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Tous
les français connaissent la chanson concernant le Roi
Dagobert, et naturellement, le bon saint Éloi et son
humour. Mais qui connaît la véritable histoire de Saint
Eloi? Probablement personne. Aussi allons-nous,
aujourd'hui, 1er
décembre, combler cette grave lacune.
Ce
que nous connaissons de la vie de saint Éloi, nous le
devons à son ami, saint Ouen. Donc, selon saint Ouen,
Éloi naquit vers 588, à Chaptelat, près de Limo-ges dans
le Limousin. Ses parents étaient de riches
gallo-romains, propriétaires de plusieurs grands
domaines qu'ils cultivaient eux-mêmes. Ils possédaient
aussi des intérêts dans l'exploitation de mines d'or du
Sud-Ouest aquitain.
Éloi
fut placé en apprentissage, par son père, à Limoges chez
un orfèvre réputé, Abbon, fabriquant de monnaie. Éloi
restera quelques années à Limoges, puis rejoindra Paris,
en France, où il entrera au service de Bobbon, l'orfèvre
du roi. Ce dernier, ayant reçu une importante commande
du roi Clotaire II, le père de Dagobert, commande d'un
trône d'or orné de pierres précieuses, en confiera la
réalisation à Éloi. Au lieu d'un trône Éloi en fabriqua
deux car il ne voulut pas garder pour lui la quantité
d'or qui était en trop. Agir ainsi était chose très
étonnante à son époque… Mais, selon saint Ouen, Éloi
aurait été un jeune hom-me très pieux et très honnête.
L'honnêteté d'Éloi lui fut très favorable, car dès ce
moment, le roi Clotaire II le garda auprès de lui. Puis,
Dagobert ayant succédé à son père, Éloi fut chargé,
entre autres, de l'ornementation des tombes de sainte
Geneviève et de saint Denis. Il réalisa des châsses pour
saint Germain, saint Séverin, saint Martin et sainte
Colombe et de nombreux objets liturgiques pour la
nouvelle abbaye de Saint-Denis. Plus tard, Éloi ayant
toute la confiance du roi Dagobert 1er,
remplit des missions des importantes et réussit
notamment à amener le duc de Breta-gne à faire sa
soumission en 636.
Vers
631 ou 632, Éloi avait, avec la permission du roi
Dagobert, fondé le monastère de Solignac. Il fonda
aussi, à Paris, le monastère Saint-Martial, devenu par
la suite couvent saint-Éloi. Un an après, en 633, dans
sa propre maison de l'île de la Cité, il fonda le
premier monastère féminin de Paris dont il confiera la
charge à sainte Aure.
Éloi
était orfèvre et il est possible qu'il ait introduit cet
art dans Limousin; on sait, en effet, que, dès le 10ème
siècle, l'abbaye Saint-Martial de Limoges était un foyer
de joaillerie et d'émaillerie, les moines travaillant
l'or et l'argent. L’orfèvre royal Éloi fut nommé
successivement contrôleur des mines et métaux, maître
des monnaies, puis grand argentier du royaume de
Clotaire II, et, enfin, trésorier de Dagobert Ier.
La tâche était souvent très difficile, mais Éloi était
appuyé par le référendaire Dadon nommé aussi Ouen.
Cependant, ministre et conseiller du roi, Éloi devait
souvent "remettre à l'endroit" les décisions ou
les mœurs royales. Un an après la mort de Dagobert qu'il
avait assisté dans ses derniers moments, Éloi quitta la
cour en même temps que saint Ouen qui y était conseiller
référendaire et chancelier. Comme lui, il entra dans la
cléricature et fut ordonné prêtre. Le même jour, le 13
mai 641, ils furent consacrés évêques, saint Ouen comme
évêque de Rouen et, Éloi comme évêque de Noyon et
Tournai, un diocèse qui s'étendait jusqu'à Courtrai,
Gand et la Frise néerlandaise. Pendant les vingt années
qui lui restaient à vivre, Éloi mul-tiplia les actions
pour convertir au christianisme la population druidique
des Flandres et des Pays-Bas toujours païennes et très
superstitieuses. Il fit sienne la spiritualité de saint
Colomban, le moine irlandais, et aimait se retirer dans
l'oratoire d'Ourscamps-sur-Oise. Saint Éloi est
également réputé fondateur de l'église de Dunkerque. Il
voyageait aussi. Nous le trouvons au concile de
Châlon-sur-Saône, en Aquitaine, à Uzès et à Marseille.
Il mourut en 660, à la veille de partir pour Cahors.
Nous
avons remarqué qu'Éloi fut un excellent orfèvre, un
homme de cour et même un ministre estimé et écouté. Mais
où réside la sainteté de notre ami Éloi?
Malgré ses nombreuses charges, Éloi était un chrétien
vertueux, aussi scrupuleux à suivre l'Evangile qu'à
ménager l'or qu'on lui confiait. Afin de mieux aider les
pauvres, il délaissait les vêtements somptueux et leur
préférait des habits moins coûteux sous lesquels,
d'ailleurs, il portait un cilice. Il usait surtout de
miséricorde envers les prisonniers de guerre tombés en
esclavage. Il en rachetait jusqu'à cinquante à la fois:
il en renvoyait certains chez eux; il en gardait aussi
certains auprès de lui et beaucoup d'entre eux devinrent
prêtres ou moines. Évêque, Éloi restait cependant le
conseiller des grands: on peut citer par exemple,
Erchinoald, le maire du palais de Neustrie ou la reine
Bathilde, épouse de Clovis II. Par ailleurs, sur son
chemin fleurissaient les prodiges: guérisons de malades
ou délivrances de possédés, ou vin multiplié pour les
pauvres.
Saint Éloi, s'étant un jour aperçu que la façade de la
basilique Saint-Médard de Noyon menaçait ruine,
prescrivit de la réparer et, malgré la saison, fit hâter
les travaux: il savait, en effet, que sa fin était
proche. Peu après, en effet, le 1er décembre 660, il
rendait son âme à Dieu tout joyeux d'entrer en
l'éternelle béatitude. Prévenue, la reine Bathilde vint
assister à ses funérailles. Lorsqu'un an plus tard on
voulut donner au saint une sépulture plus digne de lui,
on retrouva son corps intact.
Nous
avons bien remarqué qu'honnête en son métier, ministre
et monétaire intègre, saint Éloi fut également honnête
et intègre avec Dieu. Ainsi la sainteté surnaturelle
va-t-elle de pair avec les vertus humaines : qui ne
trompe pas les hommes ne trichera pas non plus avec
Dieu, et la réciproque sera vraie!
À
Paris, une église lui fut dédiée dans le quartier
parisien des ferronniers d'art et des ébénistes;
l'église Saint-Eloi fut reconstruite en 1967. Une autre
église, détruite en 1793, lui était dédiée dans la rue
des Orfèvres, près de l'hôtel de la Monnaie. Dans la
cathédrale Notre-Dame, dans la chapelle Sainte-Anne,
autrefois siège de leur confrérie, les orfèvres et
joailliers de Paris ont placé sa statue et restauré son
autel.
Saint Éloi est généralement considéré comme le saint
patron des ouvriers qui se servent d'un marteau, comme,
par exemple, les orfèvres, graveurs, forgerons,
mécaniciens, chaudronniers, horlogers, etc.
Nous
allons maintenant nous détendre un petit peu. Très
populaire, saint Éloi a fait l'objet de nombreux
dictons. Nous allons vous en citer quelques-uns:
— Si
à la saint Éloi tu brûles ton bois, tu auras froid
pendant trois mois.
— Saint
Éloi, de soleil gourmand, nous donne trois jours de beau
temps.
— À
la saint Éloi, la nuit l'emporte sur le jour qui luit
et quand arrive la saint Éloi, laboureur, tu peux rester
chez toi.
Et
pour conclure, voici:
Saint Éloi le gourmand, sa fête arrive deux fois par
an.
Eh!
Oui, saint Éloi a deux fêtes: le 1er
décembre et le 29 juin.
Ces
dictons concernent le "Saint Éloi d'hiver" appelé aussi
le "Saint Éloi des pauvres", et le "Saint Éloi d'été" ou
"Saint Éloi des riches" fêté le 25 juin. Nous savons
que saint Éloi est le saint Patron des orfèvres et des
forgerons; il l'est aussi des maréchaux-ferrants, des
forgerons, puis par extension par des charretiers, des
laboureurs et des cultivateurs.
Paulette
Leblanc |