Quatrième partie

Méditations préparatoires à la Grande Passion du Christ

7
Jésus pleure sur Jérusalem
Que de fois J’ai voulu rassembler tes enfants

Jésus et ses disciples approchaient de Jérusalem, où, bientôt, ils célébreraient la Pâque. Du haut de la colline où se trouvait maintenant le petit groupe, le spectacle était éblouissant...

Soudain, les apôtres qui manifestaient bruyamment leur enthousiasme s’arrêtèrent, perplexes, car Jésus pleurait en disant: “Ô Jérusalem, des jours viendront sur toi où tes ennemis t’environneront de tranchées, t’encercleront et te serreront de toutes parts, et t’écraseront, toi et tes enfants, et ne laisseront pas en toi pierre sur pierre, parce que tu n’as pas su reconnaître le temps où je t’ai visitée.” (Lc. XIX, 41-44)

“Ô Jérusalem, toi qui tues les prophètes et lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants comme une poule rassemble ses poussins sous son aile: mais tu n’as pas voulu... En vérité, il ne restera pas de toi pierre sur pierre: tout sera détruit.” (Mt XXIII, 37-39 et XXIV, 2)

Naturellement les apôtres se sont récriés: “Cela n’est pas possible; tout est calme maintenant. Et puis, il faudrait être fou pour détruire une telle richesse, ajoutent-ils en désignant le Temple!” Jésus, hoche la tête en pensant: “Même eux ne veulent pas comprendre, même eux ne veulent pas croire mes paroles!”

Il ne s’est passé que quelques jours depuis que Jésus avait pleuré sur Jérusalem. Mais aujourd’hui on pourrait croire qu’il y a des siècles que Jésus avait parlé ainsi. En effet, depuis quelques heures à peine, tant d’évènements graves se sont produits. Et maintenant...

Maintenant, Jésus, meurtri, blessé atrocement, outragé, méprisé,... monte péniblement le chemin d’infamie réservé aux seuls grands criminels condamnés à mort. Jésus n’est entouré que de gens hargneux, haineux, hurlant à la mort, et de soldats grossiers et sans pitié. Jésus est seul au milieu d’ennemis: où sont donc ses amis d’hier, où sont donc tous ceux qu’Il a guéris, ou nourris, il y a si peu de temps. Ont-ils tous disparu?

Non voici quelques femmes, celles qui L’accompagnaient, Lui et ses apôtres. Elles ne sont pas très rassurées, mais elles avancent vers Lui “en se frappant la poitrine et en se lamentant.” Et Jésus, pourtant presque mourant, et déjà soutenu par Simon de Cyrène,  renouvelle sa récente prédiction, celle qui scandalisa tellement ses disciples: “Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur Moi. Pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur vos enfants! Car voici venir des jours où l’on dira: heureuses les stériles et les entrailles qui n’ont pas enfanté, et les seins qui n’ont pas nourri! Car, si l’on traite ainsi le bois vert, qu’en sera-t-il du bois sec?” (Lc XXIII, 27-32)

Les soldats ont éloigné les femmes qui sanglotent davantage. Jésus, aveuglé par le sang qui sort de ses plaies frontales et ruisselle dans ses yeux, continue sa terrible montée du Calvaire, cruellement guidé dans la voie à suivre par les pointes des glaives des soldats. Bien que soutenu par le Cyrénéen, Jésus tombe encore une fois; son visage est tourné vers le ciel comme s’Il était hanté par une image intérieure. Et soudain des flots de larmes inondent ses joues maculées d’immondices, de crachats et de boue. Qu’a donc vu Jésus, pour être ainsi bouleversé?

De nouvelles et terribles visions se sont formées dans l’Esprit de Jésus: “Oui, Il est digne, Lui l’Agneau de recevoir le Livre et d’en briser les sceaux, car Il a été égorgé et a racheté, pour Dieu, par son sang, des hommes de toutes tribus, langues, peuples et nations.... Oui, Il est digne, Lui l’Agneau de Dieu égorgé!“ (Ap V, 9 et 12) Mais voici qu’apparaissent les chevaux du massacre, de la guerre, de la mort, des Enfers. Et les justes furent sacrifiés, martyrisés, égorgés comme l’Agneau...

Et les étoiles tombèrent du ciel. Et la désolation s’étendit sur la terre. Mais les justes furent sauvés, tous ceux qui étaient vêtus de robes blanches, les robes qu’ils avaient lavées dans le Sang de l’Agneau... l’Agneau qui les mène aux sources des eaux vives. Quand l’Agneau brisa le septième sceau, il se fit un grand silence. Et l’Ange des parfums vint brûler les prières de tous les saints dans un encensoir d’or. Et la fumée monta vers Dieu, comme un encens d’amour... Mais...

Mais l’Ange des parfums jeta l’encensoir d’or sur la terre, et le tiers de la terre fut détruit, et beaucoup d’hommes moururent mais ils ne se convertirent pas...

Jésus ne sent plus les coups qui pleuvent sur Lui pour Le faire revenir à Lui et L’obliger à se relever... Jésus ne voit plus que le Temple qui a été livré aux païens, lesquels foulent et pillent la ville sainte; les cadavres gisent en grand nombre... Voici que des milliers d’hommes périssent, et la ville s’écroule. (Ap XI)

Jésus s‘est évanoui. Il ne sent plus rien dans son Corps, mais sa peine est extrême, car sa Passion actuelle, de l’An 33 de notre calendrier, a rejoint une autre passion, celle qu’Il vivra dans son Corps mystique, pendant toute la durée des siècles et des siècles...

Et nous, aujourd’hui, nous qui contemplons Jésus sur son Chemin de Croix, nous comprenons que chaque fois qu’un chrétien souffre à cause de Lui, parce qu’il veut Lui rester fidèle, chaque fois qu’un de ses témoins est martyrisé, c’est sa Passion à Lui, Jésus, qui se poursuit toujours.

Rome ne crucifie pas les morts: c’est la Loi. Mais les juifs veulent que Jésus soit crucifié. Et gare au centurion et à ses sbires s’ils ne font pas ce qu’il faut pour que le spectacle soit complet! Jésus doit donc arriver vivant au sommet du Golgotha.

Les Romains font taire, sans ménagement, les insultes et les impatiences aussi inutiles que bruyantes, et réussissent enfin, à ranimer Jésus. Le condamné pourra être crucifié...

Jésus vient d’être crucifié. En esprit Il contemple Jérusalem qui tue ses prophètes et lapide ceux qui lui sont envoyés. En esprit, Il continue de pleurer sur Jérusalem. Dans son Cœur Jésus assiste à des visions terribles concernant son Église toujours martyrisée. Jésus crucifié, Jésus l’Agneau Immolé pleure dans son Cœur parce qu’Il n’a pas été reconnu par ceux qui auraient dû Le recevoir.

La souffrance du Crucifié a désormais atteint son paroxysme. Jésus peut mourir: tout est accompli... Mais voici que, maintenant, Jésus voit un Grand signe dans le Ciel: une Femme revêtue de soleil, la lune sous les pieds, et une couronne de douze étoiles sur la tête. (Ap XII) Jésus pousse un grand Cri et meurt.

Jésus, nous Te demandons: ta passion de tous les siècles, la passion de ton Église et de tous ses martyrs, martyrs du corps et martyrs du cœur, l’as-Tu vécue aussi, dans sa réalité atroce, pendant ta Passion de la terre, ta Passion dans le temps? Pleurant sur Jérusalem, est-ce aussi sur ton Église que Tu pleurais?

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