EXTRAIT BIOGRAPHIQUE
Saint Jean de Dieu naquit en Portugal, de parents
pauvres, mais chrétiens. Sa jeunesse,
à
la différence de celle de la plupart des Saints, fut très orageuse. Âgé de huit
ans, il suivit, à l'insu de ses parents, les traces d'un voyageur qui se rendait
à Madrid; mais il se perdit et fut réduit à se faire le valet d'un berger. Plus
tard, il s'enrôla dans l'armée de Charles-Quint et subit l'entraînement et le
mauvais exemple. Il ne fallut pas moins qu'un coup de la Providence pour
l'arracher au péril.
Après quelques nouvelles aventures, il apprit la
nouvelle de la mort de sa mère et résolut de se convertir. Il tint parole, et
dès lors il passa la plus grande partie de ses jours et de ses nuits dans la
prière et la pénitence, exerçant à toute occasion, malheureux, lui-même, la
charité envers les malheureux. Ce ne fut point là toutefois le terme de ses
pérégrinations incertaines; il ne trouva sa voie que plus tard, à l'âge de
quarante-cinq ans.
Il s'établit à Grenade, s'y livra à quelque
commerce et employa ses économies et les dons de la charité à la fondation d'un
hôpital qui prit bientôt de prodigieux accroissements. On vit bien alors que cet
homme, traité partout d'abord comme un fou, était un saint.
Pour procurer des aliments à ses nombreux
malades, Jean, une hotte sur le dos et une marmite à chaque bras, parcourait les
rues de Grenade en criant: "Mes frères, pour l'amour de Dieu, faites-vous du
bien à vous-mêmes." Sa sollicitude s'étendait à tous les malheureux qu'il
rencontrait; il se dépouillait de tout pour les couvrir et leur abandonnait tout
ce qu'il avait, confiant en la Providence, qui ne lui manqua jamais.
Mais Jean, appelé par la voix populaire Jean de
Dieu, ne suffisait pas à son oeuvre; les disciples affluèrent; un nouvel Ordre
se fondait, qui prit le nom de Frères Hospitaliers de Saint-Jean-de-Dieu, et
s'est répandu en l'Europe entière. Peu de Saints ont atteint un pareil esprit de
mortification, d'humilité et de mépris de soi-même.
Un jour, la Mère de Dieu lui apparut, tenant en
mains une couronne d'épines, et lui dit :
« Jean, c'est par les épines que tu dois mériter
la couronne du Ciel. — Je ne veux, répondit-il, cueillir d'autres fleurs que les
épines de la Croix ; ces épines sont mes roses ».
Une autre fois, un pauvre qu'il soignait disparut
en lui disant : « Tout ce que tu fais aux pauvres, c'est à Moi que tu le fais ».
Quand on lit l'histoire émouvante de telles vies, on ne peut s'empêcher de
s'écrier: Dieu est admirable dans Ses Saints !
Abbé L. Jaud, Vie des Saints
pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950.
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