Nul doute que beaucoup connaissent assez bien lhistoire de France pour savoir qui fut Jeanne dArc. On ne répétera sans doute pas tout ici, mais on va tâcher de résumer les traits importants décrivant la sainteté de notre héroïne.
Elle naquit vers 1412 en Champagne à Greux-Domremy. Maintenant Domremy est en Lorraine. Jehanne avait trois frères et une sur. Son père était Jacques dArc et sa mère Ysabelle Romée.
Au Bois-Chenu, quon aperçoit de Domremy, des prophéties locales, auxquelles Jehanne affirma navoir jamais cru, annonçaient quune pucelle venant de ce bois ferait des merveilles. Toute jeune, Jehanne était pour le parti armagnac, et dit quelle eût voulu quon tranchât la tête au seul habitant de Domremy qui fût Bourguignon, si çeût été le bon plaisir de Dieu.
A treize ans, elle eut une Voix de Dieu pour laider à se gouverner : elle avait jeûné la veille, et voua alors sa virginité tant quil plairait à Dieu. Dès lors, la Voix ne cessa pour ainsi dire de la harceler : Sois bonne enfant et Dieu taidera - Va au secours du roi de France
— Il te faut aller en France. Cette voix était accompagnée de la vision de saint Michel, de sainte Catherine et de sainte Marguerite.
Au début, Jehanne ne dit rien à personne. Cest en 1428 que la Voix fut plus pressante : Va vers Robert de Baudricourt, en la ville de Vaucouleurs, afin quil te donne des gens pour taccompagner. Premier échec ; début 1429, le curé de Vaucouleurs vient même lexorciser, à quoi elle proteste : Cest mal fait à lui, dit-elle, car mayant entendue en confession il me pouvait bien connaître.
Ayant annoncé à Baudricourt la défaite du roi à Harengs, survenue la veille, elle obtint alors son escorte. Quand on lui demande Quand voulez-vous partir, elle répond cette phrase qui la dépeint toute : A cette heure mieux que demain ; demain mieux quaprès.
Le 23 février 1429, vêtue dhabits masculins, les cheveux coupés en rond à la manière des jeunes garçons, Jehanne part avec Jean de Metz, Bertrand de Poulengy et Jean de Honnecourt. Cest le début de la longue chevauchée.
Mars 1429 : à Chinon, Jehanne reconnaît le dauphin : En nom Dieu, gentil prince, cest vous et non autre. A Poitiers, où elle est longuement examinée, elle répond avec hardiesse et parfois avec ironie : En nom Dieu, les gens darmes batailleront et Dieu donnera la victoire.
— Avez-vous du papier et de lencre ? Écrivez : Vous, Suffort, Classidas et la Poule, je vous somme de par le roi des Cieux que vous vous en alliez en Angleterre.
— Il y a aux livres de Notre-Seigneur plus quaux vôtres.
Blois en avril. A Orléans, les Anglais doivent lever le siège, vaincus par lentrain de Jehanne qui a bousculé conseils, capitaines et hommes de guerre. Jargeau, Tours, Loches, Beaugency, Patay, Auxerre, Troyes, Châlons, Reims enfin où est sacré le roi, le 17 juillet. Puis Soissons, Château-Thierry, Coulommiers, Crécy-en-Brie, Provins, Saint-Denis le 26 août. Elle est blessée, et le roi ordonne le repli sur la Loire, au grand désespoir de Jehanne que ses Voix ne conseillent plus en faits de guerre.
Le 29 décembre 1429, Jehanne et sa famille sont anoblies par le roi Charles : la famille du Lys ne disparaîtra quun siècle plus tard.
Partie guerroyer à Melun, elle reçoit révélation quelle sera faite prisonnière avant la Saint-Jean (24 juin). A Lagny, à sa prière, un enfant reprend vie pour recevoir le baptême. Cest le 23 mai quelle est faite prisonnière à Compiègne. Le duc Jean de Luxembourg la visite avec dédain, et lui fait des outrages que le chroniqueur nose transcrire. Le calvaire commence. Les Voix linvitent à prendre tout en gré, car elle sen ira en royaume de paradis. A la centaine denfants qui lentoure à Compiègne, elle dit : Mes enfants et chers amis, je vous signifie quon ma vendue et trahie ! Et que de bref je serai livrée à mort. Ainsi vous supplie que vous priiez Dieu pour moi, car jamais je naurai plus de puissance de faire service au roi ni au royaume de France.
On sait que Jehanne nosait se servir de son épée pour tuer, par délicatesse intime, quoiquelle entraînât valeureusement ses soldats à la victoire. Mais cette épée, elle la brisa sur le dos dune prostituée qui était venue narguer les soldats dans le campement.
Jehanne était fervente, toute donnée à ses Voix. Elle restait parfois des heures, des nuits entières dans la prière doraison, sans multiplier les formules, mais en contemplant la volonté divine. Elle se confessait tous les deux jours, elle communiait deux fois la semaine. Jaime mieux mourir que de commettre un péché mortel.
Jehanne veut que soit accomplie la justice : elle ordonne que soit exécuté lenvoyé des Anglais, quand elle apprend que le sien a été mis à mort par lennemi contre toutes les lois de la guerre. Elle sait pardonner : un certain Glasdas lavait insultée de la dernière façon, elle lui répondit : Glasdas, Glasdas, rends-ti, rends-ti, au Rèy du Ciel. Tu mas appelée
vilaine, mais grand pitié jai de ton âme et des tiens. Après la défaite, elle fait rechercher parmi les noyés le corps de Glasdas pour le faire inhumer.
Une fois prisonnière, on la traîne de tous côtés. Jean de Luxembourg la tient trois jours au château de Clairoix, puis on lemmène à celui de Beaulieu, de là à Beaurevoir. Lévêque de Beauvais la réclame alors, sous caution de dix mille francs-or. Fin septembre, à Arras ; mi-novembre à Rouen par le littoral : Derugy, Crotoy, Saint-Valery-sur-Somme, Eu et Dieppe. Au château de Bouvreuil, elle est liée et entravée dans une cage de fer, puis, après plusieurs semaines, attachée à une poutre par une chaîne, sous la garde de cinq hommes darmes grossiers. On reprochera à Jehanne de refuser de quitter ses habits dhomme ; elle les quitta un moment, mais les reprit, expliquant à lévêque quétant avec des soldats, il lui vaut mieux être ainsi, dautant quon la trompée ne la mettant pas hors des fers, ni ne lui donnant messe ou sacrements : elle est alors accusée comme relapse.
Le procès se déroulera en plusieurs étapes, de janvier à mai, sachevant après maintes péripéties, par la condamnation à être brûlée vive, comme hérétique et relapse.
Six fois, dans la
fumée, on l’entend crier : “Jésus !”
Dans les cendres, on retrouva intacts le cur et les entrailles, qui furent jetés à la Seine. Au XVIe siècle, il était question de quelques vêtements de Jehanne, quon a maintenant perdus.
En 1454, la mère et les frères de Jehanne réclamèrent la révision du procès, qui fut cassé en 1456. Jehanne est béatifiée en 1909, canonisée en 1920.
Cinq siècles après la mort de Jehanne dArc, Français et Anglais se retrouvèrent côte à côte à Orléans en 1929 lors des célébrations traditionnelles, les évêques anglais étant venus là avec lambassadeur dAngleterre, pour fêter notre Héroïne. |