Colette Boellet née à Corbie, en Picardie. Sa famille,
très pieuse, charitable et modeste, habitait à Corbie.
Son père, Robert Boellet, était le maître menuisier de
l'abbaye de Corbie; sa mère, Marguerite Moyon, se
désolait parce qu'elle n'avait pas d'enfant. Aussi, ce
couple très pieux, pria-t-il ardemment saint Nicolas. Et
la naissance
de
Colette relève du miracle. Lorsque leur petite fille
naquit, le 3 janvier 1381, la maman, Marguerite avait,
croit-on, 60 ans. On lui donna le nom de Nicole, en
souvenir du saint protecteur. Nicole, devint vite,
Nico-lette, ou Colette, diminutif familier.
Colette apprit à lire et à écrire, et elle reçut une
éducation religieuse particulièrement soignée, très
orientée vers la Passion de Jésus, particulièrement
chère à sa très pieuse maman qui se confessait et
communiait chaque semaine. Très pieuse, elle aussi,
Colette, à l'âge de neuf ans, aurait reçu une révélation
concernant l'esprit de l'ordre franciscain et la
nécessité de le réformer. En 1399, Colette avait 18 ans
lorsque ses parents moururent. Avant de mourir, son père
l'avait confiée à Raoul de Roye, abbé de Corbie. Ce
dernier voulut la marier, mais Colette refusa le mariage
que l'abbé lui présentait et se dépouilla de tous ses
biens en faveur des pauvres. Bientôt elle rencontra Jean
Bassand, prieur du couvent des Célestins d'Amiens à qui
elle fit part de son désir d'embrasser la vie
reli-gieuse. Notons ici que les Célestins étaient des
moines menant une vie érémitique tout en observant la
Règle bénédictine.
Colette rejoignit alors les béguines de Corbie, mais
elle n'y resta qu'un an, cet ordre ne lui paraissant pas
assez rigoureux. Elle décida donc d’entrer chez les
béné-dictines de Corbie, puis se dirigea vers les
clarisses urbanistes de l'abbaye du Moncel près de
Pont-Sainte-Maxence, toujours en Picardie. Colette
désirait y être servante, car elle se jugeait indigne
d’y être religieuse. Mais là encore, elle trouva que les
conditions de vie n'étaient pas assez sévères.
Elle
retourna alors à Corbie où elle rencontra le père Jean
Pinet, gardien du couvent d'Hesdin en Artois, fervent
franciscain désireux de faire revivre l’ordre d’après la
Règle primitive. Il proposa à Colette de vivre en
recluse sous la règle du tiers-ordre franciscain. L'abbé
de Corbie accorda son autorisation en 1402. Colette
devint alors ermite, et sera enfermée pendant trois ans
dans un petit local attenant à l'église paroissiale. Là,
elle mena une vie de prière et de charité; elle recevait
aussi la visite d'habitants qui avaient besoin prières
et de conseils. Mais le Seigneur avait d'autres vues sur
Colette.
Pour
bien comprendre ce que deviendra la vie de sainte
Colette, il nous faut faire un petit détour dans
l'histoire. Le Grand Schisme d'Occident qui dura de 1378
à 1417 avait profondément divisé l'Église: les uns
reconnaissait le pape de Rome; les autres s'y
opposaient, se soumettant au pape d'Avignon. Par
ailleurs, l'Ordre franciscain connaissait à cette
époque, de grandes dissensions entre les partisans de
l'observance stricte de la règle primitive de Saint
François d'Assise, et les partisans d'une règle plus
souple. En 1263, le pape Urbain IV accordait même aux
couvents des clarisses l'autorisation de posséder des
biens en commun ce qui était une incroyable entorse à la
règle de pauvreté.
Nous
devons ajouter que la France des XIVe et XVe
siècles, vivait également une époque très troublée: il
nous suffit de citer la Guerre de Cent ans, la folie du
roi Charles VI, sans oublier la guerre civile entre les
Armagnacs et les bourguignons. À cela il faut ajouter la
peste noire, apparue en 1348, et qui sévissait presque
partout en Europe.
Tandis qu'elle vivait recluse à Corbie, Colette reçut
des visions de saint François d'Assise. Un jour, elle
vit François qui la présentait à Dieu comme la
réformatrice de son ordre. Une autre fois, un arbre
mystérieux croissait et poussait ses rejetons jusque
dans sa cellule. Refusant de croire à ces visions,
Colette devint aveugle et muette. Elle comprit enfin que
cela était sa mission; elle guérit et se mit à écrire ce
qui lui avait été révélé. Et tout va s'accélérer. En
1406, une bulle pontificale délia Colette de son vœu de
réclusion et l'autorisa à fonder un couvent de Clarisses
réformées dans les diocèses d'Amiens, de Noyons et de
Paris.
Pour
commencer à réaliser son œuvre, Colette fut grandement
aidée par le Père Henri de Baume, franciscain, fervent
partisan d'une réforme de son Ordre. Ce religieux gagna
à la cause de Colette, la comtesse Blanche de Genève,
puis Isabeau de Rochechouart, baronne de Brissay. C'est
alors que Colette, le Père de Baume et la baronne de
Brissay rencontrèrent à Cimiez, près de Nice, le pape
Urbain XIII. Colette fut déclarée abbesse, dame et mère
de toutes les personnes qui se rangeraient sous sa
réforme. Il l'autorisa à accueillir dans le couvent
qu'elle allait fonder des religieuses venues de couvents
étrangers ou du tiers ordre franciscain.
Ici,
nous devons faire une petite remarque. Certains
documents retrouvés au monastère de Cimiez, indiquent
que c'est l'anti-pape Benoît XIII qu'elle aurait
rencontré à Cimiez. Anti-pape, oui, mais dont la piété
était réelle et profonde. Il aurait reçu la profession
religieuse de sainte Colette selon la règle de Sainte
Claire et la nomma abbesse de tous les monastères
qu'elle sera amenée à fonder ou réformer. Cette décision
sera confirmée par Alexandre V, pape de Rome.
Colette voulut commencer sa première fondation à Corbie,
pour en faire le berceau de la réforme franciscaine.
Mais là, elle ne rencontra que des hostilités. Elle
quitta la Picardie pour aller à Noyon: nouvel échec.
Enfin, elle trouva refuge en Franche-Comté, à Baume-le-Frontenay,
dans le manoir d'Alard de Baume, le frère du Père Henri.
Trois amies, premières moniales de l'Ordre réformé,
l'accompagnèrent: Guillemette Chrétien, Marie Sénéchal
et Jacquette Legrand. En 1410, avec l'accord du pape
Alexandre V, elles purent s'établir à Besançon et ouvrir
leur premier monastère. Colette, jusqu'à la fin de sa
vie en 1447, réussit à fonder dix-sept autres couvents,
en Savoie, en Artois, en Allemagne et en Belgique.
Sainte Colette avait 66 ans quand elle mourut à Gand, en
Belgique, le 6 mars 1447. Elle fut béatifiée en 1625 et
canonisée le 24 mai 1807 par le pape Pie VII.
Paulette Leblanc |