La Résurrection de Jésus est la base, le fondement du
christianisme. Jésus ressuscité dans un corps glorieux
aurait pu, puisqu'Il savait que nombreux seraient les
hommes, qui, au cours des siècles, ne voudraient pas de Lui,
s'en retourner définitivement vers le Père. Mais Jésus avait
dit à ses apôtres: "Il vous est utile que je m'en aille…
Mais je ne vous laisserai pas orphelins…" Jésus avait
dit aussi: "Lorsque deux ou trois sont réunis en mon nom,
je suis au milieu d'eux." Et, peu de temps avant sa
mort, Jésus, prenant du pain dira: "Prenez et mangez-en
tous: ceci est mon Corps livré pour vous." Prenant
ensuite la coupe de vin, Jésus dit: "Prenez, et buvez-en
tous, car ceci est mon sang versé pour vous." Et Jésus
ajouta: "Vous ferez ceci en mémoire de Moi."

Après cette dernière Cène, ce dernier repas pris avec ses
apôtres, Jésus partit vers sa Passion. Dans quelques heures,
tout sera accompli. Mais revenons à notre contemplation de
Jésus instituant l'Eucharistie. Montrant le pain, Jésus dit:
"Ceci est mon Corps… mon Corps livré…" À ce moment
précis, c'est Jésus Lui-même qui parle. Il peut changer la
forme de son Corps et être à la fois visible normalement
comme tout être humain bien vivant, tout en se trouvant
aussi dans le pain et dans le vin qu'Il vient de consacrer.
Ce jour-là, les apôtres ne comprirent rien, mais dès qu'ils
auront reçu l'Esprit-Saint que Jésus leur enverra plus tard,
ils comprendront. Maintenant, la Cène s'achève et Jésus
continue son enseignement; puis, avec ses apôtres, Il se
dirige vers le Jardin des Oliviers. La Passion est
commencée.
Jésus a insisté pour que les apôtres veillent et prient
durant cette longue nuit. Mais ils dorment. Luc, dans son
chapitre 22 versets 39 à 46, raconte: "Étant
sorti, Jésus s'en alla, comme de coutume, vers le mont des
Oliviers; les disciples aussi l'accompagnèrent. Lorsqu'il
fut arrivé à l'endroit choisi, il leur dit:
'Priez
afin de ne pas entrer en tentation.'
Et il s'éloigna d'eux environ d'un jet de pierre; et,
s'étant mis à genoux, il priait, disant: 'Père, si vous
voulez, détournez de moi ce calice. Cependant, que ce ne
soit pas ma volonté, mais la vôtre qui soit faite.'
Et lui apparut, venant du ciel, un ange qui le réconfortait.
Puis,
se
trouvant en agonie,
il priait plus instamment, et
sa sueur
devint comme des gouttes de sang, qui tombaient sur la
terre.
S'étant relevé de sa prière, il vint vers les disciples,
qu'il trouva plongés dans le sommeil à cause de leur
tristesse. Et il leur dit: 'Pourquoi dormez-vous? Levez-vous
et
priez,
afin que vous n'entriez point en tentation.'
"
Or, Pierre, Jacques et Jean, que Jésus avait placés à part
des autres dans le Jardin de Gethsémani, allaient, eux
aussi, s'endormir. Ici il faut réfléchir à l'attitude de
Jean. Nous savons que saint Jean est le seul parmi les
apôtres à avoir accompagné Jésus jusqu'à sa mort. Tous les
autres avaient fui… Nous trouvons le récit de l'Agonie de
Jésus chez Matthieu (26, 36 à 41), sauf l'épisode de la
sueur de sang, et chez Marc, (14, 35 à 42), mais rien chez
Jean. Or nous savons que les apôtres Pierre et Jean, ont,
par humilité, omis les événements qui les mettaient en
valeur. On comprend donc que Jean se soit tu. Alors, comment
les autres apôtres ont-ils connu les détails très intimes de
l'agonie de Jésus? Qui leur a raconté cet épisode si
douloureux? Jean, probablement, après la Résurrection ou
après la Pentecôte. Il avait certainement moins dormi que
les autres, ce soir-là. De plus, entendant les gémissements
de Jésus, on peut supposer qu'il se soit approché
familièrement très près de Jésus, et qu'il ait entendu ses
paroles et vu sa sueur de sang. La suite, nous la
connaissons: Jésus va être arrêté, les apôtres vont fuir,
Pierre reniera son maître, et Jésus va être crucifié et
mourir. Mais Jean restera jusqu'au bout avec son Maître,
jusqu'au pied de la Croix, avec Marie.
Ensuite, ce sera la Résurrection et pendant quarante jours
Jésus ressuscité se montrera aux apôtres, aux disciples, et
à beaucoup d'autres personnes, "jusqu'à cinq cents frères
à la fois". Jésus mangera plusieurs fois avec ses
apôtres. Peut-on penser que Jésus renouvellera souvent son
geste de l'Eucharistie? Nous ne le savons pas car l'Évangile
ne nous le dit pas. Nous savons seulement, d'une manière
certaine, que, le soir de la Résurrection, c'est seulement
au moment de la fraction du pain que les disciples d'Emmaüs
reconnurent Jésus. À plusieurs reprises Jésus mangea avec
ses apôtres, mais nous ne savons pas s'Il procéda à la
fraction du pain. Le temps passe; maintenant il est temps
pour Jésus de rejoindre le Père. C'est l'Ascension. Jésus
est monté au Ciel. Alors, obéissant à la parole de l'Ange,
les apôtres rejoignent le Cénacle. Avec Marie, ils vont
attendre un nouvel événement… Ils ne savent pas très bien
quoi. Enfin, arrive l'Esprit-Saint promis. Les apôtres n'ont
plus peur; immédiatement ils vont commencer à évangéliser le
monde… Ils procéderont aussi à la Fraction du pain, terme
que les premiers chrétiens utilisaient pour évoquer
l'Eucharistie.
Les apôtres vont partir évangéliser le monde connu à cette
époque, essentiellement l'empire romain. De plus,
actuellement, des archéologues commencent à retrouver des
traces de l'évangélisation en Inde et en Chine, et même au
Tibet, par l'apôtre Thomas. Mais comment, dans l'Église
primitive, les réunions dominicales se passaient-elles? Nous
sommes sûrs que, dès le début, les fidèles, de plus en plus
nombreux, "étaient
assidus à l'enseignement des apôtres et aux réunions
communes, à la fraction du pain et aux prières."
(Ac-2-42) Donc, il y avait déjà une sorte de "messe"
comportant des enseignements, et surtout la consécration du
pain et du vin: la fraction du Pain. Comment cela se
faisait-il? Probablement un peu n'importe comment, car les
apôtres étaient certainement débordés, et les premiers
fidèles confondaient un repas ordinaire, avec ses possibles
défauts, et le Repas eucharistique. D'ailleurs les apôtres
s'en rendront vite compte et pour rester fidèles à leur
tâche d'enseignement, ils institueront les diacres, ainsi
que le rappellent les Actes des Apôtres:
"En
ces jours-là, comme le nombre des disciples augmentait, les
frères de langue grecque récriminèrent contre ceux de langue
hébraïque: ils trouvaient que, dans les secours distribués
quotidiennement, les veuves de leur groupe étaient
désavantagées. Les Douze convoquèrent alors l'assemblée des
disciples et ils leur dirent: 'Il n'est pas normal que nous
délaissions la parole de Dieu pour le service des repas.'
Cherchez plutôt, frères, sept d'entre vous, qui soient des
hommes estimés de tous, remplis d'Esprit Saint et de
sagesse, et nous leur confierons cette tâche. Pour notre
part, nous resterons fidèles à la prière et au service de la
Parole.' La proposition plut à tout le monde, et l'on
choisit: Étienne, homme rempli de foi et d'Esprit Saint,
Philippe, Procore, Nicanor, Timon, Parménas et Nicolas, un
païen originaire d'Antioche converti au judaïsme. On les
présenta aux Apôtres qui, après avoir prié, leur imposèrent
les mains."
(Act 6, 1 à 6)
L'institution des diacres était vraiment indispensable, car
il fallait, de plus, lutter contre les nombreux abus qui
s'étaient déjà installés dans les assemblées. Saint Paul en
parle avec vigueur afin de condamner ces façons de faire,
loin des enseignements de Jésus. Il s'adresse aux
Corinthiens: "En
vous recommandant ce point, je n'ai garde de vous louer de
ce que vous vous assemblez, non pour votre avantage, mais
pour votre préjudice. Et d'abord j'apprends que, lorsque
vous vous réunissez en assemblée, il y a des divisions parmi
vous, -et je le crois en partie, car il faut qu'il y ait
parmi vous des groupes qui s'opposent, afin que les frères
d'une vertu éprouvée soient manifestés parmi vous- lors donc
que vous vous réunissez ce n'est plus le repas du Seigneur
que vous célébrez; car, à table, chacun commence par prendre
son propre repas, en sorte que tels ont faim, tandis que
d'autres se gorgent. N'avez-vous pas des maisons pour y
manger et boire? Méprisez-vous l'Église de Dieu, et
voulez-vous faire un affront à ceux qui n'ont rien? Que vous
dirai-je? Que je vous loue? Non, je ne vous loue point en
cela."
Paul poursuit en rappelant, avec minutie, ce que Jésus a
fait immédiatement avant sa Passion: "Moi,
je vous ai pourtant transmis ce que j'ai reçu de la
tradition qui vient du Seigneur:
la nuit où il fut livré, il prit du pain, et après avoir
rendu grâces, il le rompit et dit: 'Ceci est mon corps livré
pour vous; faites cela en mémoire de moi.' De même, après
avoir soupé, il prit la coupe pleine de vin et dit: 'Cette
coupe est la nouvelle alliance en mon sang; toutes les fois
que vous en boirez, faîtes cela en mémoire de moi.'
Ainsi donc,
poursuit saint Paul, toutes les fois que vous mangez ce
pain et que vous buvez le vin de ce calice, vous annoncez la
mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne.
C'est
pourquoi celui qui mangera le pain ou boira à la coupe du
Seigneur indignement, sera coupable envers le corps et le
sang du Seigneur.
Que chacun donc s'éprouve soi-même, et qu'ainsi il mange
dignement de ce pain et boive de ce calice;
car
celui qui mange et boit indignement, sans discerner le corps
du Seigneur, mange et boit son propre jugement.
C'est pour cela qu'il y a parmi vous beaucoup de gens
débiles et de malades, et beaucoup sont morts. Si nous nous
examinions nous-mêmes nous ne serions pas jugés. Mais le
Seigneur nous juge et nous châtie, afin que nous ne soyons
pas condamnés avec ce monde. Ainsi, mes frères, lorsque vous
vous réunissez pour le repas, attendez-vous les uns les
autres. Si quelqu'un a faim qu'il mange chez lui, afin que
vous ne vous réunissiez pas pour votre condamnation." (1 Cor
11, 17 à 34)
Voici que tout s'éclaire.
Entre la
Cène du Seigneur donnant son Corps et son Sang
en nourriture à nos âmes, juste avant d'aller vers sa
Passion,
et les
"fractions du pain", les Eucharisties de l'Église des
apôtres,
il y a une parfaite continuité. Si l'on a faim, qu'on mange
chez soi, car il faut respecter la Cène du Seigneur.
Il faut
adorer le Seigneur réellement présent dans le pain et le vin
consacrés; il faut vivre de ce Don de Dieu, Don de l'Amour
suprême.
Par amour Dieu créa l'Homme, de même par Amour Il vint à lui
pour le délivrer de ses péchés et pour le sauver des
attaques du démon. Jésus, Parole de Dieu incarnée, voulant
demeurer avec les hommes pour les fortifier tout au long de
leur vie, Jésus vécut avec eux, souffrit sa Passion, fut
crucifié, mourut puis ressuscita. Mais avant de retourner
vers son Père, Il nous laissa l'Eucharistie, immense mystère
de l'Amour, pour rester toujours avec nous comme Il l'avait
promis lorsqu'Il avait dit: "Voici que je dois retourner
vers le Père, mais je ne vous laisserai pas orphelins."
Les saintes espèces consacrées sont vraiment Jésus présent:
c'est notre foi. Jésus présent réellement veut être aimé et
"consolé". Saint Paul affirme dans son Épitre aux
Corinthiens que nous devons manger et boire le Corps et le
Sang du Seigneur avec dignité, sinon, affirme saint Paul,
nous risquons la condamnation. Mais, Dieu ayant permis que
le pain et le vin puissent être conservés, afin de pouvoir
les porter aux malades, là où sont le pain et le vin
consacrés, là est Jésus.
Les saintes espèces conservées dans nos tabernacles sont
vraiment Jésus réellement présent. La continuité entre
l'institution de l'Eucharistie le soir du Jeudi-Saint et
maintenant est incontestable. D'ailleurs, l'attitude de
nombreux saints nous le prouve, notamment le jeune saint
Tarcisius qui, vers 254, sous le règne de l'empereur
Valérien, préféra mourir plutôt que de laisser profaner les
saintes espèces qu'il portait, pour que les malades et les
chrétiens condamnés au martyre puissent communier. De plus,
au cours des siècles, de très nombreux miracles
eucharistiques ont attesté la présence de Jésus bien vivant
quoique caché.
Mais pourquoi une telle présence de Dieu sur la terre? Parce
que les hommes sont des êtres sensibles qui ont besoin de
"choses" concrètes pour croire en Dieu et pour prier. Les
amoureux le savent bien, eux qui aspirent sans cesse à la
présence de l'être aimé. Jésus le savait encore mieux que
nous. Bien sûr, Il avait dit à ses disciples: "Lorsque
deux ou trois sont réunis en mon Nom, je suis au milieu
d'eux." Mais nous nous sentons souvent seuls quand nous
prions; aussi, lorsque nous allons auprès du saint
Sacrement, nous trouvons toujours Celui qui nous aime et que
notre cœur aime. Quel bonheur! Quelle joie! Quelle aide pour
notre foi!
Paulette
Leblanc – Décembre 2013 |