Nous avons vu que de
nombreux psaumes présentent, à travers les ennemis d'Israël, une
humanité sans Dieu. Mais cette humanité, y compris Israël, est très
malheureuse; et dans son malheur, via les psaumes notamment, elle
s'adresse à Dieu qui se laisse fléchir; mais très vite, elle retombe
dans son péché. Et tout recommence. En réalité, Dieu éduque son
peuple, et, à mesure que les siècles passent, l'esprit de l'homme
s'ouvre à la vérité. L'homme est malheureux parce qu'il est pécheur,
parce qu'il enfreint la Loi que Dieu lui a donnée. Tous les hommes
sont pécheurs, et par conséquent, malheureux. Mais Dieu, fidèle à
son alliance, éduque son peuple et lui révèle sa Loi d'amour,
émanation de sa tendresse. Pourtant l'homme est toujours triste car
il n'arrive pas à se guérir de ses fautes.
L'homme est triste et
il aspire à s'en aller vers Dieu. C'est un peu la prière que le roi
David exprime lorsque, dans le psaume 60, il fait des vœux qui ne
sont pas de la terre. Ainsi, après avoir redit sa confiance à Dieu
(Ps 60, 1 à 5) il comprend que Dieu l'a exaucé dans un roi devenu
quasiment immortel: "Oui, mon Dieu, tu exauces mon vœu, tu fais
largesse à ceux qui craignent ton nom. Accorde au roi des jours
et des jours: que ses années deviennent des siècles! Qu'il
trône à jamais devant la face de Dieu! Assigne à sa garde
Amour et Vérité. Alors, je chanterai sans cesse ton nom,
j'accomplirai mon vœu jour après jour." (Ps 60, 6 à 9)
En effet, le Seigneur,
toujours plein d'amour et de miséricorde, promet un Messie, un
Sauveur, d'abord aux enfants de son peuple, puis à toute l'humanité.
Parfois, le psalmiste mentionne ce Messie comme s'il était déjà là.
C'est ce qui se passe dans le psaume 83. Le psalmiste est heureux de
contempler les merveilles de Dieu. L'homme désire ardemment la
maison de Dieu, il chante ceux qui sont heureux auprès de Dieu:
"De quel amour sont aimées tes demeures, Seigneur, Dieu de
l'univers! Mon âme s'épuise à désirer les parvis du Seigneur;
mon cœur et ma chair sont un cri vers le Dieu vivant! L'oiseau
lui-même s'est trouvé une maison, et l'hirondelle, un nid pour
abriter sa couvée: tes autels, Seigneur de l'univers, mon Roi et mon
Dieu! Heureux les habitants de ta maison: ils pourront te chanter
encore! Heureux les hommes dont tu es la force: des chemins
s'ouvrent dans leur cœur! Quand ils traversent la vallée de la
soif, ils la changent en source; de quelles bénédictions la revêtent
les pluies de printemps!" (Ps 83, 2 à 7)
Maintenant l'homme prie
pour tous les hommes qui "vont de hauteur en hauteur; ils se
présentent devant Dieu à Sion. Seigneur, Dieu de l'univers, entends
ma prière; écoute, Dieu de Jacob. Dieu, vois notre bouclier,
regarde le visage de ton Messie." (Ps 83, 8 à 10) Quel
Messie? Probablement le roi d'Israël. Mais dans la Pensée de Dieu
qui permet au psalmiste de s'exprimer, le vrai Messie, la Parole de
Dieu, n'est-il pas déjà présent? "Oui, un jour dans tes parvis
en vaut plus que mille. J'ai choisi de me tenir sur le seuil,
dans la maison de mon Dieu plutôt que d'habiter parmi les infidèles.
Le Seigneur Dieu est un soleil, il est un bouclier; * le
Seigneur donne la grâce, il donne la gloire. Jamais il ne refuse
le bonheur à ceux qui vont sans reproche. Seigneur, Dieu de
l'univers, heureux qui espère en toi!" (Ps 83, 11 à 13)
Le Messie est-il Dieu? Est-ce Lui qui a
fondé la terre et règne sur elle? L'Homme innocent et dont le cœur
est pur, est-il Celui que le peuple cherche? Difficile à dire;
pourtant, les portes s'élèvent sur le passage du Roi de gloire, le
Seigneur, Dieu de l'univers. Est-ce que Jésus ressuscité a expliqué
cela aux disciples d'Emmaüs. Nous ne savons pas. Pourtant, c'est
exactement ce qu'exprime le psaume 23:
"Au Seigneur, le monde et sa richesse, la
terre et tous ses habitants! C'est lui qui l'a fondée sur les
mers et la garde inébranlable sur les flots. Qui peut gravir la
montagne du Seigneur et se tenir dans le lieu saint? L'homme au
cœur pur, aux mains innocentes, qui ne livre pas son âme aux
idoles (et ne dit pas de faux serments). Il obtient, du Seigneur, la
bénédiction, et de Dieu son Sauveur, la justice. Voici le peuple de
ceux qui le cherchent! Voici Jacob qui recherche ta face!
Portes, levez vos frontons, élevez-vous,
portes éternelles:
qu'il entre, le roi de gloire! Qui est ce roi de gloire? C'est
le Seigneur, le fort, le vaillant, le Seigneur, le vaillant des
combats. Portes, levez vos frontons, levez-les, portes
éternelles: qu'il entre, le roi de gloire! Qui donc est ce roi de
gloire? C'est le Seigneur, Dieu de l'univers; c'est lui, le roi
de gloire." (Ps 23, 1 à 10)
Le Messie qui se cache
plus ou moins dans les Écritures, donc aussi dans les psaumes, sera
la Lumière du monde. Pourtant, ces annonces du Messie Sauveur sont
si bien voilées que les apôtres ne comprirent pas Jésus leur
révélant ses souffrances et sa résurrection. Et Jésus, après sa
résurrection dut Lui-même leur expliquer, et leur prouver, en
particulier aux disciples d'Emmaüs, que tout ce qui Le concernait
était inscrit dans les Écritures. Oui, Jésus est d'abord la Lumière
du monde, le chemin qui mène à Dieu, et le feu de l'Amour. C'est ce
qu'exprime le psaume 96.
Le Seigneur est
roi! Exulte la terre! Joie pour les îles sans nombre!
Ténèbres et nuées l'entourent, justice et droit sont l'appui de
son trône. Devant lui s'avance un feu qui consume
alentour ses ennemis. Quand ses éclairs illuminèrent le monde,
la terre le vit et s'affola; les montagnes fondaient comme cire
devant le Seigneur, devant le Maître de toute la terre.
Les cieux ont proclamé sa justice, et tous les peuples ont vu sa
gloire." (Ps 96, 1 à 6)
Le Seigneur est le Roi
de la terre; il est la justice, et le feu. Jésus a affirmé: "Si vous
aviez la foi comme un grain de sénevé, vous diriez à cette montagne:
va! Et elle irait…" Mais le psalmiste comprend que beaucoup d'hommes
continueraient à adorer des idoles, même après la venue du Messie;
aussi leur fait-il honte: "Honte aux serviteurs d'idoles
qui se vantent de vanités! Pour Sion qui entend, grande joie! Les
villes de Juda exultent devant tes jugements, Seigneur!" (Ps
96, 7 et 8)
Car le Seigneur est
au-dessus de tout: "Tu es, Seigneur, le Très-Haut sur toute la
terre: tu domines de haut tous les dieux." D'où le
conseil: "Haïssez le mal, vous qui aimez le Seigneur, car il
garde la vie de ses fidèles et les arrache aux mains des impies."
Car "une lumière est semée pour le juste, et pour le
cœur simple, une joie. Que le Seigneur soit votre joie,
hommes justes; rendez grâce en rappelant son nom très saint."
(Ps 96, 9 à 12)
Le Messie n'est pas
encore très visible, mais dans le long psaume 88, il y a
comme un dialogue entre l'homme et Dieu. L'homme loue Dieu qui
l'émerveille; et Dieu répond d'une manière telle que l'on peut
comprendre qu'Il annonce de nouveau le Messie, via la descendance de
David. Le psalmiste chante: "L'amour
du Seigneur, sans fin je le chante; ta fidélité, je l'annonce d'âge
en âge. Je le dis: c'est
un amour bâti pour toujours; ta fidélité est plus stable que les
cieux." Et Dieu répond: "Avec
mon élu, j'ai fait une alliance, j'ai juré à David, mon
serviteur: j'établirai
ta dynastie pour toujours, je te bâtis un trône pour la
suite des âges." (Ps 88, 2 à 5)
Il n'est pas sûr que
l'homme ait bien compris, mais il poursuit ses louanges à la
grandeur de Dieu: "Que les cieux
rendent grâce pour ta merveille, Seigneur, et l'assemblée des
saints, pour ta fidélité.
Qui donc, là-haut, est comparable au Seigneur? Qui d'entre les dieux
est semblable au Seigneur?
Parmi tous les saints, Dieu est
redoutable, plus terrible que tous ceux qui l'environnent.
Seigneur, Dieu de l'univers, qui est
comme toi, Seigneur puissant que ta fidélité environne?
C'est toi qui maîtrises l'orgueil de
la mer; quand ses flots se soulèvent, c'est toi qui les apaises.
C'est toi qui piétinas la dépouille
de Rahab;
par la force de ton bras, tu dispersas tes ennemis.
À toi, le ciel! À toi aussi, la terre!
C'est toi qui fondas le monde et sa richesse!
C'est toi qui créas le nord et le midi:
le Tabor et l'Hermon, à ton nom, crient de joie.
À toi, ce bras, et toute sa vaillance!
Puissante est ta main, sublime est ta droite!" (Ps 88,
6 à 15)
Voici que l'homme fait
de nouveau allusion à son peuple dont Dieu est le Roi: "Justice
et droit sont l'appui de ton trône. Amour et Vérité précèdent ta
face. Heureux le peuple
qui connaît l'ovation! Seigneur, il marche à la lumière de ta
face; tout le jour, à
ton nom il danse de joie, fier de ton juste pouvoir.
Tu es sa force éclatante, ta grâce
accroît notre vigueur.
Oui, notre roi est au Seigneur; notre bouclier, au Dieu saint
d'Israël." (Ps 88, 16 à 19)
8-1-1-Allusions
au roi David
Mais dans l'esprit de l'homme il y a
comme une confusion: Oui Dieu est Roi, mais le roi qui est visible
aux yeux des hommes "est au Seigneur"; c'est David dont le psalmiste
rappelle comment Dieu l'a choisi et le protège: "Autrefois,
tu as parlé à tes amis, dans une vision tu leur as dit: 'J'ai donné
mon appui à un homme d'élite, j'ai choisi dans ce peuple un jeune
homme. J'ai trouvé
David, mon serviteur, je l'ai sacré avec mon huile sainte;
et ma main sera pour toujours avec
lui, mon bras fortifiera son courage.
L'ennemi ne pourra le surprendre, le
traître ne pourra le renverser;
j'écraserai devant lui ses adversaires
et je frapperai ses agresseurs.
Mon amour et ma fidélité sont avec lui,
mon nom accroît sa vigueur;
j'étendrai son pouvoir sur la mer et sa
domination jusqu'aux fleuves. (Ps 88, 20 à 26)
Et voici une autre
allusion à David, mais qui s'adresse peut-être aussi au Messie à
venir: "Il me dira: 'Tu es mon
Père, mon Dieu, mon roc et mon salut!
Et moi, j'en ferai mon fils aîné,
le plus grand des rois de la terre!
Sans fin je lui garderai mon amour, mon
alliance avec lui sera fidèle;
je fonderai sa dynastie pour toujours,
son trône aussi durable que les cieux...
Jamais je ne violerai mon alliance,
ne changerai un mot de mes paroles.
Je l'ai juré une fois sur ma sainteté;
non, je ne mentirai pas à David!
Sa dynastie sans fin subsistera
et son trône, comme le soleil en ma présence,
comme la lune établie pour toujours,
fidèle témoin là-haut!" (Ps 88, 27 à 30 et 35 à 38 )
Mais attention, les
fils de David doivent être fidèles, sinon… l'alliance sera brisée.
"Si ses fils abandonnent ma loi
et ne suivent pas mes volontés,
s'ils osent violer mes préceptes et ne
gardent pas mes commandements, je punirai leur faute en les
frappant, et je châtierai leur révolte,
mais sans lui retirer mon amour, ni
démentir ma fidélité." (Ps 88, 31 à 34)
Hélas! Israël s'est emporté contre son
Messie: "Pourtant tu l'as méprisé, rejeté; tu t'es emporté contre
ton Messie." (Ps 88, 35)
Et Dieu a mis ses menaces à exécution, ainsi que le
constate le psalmiste: "Tu as brisé
l'alliance avec ton serviteur, jeté à terre et profané sa couronne.
Tu as percé toutes ses murailles, tu
as démantelé ses forteresses;
tous les passants du chemin l'ont pillé:
le voilà outragé par ses voisins.
Tu as accru le pouvoir de l'adversaire,
tu as mis en joie tous ses ennemis;
tu as émoussé le tranchant de son épée,
tu ne l'as pas épaulé dans le combat.
Tu as mis fin à sa splendeur, jeté à
terre son trône; tu as
écourté le temps de sa jeunesse et déversé sur lui la honte." (Ps
88, 36 à 46)
L'homme est consterné; il reconnaît sa
faute, sa honte, le peu de chose qu'est sa vie, et il implore d'une
façon telle que l'on est presque obligé de penser à Jésus et à sa
Passion. "Combien de
temps, Seigneur, resteras-tu caché, laisseras-tu flamber le feu de
ta colère? Rappelle-toi le
peu que dure ma vie, pour quel néant tu as créé chacun des hommes!
Qui donc peut vivre et ne pas voir
la mort? Qui s'arracherait à l'emprise des enfers?
Où donc, Seigneur, est ton premier
amour, celui que tu jurais à David sur ta foi?
Rappelle-toi, Seigneur, tes serviteurs
outragés, tous ces peuples dont j'ai reçu la charge.
Oui, tes ennemis ont outragé,
Seigneur, poursuivi de leurs outrages ton messie.
Béni soit le Seigneur pour toujours!
Amen! Amen!" (Ps 88, 47 à 53)
Le psaume 19, attribué
à David, semble être comme une réponse au psaume 88. En effet, le
psalmiste semble s'adresser à une personne restée anonyme. Il
implore indirectement le Seigneur pour elle en raison de ses bonnes
actions passées. "Que le Seigneur te réponde au jour de détresse,
que le nom du Dieu de Jacob te défende. Du sanctuaire, qu'il
t'envoie le secours, qu'il te soutienne des hauteurs de Sion.
Qu'il se rappelle toutes tes offrandes; ton holocauste, qu'il le
trouve savoureux. Qu'il te donne à la mesure de ton cœur, qu'il
accomplisse tous tes projets." (Ps 19, 2 à 5)
Le psalmiste se réjouit
alors de la victoire du Messie de son Dieu. Et Dieu exaucera les
demandes de ce messie: "Nous acclamerons ta victoire en arborant
le nom de notre Dieu. Le Seigneur accomplira toutes tes demandes.
Maintenant, je le sais: le Seigneur donne la victoire à son
Messie; du sanctuaire des cieux, il lui répond par les exploits
de sa main victorieuse." (Ps 19, 6 et 7)
Et soudain, comme
inconsciemment, le psalmiste retourne à son présent et à ses combats
jamais achevés, contre un ennemi farouche. D'où une ultime prière:
"Aux uns, les chars; aux autres, les chevaux; à nous, le nom de
notre Dieu: le Seigneur. Eux, ils plient et s'effondrent; nous,
debout, nous résistons. Seigneur, donne au roi la victoire!
Réponds-nous au jour de notre appel." (Ps 19, 8 à 10)
8-1-2-Le
vrai Messie
Voici enfin la
victoire. Certes, il s'agit d'un roi auquel pense le psalmiste qui
attribue son œuvre à David. Mais ce roi n'est-il pas déjà l'image du
Messie attendu par les juifs? "Seigneur, le roi se réjouit de ta
force; quelle allégresse lui donne ta victoire! Tu as répondu au
désir de son cœur, tu n'as pas rejeté le souhait de ses lèvres. Tu
lui destines bénédictions et bienfaits, tu mets sur sa tête une
couronne d'or. La vie qu'il t'a demandée, tu la lui donnes, de longs
jours, des années sans fin. Par ta victoire, grandit son éclat:
tu le revêts de splendeur et de gloire. Tu mets en lui ta
bénédiction pour toujours: ta présence l'emplit de joie! Oui, le
roi s'appuie sur le Seigneur: la grâce du Très-Haut le rend
inébranlable." (Psaume 20, 2 à 8) S'agit-il, dans ces
versets, d'une allusion à ce qui sera, mille ans plus tard, la
résurrection de Jésus?
Malheureusement les
ennemis de Dieu sont toujours là: "Ta main trouvera tes ennemis,
ta droite trouvera tes adversaires. Tu parais, tu en fais un
brasier: la colère du Seigneur les consume, un feu les dévore. Tu
aboliras leur lignée sur la terre et leur descendance parmi les
hommes. S'ils trament le mal contre toi, s'ils préparent un complot,
ils iront à l'échec. Oui, tu les renverses et les terrasses; ton arc
les vise en plein cœur. Dresse-toi, Seigneur, dans ta force:
nous fêterons, nous chanterons ta vaillance." (Ps 20, 9 à 14)
8-1-3-La
soif de Dieu
David, réfugié dans le
désert de Juda, exprime son grand désir de Dieu, sa grande soif de
Dieu tout au long du psaume 62. Est-ce une allusion à la future
parole que prononcera Jésus au moment de mourir: "J'ai soif!"
"Dieu, tu es mon
Dieu, je te cherche dès l'aube: mon âme a soif de toi; après toi
languit ma chair, terre aride, altérée, sans eau. Je t'ai
contemplé au sanctuaire, j'ai vu ta force et ta gloire. Ton amour
vaut mieux que la vie: tu seras la louange de mes lèvres!"
(Ps 62, 2 à 4)
David rédige et chante
ce psaume. Mais, nous savons que Jésus, après sa résurrection a dû
expliquer à ses apôtres, tout ce qui Le concernait dans l'Écriture.
Ce qui suit est peut-être aussi comme une sorte de prophétie de la
vie de prière de Jésus pendant sa vie publique, l'institution de
l'Eucharistie et la nuit d'agonie de Jésus à Gethsémani. Le
psalmiste chante: "Toute ma vie je vais te bénir, lever les mains
en invoquant ton nom. Comme par un festin je serai rassasié;
la joie sur les lèvres, je dirai ta louange. Dans la nuit, je me
souviens de toi et je reste des heures à te parler. Oui, tu
es venu à mon secours: je crie de joie à l'ombre de tes ailes. Mon
âme s'attache à toi, ta main droite me soutient." (Ps 62, 5 à 9)
Mais de nouveau le
psalmiste revient à sa réalité à lui, sa réalité de guerrier
toujours menacé par des ennemis implacables: "Mais ceux qui
pourchassent mon âme, qu'ils descendent aux profondeurs de la
terre, qu'on les passe au fil de l'épée, qu'ils deviennent la
pâture des loups! Et le roi se réjouira de son Dieu. Qui jure par
lui en sera glorifié, tandis que l'homme de mensonge aura la bouche
close!" (Ps 62, 10 à 12)
Il y a de nombreux
dénominateurs communs dans les psaumes. Ainsi, tout au long des
psaumes, l'homme cherche Dieu, et cette recherche de Dieu
s'exprimera à plusieurs reprises par l'expression: "J'ai soif". Nous
venons de voir comment, dans le psaume 62, l'âme de David a soif de
Dieu. Dans le psaume 41, l'auteur est altéré: "Comme un cerf
altéré cherche l'eau vive, ainsi mon âme te cherche toi, mon
Dieu. Mon âme a soif de Dieu, le Dieu vivant; quand
pourrai-je m'avancer, paraître face à Dieu?" Car c'est de Dieu
que l'homme a soif; lui qui "n'a d'autre pain que ses larmes, le
jour, la nuit, lui qui chaque jour entends dire: 'Où est-il ton
Dieu?' Et l'homme se rappelle les beaux jours d'autrefois:
"Je me souviens, et mon âme déborde: en ce temps-là, je franchissais
les portails! Je conduisais vers la maison de mon Dieu la
multitude en fête, parmi les cris de joie et les actions de grâce."
(Ps 41, 2 à 5)
L'homme se souvient et
retrouve l'espérance: "Pourquoi te désoler, ô mon âme, et gémir
sur moi? Espère en Dieu! De nouveau je rendrai grâce: il est mon
sauveur et mon Dieu! Si mon âme se désole, je me souviens de toi,
depuis les terres du Jourdain et de l'Hermon, depuis mon humble
montagne." (Ps 41, 6 et 7)
Dieu comble celui qui
espère: "L'abîme appelant l'abîme à la voix de tes cataractes,
la masse de tes flots et de tes vagues a passé sur moi. Au long
du jour, le Seigneur m'envoie son amour; et la nuit, son
chant est avec moi, prière au Dieu de ma vie." (Ps 41, 8 et 9)
Et le psalmiste, certes
sans le savoir, évoque la Passion de Jésus: "Je dirai à Dieu, mon
rocher: 'Pourquoi m'oublies-tu? Pourquoi vais-je assombri,
pressé par l'ennemi?' Outragé par mes adversaires, je suis meurtri
jusqu'aux os, moi qui chaque jour entends dire: 'Où est-il ton
Dieu?' Pourquoi te désoler, ô mon âme, et gémir sur moi? Espère en
Dieu! De nouveau je rendrai grâce: il est mon sauveur et mon
Dieu." Le psalmiste a-t-il ici comme une vision de
l'avenir, non seulement du Messie, qui sera rejeté par les hommes,
mais de ce qui arrivera également à son œuvre? (Ps 41, 10 à 13)
L'homme est heureux. Il
commence à espérer, quoique très vaguement, un sauveur, un messie.
Pour l'âme qui espère et qui rend grâce, ce messie sera cependant
"son sauveur et son Dieu." Mais alors pourquoi le Sauveur
sera-t-il rejeté? Il sera, non seulement rejeté, mais traîné en
justice, accusé injustement, outragé. Cependant, il sera toujours
près du pauvre pour l'aider. Le psaume 108 exprime cela d'une façon
étonnante de vérité. C'est le Sauveur Lui-même qui prie par
l'intermédiaire du psalmiste:
"Seigneur, mon Dieu
et mon salut, dans cette nuit où je crie en ta présence, que
ma prière parvienne jusqu'à toi, ouvre l'oreille à ma plainte.
Car mon âme est rassasiée de malheur, ma vie est au bord de
l'abîme." (Ps 108, 2 à 4) C'est déjà la trahison, suivie
d'un ignoble procès: "On me voit déjà descendre à la fosse, je
suis comme un homme fini. Pour prix de mon amitié, ils
m'accusent, moi qui ne suis que prière. Ils me rendent
le mal pour le bien, ils paient mon amitié de leur haine:
'Chargeons un impie de l'attaquer: qu'un accusateur se tienne à
sa droite. À son procès, qu'on le déclare impie, que sa prière soit
comptée comme une faute. Que les jours de sa vie soient écourtés,
qu'un autre prenne sa charge'." (Ps 108, 5 à 8)
Et voici que ce sont
les successeurs du Sauveur qui sont, eux aussi, attaqués, humiliés:
"Que ses fils deviennent orphelins, que sa femme soit veuve.
Qu'ils soient errants, vagabonds, ses fils, qu'ils mendient,
expulsés de leurs ruines. Qu'un usurier saisisse tout son bien, que
d'autres s'emparent du fruit de son travail. Que nul ne lui reste
fidèle, que nul n'ait pitié de ses orphelins. Que soit retranchée sa
descendance, que son nom s'efface avec ses enfants." (Ps 108, 9
à 13)
Mais ceux qui accusent
les mauvais ne sont-ils pas, eux aussi, de grands pécheurs? D'où la
plainte du psalmiste, plainte encore bien dénuée de la moindre
charité: "Qu'on rappelle au Seigneur les fautes de ses pères, que
les péchés de sa mère ne soient pas effacés. Que le Seigneur garde
cela devant ses yeux, et retranche de la terre leur mémoire! Ainsi,
celui qui m'accuse oublie d'être fidèle: il persécute un pauvre,
un malheureux, un homme blessé à mort. Puisqu'il aime la
malédiction, qu'elle entre en lui; il refuse la bénédiction, qu'elle
s'éloigne de lui! Il a revêtu comme un manteau la malédiction,
qu'elle entre en lui comme de l'eau, comme de l'huile dans ses os!
Qu'elle soit l'étoffe qui l'habille, la ceinture qui ne le quitte
plus! C'est ainsi que le Seigneur paiera mes accusateurs, ceux qui
profèrent le mal contre moi." (Ps 108, 14 à 20)
Le psalmiste comprend
qu'il est pauvre, abandonné, délaissé. Il implore le Seigneur. Mais,
si on réfléchit un peu, n'est-ce pas Jésus-Christ, abandonné du
Père, qui appelle son soutien et sa grâce? "Mais toi, Seigneur
Dieu, agis pour moi à cause de ton nom. Ton amour est fidèle:
délivre-moi. Vois, je suis pauvre et malheureux; au fond de
moi, mon cœur est blessé. Je m'en vais comme le jour qui
décline, comme l'insecte qu'on chasse. J'ai tant jeûné que mes
genoux se dérobent, je suis amaigri, décharné. Et moi, on me
tourne en dérision, ceux qui me voient hochent la tête. Aide-moi,
Seigneur mon Dieu : sauve-moi par ton amour! Ils connaîtront que là
est ta main, que toi, Seigneur, tu agis. Ils maudissent, toi, tu
bénis…" (Ps 108, 21 à 28)
Hélas! Le psalmiste
revient vite à ses vieilles habitudes et se réjouit du malheur de
ses ennemis: "ils se sont dressés, ils sont humiliés: ton
serviteur est dans la joie. Qu'ils soient couverts d'infamie, mes
accusateurs, et revêtus du manteau de la honte! À pleine voix, je
rendrai grâce au Seigneur, je le louerai parmi la multitude, car il
se tient à la droite du pauvre pour le sauver de ceux qui le
condamnent." (Ps 108, 28 à 31)
8-3-1-Quelques
jours avant la Passion de Jésus
Nous avons vu plus
haut, comment le Seigneur, après sa résurrection, tandis qu'Il
marchait avec ses disciples vers la localité d'Emmaüs, leur montra
comment tout ce qui le concernait était déjà inscrit dans les
Écritures. Ainsi, dans les psaumes, il est souvent question du
Messie et de son rejet par son peuple. Nous allons poursuivre
l'étude de quelques-uns de ces psaumes que l'on pourrait appeler:
"Psaumes de la Passion de Jésus". Voici une prière, attribuée à
David, mais qui, à quelques versets près, pourrait être attribuée à
Jésus, quelques jours avant sa Passion: "Mon
Dieu, écoute ma prière, n'écarte pas ma demande. Exauce-moi, je t'en
prie, réponds-moi; inquiet, je me plains.
Je suis troublé par les cris de l'ennemi
et les injures des méchants; ils me chargent de crimes, pleins de
rage, ils m'accusent.
Mon cœur se tord en moi, la peur de la mort tombe sur moi; crainte
et tremblement me pénètrent, un frisson me saisit. (Ps
54, 2 à 6)
Mais Jésus, poursuivant
la prière du psaume voit tous les désordres qui menacent la ville:
"Alors, j'ai dit: 'Qui me donnera
des ailes de colombe? Je volerais en lieu sûr;
loin, très loin, je m'enfuirais pour
chercher asile au désert.'
J'ai hâte d'avoir un abri contre ce
grand vent de tempête! Divise-les, Seigneur, mets la confusion dans
leur langage! Car je vois dans la ville discorde et violence:
de jour et de nuit, elles tournent en haut de ses remparts.
Au-dedans, crimes et malheurs;
au-dedans, c'est la ruine: fraude et
brutalité ne quittent plus ses rues." Et aussi: "Que la mort les
surprenne, qu'ils descendent vivants dans l'abîme, car le mal habite
leurs demeures, il est au milieu d'eux."
(Ps 54, 7 à 12)
Jésus vient, en quelque sorte, de décrire
le tableau de Jérusalem et des foules qui l'insulteront et le
condamneront. Mais voici Judas, le traître, qui apparaît: "Si
l'insulte me venait d'un ennemi, je pourrais l'endurer; si mon rival
s'élevait contre moi, je pourrais me dérober.
Mais toi, un homme de mon rang, mon
familier, mon intime!
Que notre entente était bonne, quand nous allions d'un même pas
dans la maison de Dieu!" (Ps 54, 13 à 15) Et plus loin:
"Un traître a porté la
main sur ses amis, profané son alliance:
il montre un visage séduisant, mais
son cœur fait la guerre; sa parole est plus suave qu'un
parfum, mais elle est un poignard." (Ps 54, 21 et 22)
Pourtant la confiance revient vite:
"Pour moi, je crie vers
Dieu; le Seigneur me sauvera.
Le soir et le matin et à midi, je me
plains, je suis inquiet. Et Dieu a entendu ma voix,
il m'apporte la paix. Il me délivre dans
le combat que je menais; ils étaient une foule autour de moi.
Dieu entendra, et il les humiliera, Lui qui de toute éternité est
assis sur son trône. Car il n'y a point en eux de changement, et ils
ne craignent point Dieu. Que Dieu
entende et qu'il réponde, lui qui règne dès l'origine, à ceux-là
qui ne changent pas, et ne craignent pas Dieu.
Décharge ton fardeau sur le Seigneur: il
prendra soin de toi. Jamais il ne permettra que le juste
s'écroule. Et
toi, Dieu, tu les précipites au fond de la tombe, ces hommes qui
tuent et qui mentent. Ils s'en iront dans la force de l'âge; moi,
je m'appuie sur toi!" (Ps 54, 17 à 24)
Le psaume 68 va encore
plus loin dans la détresse de Jésus. On pourrait presque Le
contempler durant son agonie à Gethsémani. Nous ne donnerons ici que
quelques exemples. Ainsi, le psalmiste "voit" le Messie crier,
supplier Dieu: "Sauve-moi, mon Dieu: les eaux montent
jusqu'à ma gorge! J'enfonce dans la vase du gouffre, rien qui me
retienne; je descends dans l'abîme des eaux, le flot m'engloutit.
Je m'épuise à crier, ma gorge brûle. Mes yeux se sont usés
d'attendre mon Dieu. Plus abondants que les cheveux de ma tête,
ceux qui m'en veulent sans raison; ils sont nombreux, mes
détracteurs, à me haïr injustement. (Ps 68, 2 à 5) "je
suis un étranger pour mes frères, un inconnu pour les fils de ma
mère. L'amour de ta maison m'a perdu; on t'insulte, et l'insulte
retombe sur moi. Si je pleure et m'impose un jeûne, je reçois
des insultes; si je revêts un habit de pénitence, je deviens la
fable des gens… (Ps 68, 9 à 12)
On croirait entendre
Jésus prier le Père pour que le calice qu'Il entrevoit à Gethsémani
passe loin de Lui: "Et moi, je te prie, Seigneur: c'est
l'heure de ta grâce; dans ton grand amour, Dieu, réponds-moi,
par ta vérité sauve-moi… Réponds-moi, Seigneur, car il est bon, ton
amour; dans ta grande tendresse, regarde-moi… Ne cache pas ton
visage à ton serviteur; je suffoque: vite, réponds-moi. Sois proche
de moi… (Ps 68, 14, 17, 18)
Mais le Père continue à
se taire: "L'insulte m'a broyé le cœur, le mal est incurable…"
Jésus restera seul: "J'espérais un secours, mais en vain,
des consolateurs, je n'en ai pas trouvé." (Ps 68, 21) Et
voici la Passion: "À mon pain, ils ont mêlé du poison;
quand j'avais soif, ils m'ont donné du vinaigre." (Ps 68,
22)
Le psalmiste revient à
son refrain habituel et humain de vengeance, mais, n'est-ce pas la
résurrection du Messie qu'il contemple maintenant? "Et moi,
humilié, meurtri, que ton salut, Dieu, me redresse. Et je
louerai le nom de Dieu par un cantique, je vais le magnifier, lui
rendre grâce… Les pauvres l'ont vu, ils sont en fête… Car le
Seigneur écoute les humbles, il n'oublie pas les siens
emprisonnés." (Ps 68, 30, 31, 33, 34) Et le monde est
sauvé: "Dieu viendra sauver Sion et rebâtir les villes de Juda.
Il en fera une habitation, un héritage: patrimoine pour les
descendants de ses serviteurs, demeure pour ceux qui aiment son
nom." (Ps 68, 36 et 37) Le psaume 97 reprendra cette allusion à
la résurrection: "car le Seigneur vient pour gouverner la
terre, pour gouverner le monde avec justice et les
peuples avec droiture! (97, 9)
Revenons à l'agonie de
Jésus. Le psaume 87 évoque lui aussi les mêmes thèmes de l'agonie de
Jésus à Gethsémani, avec des expressions presque identiques:
"Seigneur, mon Dieu et mon salut, dans cette nuit où je crie en ta
présence, que ma prière parvienne jusqu'à toi, ouvre l'oreille à
ma plainte, car mon âme est rassasiée de malheur, ma vie est au
bord de l'abîme; on me voit déjà descendre à la fosse, je suis comme
un homme fini. Ma place est parmi les morts, avec ceux que l'on a
tués, enterrés, ceux dont tu n'as plus souvenir, qui sont exclus, et
loin de ta main. Tu m'as mis au plus profond de la fosse, en des
lieux engloutis, ténébreux; le poids de ta colère m'écrase, tu
déverses tes flots contre moi. Tu éloignes de moi mes amis,
tu m'as rendu abominable pour eux; enfermé, je n'ai pas d'issue:
à force de souffrir, mes yeux s'éteignent. Je t'appelle,
Seigneur, tout le jour, je tends les mains vers toi." (Ps 87, 2
à 10) "Moi, je crie vers toi, Seigneur; dès le matin, ma
prière te cherche: pourquoi me rejeter, Seigneur, pourquoi me
cacher ta face. Tu éloignes de moi amis et familiers; ma
compagne, c'est la ténèbre." (Ps 87, 14, 15 et 19)
Mais Dieu, après une
longue attente, a pleinement exaucé son enfant plein d'espoir. C'est
ce que le psaume 39 révèle, en s'appuyant sur l'incarnation de la
Parole de Dieu: "D'un grand espoir j'espérais le Seigneur: il
s'est penché vers moi pour entendre mon cri. Il m'a tiré de
l'horreur du gouffre, de la vase et de la boue; il m'a fait
reprendre pied sur le roc, il a raffermi mes pas." (Ps 39, 2 et
3) "Heureux est l'homme qui met sa foi dans le Seigneur
et ne va pas du côté des violents, dans le parti des traîtres…"
Tu ne voulais ni offrande ni sacrifice, tu as ouvert mes oreilles;
tu ne demandais ni holocauste ni victime, alors j'ai dit:
'Voici, je viens.' Dans le livre, est écrit pour moi ce que tu
veux que je fasse. Mon Dieu, voilà ce que j'aime: ta loi me tient
aux entrailles..." (Ps 39, 5, 7 à 9)
"Daigne,
Seigneur, me délivrer; Seigneur, viens vite à mon secours!
Mais tu seras l'allégresse et la joie de tous ceux qui te
cherchent; toujours ils rediront: 'Le Seigneur est grand!'
ceux qui aiment ton salut." (Ps 39, 5, 14 et 17)
8-3-2-La
mort de Jésus
Le psaume 21 est
attribué à David. Dans quelles conditions ce psaume a-t-il été
composé? Nous ne le saurons probablement jamais. Mais ce qui est
sûr, c'est que, mille ans avant que les faits ne se réalisent, le
psalmiste semble assister à la mort du Messie. Ici, le psalmiste est
comme entré dans le corps de Jésus mourant, et ses paroles peuvent
être attribuées à Jésus Lui-même:
"Mon
Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné? Le salut est loin de
moi, loin des mots que je rugis.
Mon Dieu, j'appelle tout le jour, et
tu ne réponds pas; même la nuit, je n'ai pas de repos.
Toi, pourtant, tu es saint, toi qui
habites les hymnes d'Israël!
C'est en toi que nos pères espéraient,
ils espéraient et tu les délivrais.
Quand ils criaient vers toi, ils
échappaient; en toi ils espéraient et n'étaient pas déçus." (Ps 21,
1 à 6)
Le Père continue à se taire, tandis que
Jésus meurt dans des conditions épouvantables, raillé, outragé,
moqué par des spectateurs impitoyables: "Et
moi, je suis un ver, pas un homme, raillé par les gens,
rejeté par le peuple.
Tous ceux qui me voient me bafouent, ils ricanent et hochent la
tête: 'Il comptait
sur le Seigneur: qu'il le délivre! Qu'il le sauve, puisqu'il est son
ami!' (Ps 21, 7 à 11)
Pourtant sa naissance fut bien
accueillie: "C'est toi qui
m'as tiré du ventre de ma mère, qui m'a mis en sûreté entre ses
bras. À toi je fus confié
dès ma naissance; dès le ventre de ma mère, tu es mon Dieu."
(Ps 21, 12) Mais maintenant, pourquoi cet abandon? "Ne
sois pas loin: l'angoisse est proche, je n'ai personne pour
m'aider. Des
fauves nombreux me cernent, des taureaux de Basan m'encerclent.
Des lions qui déchirent et rugissent
ouvrent leur gueule contre moi." (Ps 21, 13 et 14)
Nous venons de reconnaître tous ceux qui
accusaient Jésus injustement; maintenant voici la révélation du
Sacré-Cœur: "Je suis
comme l'eau qui se répand, tous mes membres se disloquent.
Mon cœur est comme la cire, il fond au milieu de mes
entrailles." (Ps 21, 15) Et Jésus a soif: "Ma
vigueur a séché comme l'argile, ma langue colle à mon palais.
Tu me mènes à la poussière de la mort." (Ps 21, 16)
Et la description du tableau continue,
qui sera reprise plus tard par le prophète Zacharie: "Oui,
des chiens me cernent, une bande de vauriens m'entoure. Ils me
percent les mains et les pieds;
je peux compter tous mes os. Ces
gens me voient, ils me regardent.
Ils partagent entre eux mes habits et
tirent au sort mon vêtement." (Ps 21, 17 à 19)
Mais la mort ne sera pas victorieuse:
"Mais
toi, Seigneur, ne sois pas loin: ô ma force, viens vite à mon aide!
Préserve ma vie de l'épée,
arrache-moi aux griffes du chien;
sauve-moi de la gueule du lion et de la
corne des buffles. Tu m'as répondu!
Et je proclame ton nom devant mes
frères, je te loue en pleine assemblée.
Vous qui le craignez, louez le Seigneur,
glorifiez-le, vous tous, descendants de Jacob, vous tous,
redoutez-le, descendants d'Israël.
Car il n'a pas rejeté, il n'a pas
réprouvé le malheureux dans sa misère; il ne s'est pas voilé la face
devant lui, mais il entend sa plainte." (Ps 21, 20 à 25)
Et le Messie, ressuscité, est dans la
louange: "Tu seras ma
louange dans la grande assemblée; devant ceux qui te craignent, je
tiendrai mes promesses.
Les pauvres mangeront: ils seront
rassasiés; ils loueront le Seigneur, ceux qui le cherchent: 'À
vous, toujours, la vie et la joie!'
La terre entière se souviendra et
reviendra vers le Seigneur, chaque famille de nations se
prosternera devant lui:
'Oui, au Seigneur la royauté, le pouvoir sur les nations!'
Tous ceux qui festoyaient
s'inclinent; promis à la mort, ils plient en sa présence.
Et moi, je vis pour lui: ma
descendance le servira; on annoncera le Seigneur aux générations
à venir. On proclamera
sa justice au peuple qui va naître: Voilà son Œuvre!"
(Ps 21, 26 À 32)
Le psaume 141 résume
tout ce qui précède concernant le Messie. Pendant sa Passion Jésus
s'adresse au Père: "À pleine
voix, je crie vers le Seigneur! À pleine voix, je supplie le
Seigneur, je répands
devant lui ma plainte; devant lui, je dis ma détresse.
Lorsque le souffle me manque, toi,
tu sais mon chemin. Sur le sentier où j'avance, un piège m'est
tendu. Regarde à mes
côtés, et vois: personne qui me connaisse! Pour moi, il n'est
plus de refuge: personne qui pense à moi!
J'ai crié vers toi, Seigneur!
J'ai dit: 'Tu es mon abri, ma part, sur la terre des vivants.'
Sois attentif à mes appels: je
suis réduit à rien; délivre-moi de ceux qui me poursuivent: ils
sont plus forts que moi.
Tire-moi de la prison où je suis, que je rende grâce à ton nom.
Autour de moi, les justes feront cercle pour le bien que tu m'as
fait. (Ps 141, 2 à 8)
Toujours le Seigneur
sera le refuge et la force de son Messie, ainsi que l'annonçait déjà
le psaume 27 dans son verset 8 "Le
Seigneur est la force de son peuple, le refuge et le salut de
son messie." Le psaume 117 reprend toute l'histoire des hommes;
Il fait constamment allusion à la Passion de Jésus, mais à plusieurs
reprises il évoque la Résurrection du Messie. Oui, Israël doit dire
et redire: Éternel est l'amour du Seigneur: "Rendez
grâce au Seigneur: Il est bon! Éternel est son amour!
Oui, que le dise Israël: Éternel est son
amour! Que le dise la
maison d'Aaron: éternel est son amour!
Qu'ils le disent, ceux qui craignent le
Seigneur: Éternel est son amour!" (Ps 117, 1 à 4)
Après cette louange un
rappel de la Passion: "Dans mon
angoisse j'ai crié vers le Seigneur, et lui m'a exaucé, mis au
large. Le Seigneur est
pour moi, je ne crains pas; que pourrait un homme contre moi?
Le Seigneur est avec moi pour me
défendre, et moi, je braverai mes ennemis.
Mieux vaut s'appuyer sur le Seigneur que
de compter sur les hommes; mieux vaut s'appuyer sur le Seigneur que
de compter sur les puissants!" (Ps 117, 5 à 9)
Et de nouveau c'est la
Passion du futur Messie, mais avec toujours des accents de vengeance
liés à la mentalité juive de l'époque: "Toutes
les nations m'ont encerclé:
au nom du Seigneur, je les détruis! Elles m'ont cerné, encerclé: au
nom du Seigneur, je les détruis!
Elles m'ont cerné comme des guêpes: (ce
n'était qu'un feu de ronces), au nom du Seigneur, je les détruis!"
(Ps 117, 10 à 12) Mais le Seigneur vient au secours de son envoyé:
"On m'a poussé, bousculé pour m'abattre; mais le Seigneur m'a
défendu. Ma force et
mon chant, c'est le Seigneur; il est pour moi le salut." (Ps 117,
13 et 14)
Enfin c'est la résurrection: "Clameurs
de joie et de victoire sous les tentes des justes: le bras du
Seigneur est fort, le bras
du Seigneur se lève, le bras du Seigneur est fort!
Non, je ne mourrai pas, je vivrai
pour annoncer les actions du Seigneur:
il m'a frappé, le Seigneur, il m'a
frappé, mais sans me livrer à la mort.
Ouvrez-moi les portes de justice:
j'entrerai, je rendrai grâce au Seigneur. C'est ici la porte du
Seigneur: qu'ils entrent, les justes!
Je te rends grâce car tu m'as exaucé:
tu es pour moi le salut.
La pierre qu'ont rejetée les
bâtisseurs est devenue la pierre d'angle:
c'est là l'œuvre du Seigneur, la
merveille devant nos yeux." (Ps 117, 15 à 13)
La louange pascale alors peut reprendre
avec plus de vigueur, avec, curieusement, une allusion aux
acclamations des Rameaux: "Voici
le jour que fit le Seigneur, qu'il soit pour nous jour de fête et
de joie! Donne,
Seigneur, donne le salut! Donne, Seigneur, donne la victoire!
Béni soit au nom du Seigneur celui
qui vient! De la maison du Seigneur, nous vous bénissons!
Dieu, le Seigneur, nous illumine.
Rameaux en main, formez vos cortèges jusqu'auprès de l'autel.
Tu es mon Dieu, je te rends grâce,
mon Dieu, je t'exalte!
Rendez grâce au Seigneur: Il est bon! Éternel est son amour!
(Ps 117, 14 à 29)
Nous avons vu combien la Résurrection
est très liée à la Passion de Jésus: c'est ce qu'exprime, dans leur
langage toujours voilé pour ce qui concerne le messie, les psaumes
61 et 109. Ainsi, le psaume 61 est comme la traduction de la prière
de Jésus agonisant sur la croix: "Je n'ai de repos qu'en Dieu seul,
mon salut vient de lui.
Lui seul est mon rocher, mon
salut, ma citadelle: je suis inébranlable.
Combien de temps tomberez-vous sur un
homme pour l'abattre, vous tous, comme un mur qui penche, une
clôture qui croule?
Détruire mon honneur est leur seule pensée: ils se plaisent à
mentir. Des lèvres, ils bénissent; au fond d'eux-mêmes, ils
maudissent…" (Ps 61, 2 à 5)
Jésus mourant se remet
entre les mains de Dieu, tout en adressant ses derniers conseils aux
hommes: "Mon salut et ma
gloire se trouvent près de Dieu. Chez Dieu, mon refuge, mon
rocher imprenable! Comptez
sur lui en tous temps, vous, le peuple. Devant lui épanchez votre
cœur: Dieu est pour nous un refuge.
L'homme n'est qu'un souffle, les
fils des hommes, un mensonge: sur un plateau de balance, tous
ensemble, ils seraient moins qu'un souffle." Mais il y aura un
jugement; et si les hommes ont suivi les conseils du Seigneur, Dieu
leur rendra selon ce qu'ils auront fait: "N'allez
pas compter sur la fraude et n'aspirez pas au profit; si vous
amassez des richesses, n'y mettez pas votre cœur.
Dieu a dit une chose, deux choses que
j'ai entendues. Ceci: que la force est à Dieu;
à toi, Seigneur, la grâce!
Et ceci: tu rends à chaque homme selon ce qu'il fait".
(Ps 61, 6 à 13)
Le psaume 109 est plus
explicite et, incontestablement, présente le Messie ressuscité,
assis à la droite de Dieu: "Oracle
du Seigneur à mon seigneur: 'Siège à ma droite, et je ferai de
tes ennemis le marchepied de ton trône.' De Sion, le Seigneur te
présente le sceptre de ta force: 'Domine jusqu'au cœur de
l'ennemi.' Le jour où
paraît ta puissance, tu es prince, éblouissant de sainteté:
Comme la rosée qui naît de l'aurore, je t'ai engendré." (Ps 109, 1 à
3)
Le Messie n'est pas seulement le grand
roi, assis à la droite de Dieu, il est aussi le prêtre selon l'ordre
du roi Melkisédek, donc pas oint de la main des hommes: "Le
Seigneur l'a juré dans un serment irrévocable: 'Tu es prêtre à
jamais selon l'ordre du roi Melkisédek.' À ta droite se tient le
Seigneur: il brise les rois au jour de sa colère.
Il juge les nations: les cadavres
s'entassent; il brise les chefs, loin sur la terre.
Au torrent il s'abreuve en chemin, c'est
pourquoi il redresse la tête." (Ps 109, 4 à 7)
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