Irénée de
Lyon
est le deuxième
Évêque de Lyon. Il
a vécu de 177 à 202. Irénée est l'un des
Pères de l'Église
et on lui doit, dans son œuvre de théologien, la présentation de
la doctrine catholique contre les thèses
gnostiques.
Petits
rappels
Le
gnosticisme est un mouvement religieux qui regroupe diverses
doctrines se caractérisant, généralement,
par
une
croyance
étonnante: les hommes seraient des âmes divines emprisonnées
dans un monde matériel créé par un dieu mauvais ou imparfait
appelé le
démiurge. Ce
mouvement connut son apogée au cours du
IIe siècle.
Le
démiurge était considéré soit comme une incarnation du mal,
soit comme un dieu bon mais imparfait. Il existerait auprès d'un
autre être suprê-me plus éloigné et incarnant le bien, mais dont
la connaissance est difficile. Afin de se libérer du mon-de
matériel inférieur, l'homme a besoin de la
gno-se,
c'est-à-dire la connaissance spirituelle
éso-térique
disponible à travers la connaissance de l'être suprême. Jésus de
Nazareth est identifié par certains cultes gnostiques comme une
incarnation de l'être suprême, pour apporter la gnose aux
hommes.
Le terme
gnose,
c'est-à-dire la connaissance, désigne également des tendances
universelles de la pensée qui trouvent leur dénominateur commun
autour de la notion de connaissance. Ainsi, le
mani-chéisme, le
mandéisme, la
Kabbale et l'hermétisme,
peuvent être considérés comme des formes de gnose.
D'inspiration chrétienne, le gnosticisme fut qua-lifié d'hérésie
par les
Pères de l'Église
dont saint
Irénée de Lyon.
Revenons
à saint Irénée,
fêté le
28 juin dans
l'Église catholique et le
23 août dans l'Église
orthodoxe. De
culture et de langue
grecque, Irénée
naquit à
Smyrne en
Asie Mineure entre
130 et
140, de parents
grecs et chrétiens. Irénée encore jeune, fut l'élève de
saint Polycarpe
qui avait reçu l'imposition des mains de l'apôtre
Jean.
Saint Jérôme pense
qu'Irénée fut aussi le disciple de St
Papias
également disciple de St Jean.
Irénée
arriva en
Gaule vers
157; il exerça
d'abord la fonction de simple prêtre collaborateur de
Pothin,
premier évêque de Lyon.
Quand saint Pothin périt victime d’une persécution de
Marc Aurèle, en
177, Irénée fut choisi pour le remplacer. Irénée consacra sa vie
épiscopale à l'évangélisation des peuples qui lui étaient
confiés et à la défense de la vérité en luttant contre les
hérésies des
Gnostiques et des
Valentiniens. (Valentin
était un
chrétien
gnostique, donc
hérétique
comme tous les gnostiques.)
L'épiscopat
de saint Irénée fut donc est marqué par une forte expansion
missionnaire; il fonda, par l'intermédiaire de ses
missionnaires, un grand nombre de
diocèses, comme
ceux de
Besançon et de
Valence
qui doivent à l'évêque de Lyon leurs premiers pasteurs.
D'après les
témoignages de saint
Jérôme au
Ve siècle
et de
Grégoire de Tours
au
VIe siècle,
saint Irénée serait mort
martyr à Lyon en
202, victime d'un
édit de persécution de l'empereur
Septime Sévère.
Irénée avait converti presque tous les habitants de son diocèse
par ses prédications et l'exemple de sa vie. Ses reliques qui
avaient été conservées, depuis le Ve siècle, dans l'église
Saint-Irénée
auprès d'autres
martyrs de Lyon,
furent dispersées en 1562, par les calvinistes.
Les
Écrits de saint Irénée
Irénée fut
avant tout un homme de foi et un pasteur. Du bon pasteur, il
possédait le sens de la mesure, la richesse de la doctrine,
l'ardeur missionnaire. En tant qu'écrivain et
grand théologien
chrétien
anti-gnostique, il poursuivit un double objectif: défendre la
véritable doctrine contre les attaques des hérétiques, et
exposer avec clarté les vérités de la foi. Ses œuvres qui nous
sont parvenues, correspondent exactement à ces objectifs: les
cinq livres Contre les hérésies, et l'Exposition de
la prédication apostolique. L'ouvrage:
Contre les hérésies,
était dirigé
contre
Valentin d'Égypte
et les
gnostiques. Pour
Irénée l’autorité des Écritures est absolue: la
Bible suffit pour
connaître Dieu et son œuvre. Il soutient que l’Écriture révèle
un plan de Dieu pour le salut des
hommes.
Autre point
très important: Irénée fut le premier à parler de la
Tradition: contre les hérétiques, il défendit la
tradition de
l'Église qui revendiquait sa transmission par les apôtres et se
voulait fondée sur la 'règle de vérité' qui est la foi en
Dieu et en son
Fils
Jésus-Christ. Face
aux hérétiques qui voulaient l'Écriture seule, saint Irénée
insiste sur l'Écriture et la Tradition: l'Église est une
Tradition, c'est–à-dire une transmission. Selon saint
Irénée, l'Église est la gardienne de la vérité et de la foi des
apôtres reçue dans l'Écriture. On peut donc affirmer que les
sources d'Irénée de Lyon sont avant tout la tradition
catéchétique et les Écritures. Pour lui, la
Nouvelle Alliance reprendrait le contenu de l’Ancienne. Irénée
cherche par là à éviter le rejet de l’Ancien
Testament.
Enfin,
Irénée fut un grand défenseur des quatre évangiles de
Matthieu, de
Marc, de
Luc et de
Jean dans le
Nouveau Testament.
Il est le premier écrivain chrétien connu à avoir listé les
quatre
évangiles canoniques
comme inspirés divinement. Irénée fut aussi le premier à
affirmer que l'évangile
de Jean avait été
écrit par
l'apôtre Jean
lui-même, et que l'évangile de Luc avait été écrit par
Luc, le compagnon
de
Paul.
Pour
conclure, nous dirons que saint Irénée fut le champion de la
lutte contre les hérésies, dont la gnose qui menaçait l'Église
du IIe siècle. Il revendiquait fermement la sainteté originelle
de la matière, du corps, de la chair, ainsi que de l'esprit.
Mais son œuvre va bien au-delà du rejet de l'hérésie: on peut
dire en effet qu'il se présente comme le premier grand
théologien de l'Église. Pour Irénée, la "règle de la foi"
coïncide en pratique avec le Credo des Apôtres et nous
donne la clé pour interpréter l'Evangile, pour interpréter le
Credo à la lumière de l'Evangile.
Dans son
Audience générale du mercredi 28 mars 2007, le pape Benoît XVI a
repris l'enseignement de saint Irénée. En effet, affirme Benoît
XVI, l'Évangile prêché par Irénée est celui qu'il avait reçu
de Polycarpe, évêque de Smyrne, et l'Évangile de Polycarpe
remonte à l'apôtre Jean, dont Polycarpe était le disciple.
Ainsi, le véritable enseignement n'est pas celui inventé par les
intellectuels au-delà de la foi simple de l'Eglise. Le véritable
Évangile est celui enseigné par les évêques qui l'ont reçu d’une
chaîne ininterrompue depuis les Apôtres. La foi publiquement
confessée par l'Église est la foi commune de tous. Seule cette
foi est apostolique, elle vient des Apôtres, c'est-à-dire de
Jésus et de Dieu. En adhérant à cette foi transmise publiquement
par les Apôtres à leurs successeurs, les chrétiens doivent
observer ce que les évêques disent, ils doivent suivre en
particulier l'enseignement de l'Église de Rome, prééminente et
très ancienne. Cette Église, en raison de son origine antique,
possède un caractère apostolique suprême; en effet, elle tire
son origine des piliers du Collège apostolique, Pierre et Paul.
Toutes les Églises doivent être en accord avec l'Église de Rome,
en reconnaissant en elle la mesure de la véritable tradition
apostolique, de l'unique foi commune de l'Eglise. (Benoît
XVI)
Nous avons
vu, poursuit Benoît XVI, que saint Irénée s'était préoccupé
d'illustrer le concept authentique de Tradition apostolique, que
nous pouvons résumer en trois points.
a) La
Tradition apostolique est "publique", et non pas privée ou
secrète. Pour Irénée, il ne fait aucun doute que le contenu de
la foi transmise par l'Église est celui reçu par les Apôtres et
par Jésus, par le Fils de Dieu. Celui qui veut connaître la
véritable doctrine doit uniquement connaître "la Tradition qui
vient des Apôtres et la foi annoncée aux hommes."
b) La
Tradition apostolique est "unique". En effet, tandis que le
gnosticisme est sous-divisé en de multiples sectes, la Tradition
de l'Église est unique dans ses contenus fondamentaux; elle crée
ainsi une unité à travers les divers peuples, à travers les
diverses cultures; il s'agit d'un contenu commun comme la
vérité, en dépit de la diversité des langues et des cultures. Il
y a une phrase très précieuse de saint Irénée dans le livre
Contre les hérésies: "L'Église, bien que
disséminée dans le monde entier, préserve avec soin la foi des
Apôtres, comme si elle n'habitait qu'une seule maison.
c) Enfin,
conclut Benoît XVI, la Tradition apostolique est,
"pneumatique", c'est-à-dire spirituelle, guidée par l'Esprit
Saint: en grec Esprit se dit pneuma. Il ne s'agit pas, en
effet, d'une transmission confiée à l'habileté d'hommes plus ou
moins savants, mais à l'Esprit de Dieu, qui garantit la fidélité
de la transmission de la foi. Là où est l'Église se trouve
l'Esprit de Dieu; et là où est l'Esprit de Dieu, se trouve
l'Église et toute grâce. Sa tradition, selon Irénée,
tradition ininterrompue, n'est pas traditionalisme, car cette
Tradition est toujours intérieurement vivifiée par l'Esprit
Saint, qui la fait à nouveau vivre, qui la fait être interprétée
et comprise dans la vitalité de l'Église… De manière plus
générale, dans la doctrine d'Irénée la dignité de l'homme, corps
et âme, est solidement ancrée dans la création divine, dans
l'image du Christ et dans l'œuvre permanente de sanctification
de l'Esprit…"
Paulette
Leblanc |