
Siéger à droite et à gauche de Jésus
Jésus prit à part les douze apôtres pour leur annoncer sa
Passion devenue imminente : “Voici que nous montons à Jérusalem; le Fils de
l’Homme sera livré aux grands prêtres et aux scribes. Ils le condamneront à
mort...”
Autant que l’on puisse en juger, les apôtres n’avaient rien
compris. Pire, il semble même que leurs préjugés et leurs espoirs terrestres et
humains s’étaient encore renforcés car, peu de temps après, “la Mère des fils
de Zébédée s’approcha de Jésus, avec eux, pour lui faire une demande...
– Voilà mes deux fils : ordonne qu’ils siègent, l’un à ta
droite, l’autre à ta gauche, dans ton Royaume.
Jésus répondit :
– Vous ne savez pas ce que vous demandez. Non
vraiment, ils ne savaient pas!
– Pouvez-vous boire à la coupe que je vais boire?
insista Jésus.
– Nous le pouvons, répondirent les deux frères sans
même savoir ce qu’ils disaient, ni de quoi ils parlaient. Jésus les regarda
longuement:
– Ma coupe, vous y boirez; quant à siéger à ma droite et à
ma gauche, il ne m’appartient pas de l’accorder; il y a ceux pour qui ces places
ont été préparées par mon Père.” (Mt. XX, 20-28)
Le Royaume de Jésus n’est pas de ce monde. Jamais Il ne
régnera sur notre terre comme les rois ou les empereurs du monde. Son Royaume
n’est pas de ce monde, et Pilate l’aura bien compris quand, répondant à
l’accusation des docteurs de la Loi, il dira : “Mais son royaume n’est pas de
ce monde!”
C’est vrai! En entendant Jésus répondre aux fils de Zébédée,
on ne peut pas ne pas penser au jour de son couronnement, à ce jour terrible de
sa Passion, de son crucifiement et de sa mort. Élevé de terre pour attirer tout
à Lui, Il aura auprès de Lui, l’un à ta droite, l’autre à ta gauche, ceux à qui
le Père avait, de toute éternité, destiné ces places: deux larrons, deux
brigands!
Jésus nous Te contemplons... C’est le jour de ton
couronnement: Tu vas mourir dans quelques instants et tes deux principaux
ministres sont là, l’un à ta droite, et l’autre à ta gauche... Ce sont des
bandits de grand chemin, condamnés à cause de leurs forfaits. Ce sont des
pécheurs notoires dont les hommes honnêtes doivent se débarrasser au plus
vite... Mais ces deux bandits, c’est toute l’humanité: car le jour de ton
Couronnement sur la Croix, le jour de ta Gloire, Jésus, c’est l’humanité entière
que le Père a voulu mettre près de Toi, à ta droite et à ta gauche.
Jésus, nous contemplons le Golgotha, en ce jour de ton
couronnement: trois condamnés sont en train de mourir. Toi, Jésus, Tu es là, sur
la Croix qui va devenir ta Gloire. À ta droite, pleure celui qui deviendra le
Bon Larron: c’est toute l’humanité pécheresse qui se repent, qui revient à Dieu,
qui comprend soudain l’énormité de ses fautes, de ses erreurs, de son péché, et
qui demande pardon. Cette humanité-là, c’est celle que Tu sauves, Jésus, sur la
Croix, aujourd’hui, jour de ton couronnement. Cette humanité-là, c’est celle à
qui Tu diras, chaque jour : “Aujourd’hui, Tu seras avec Moi, dans le
Paradis!”
Jésus, nous Te contemplons sur la Croix, le jour de la Gloire
de ton Couronnement. Déjà Tu accueilles l’humanité égarée qui retrouve le chemin
de Vie, qui regrette ses fautes, et qui implore ton pardon. Mais à ta gauche,
Jésus, il y a l’autre humanité, celle à qui Tu seras obligé de dire, lors de la
Résurrection des morts, et du Jugement dernier : “Allez-vous-en, maudits, au
feu éternel!” Certes, on ne sait pas ce qui se passe au plus profond d’un
cœur humain au moment où son âme va quitter son corps, mais on ne doit pas rayer
d’un trait les paroles de Jésus qui affirme que l’Enfer existe. L’Enfer existe,
et il y a des gens qui délibérément choisissent d’être éternellement séparés de
Dieu.
On ne peut pas rayer les paroles de Jésus, comme trop de nos
contemporains le font aujourd’hui. Le mauvais larron, qui siège à la gauche de
Jésus, le jour de son Couronnement, en est la preuve certaine: c’est l’ivraie
semée par l’Ennemi, l’ivraie qu’il faut laisser croître avec le bon grain, mais
qui sera jetée au feu le jour du jugement.
Contemplons encore le Golgotha, le Jour du Couronnement de
Jésus... D’un côté le mal, le mal absolu qui, en pleine connaissance, avec une
totale volonté et détermination, refuse Dieu et cherche, par tous les moyens, à
entraîner les autres. De l’autre côté, ce sont les pauvres bougres, pas
forcément méchants, mais faibles, un peu lâches, pas très intelligents, qui se
laissent entraîner, qui veulent voir ou faire des expériences... Ils vont
parfois loin dans le mal, mais le jour où ils comprennent leurs sottises, les
désastres dont leur faiblesse et leurs misères ont été la cause, alors, rentrant
en eux-mêmes, ils se retournent vers le Grand Crucifié et s’écrient :
“Souviens-Toi de moi quand Tu seras dans ton Royaume.”
Sur le Golgotha, la pauvreté de Jésus est extrême, mais c’est
sa richesse. Cependant, aux yeux des hommes, le Golgotha, c’est l’horreur
absolue. On comprend qu’il ait dit à Jacques et à Jean: “Vous ne savez pas ce
que vous demandez.” Aujourd’hui, ni Jacques, ni Jean ne sont capables de
boire à la coupe. Plus tard, oui, mais ils ne le savent pas encore.
Jésus, notre Sauveur, environ dix-huit heures avant son
Couronnement sur la Croix, institua l’Eucharistie pour rester avec nous jusqu’à
la fin des temps. Son Cœur Eucharistique savait quelle serait l’étendue de son
humiliation sur la Croix: son Trône de Gloire. Son Cœur Eucharistique savait
quelle serait la pauvreté absolue qu’Il revêtirait au moment de la manifestation
de sa Gloire. Mais le Cœur de Jésus, son Cœur qui ne voulait pas nous laisser
orphelins, son Cœur en action de grâce nous donna la seule richesse qui lui
restait alors, mais une richesse infinie: son Corps pour nourriture, et son Sang
pour breuvage.
Merci, Jacques et Jean, d’avoir permis à Jésus de nous
montrer le Trône de sa gloire, et de nous faire contempler son Cœur
Eucharistique, pauvre et humble. Merci! Jacques et Jean, un jour vous boirez la
coupe de Jésus, mais vous serez bien plus que des ministres humains. Vous ne
siégerez ni à droite ni à gauche de Jésus dans son Royaume: mais vous aurez bien
davantage puisque vous aurez partagé son martyre et que vous suivrez l’Agneau de
Dieu partout où Il ira.


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