Deuxième partie

Méditations sur la Passion de Jésus
pendant sa vie publique

20
Jacques et Jean

Siéger à droite et à gauche de Jésus

 

Jésus prit à part les douze apôtres pour leur annoncer sa Passion devenue imminente : “Voici que nous montons à Jérusalem; le Fils de l’Homme sera livré aux grands prêtres et aux scribes. Ils le condamneront à mort...”

Autant que l’on puisse en juger, les apôtres n’avaient rien compris. Pire, il semble même que leurs préjugés et leurs espoirs terrestres et humains s’étaient encore renforcés car, peu de temps après, “la Mère des fils de Zébédée s’approcha de Jésus, avec eux, pour lui faire une demande...

– Voilà mes deux fils : ordonne qu’ils siègent, l’un à ta droite, l’autre à ta gauche, dans ton Royaume.

Jésus répondit :

– Vous ne savez pas ce que vous demandez. Non vraiment, ils ne savaient pas!

– Pouvez-vous boire à la coupe que je vais boire? insista Jésus.

– Nous le pouvons, répondirent les deux frères sans même savoir ce qu’ils disaient, ni de quoi ils parlaient. Jésus les regarda longuement:

– Ma coupe, vous y boirez; quant à siéger à ma droite et à ma gauche, il ne m’appartient pas de l’accorder; il y a ceux pour qui ces places ont été préparées par mon Père.” (Mt. XX, 20-28)

Le Royaume de Jésus n’est pas de ce monde. Jamais Il ne régnera sur notre terre comme les rois ou les empereurs du monde. Son Royaume n’est pas de ce monde, et Pilate l’aura bien compris quand, répondant à l’accusation des docteurs de la Loi, il dira : “Mais son royaume n’est pas de ce monde!”

C’est vrai! En entendant Jésus répondre aux fils de Zébédée, on ne peut pas ne pas penser au jour de son couronnement, à ce jour terrible de sa Passion, de son crucifiement et de sa mort. Élevé de terre pour attirer tout à Lui, Il aura auprès de Lui, l’un à ta droite, l’autre à ta gauche, ceux à qui le Père avait, de toute éternité, destiné ces places: deux larrons, deux brigands!

Jésus nous Te contemplons... C’est le jour de ton couronnement: Tu vas mourir dans quelques instants et tes deux principaux ministres sont là, l’un à ta droite, et l’autre à ta gauche... Ce sont des bandits de grand chemin, condamnés à cause de leurs forfaits. Ce sont des pécheurs notoires dont les hommes honnêtes doivent se débarrasser au plus vite... Mais ces deux bandits, c’est toute l’humanité: car le jour de ton Couronnement sur la Croix, le jour de ta Gloire, Jésus, c’est l’humanité entière que le Père a voulu mettre près de Toi, à ta droite et à ta gauche.

Jésus, nous contemplons le Golgotha, en ce jour de ton couronnement: trois condamnés sont en train de mourir. Toi, Jésus, Tu es là, sur la Croix qui va devenir ta Gloire. À ta droite, pleure celui qui deviendra le Bon Larron: c’est toute l’humanité pécheresse qui se repent, qui revient à Dieu, qui comprend soudain l’énormité de ses fautes, de ses erreurs, de son péché, et qui demande pardon. Cette humanité-là, c’est celle que Tu sauves, Jésus, sur la Croix, aujourd’hui, jour de ton couronnement. Cette humanité-là, c’est celle à qui Tu diras, chaque jour : “Aujourd’hui, Tu seras avec Moi, dans le Paradis!”

Jésus, nous Te contemplons sur la Croix, le jour de la Gloire de ton Couronnement. Déjà Tu accueilles l’humanité égarée qui retrouve le chemin de Vie, qui regrette ses fautes, et qui implore ton pardon. Mais à ta gauche, Jésus, il y a l’autre humanité, celle à qui Tu seras obligé de dire, lors de la Résurrection des morts, et du Jugement dernier : “Allez-vous-en, maudits, au feu éternel!” Certes, on ne sait pas ce qui se passe au plus profond d’un cœur humain au moment où son âme va quitter son corps, mais on ne doit pas rayer d’un trait les paroles de Jésus qui affirme que l’Enfer existe. L’Enfer existe, et il y a des gens qui délibérément choisissent d’être éternellement séparés de Dieu.

On ne peut pas rayer les paroles de Jésus, comme trop de nos contemporains le font aujourd’hui. Le mauvais larron, qui siège à la gauche de Jésus, le jour de son Couronnement, en est la preuve certaine: c’est l’ivraie semée par l’Ennemi, l’ivraie qu’il faut laisser croître avec le bon grain, mais qui sera jetée au feu le jour du jugement.

Contemplons encore le Golgotha, le Jour du Couronnement de Jésus... D’un côté le mal, le mal absolu qui, en pleine connaissance, avec une totale volonté et détermination, refuse Dieu et cherche, par tous les moyens, à entraîner les autres. De l’autre côté, ce sont les pauvres bougres, pas forcément méchants, mais faibles, un peu lâches, pas très intelligents, qui se laissent entraîner, qui veulent voir ou faire des expériences... Ils vont parfois loin dans le mal, mais le jour où ils comprennent leurs sottises, les désastres dont leur faiblesse et leurs misères ont été la cause, alors, rentrant en eux-mêmes, ils se retournent vers le Grand Crucifié et s’écrient : “Souviens-Toi de moi quand Tu seras dans ton Royaume.”  

Sur le Golgotha, la pauvreté de Jésus est extrême, mais c’est sa richesse. Cependant, aux yeux des hommes, le Golgotha, c’est l’horreur absolue. On comprend qu’il ait dit à Jacques et à Jean: “Vous ne savez pas ce que vous demandez.” Aujourd’hui, ni Jacques, ni Jean ne sont capables de boire à la coupe. Plus tard, oui, mais ils ne le savent pas encore.

Jésus, notre Sauveur, environ dix-huit heures avant son Couronnement sur la Croix, institua l’Eucharistie pour rester avec nous jusqu’à la fin des temps. Son Cœur Eucharistique savait quelle serait l’étendue de son humiliation sur la Croix: son Trône de Gloire. Son Cœur Eucharistique savait quelle serait la pauvreté absolue qu’Il revêtirait au moment de la manifestation de sa Gloire. Mais le Cœur de Jésus, son Cœur qui ne voulait pas nous laisser orphelins, son Cœur en action de grâce nous donna la seule richesse qui lui restait alors, mais une richesse infinie: son Corps pour nourriture, et son Sang pour breuvage.

Merci, Jacques et Jean, d’avoir permis à Jésus de nous montrer le Trône de sa gloire, et de nous faire contempler son Cœur Eucharistique, pauvre et humble. Merci! Jacques et Jean, un jour vous boirez la coupe de Jésus, mais vous serez bien plus que des ministres humains. Vous ne siégerez ni à droite ni à gauche de Jésus dans son Royaume: mais vous aurez bien davantage puisque vous aurez partagé son martyre et que vous suivrez l’Agneau de Dieu partout où Il ira.  

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