Landry de Paris
Évêque, Saint
+ ca. 661

Entre les prélats de notre France qui florissaient le plus sur la fin du règne de Clovis II, saint Landry, évêque de Paris, fut un des plus signalés pour ses actions vertueuses. Il était François de nation : on ne parle point de sa naissance. Dès son jeune âge, il s'adonna tellement à la vertu, qu'il pouvait servir à tous d'un rare exemple de perfection. Notre-Seigneur, qui l'avait choisi pour servir de lumière à plusieurs, l'élira au siège épiscopal de Paris, par l'élection qu'en fit le clergé, l'an de Notre-Seigneur 630, au temps de Clovis, roi de France, fils de Dagobert et de Sichilde.

Le mérite de sa très-sainte vie le rendit plus illustre que l'antiquité ou la noblesse de sa race, puisque l'histoire a remarqué l'un et non pas l'autre. Il se comporta dignement en sa charge, s'employant assidûment en la prédication, et en la pratique des actions héroïques et vertueuses. Il avait un soin particulier de soulager les pauvres, de retirer les pèlerins, de marier les pauvres filles, d'assister les malades et

de s'employer à toutes sortes d'œuvres charitables, avec tant de ferveur et d'affection, que pour ses pieuses et grandes libéralités, il fut appelé prodigue par les mondains.

Ce fut lui qui fit premièrement construire l'hôtel-Dieu de Paris, où de son propre revenu il nourrissait les pauvres malades, et ne se contentait pas d'accomplir ce conseil évangélique : Donne à tout homme qui te demande : mais il prévenait même et cherchait les indigents et les nécessiteux, pour les-secourir. Enfin il devenait lui-même indigent pour faire du bien et subvenir aux indigents ; tant était grand le feu de sa charité, suivant en cela de bien près les vestiges du Pasteur des pasteurs. D'où vient qu'il est représenté ordinairement comme un jeune homme tenant entre ses mains une corbeille remplie de pains, pour marque de son aumône continuelle.

Ainsi ce saint personnage montrait le chemin du ciel, prêchait les œuvres de charité, et était une lampe brillante par ses prédications, et ardente par ses charitables actions. C'est ce qui a donné sujet au moine Mareulphe, grave et ancien auteur, qui vivait de son temps, en ses deux livres qu'il a écrits des Formules par son commandement, et qu'il lui dédia, de l'appeler très-heureux en mérites, et digne de tout honneur et louange apostoliques.

Tant de perfections si relevées lui acquirent une si grande réputation dans tout ce royaume, qu'on le jugea mériter la charge et le gouvernement de tout un peuple. Aussi véritablement le même auteur dit qu'il fut fait chancelier de France, maniant les affaires avec une intégrité et une fidélité admirables, ne visant seulement qu'au bien et au soulagement du public. Saint Ouen, archevêque de Rouen, qui vivait en même temps que lui, avait aussi exercé cette charge avant lui. Il avait une singulière dévotion à saint Denis, apôtre de la France et le premier évêque de Taris, et aux saints martyrs Rustic et Éleuthère, ses compagnons, dont les corps reposent en l'église de l'abbaye de Saint-Denis en France. De sorte qu'afin que les religieux de l'abbaye se conservassent mieux et plus facilement à la discipline monastique, en la pureté et en la tranquillité, il exempta l'abbaye de la juridiction de l'évêché de Paris, à la requête même du roi Clovis II, l'an 662, le seizième de son règne, laquelle exemption il fit confirmer, ratifier et soussigner à vingt-quatre évêques assemblés à Clichy : entre lesquels était saint Ouen, archevêque de Rouen, et saint Éloi, évêque de Noyon. Elle fut écrite sur une écorce de bois, qui se conserve soigneusement en cette abbaye. Ce privilège a aussi depuis été confirmé par l'autorité du Saint- Siège apostolique. C'est ainsi que le rapporte Doublet, en son Histoire de l'abbaye de Saint-Denis.

Saint Landry donc, après avoir gouverné l'Église de Paris avec autant de soin, de zèle et d'affection qu'on pouvait désirer d'un saint prélat, rendit son âme à Dieu, et s'en alla recevoir la récompense de ses travaux au ciel, le 10 juin. Son corps fut inhumé en l'église de Saint-Germain l'Auxerrois, où, par son invocation et par l'attouchement de sou suaire et d'une de ses dents, il s'est fait plusieurs miracles. Plusieurs infirmes atteints de maladies incurables, et abandonnés des médecins, en ont été miraculeusement guéris ; comme un nommé Raoul, natif de Gonesse, devenu lépreux; un soldat nommé Odon, natif de Villejuif, paralytique ; une femme nommée Aveline, tourmentée d'une fièvre et d'hydropisie; un autre homme encore de Bagnolet, nommé Étienne ; un prêtre appelé Hervé, demeurant en l'hôpital des lépreux situé près de Montmartre; et le neveu de l'évêque de Paris, Maurice de Soliac, très docte prélat et bien versé en la médecine, appelé Jean, tous trois affligés de l'esquinancie.

Ce Jean de Soliac ayant été porté en l'église de Saint-Germain l'Auxerrois, le suaire de saint Landry avec sa dent lui furent imposés, et il les toucha avec respect. Il s'en retourna ensuite avec une grande confiance d'en recevoir du soulagement. Il ne fut pas plutôt arrivé en la maison épiscopale, que son esquinancie se dissipa. Il fut guéri en présence de l'évêque Maurice son oncle, qui, sachant bien que c'était une chose honorable de manifester les œuvres que Dieu fait par l'entremise de ses saints, publia lui-même ce miracle au peuple en ses prédications, et en déclara tout le succès au Pape Alexandre III, lequel était pour lors en cette ville de Paris.

De plus, en mémoire de ce miracle, ce pieux Prélat, avec le clergé de Paris, leva Je corps de saint Landry de son tombeau, et le mit en une chasse artistement travaillée, bien qu'elle ne fût que de simple bois, l'an 1171, le trente-quatrième du règne du roi Louis VII.

Mais en l'an 1408, le seizième jour de septembre, cette châsse, qui était à demi pourrie, fut ouverte par le Révérend Père en Dieu messire Pierre d'Orgemont, également évêque de Paris, et ses sacrés ossements furent mis dans une autre chasse d'argent doré, excepté deux os, l'un du doigt et l'autre du col, qui furent livrés à MM. Jean Fleury, secrétaire du roi, et Jean le Bugule procureur général en la cour de Parlement, comme trésoriers de la paroisse de Saint-Landry, où ils furent solennellement portés avec cierges et torches ardentes. Cette nouvelle châsse d'argent doré fut élevée en l'église de Saint-Germain l'Auxerrois, sur un pilier de maçonnerie derrière le grand autel.

Il arriva un jour que le feu ayant pris à une certaine maison, au lieu où est à présent le grand Châtelet de Paris, appelé pour lors la porte Royale, il s'alluma avec une telle violence par la force du vent, qui était très grand, qu'il menaçait la ville d'un incendie général. Cependant, voyant que quelques remèdes qu'on y pût apporter, il ne laissait pas de s'accroître, et que déjà plusieurs maisons étaient embrasées et consumées, ou eut recours au suaire de saint Landry, qui était gardé dans l'église de Saint-Germain : il fut promptement apporté par le doyen de cette église, nommé Hervé. Cette précieuse relique ayant donc été attachée au bout d'une perche, et opposée aux Gammes les plus violentes, aussitôt le feu commença à se retirer et à diminuer, et s'éteignit peu à peu, sans faire un plus grand dommage. Chose vraiment miraculeuse, que ce qui n'a point d'activité la fasse perdre au feu qui est si actif; et que ce qui est propre pour le fomenter et l'entretenir, vienne à l'éteindre.

Comme un des paroissiens de l'église Saint-Germain l'Auxerrois violait la sainteté du lieu, en jouant aux dés avec quelques autres, jurant et y faisant dos festins pendant la nuit, saint Landry lui apparut et lui dit : Ne savez-vous pas que Notre-Seigneur a dit :Ma maison est la maison d'oraison : pourquoi donc avez-vous été si téméraire que de profaner ce saint lieu ? Et il le fouetta si rudement, que les marques lui demeurèrent longtemps imprimées sur la peau. Ce qui nous apprend avec quel respect nous devons être en l'église, puisque Dieu et ses saints punissent si rigoureusement les irrévérences qui s'y commettent.

Un soldat, s'étant blessé le genou d'une épine qu'il s'y était enfoncée, en ressentait de très-grandes douleurs ; de sorte que faute de l'avoir soigneusement pansée il s'y était fait un dangereux apostème : toutefois, s'étant fait porter sur le tombeau de saint Landry, il en fut guéri par son intercession, en appliquant le suaire du saint sur son mal.

Les Parisiens ont une particulière dévotion à saint Landry, pour les insignes bienfaits qu'ils ont reçus de Dieu par sa faveur; eu reconnaissance desquels ils lui ont fait bâtir une belle église au milieu de leur ville : elle avait été depuis érigée en paroisse, mais elle fut démolie en 1828.

Saint Landry fut le vingt-huitième évêque de Paris, le huitième après saint Germain.

Sa fête se célèbre le 10 de juin. Le docteur Molan en fait aussi mention en ce jour dans ses Additions sur Usuard. Doublet, religieux de l'abbaye de Saint-Denis, a écrit la vie de saint Landry. Plusieurs autres auteurs, un ancien manuscrit qui est en l'église de Saint-Germain l'Auxerrois, Marculphe et Aymon Doublet en divers lieux de son Histoire, Dubreuil en ses Antiquités de Paris, et M. Robert en son Gallia christiana, eu parlent fort honorablement.

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