Saint Léandre, d'une
famille princière, naquit en Espagne. Il embrassa de bonne heure la
vie monastique et y
puisa
l'esprit de dévouement et de discipline qui devait lui valoir
l'honneur d'exercer une influence prépondérante sur l'avenir de son
pays.
Séville fut le théâtre
de son zèle et de ses vertus. Moine d'abord, puis archevêque de
cette cité, il créa, à l'ombre de sa métropole, une école destinée à
propager, en même temps que la foi catholique, l'étude de toutes les
sciences et de tous les arts. Il présidait lui-même aux exercices
des maîtres savants et des nombreux élèves qu'il avait su attirer.
Parmi ses disciples, le
plus célèbre fut son jeune frère, saint Isidore, qui devint son
successeur, et surpassa sa gloire. Mais une autre illustration de
l'école de Léandre fut saint Herménégilde, un des fils du roi arien
Leuvigilde; c'est lui qui avait gravé au cœur de l'illustre jeune
homme cette foi invincible qui fit de lui la victime de son propre
père.
Une des gloires de
saint Léandre est d'avoir été un ami du grand Pape saint Grégoire le
Grand. On aime à trouver ces tendres et fortes amitiés, dont la vie
des Saints fournit tant d'exemples; elles seules sont vraies et
solides, parce qu'elles reposent sur la seule base ferme et
inébranlable, l'amour de Dieu. Rien de plus attendrissant que la
correspondance intime de ces deux grands personnages :
« Absent par le
corps, écrivait le Pape à son fidèle ami, vous êtes toujours présent
à mes regards, car je porte gravés au fond de mon âme les traits de
votre visage... Ma lettre est bien courte, mais elle vous montrera
combien je suis écrasé par le poids de ma charge,
puisque j'écris si peu à celui
que j'aime le plus au monde. »
Quel éloge de notre Saint sous la plume d'un si grand Pape!
Léandre, éprouvé par la
persécution, eut enfin le bonheur de voir le triomphe de son Église.
Le roi Leuvigilde se convertit avant de mourir, et mit son fils
Récarède sous la conduite du saint archevêque, qu'il avait exilé.
Récarède eut la gloire de ramener tout son peuple à l'Église
romaine ; cette gloire, il faut le dire, rejaillit en grande partie
sur Léandre, qui s'empressa d'annoncer la nouvelle au Pape saint
Grégoire.
On ne connaîtrait qu'à
demi ce docteur et cet apôtre de l'Espagne, si l'on ignorait que sa
vie fut toujours mortifiée et recueillie comme celle d'un moine,
sans faste comme celle d'un pauvre de Jésus-Christ, laborieuse comme
celle d'un soldat de la foi.
Abbé L. Jaud, Vie
des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950. |