Saint Hugues, dit de Grenoble, naquit à Châteauneuf sur
Isère, dans le département de la Drome, vers 1053. Son
père, Odilon de Châteauneuf, était un pieux chevalier,
officier. Ce que nous connaissons de sa vie, nous le
devons à Guigues, prieur de la Grande-Chartreuse. Hugues
fit d'abord des études à l'école cathédrale de Valence,
où il était déjà chanoine. Il fut remarqué par le légat
du pape Grégoire VII, Hugues de Die. Conseiller d'Hugues
de Die, notre Hugues, de Grenoble, prit une part
importante, en 1007, au concile de Vienne qui condamna
l'empereur Henri IV, lequel vint se soumettre au pape
Grégoire VII à Canossa. Puis, Hugues de Die prit Hugues
de Châteauneuf comme secrétaire et l'emmena avec lui au
synode d'Avignon en 1080. Et bientôt, alors qu'il
n'avait que 27 ans, Hugues fut élu et nommé évêque de
Grenoble.
À
cette époque, une grande partie du clergé de ce diocèse
avait une moralité particulièrement déplorable. Dès
qu'il fut installé dans son diocèse, Hugues s'efforça
d'y faire triompher les principes de la réforme
grégorienne, luttant en particulier contre la simonie et
le mariage des prêtres. Ainsi, pour ceux d'entre eux qui
acceptaient d'abandonner femmes et enfants, il fonda
plusieurs collégiales de chanoines réguliers. Au bout de
deux années, Hugues de Grenoble, découragé, voulut se
retirer à l'abbaye de la Chaise-Dieu dans le Velay. Il y
vécut quinze mois parfaitement heureux, jusqu'au jour où
un ordre pontifical lui enjoignit d'aller réoccuper son
siège épiscopal. Nous sommes en 1084.
Entre temps, Hugues avait accueilli à Grenoble celui qui
deviendra saint Bruno, son ancien professeur de Reims.
Bruno avait quitté le monde avec quelques compagnons; la
petite communauté fut installée par Hugues dans la
vallée de la Grande-Chartreuse. Saint Bruno y fonda
l'Ordre des Chartreux. Hugues y séjournait le plus
souvent possible. En 1085, Hugues de Grenoble consacra
l'église du nouveau monastère et pourvut aux besoins
matériels des Chartreux.
Revenu dans son diocèse, Hugues se consacra complètement
à la défense des droits de l'Église, et il devint, dès
1088 l'homme de confiance du pape Urbain II (1088-1099)
dont il fit connaître, en France, les lettres et les
consignes. Le pontife, en retour, le soutint contre ses
adversaires, notamment contre Guy de Bourgogne,
archevêque de Vienne, qui deviendra le pape Calixte II.
Il y eut aussi un conflit avec Guigues III d'Albon au
sujet de la possession de territoires ecclésiastiques
situés dans le Grésivaudan, en Isère. Hugues soutenait
que le comte d'Albon avait usurpé les terrains de
l'évêché de Grenoble avec l'aide de l'évêque Mallen. Un
accord fut finalement trouvé entre Hugues et Guigues en
1099. Guigues acceptait de céder les territoires, sujets
du litige. D'autre part, Hugues et le comte Guy d'Autun
seigneur de Grenoble, se mettaient d'accord pour aboutir
en 1105 à un accord de pacification. Au concile du
Latran II, en 1123, Hugues de Grenoble exhorta le pape
Pascal II à se montrer plus ferme face aux pressions de
l'empereur Henri V, et ce dernier se vengea en le
mettant au ban de l'Empire. Mais la population
grenobloise se rangea derrière son évêque qui put
bientôt se faire restituer les droits et les biens
ecclésiastiques qui lui avaient été confisqués. Hugues
embellit sa cité épiscopale, y faisant construire un
pont, un marché et trois hôpitaux; enfin, il fit
restaurer la cathédrale Saint-Vincent ainsi que l'église
Saint-Laurent.
Nous
sommes en 1125. Toujours désireux de se retirer à la
Grande Chartreuse, pour y mener la vie contemplative à
laquelle il aspirait, Hugues demanda l'autorisation de
démissionner pour pouvoir se retirer à la
Grande-Chartreuse. Mais cette autorisation lui fut
refusée, compte tenu des circonstances difficiles que
traversait l'Église.
En
1130, Hugues, âgé de 77 ans, trouva la force d'aller à
la rencontre du pape
Innocent II
qui fuyait l'Italie
et de l'accompagner jusqu'au
Puy
où devait se réunir un important concile visant à faire
reconnaître Innocent II par les souverains d'Europe
et à prononcer l'excommunication
contre l'usurpateur
Anaclet II.
Hugues de Grenoble s'éteignit en 1132. Il fut canonisé
deux ans plus tard en 1134, par Innocent II. Son culte
connut une large diffusion, en particulier grâce à
l'appui des Chartreux qu'il avait beaucoup aidés et qui
le considéraient comme l'un des leurs. Hugues de
Grenoble est fêté le 1er
avril.
Voici maintenant quelques mots sur la spiritualité
d'Hugues de Grenoble. Guigues, prieur de la Grande
Chartreuse a raconté que Hugues, par la puissance de sa
sainteté, guérissait bien des âmes; ses prédications
véhémentes remuaient les foules et touchaient les cœurs;
au confessionnal, il pleurait souvent avec ses pénitents
et les excitait à une plus grande contrition.
Incontestablement, au bout de quelques années, et malgré
les difficultés rencontrées, le diocèse de Grenoble
s'était beaucoup amélioré sur le plan spirituel.
Parmi les plus grandes vertus de Hugues de Grenoble, il
faut remarquer sa modestie et sa charité. Dur pour
lui-même, il se montrait prodigue pour les pauvres et
alla jusqu'à vendre pour eux son anneau et son calice.
Il se montra toujours d'une énergie indomptable pour
défendre les intérêts de l'Église. À son exemple, nous
apprenons aussi que si le salut des âmes est une chose
inestimable, il ne s'opère souvent qu'au prix d'une
longue persévérance et d'une très grande abnégation.
Paulette
Leblanc |