Quatrième partie

Méditations préparatoires à la Grande Passion du Christ

13
Et Marie ?
L’Humble Servante du Seigneur

Jésus meurt sur la Croix. Au pied de la Croix, il y a Marie, et Jean, et Marie-Madeleine. Jésus meurt, et Marie est là. Marie est là, au pied de la Croix, pour partager, avec son  fils la douleur effroyable qui conclut la première célébration de la Nouvelle Pâque.

Marie est là, au pied de la Croix; elle achève avec son Fils la première fête de la Pâque chrétienne. Marie est là, pour participer à la fin sanglante de la fête... Mais pourquoi n’y était-elle pas au commencement? Pourtant, la mère de famille est toujours présente quand les juifs célèbrent la Pâque?

Revenons au Cénacle, quand Jésus institua l’Eucharistie. Jésus est seul avec ses apôtres dans la grande salle de la maison, la salle du Cénacle. Il a célébré la Pâque, la Pâque juive, avec deux jours d’avance: c’était permis... Or, cette fête de Pâque, la plus solennelle de toutes les fêtes juives, est toujours célébrée en famille. Et lors des multiples fois où Jésus avait célébré la Pâque, à Nazareth en particulier, Marie était toujours présente, et près de Lui. Aujourd’hui, c’est pour Jésus la grande Pâque de l’Adieu; cela, Il le sait puisque c’est son Heure, et la Maman n’est pas là...

Marie n’est pas avec Jésus pour célébrer sa dernière Pâque terrestre. Pourtant, elle n’est pas loin, elle doit même être tout à côté, dans une pièce voisine. Alors? L’Évangile ne nous dit rien de la présence de Marie à quelques mètres de Jésus, mais il est certain qu’elle est à Jérusalem, puisque dans quelques heures elle suivra son chemin de Croix.

Il y avait aussi d’autres femmes ici, tout à l’heure, dans la maison, mais plusieurs ont dû repartir chez elles ou chez des parents ou des amis. Marie est donc restée avec Jésus, son Fils, ce qui est normal. Pourquoi Jésus, ce soir de fête, a-t-Il laissé sa Mère toute seule?

Avec Jésus, les choses sont rarement simples, ou du moins simples selon nos petits raisonnements humains. C’était son grand Adieu avant son agonie, son arrestation, sa mort,... puis sa Résurrection. L’Heure est solennelle! La fête est solennelle! Et Jésus laisse Marie, sa Mère, à l’écart alors qu’elle aurait très bien pu être là. Sa présence aurait été d’autant plus plausible que Jésus l’avait longuement préparée, elle, la toute Sainte, à être la Corédemptrice, à devenir la Mère de l’Église qu’Il allait instituer, et la conseillère des apôtres. Mais Jésus laisse Marie seule, à part, comme à l’écart...

Jésus laisse sa Mère comme à l’écart... Il célèbre la Pâque avec les douze, dont l’un est un démon... Il les enseigne longuement et pour cela, Il va même jusqu’à leur laver les pieds: ils ont besoin d’apprendre l’humilité, et de découvrir l’humilité du Maître, l’humilité de Dieu. Marie n’avait pas besoin de cet enseignement, elle, l’humble Servante du Seigneur...

Maintenant, Jésus va préparer ses apôtres à devenir ses prêtres, lesquels, comme Lui, sont destinés à être les vivantes victimes de son Sacerdoce. Marie n’était pas destinée à être prêtre, sa mission était tout autre: elle était et devait rester la Mère, celle qui prépare la naissance à la Vie de Dieu, cette vie spirituelle si grande qu’elle doit faire de nous des dieux par participation. Le prêtre est l’intermédiaire obligé entre Dieu et les hommes. Mais Marie est la Mère, bienheureuse entre toutes les femmes. Bienheureuse entre tous les humains!

Maintenant c’est le silence absolu dans la salle du Cénacle: Jésus vient d’instituer l’Eucharistie. Il vient de livrer son Corps pour le salut des hommes, et son Sang va être versé. Le Père L’a glorifié. Les apôtres ne comprennent rien, mais ils sentent confusément que quelque chose de très grand vient de se produire, et ils se taisent: ils prient. Jésus peut les laisser seuls quelques minutes.

Marie est seule dans la pièce voisine: elle prie et elle pleure. On frappe: c’est le Fils. Comme Il est grand et solennel! Marie essuie ses larmes et se lève. Jésus s’approche, lui tend une bouchée de pain et lui fait boire quelques gouttes de vin. Puis Jésus l’embrasse et murmure quelques paroles. Marie pleure plus fort mais laisse partir Jésus, sans un mot... 

Comme il serait bon de rester avec Marie pendant que Jésus retourne  vers ses apôtres, puis lorsqu’Il va avec eux jusqu’au jardin des Oliviers. Comme il serait bon de rester avec Marie au moins quelques instants, avec Marie pendant que Jésus souffre son Agonie. Mais non,   c’est au pied de la Croix sur laquelle Jésus meurt, que nous devons nous retrouver, que nous allons retrouver Marie...

Jésus va mourir... Malgré le déluge des douleurs qui Le cernent de toutes parts Il pense encore aux autres. Marie est là, la Vierge toute sainte, la Maman fidèle. Qui prendra soin d’elle maintenant? Il y a aussi Jean, l’apôtre vierge. Hier soir, Jésus a complètement purifié le cœur de son apôtre bien-aimé quand ce dernier s’est nonchalamment couché sur sa poitrine. Jean est jeune, il est bon, il est pur et vierge, et Jésus sait qu’il le restera. Oui, Jean peut prendre chez lui la Mère Immaculée. (Jn XIX, 25-27)

Jésus va mourir... Il regarde aussi la grande pécheresse devenue l’amoureuse fidèle au Seigneur son Dieu. Jésus pardonne de nouveau ses nombreux péchés et bénit son grand amour. Jésus pardonne aussi aux autres pécheurs qui meurent ou s’agitent près de Lui: les larrons, les soldats, les juifs du Sanhédrin et les juifs fidèles. Jésus réserve même de grandes grâces à quelques-uns d’entre eux.

Jésus va mourir... Mais son Cœur de Rédempteur accueille le larron qui se repent. Dans quelques instants Jésus laissera percer son Cœur par le soldat romain qui, baigné dans le Sang de l’Agneau, sera le premier à proclamer sa divinité à la face monde. (Mt XXVII, 50-54)

Jésus va mourir... Jésus meurt, et Il a soif de nous, de nous tous... Tout étant accompli, Jésus peut remettre l’Esprit au Père. Jésus meurt dans un grand cri et la terre, plongée dans l’obscurité, pleure le Fils de Dieu. Jésus meurt...

Jésus est mort. Au pied de la Croix il y a le monde entier: les purs, les pécheurs, les femmes, les vierges: hommes et femmes, et toutes les nations, de tous les temps, de tous les lieux, des siècles passés et des siècles à venir. Au pied de la Croix sur laquelle Jésus est mort, nous sommes tous là.

Au pied de la Croix de Jésus, parmi les trois personnes qui touchent sa Croix, les trois qui L’aimaient, il y a deux femmes et un seul homme; il y a deux êtres vierges: Marie et Jean, et une pécheresse. Curieuse proportion! Est-ce coïncidence? Deux vierges: un homme et une femme, et une grande pécheresse, repentie et brûlante d’amour. Deux femmes, sexe méprisé du temps de Jésus, et un jeune homme, tout jeune adulte... Qu’est-ce que Jésus peut bien vouloir nous enseigner à travers ses choix toujours déconcertants?

Les choix de Jésus: un très jeune homme, purifié par Lui; une grande pécheresse repentie, et purifiée aussi. Et Marie... Marie, Notre-Dame des douleurs.

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