était né sans passion.

Sa charité envers les pauvres ne connaissait point, pour ainsi dire, de bornes. Après la mort de son père, qui lui laissa des biens considérables, il augmenta encore ses aumônes. Il allait chercher les pauvres dans leurs cabanes, et en même temps qu'il les soulageait dans leurs misères, il les exhortait à se repentir de leurs fautes , et à mener une vie plus chrétienne. Sa femme lui faisait quelquefois des reproches sur ce que par ses aumônes excessives il appauvrissait sa famille ; mais il lui répondait avec douceur, que la meilleure manière de placer son argent, était de le donner aux pauvres, qu'on lui faisait par-là produire le centuple, comme Jésus-Christ lui-même l'avait promis. On lit dans l'auteur de sa vie, que ses immenses charités furent souvent accompagnées de miracles, et que Dieu lui accorda le don de multiplier ce qu'il avait destiné au soulagement des malheureux.

Il joignait à la pratique de l'aumône celle de l'abstinence et de la mortification. Il savait allier les devoirs de son état à l'exercice de la prière. Il y donnait un temps considérable, et lorsqu'il paraissait distrait par les occupations extérieures, il unissait son âme à Dieu par des aspirations fréquentes ; en sorte que tous les lieux où il se trouvait, étaient pour lui des lieux d'oraison. Tous les jours il assistait dans l'église de Saint-Gilles à matines, qui se disaient à minuit, et il ne se retirait que le lendemain matin après la grand'messe. Sa ferveur était si exemplaire, surtout pendant le saint Sacrifice , que tous ceux qui le voyaient, se sentaient pénétrés de la plus vive dévotion. Il restait quelque temps prosterné devant un crucifix, en attendant que le prêtre fût arrivé à l'autel. Ses exemples et ses discours convertirent un grand nombre de pécheurs. Il consacrait uniquement a la piété les Dimanches et les fêtes, et il était en prières lorsque Dieu l'appela pour récompenser ses' vertus.

Le 13 Novembre 1197, il assista à matines, suivant sa coutume, et resta à genoux devant le crucifix, jusqu'à ce que le prêtre commençât la messe. Au Gloria in excelsis, il étendit les bras en forme de croix. Peu de temps après il tomba le visage contre terre. Ceux qui le virent en cet état, crurent qu'il s'y était mis par dévotion. Mais quand on s'aperçut qu'il ne se levait point à l'évangile, on s'approcha de lui, et on remarqua qu'il ne vivait plus.

Sicard, évêque de Crémone, après avoir constaté l'héroïsme de ses vertus et la certitude de ses miracles, se rendit à Rome avec plusieurs personnes respectables pour solliciter sa canonisation. Le Pape Innocent III le mit au nombre des Saints, et publia sa bulle en 1198. Le corps du serviteur de Dieu fut levé de terre en 1356, et transféré dans la cathédrale de Crémone. Mais son chef est resté dans l'église de Saint-Gilles.

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Les facultés et les besoins de l'homme prouvent qu'il est né pour le travail. La société d'ailleurs, dont il est membre, lui en fait un devoir. Il ne serait pas juste qu'en ne contribuant en rien aux charges communes, il profilât du travail des autres. Une vie d'amusements et de plaisirs est donc indigne d'une créature raisonnable, à plus forte raison d'un chrétien. Que l'on examine ceux qui n'ont point d'occupation sérieuse, et l'on verra que la vie même est un fardeau pour eux. Il faut de l'exercice à l'âme naturellement active, et nul homme ne peut être heureux s'il ne sait se faire un genre d'occupation. Mais ces réflexions ont encore plus de force, quand on passe de l'ordre physique à l'ordre moral. Observons cependant que les professions qui portent au péché, sont toujours défendues ; mais ,les autres doivent être estimées à proportion de l'avantage qui en revient à la société, et des facilités qu'on y trouve pour pratiquer la vertu. On peut les sanctifier toutes, en les rapportant à Dieu, qui est la grande fin de toutes les choses créées. Chaque profession entre dans le plan général de la Providence, et c'est se rendre coupable , que de n'en pas remplir les devoirs. Il est vrai que les arts mécaniques ne tendent point de leur nature à perfectionner la raison, ni à produire la vertu ; mais ils deviennent méritoires pour tous ceux qui les ennoblissent par des principes de religion, par la pratique des vertus chrétiennes. Au reste, ces vertus sont le fruit de la prière, de la méditation de la loi sainte el de la vigilance sur soi-même. Nous devons donc réserver toujours des moments pour ces pieux exercices, et leur donner même la préférence, s'il arrivait qu'ils fussent incompatibles avec quelques-uns des exercices de la vie ordinaire. Ces moments ne nous manqueront jamais : nous en trouvons bien pour nos amusements et nos plaisirs. Il faut que nous devenions des Saints, et ce n'est que par là que nous le deviendrons.

SOURCE : Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux Saints… – Traduction : Jean-François Godescard.

 

 

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