
Contemplons Jésus dans son cœur. Il est entre neuf et dix
heures du soir, ce jeudi qui deviendra le Jeudi Saint. La Pâque selon la
Tradition juive a été joyeusement célébrée. Puis Jésus a longuement prié
avec ses apôtres en leur faisant, doucement, découvrir le sens caché des
paroles du psalmiste.
Jésus
a fait préparer la table de la Nouvelle Alliance avec du pain et du vin.
Tous les convives se sont installés autour de la table et L’écoutent avec
attention. L’atmosphère est encore lourde d’une prière dont on vient
seulement, avec stupéfaction et inquiétude de découvrir le sens. Pendant
quelques minutes Jésus se tait, et personne n’ose plus troubler sa prière...
À quoi devait penser Jésus, ce soir-là ? Il savait que
c’était son Heure, sa dernière Pâque terrestre, sa première Eucharistie. Il
savait que dans quelques heures, c’est Lui qui serait la victime, c’est Lui
que l’on immolerait, mais dans les pires tortures, et c’est Lui qui
mourrait... dans moins de dix sept heures. C’est Lui Jésus qui serait la
Grande Victime élevée sur la Croix.
À quoi avait dû penser Jésus, au début de la soirée de
fête, en immolant l’agneau pascal? Jésus savait que dans quelques heures, ce
serait Lui que l’on immolerait... Et son être tout entier avait frémi à
cette pensée. Mais Jésus avait tout accepté de la volonté du Père. Il savait
que ce sacrifice de Lui-même était nécessaire pour le salut de l’humanité,
et Il avait dit oui au Père et Lui avait demandé de glorifier son Fils,
puisque c’était pour cette heure qu’Il était venu.
L’Amour entre le Père et le Fils était intact, et bientôt
Jésus le prouverait. Mais pour l’instant, son humanité frémissait. Alors,
par un geste d’une solennité inouïe, Jésus va devancer son offrande au Père,
et faire comprendre aux hommes qu’Il les aime toujours.
L’Agonie de Jésus commence, quand Il invente
l’Eucharistie...
L’Eucharistie, c’est l’Action de grâces parfaite. Jésus
sait que la mort L’attend; dans quelques heures, tout sera accompli. Jésus
connaît les supplices qui Lui sont réservés. Et Il rend grâce au Père ! Son
offrande devient Action de grâces, son Agonie devient Don suprême. Son
Agonie devient son Corps livré et son Sang versé pour le salut des hommes
qu’Il ne laissera pas orphelins.
Jésus anticipe son immolation, et se livre à ses apôtres.
Prenant du pain, Il le bénit, le rompt, et le donne aux disciples en
disant :
– Prenez, et mangez-en tous. Ceci EST mon Corps livré
pour vous.
Puis, prenant la coupe du vin, Il la bénit et la donne
aux apôtres en disant :
– Prenez et buvez-en tous, ceci EST mon sang versé
pour vous... C’est le Sang de la Nouvelle Alliance en mon Sang. Vous ferez
cela en mémoire de Moi.
Le Corps de Jésus, EST déjà livré, et son Sang EST déjà
versé... Les apôtres, écrasés par tant d’événements, incompréhensibles pour
eux, sont restés muets: leur silence est devenu prière. L’Agonie de Jésus
commence.
Alors, pour prouver qu’Il aime le Père, sans rien
expliquer, Jésus dit aux apôtres :
– Sortons d’ici...”
Et Il se dirige directement vers le Jardin des Oliviers,
là où sa terrible Agonie doit se poursuivre...
Entre la Cène de l’Eucharistie et l’Agonie de Gethsémani,
il n’y a pas d’interruption. Le bonheur de la Cène, l’Action de grâce de
l’Eucharistie sont déjà la douleur de l’Agonie, sont déjà la mort du Christ
sur la Croix.
Jésus, voici que nous croyons comprendre qu’il y a une
parfaite continuité entre l’Eucharistie et ton Agonie. Le lien entre
l’Eucharistie (la Cène) et Gethsémani (ton Agonie), puis le Calvaire et le
Golgotha (la mort sur la Croix), c’est le pain et le vin de l’Eucharistie,
c’est ton Corps livré et c’est ton Sang versé.


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