3
La vie publique de Jésus

3-1-Le Baptême de Jésus

3-1-1-L'Œuvre de Dieu

Le ciel et tous les anges chantaient les louanges et la gloire de Dieu. Les anges Te bénissaient, Toi, le Verbe de Dieu, le Fils unique destiné à rassembler dans une Unité incroyable car voulue de Dieu, l’ensemble de la Création. Les anges Te louaient, Verbe de Dieu, rassemblant en Toi Dieu et toute sa Création. Toi, Fils de Dieu et Fils de l’Homme, Dieu Unique dans le Père et l’Esprit, Toi Fils unique, Verbe du Père, dans l’Esprit Tu rassemblais déjà la Création pour réaliser ton Corps mystique, Œuvre de Dieu, l’ŒUVRE de Dieu, en Dieu.

Le mystère est si grand qu'il est inexprimable. Revenons à la création... Le Père a dévoilé le projet de son Œuvre globale et l'Incarnation du Fils à Lucifer qui se tait. Le Cœur du Père s’attriste car Il voit que son plus bel ange, destiné à tant de bonheur, est en train d’inventer le malheur, son malheur. Et le Père voit aussi que son pauvre Lucifer, devenu jaloux, va chercher à détruire son Œuvre, et les hommes en particulier. Alors, Dieu le Père qui veut réaliser son Œuvre, et dont rien ne pourra jamais contrecarrer la Sainte et Divine Volonté, car aucune volonté créée ne peut jamais aller contre sa Volonté Divine, incréée et éternelle, Dieu le Père envoie le Fils réparer les dégâts commis par le Jaloux et réussir une œuvre encore plus belle et plus merveilleuse, le Corps mystique du Fils bien-aimé, l’Œuvre de Dieu en Dieu. 

Comment cela se fera-t-il?...

3-1-2-Jésus prend le Péché du monde

C’était après le Baptême de Jésus dans le Jourdain. Jean Baptiste venait de découvrir la vraie nature de son cousin, son état civil en quelque sorte: il est le Fils de Dieu!!! Tout s’éclaire en Jean, qui ne peut s’empêcher de dire à ses disciples, André et Jean, en désignant Jésus: “Voici l’Agneau de Dieu, Celui qui enlève les péchés du monde.” Car Jésus n’était pas descendu dans l’eau du Jourdain comme les pécheurs, pour se repentir de ses péchés, mais pour prendre sur Lui tous les péchés de tous hommes de tous les temps, et les porter bientôt sur la Croix, et purifier tous les hommes...

Le mystère s’éclaircit un peu. Contemplant sa création, et, en particulier,  l’homme dont la perfection L’émerveillait, Dieu voulut “expérimenter” l’homme. Pour ce faire Il envoya son Fils et procéda, par son Esprit, à l’Incarnation de son Verbe et Fils bien-aimé. Ce Verbe incarné, ce fut Jésus. En effet, depuis la Création des hommes, les choses avaient changé: l’Homme, écoutant la voix perfide de Lucifer, devenu Satan, et de tous ses suppôts, avait malheureusement péché, souvent grandement péché, et il portait douloureusement le poids de ses fautes. Le Fils Lui, ne pêcherait jamais. Né d’une mère immaculée, il ne subirait jamais ni le poids, ni les contraintes du péché du monde. Le Fils était et resterait éternellement l’Innocent. Pourtant Dieu voulait vraiment “expérimenter” l’homme, devenu, hélas! pécheur.

Que faire?

Oui, que faire pour “expérimenter” les hommes, toujours merveilleux mais souillés et blessés à mort? Le Fils, Un avec le Père, se résolut à prendre tout simplement sur Lui-incarné, dans le Jourdain, dans sa chair préservée du péché et de ses conséquences, tous les péchés du monde. Et, ce faisant, Il prenait aussi toutes les blessures, toutes les souffrances, toutes les peines et les détresses humaines, et toutes ses faiblesses..., toutes, absolument toutes, pour les porter bientôt à Gethsémani et au Calvaire...

Jésus allait donc accomplir la route de sa vie publique en portant le poids des péchés des hommes et de toutes leurs souffrances. Ainsi Jésus, Fils de Dieu, Un avec le Père et l’Esprit, pourrait “expérimenter” non seulement les merveilles de l’espèce humaine, mais également ses faiblesses et toutes ses souffrances conséquences du péché. Le chemin de Croix que Jésus avait commencé dans son Cœur dès sa naissance, allait se poursuivre de plus en plus terrifiant et atrocement douloureux pendant trois ans, pour atteindre son paroxysme à Gethsémani et sur la Croix.

De ses souffrances à Gethsémani et sur la Croix, Jésus pourra dire en toute vérité: “Vos souffrances, je les ai toutes subies, toutes portées et supportées.” Oui, “c’étaient nos souffrances qu’Il portait.” C’était de nos péchés qu’Il nous délivrait. Dès l'instant de son Baptême dans le Jourdain, où Il prit sur Lui tous les péchés du monde et leurs conséquences, Jésus souffrit la douleur du monde. Cela se ferait non seulement pendant sa vie publique, mais tout au long des siècles, dans son Corps Mystique.

3-2-Les tentations de Jésus

3-2-1-Les tentations au désert

Nous savons tous qu'après son Baptême, Jésus, poussé par l'Esprit, se réfugia dans le désert pour y être tenté par le diable. Après avoir jeuné pendant quarante jours, Il eut faim... Rien d'étonnant à cela; mais Jésus résista à la tentation de l'extraordinaire en transformant les pierres en pain. Jésus, Dieu fait homme voulait expérimenter la faim physique des hommes... Le diable le transporta ensuite sur le faîte du temple et l'incita à se jeter en bas. Quelle réussite étonnante: les anges le porteraient sur leurs bras pour qu'Il ne se fasse aucun mal. Il va de soi que Jésus n'avait pas été transporté matériellement sur le faîte du temple: les tentations de ce genre se font en esprit, dans la pensée; ensuite il est temps de préparer, parfois longuement, la grande manifestation capable de transporter les foules et de les gagner. Non, encore une fois, Jésus ne se laissera pas tenter par ces choses extraordinaires: le Fils de l'Homme est venu pour expérimenter les faiblesses de l'homme et non pour mettre à son profit les dons que Dieu lui a donnés.

Alors le diable lui "montra" tous les royaumes du monde. Tous ces royaumes seront à Lui, Jésus-Christ, s'il commence par adorer Satan. Tentation subtile s'il en est! Satan n'a certainement pas dû agir ainsi, mais Lui montrer tous les avantages qu'Il aurait, pour remplir sa mission, à posséder d'immenses richesses, à disposer de grands moyens pour arriver à ses fins. Adorer Satan, c'est adorer toutes ses idoles, en un mot de disposer d'argent, de puissance et du pouvoir absolu, comme tous les grands de la terre. Et Lui, Jésus, n'est-Il pas le plus grand de tous! Cette grande tentation se fit dans le cœur et l'esprit de Jésus. Mais Jésus, Fils de Dieu, Créateur, n'adorera jamais Lucifer, sa créature. Satan le quitta, penaud et furieux…

3-2-2-Les tentations de Gethsémani

Jésus a vécu sa vie publique. Les dons divins qu'Il possédait, Il les a utilisés uniquement pour nourrir les foule ou guérir des malades. Jésus est resté très pauvre avec ses disciples. Jamais Il ne s'est imposé, toujours Il est resté fidèle à la Loi de son peuple, Loi qu'Il était venu accomplir et non abolir. Il n'a fait que du bien partout où Il passait. Pourtant les chefs du peuple ne veulent pas de Lui, et bientôt on va venir L'arrêter pour Le crucifier, car l'Heure est venue. Jésus vient d'en informer ses apôtres qui n'ont pas compris... Jésus vient d'instituer l'Eucharistie, et ses paroles de consécration n'ont pas encore éveillé chez les douze le souvenir des paroles scandaleuses qu'Il avait prononcées, quelque temps auparavant: "sa chair était une vraie nourriture et son sang un vrai breuvage."  Maintenant Jésus prie, à Gethsémani: Il attend le traître et les soldats qui l'accompagnent.

Gethsémani... Gethsémani! Jésus est accablé de tentations. À quoi bon son sacrifice! Pourquoi et pour qui tant de souffrances? De toutes façons ces malheureux hommes ne comprendront jamais... Ils continueront à pécher, à blasphémer, à s’entretuer... Trouvera-t-il encore la foi sur la terre quand Il reviendra? Et si ces jours de malheur spirituel, ceux que nous vivons, n’étaient abrégés, les élus eux-mêmes ne se soutiendraient pas... Mais seront-ils abrégés?

Jésus est accablé de tentations et Jésus supplie le Père d’éloigner de Lui ce calice. Tant d’âmes continueront à se perdre malgré sa Passion qui vient, sa Passion qui arrive vite, car c’est l’Heure. Et Jésus repense à ses premières tentations, après son long jeûne de quarante jours. Il allait commencer sa vie publique. Il connaissait ses pouvoirs, il pourrait faire de nombreux et extraordinaires miracles... Il pourrait devenir un chef puissant et respecté, ce Messie guerrier que son peuple attendait: ah! comme Il aurait été bien reçu alors. Il aurait pu apparaître sur les nuées du ciel et convaincre tout le monde! Il aurait pu être un maître puissant et vénéré, capable de montrer qu’Il était le vrai Fils de Dieu. Fils de Dieu!

Mais Dieu est humble, Dieu est pauvre, et le Fils, le Verbe ne pouvait être que pauvre et humble. Et Dieu qui a créé la terre, qui a fait la nature et qui l’a trouvée bonne, Dieu ne pouvait aller contre les lois parfaites de cette nature merveilleuse. Alors Jésus a renoncé aux grandes actions d’éclat. Jésus a choisi l’humilité de Dieu, Jésus a choisi la pauvreté, cette richesse du cœur qui conquiert les cœurs ouverts, le cœurs de ceux qui peuvent comprendre les Béatitudes: heureux les pauvres de cœur!

Jésus porte le poids des péchés du monde. Il est devenu péché à cause de nous, et le Père ne veut plus de Lui qui s'est fait péché quoiqu’Innocent. Parce que Jésus a obéi au Père, à toutes ses volontés, le Père semble Le rejeter. Jésus, humble et pauvre de cœur, pleure des larmes de sang!

Nous sommes là près de Vous, Jésus qui pleurez des larmes de sang. qui suez votre sang... Nous n’avons rien à Vous donner, rien à Vous offrir pour vous soulager: nous sommes si pauvres. Jésus, le poids des âmes qui se perdent Vous est insupportable, et nous sommes tous cause de votre douleur infinie. Que faire, Jésus, sinon Vous aimer et prier avec tous ceux qui Vous ont aimé? Que faire sinon dire avec les saints:

- Nous T’aimons Jésus, car Tu es Fils du Père, et donc mon Père aussi. Nous T’aimons parce que Tu es Amour. Ô Amour du Père et du Fils, Amour et Esprit Créateur, Esprit d’Amour qui soude la Trinité, Esprit de Dieu, Esprit de Jésus abandonné du Père. Jésus abandonné du Père mais pourtant toujours Un avec Lui dans l’éternelle étreinte de l’infini Amour...

- Nous T’aimons, ô Jésus, abandonné du Père pendant ta Passion et ta longue Agonie, abandonné mais pourtant Un avec Lui, et toujours le Bien-Aimé... Et nous sommes avec Toi, près de Toi, ô Jésus notre Sauveur.

- Nous T’aimons, notre Sauveur. Nous T’aimons de l’Amour que Tu as mis en nous. Nous T’aimons, émerveillés de Toi, émerveillés de ton Amour, émerveillés et éblouis de Dieu. Nous T’aimons, ô Toi, notre vérité, notre vie, notre chemin et notre sécurité.

- Nous T’aimons parce que Tu nous aimes, parce que Tu veux nous faire partager ton bonheur, ton bonheur infini, ton bonheur éternel. Nous T’aimons parce que Tu l’as voulu. Nous ne sommes rien sans Toi. Nous n’existons que par Toi. Nous ne vivons que pour Toi qui as rempli nos cœurs. Si nous vivons, c’est pour Toi... Si nous aimons, c’est pour Toi... Si nous chantons, c’est encore pour Toi. Si nous souffrons, c’est toujours pour Toi. Car l’Amour est douleur, Tu le sais mieux que nous.

- L’amour est douleur, l’Amour porte la Croix, l’Amour pleure de n’être pas aimé. Ton Amour, ô Seigneur est un Amour de joie souvent baigné de larmes. Ton Amour, ô Jésus, est bonheur et douleur. Il est paix dans les peines et les bourrasques. Il est notre joie, il est notre tristesse. Il est calme dans les tempêtes. Mais notre cœur saigne, Seigneur, dans l’Amour de ton cœur car Tu n’es pas aimé. Car Tu es incompris des hommes trop pécheurs, des hommes désespérés qui ont perdu l’espoir, qui ne peuvent plus accepter ton espérance, l’espérance que Tu apportes quand ton cri de détresse traverse les siècles et les mondes: “Père! pourquoi m’as-Tu abandonné?...”

- Nous T’aimons, Jésus, notre Sauveur et notre joie. Nous T’aimons, Jésus, parce que Tu es l’Amour et parce que Tu nous aimes. Tu nous aimes, Tu nous as toujours aimé, de toute éternité. Nous T’aimons, Jésus, Toi qui nous as délivré du péché, de l’Enfer. Nous T’aimons, ô Jésus, car Tu es tout pour nous. Et nous sommes à Toi.

3-3-Les Béatitudes

Nous connaissons tous par cœur les  Béatitudes que Jésus nous a proposées:

Voyant les foules, Jésus monta sur la montagne, et lorsqu'il se fut assis, ses disciples s'approchèrent de lui. Alors, prenant la parole, il se mit à les enseigner, en disant :

Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux! Heureux ceux qui sont affligés, car ils seront consolés!

Heureux ceux qui sont doux, car ils posséderont la terre!

Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés!  Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde! 8

Heureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu!

Heureux les pacifiques, car ils seront appelés enfants de Dieu!

Heureux ceux qui souffrent persécution pour la justice, car le royaume des cieux est à eux!

Heureux serez-vous, lorsqu'on vous insultera, qu'on vous persécutera, et qu'on dira faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi. Réjouissez-vous alors, soyez dans l'allégresse, parce que votre récompense est grande dans les cieux; car c'est ainsi qu'ils ont persécuté les prophètes qui ont été avant vous. (Matthieu, 5, 1 à 12)

Ces béatitudes ont été commentées des millions de fois, aussi ne recommencerons-nous pas. Mais nous allons essayer de voir, comment chacun à sa façon, peut les vivre et découvrir ainsi l'immense amour de Dieu pour nous, ainsi que notre petite réponse. Et nous serons émerveillés par d'autres béatitudes que Jésus n'a pas mentionnées clairement mais auxquelles Il devait penser, nous laissant le soin de les mettre au jour.

3-3-1-Heureux les pauvre de cœur

Nous voici devant Vous, Seigneur, pauvres et démunis de tout. Nous nous sentons si faibles, si fragiles, si impuissants. Nous sommes pauvres devant Vous, Jésus, qui êtes l'Amour, le merveilleux Amour de Dieu. Nous sommes pauvres d’amour, et pourtant nous Vous aimons, car nous savons que Vous nous aimez, nous savons que Vous nous donnez tout l’Amour dont nous avons besoin pour Vous en rendre un peu.

Nous sommes pauvres d’Amour, devant Vous, ô Jésus... Si pauvres! Nous n'avons que notre pauvreté à Vous offrir, la pauvreté qui remplit tout notre être, nous n'avons que cela. Est-ce cela que Vous voulez de nous? Est-ce pour cela que vous venez à la rencontre de notre pauvreté, pour nous combler de la béatitude de ceux qui possèdent le Royaume des cieux, de ceux qui contemplent vos merveilles?

Oui, Jésus,  maintenant nous allons regarder dans la même direction que Vous. Car on dit bien: “Aimer, c’est regarder ensemble dans la même direction.” Alors nous Vous regardons et nous suivons votre regard. Nos yeux suivent votre regard pour regarder avec Vous tout ce que Vous aimez, ce qui Vous intéresse. Nos yeux suivent votre regard pour admirer ce que Vous admirez, pour contempler ce que Vous contemplez, pour aimer tout ce que Vous aimez... Dans l’admiration ou dans la compassion.

Vous regardez, Jésus, toute la Création, cette Œuvre merveilleuse née de votre Parole, jaillie de votre Verbe. Vous regardez les mondes merveilleux que Vous avez créés et confiés à vos anges. Vous regardez tous les êtres vivants doués de sensibilité pour être la joie des hommes. Vous regardez enfin les hommes, les pauvres hommes que nous sommes, ces hommes qui sont vôtres et que Vous aimez tant. Ces hommes à qui Vous avez donné la terre pour la peupler et la faire fructifier.

Et elle est si belle cette terre que parfois nous, pauvres hommes, nous avons la tentation de nous y arrêter, de la saisir, de la prendre et de l’utiliser, de nous en faire un dieu... Alors Jésus, votre regard s’éloigne des créatures et nous invite à Le suivre. Votre regard s’éloigne des choses que Vous avez créées et qui peuvent devenir pièges pour nous, si nous n’y prenons garde, si nous oublions que ce n’est pas pour la création que Vous nous avez façonnés à votre image, mais pour Vous. Alors Jésus, votre regard se tourne vers le Père. Votre regard se tourne vers le Père et se perd dans un Amour infini, incréé, éternel, votre Amour, l’Amour du Père et du Fils, l’Amour qui est Vous, l’Amour qui est l’Esprit. Votre regard nous regarde, Jésus, et nous invite à le suivre pour découvrir le Père, pour découvrir l’Esprit, pour découvrir l’Amour...

Votre regard nous invite, ô Jésus, à découvrir l’Amour que Vous êtes. Et soudain nous nous ne savons plus rien, nous ne sommes plus rien qu’embryon d’amour destiné à grandir. À grandir pour Vous, à grandir en Vous, à grandir et à nous perdre en Vous. Votre regard nous invite Jésus à contempler la Trinité... Bien sûr nous ne comprenons rien. Nous Vous regardons Jésus, c’est tout. Et nous nous taisons... Et nous Vous aimons, c’est tout. Malgré notre pauvreté et malgré notre misère. Et malgré nos péchés, et malgré notre indignité. Et malgré notre petitesse, et malgré notre faiblesse. Et malgré tout. Nous Vous aimons, Jésus, c’est tout, car Verbe de Dieu, Fils unique du Père, Vous êtes aussi Amour. Et tellement Amour! Et nous sommes si pauvres, tellement pauvres d'amour! Nos cœurs sont si pauvres, Seigneur, et pourtant bienheureux...

Les pauvres que Jésus aime, ce sont les pauvres de cœur, ce sont ceux qui savent aimer, partager, aimer leurs frères, mais sans se montrer, discrètement. Jésus a aimé Lazare et ses sœurs. Il aimait se retrouver chez eux, et Il mangeait avec eux. Pourtant, c’étaient des riches, mais Il devait ouvrir leurs cœurs pour qu'ils deviennent des cœurs de pauvres, des cœurs ouverts à Dieu, des cœurs qui savent que Tout vient de Dieu, et qui vivent dans la confiance. Ouvrons nos cœurs à la pauvreté, la pauvreté de ceux qui sont bons et généreux, même s’ils sont riches matériellement. Car il faut bien des riches qui soient bons pour venir en aide à ceux qui n’ont pas le nécessaire.

3-3-2-Bienheureux les cœurs pauvres et humbles

“Bienheureux les cœurs humbles, ils seront près de Dieu et ils vivront en Dieu.”

Parfois, pour des raisons diverses, nous sommes comme dans un monde de ténèbres; nous nous sentons effroyablement démunis et impuissants, complètement dépassés, et incapables d’avancer. Et soudain, voici que nous nous mettons à sourire, car une occasion nous est donnée qui nous conduit à approfondir la béatitude des cœurs humbles. Bienheureux les cœurs humbles, ils seront près de Dieu et ils vivront en Lui.

Bienheureux les cœurs humbles, ils seront près de Dieu et ils vivront en Dieu! Contemplons Jésus. Tout en Lui est douceur et humilité, car, homme parmi les hommes, mais Dieu aussi, donc Amour empli de la Sagesse créatrice de Dieu, Il connaît la vraie place de l’homme, sa grandeur et sa petitesse, son extrême faiblesse, et sa vulnérabilité. Et Il sait que l’homme n’est que par Dieu qui le crée à chaque instant. Il sait que l’homme n’est rien, ne peut rien par lui-même, et qu’il disparaîtrait instantanément si Dieu cessait de le penser, cessait de le vouloir.

Quand nous méditons sur ces réalités nous sommes pris de vertige, un vertige qui pourrait être destructeur s’il ne se réfugiait pas immédiatement dans l'Amour de Dieu et sa miséricorde, s’il ne se plongeait pas, s’il ne s’abandonnait pas dans la confiance, une confiance éperdue en Dieu, l’Amour Tout-Puissant Créateur. Jésus-Homme savait tout cela quand, sur la terre, Il partageait notre nature, nos contraintes et nos contingences. Mais l’orgueil n’était pas en Jésus, et sa dimension humaine restait parfaitement à sa place. Devant le Père, le Fils, incarné pour sauver l’homme, ne pouvait qu’être humble, car c’est en étant humble qu'Il était toujours le Fils.

Jésus-Christ, Dieu égal au Père, mais ayant choisi notre nature humaine pour parfaire la Création et réaliser son Corps mystique qui achèverait, de la manière que Dieu voulait depuis le commencement, l’union de la matière à la vie des esprits, Jésus-Christ ne pouvait qu’être humble, étroitement uni au Père et assumant notre matière.

Jésus était doux et humble, car son Cœur ne faisait qu’un avec le Cœur du Père. Dans une éternelle étreinte d’Amour, son Cœur se perdait dans le Cœur du Père pour être le Cœur éternel et unique de Dieu. Entre le Père et Lui, Jésus, Fils du Père, c’est l’accord éternel et parfait, c’est l’obéissance amoureuse et libre unie à la volonté amoureuse du Père avec qui Il est un, c’est l’unicité d’une Trinité qui est trine car elle est Amour. Et dans cette unité des Trois, dans cette égalité des Trois, il ne peut exister aucune rivalité... Dieu, forcément est humble, de l’humilité de l’Amour.

Dieu est Amour, et Dieu est bonheur infini, et Dieu est humble. Incarné parmi nous, Jésus-Dieu-fait-homme, restait humble. Et Il voulait que l’homme, créé à l’image de Dieu, mais déformé par le péché, redevienne la véritable image de Dieu, redevienne donc humble. Seulement alors, libéré de l’ennemi et de son orgueil, l’homme serait heureux. Il reviendrait vers Dieu, pourrait vivre avec Dieu et pourrait vivre en Dieu.

Bienheureux les cœurs humbles, ils seront près de Dieu, et ils vivront en Dieu.

Encore une fois l'Amour de Dieu pour nous nous bouleverse: il est trop grand pour nous. Dieu de Miséricorde, ton Amour est trop grand pour nous, et pourtant nous y aspirons de tout notre être. Ce désir nous étreint et nous brise à la fois. Nos cœurs sont trop petits pour accueillir, Jésus. Nos cœurs éclatent quand Il vient à nous. Nos cœurs et nos corps nous font mal lorsque Jésus s'approche... Ce sont les saints qui nous l'ont dit. Mais c'est notre bonheur, notre bonheur en Lui, en son Cœur doux et humble.

3-3-3-Bienheureux les doux

“Bienheureux les doux car ils posséderont la terre.” Cette béatitude énoncée par Jésus est bien connue, mais la connaissons-nous vraiment? Et puis, que signifier "posséder la terre" alors que Jésus nous incite plutôt à renoncer aux biens du monde? Cependant, si on complète un peu la phrase en disant: “Bienheureux les doux car ils posséderont la terre, c’est-à-dire le Corps de Jésus, le Pain Eucharistique, pour entrer dans un Cœur à cœur éternel avec le Seigneur,” alors, tout change. Jésus, doux et humble de Cœur, nous propose sa béatitude d’Amour: “Heureux les doux car ils Me posséderont.”

Heureux les doux et les humbles de cœur car Jésus leur partage son Pain Eucharistique, le Pain de Vie qui donne vie, le Pain de l’Amour qui se donne et qui donne l’Amour. Heureux les doux car ils partagent déjà la douceur et l’humilité du Cœur de Jésus! Quelle merveille étonnante! La terre promise, la terre que les doux possèdent déjà, c’est le Corps très Saint de Jésus, livré pour nous, toujours présent et vivant parmi nous et en nous; la terre promise, c’est Jésus qui se donne dans son Cœur Eucharistique.

Jésus, laisse-nous contempler ton humilité, laisse-nous T’adorer dans ton Cœur qui nous donne ton Amour, qui nous appelle, qui mendie notre amour et qui nous dit: “Je t’aime, en retour aime-Moi. Aime-Moi dans ma douceur, dans mon humilité. Aime-Moi, Fils de Dieu, Fils du Père, mais aussi Fils de l’Homme. Aime-Moi dans mon Eucharistie, aime-Moi dans tes frères, tous tes frères, tous, sans exception car Je les aime tous. Pour tous les hommes J’ai accepté la volonté du Père; pour tous les hommes Je me suis offert au Père, pour tous les hommes Je suis mort sur la Croix, la Croix de l’Amour, la Croix du Sacré-Cœur qui attend tous les hommes, mes frères et vos frères. Pour sauver tous les hommes J’ai versé le sang de mon Cœur, mon Cœur Eucharistique qui demeure avec vous et qui vous accompagne, si vous le voulez bien, pendant tout votre exil.”

Oui, Jésus, nous T’aimons doux et humble, nous T’aimons doux et pur, Innocent condamné à cause de nos péchés, nous T’aimons, ô notre Terre promise, Jésus notre Espérance, Jésus, notre très doux Amour.

Notre cœur se tait, Jésus, car il est ravi de ta douceur, de ton humilité, de ta bonté pour nous, de ta patience aussi. Notre cœur se tait, Jésus, émerveillé de Toi, et de ton Cœur Sacré, de ton Cœur amoureux, amoureux de nos cœurs. Jésus, notre cœur se tait, il contemple sa Terre promise: ton Cœur, ton doux et humble Amour; il contemple ton Cœur plein d'amour pour nous, pour chacun de nous. Heureux les doux, ils posséderont la terre promise: l’Amour et le Cœur de Jésus. Heureux les doux, ils auront part au festin de Dieu. 

3-3-4-Heureux ceux qui espèrent

Nous découvrons maintenant comment relier l’espérance à la douceur et à l’humilité que le Seigneur désire pour nous, car douceur et humilité sont une des conditions de notre béatitude. “Bienheureux les doux, bienheureux les humbles, car ils posséderont la terre promise, la présence de Jésus dans son Eucharistie. Bienheureux les doux, bienheureux les humbles, car ils entreront en possession de la terre promise qu’ils espèrent déjà...” Et c'est l’espérance qui nous donne le Royaume de Dieu, l’espérance nous fait posséder la terre, et nous sommes les plus heureux des hommes.

Alors, qu’est-ce que l’espérance pour chacun de nous? Quand il s’agit de nous, de notre salut, Dieu ne fait rien avec hâte: non Il prend son temps, Il agit avec discrétion, avec une infinie douceur, avec son amoureuse humilité. Le miracle de la conversion des cœurs, Dieu le fait sans bruit, sans éclat, mais dans le silence de son Amour. Il suffit d’ouvrir son cœur, c’est-à-dire de le rendre réceptif à ses paroles silencieuses et mystérieuses car émises sans aucun mot ni aucune phrase, et d’accueillir ses enseignements et ses conseils, puis de Le laisser faire. Dans une humble espérance...

3-3-5-Bienheureux ceux qui pleurent. Les béatitudes de l'amour qui pleure

Le Seigneur avait dit: “Bienheureux ceux qui pleurent car ils seront consolés.” Oui, bienheureux sont-ils, ceux qui pleurent sur les pécheurs, sur ceux qui ne sont pas encore convertis, sur ceux qui ne connaissent pas l'amour de Dieu pour eux. Bienheureux sont-ils, car ils sont enfin débarrassés de leurs égoïsmes. Ils pleurent avec Jésus des larmes d’amour car ils sont dans le Cœur de Dieu.

Bienheureux ceux qui pleurent des larmes d’amour avec Jésus car ils seront consolés quand le Père viendra les chercher pour les conduire chez Lui. Alors ils découvriront que leurs larmes, mêlées aux larmes de Jésus, n’étaient pas des larmes stériles, mais des larmes qui sauvaient le monde.  

Bienheureux ceux qui pleurent des larmes d’amour avec Jésus, car ils seront consolés quand le Seigneur Jésus les recevra dans son Cœur amoureux, le Sacré-Cœur de son Corps mystique, et qu'Il leur montrera tous ceux qu’ils ont contribué à transformer en pierres vivantes et pleines d’amour de l’Église éternelle.

Bienheureux ceux qui pleurent des larmes d’amour avec Jésus, ils ont trouvé l’Amour de Dieu. Ils ont trouvé l’Amour.

3-3-6-Les béatitudes cachées

Voici que soudain nous avons envie de poursuivre les enseignements de Jésus, voire de les compléter, si cela était possible. Le Seigneur ne nous en voudra certainement pas d'ajouter quelques béatitudes à celles qu'Il nous a confiées. Rendons-nous donc, en pensée, près du Lac de Génésareth. Jésus parle à ses disciples et nous L’écoutons. Jésus complète les béatitudes qu'Il vient d'annoncer et parle des gens heureux qui deviendront des bienheureux:

- Bienheureux ceux qui savent être heureux sur la terre, car ils remplissent de joie le Cœur de Dieu et les cœurs de leurs frères.

- Bienheureux les cœurs joyeux, car ils reflètent Dieu.

- Bienheureux les cœurs purs qui rient dans la clarté de Dieu, ils libèrent le cœur de leurs amis.

- Bienheureux les cœurs qui chantent, car ils aiment leur Dieu.

- Bienheureux les cœurs donnés, les cœurs offerts qui ne cherchent que Dieu: ils connaîtront la joie intense d’être comblés de Dieu...

- Bienheureux ceux qui aiment, car ils seront aimés.

- Bienheureux ceux qui sont toujours contents, toujours contents de Dieu et de leurs frères, ils connaîtront la joie de Dieu et la joie en Dieu.

- Bienheureux ceux qui sont heureux en Dieu, car là est le vrai bonheur.”

Jésus! Devons-nous être peu confus d’avoir pris Ta place, d’avoir parlé pour Toi? N'avons-nous pas plutôt écouté la fontaine de joie qui est en Toi et dont Tu nous confies parfois quelques éclaboussures. Ta fontaine de joie, c'est ce don merveilleux qui réjouit le cœur de l’homme et qui réjouit ton Cœur...

La Fontaine de joie, don du ciel, don de Dieu... L’Évangile n’en parle pas beaucoup, mais Tu as dû, Toi aussi Jésus, être heureux dans Ton Cœur, dans ta vie. Toi aussi Tu as dû être heureux quand Tu rencontrais le Père, quand Tu souriais à ta Mère, quand Tu aidais Joseph. Toi aussi Tu as dû être heureux quand Tu pensais à ce que deviendraient un jour tes apôtres, lorsque, revenus de leurs péchés, ils sauraient accepter le martyre, pour Te prouver leur amour, leur foi et leur confiance.

Bienheureux aussi ceux qui sont capables d’être heureux dans leur cœur même quand leur être saigne... Qui peuvent rester heureux dans leur cœur et dans la foi, même quand tout semble s’écrouler autour d’eux. Oui, nous croyons, Jésus, que Tu aimes les gens heureux, les gens heureux de Toi, les gens heureux de Ton Amour, les gens heureux de Dieu. Et nous osons poursuivre:

- Bienheureux les cœurs purs et heureux: ils verront et chanteront Dieu. Ils chanteront l’extraordinaire partition de l’Amour, de l’Amour qui est Dieu. L’Amour qui nous fait dire: “Je T’aime.”

3-4-Le regard de Jésus. Le jeune homme riche

Un jeune homme vint un jour trouver Jésus: il désirait la vie éternelle. Jésus le regarda et l’aima. Puis Il lui dit: ”Va! vends tout ce que Tu as, et suis-moi.” Le jeune homme s’en alla tout triste car il était riche... L’Évangile ne nous dit pas ce qu’il fit ensuite... Les apôtres n’en ont pas parlé: peut-être que, s’ils l’ont vu un jour, revenu pour suivre Jésus, cela leur a paru tellement naturel qu’ils ne l’ont même pas remarqué. Suivre Jésus, pour eux qui l’avaient déjà fait, n’avait rien d’extraordinaire... D’ailleurs, ils ne se sont jamais posé de questions sur Lazare qui, lui aussi, était riche, et même très riche.

Jésus a regardé ce jeune homme riche, et Il l’a aimé. Et quand Jésus regarde quelqu’un, quand Il aime quelqu’un, ce n’est pas pour rire. Nous sommes tous un peu ce jeune riche, nous nous comportons tous un peu comme lui. Sur le moment, quand Jésus nous dit: “Je t’aime, viens, et suis-Moi!” nous sommes tous un peu interloqués. Avons-nous bien compris? Est-ce rêve, ou réalité? Et puis, notre famille a besoin de nous; et puis, il y a nos devoirs, et même les commandements de Dieu. Que faire? Avons-nous bien compris? Car nous sommes tous des riches, même si matériellement nous ne possédons rien.

Jésus a regardé ce jeune homme riche, et Il l’a aimé. Et nous, nous ne pouvons pas imaginer que Jésus ait abandonné quelqu’un à qui Il avait donné son Amour après l’avoir regardé. Le regard de Jésus a inévitablement transpercé le cœur du jeune homme riche. Et voici que soudain, lui aussi aimait Jésus. Pourtant, tout triste, il retourna chez lui, car il avait des devoirs à remplir, du travail à donner à ceux qui comptaient sur lui pour nourrir leurs familles, des parents à soigner, peut-être. Il retourna chez lui, tout triste, car voici qu’il aimait Jésus, lui aussi...

Jésus a regardé le jeune homme riche, et Il l’a aimé. Et voici que son cœur fut soudain plein d'amour, mais il était tout triste: comment allait-il faire? Qu’allait-il dire? “Qu’il est difficile à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu!” Mais que faire quand tant d’autres comptent sur vous, quand on est leur gagne-pain? Ou encore quand il n’y a personne pour assurer la gestion des affaires. Mon Dieu, que faire?

Jésus a regardé le jeune homme riche et Il l’a aimé. Et lui, le jeune homme riche, a aimé Jésus: il ne pouvait plus faire autrement. Il est parti tout triste, car il était riche, et il est difficile à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu. Il est parti tout triste parce qu’il aimait, Jésus, et quand on aime, on ne pense plus qu’à celui qu'on aime; et le jeune riche ne pensait plus qu’à Jésus.

Le jeune riche ne pensait plus qu’à Jésus. Peu à peu ses biens lui semblèrent moins importants. Il commença à trouver du personnel compétent pour diriger son domaine, pour prévoir et assurer les récoltes. Voici qu’il découvrait aussi la vraie compétence de ses paysans et il comprenait qu’il pouvait leur faire confiance... Le monde entier changeait autour de lui, et c’est sans tristesse que le jeune riche continuait à penser à Jésus. Et peut-être qu'un jour, le jeune riche quitta tout et suivit celui qui avait été crucifié et qui était ressuscité...

3-5-La foule des rameaux

Jésus s’était éloigné quelque temps de Jérusalem, puis Il s’était transfiguré devant trois de ses disciples. Il avait rempli son âme de l’Eau vive du Saint-Esprit... Il pouvait maintenant retourner à Jérusalem pour y être crucifié. Mais auparavant Il avait encore quelque chose à accomplir. Roi de l’univers Il devait entrer dans sa ville, monté sur un âne, et sous les applaudissements de la foule.

Et voici que la foule acclame Jésus monté sur un très jeune âne qui n’en revient pas de porter le Roi du monde. La foule vit un incroyable délire de liesse et elle étale palmes et manteaux sur le passage de Celui qui vient sauver les hommes. Seuls les membres du Sanhédrin et les docteurs de la Loi s’inquiètent:

- Ils vont tous à Lui! Il faut supprimer cet homme! Mais comment faire? Pour quelle bonne œuvre peut-on le condamner? Mais il faut agir en secret, parce que la foule...

La foule! s’écrie Caïphe, “la foule, il suffit d’un tribun au verbe sonore pour la faire changer d’opinion du jour au lendemain.”

La foule? Mais est-ce la même foule? Aujourd’hui, dans la foule hurlante de bonheur, il y a le petit peuple à qui Jésus a redonné espoir. Il y a tous les possédés qui ont été délivrés des liens qui les attachaient au démon. Il y a tous les malades qui ont été guéris et leurs familles reconnaissantes. Il y a tous ceux qui avaient faim et qui ont été rassasiés. Aujourd’hui la foule rend grâce. Est-ce vraiment cette foule-là qui criera, dans quelques jours: “À mort! crucifie-le!”? Non ce n’est pas possible.

Alors quelle sera la foule qui dans cinq jours hurlera une haine incontrôlée, suscitée par des chefs ignobles? Est-ce la maman à qui Jésus avait rendu son fils qui était mort? Non! Impossible! Est-ce l’aveugle à qui Jésus a rendu la vue? Difficile à croire. Est-ce le paralysé que Jésus a remis debout? Est-ce la femme adultère que Jésus n’a pas condamnée car, s’il l’avait fait Il aurait été coupable d’une grande injustice: où était son complice, ce jour-là, quand on allait la lapider? Il faut être deux pour commettre un adultère? Non la pauvre femme devait encore se cacher...

Aujourd’hui une foule accompagne Jésus avec des rameaux. Elle l’a reconnu comme son véritable Roi, et elle n’en veut pas d’autre. Oh! bien sûr, il y a dans cette foule quelques espions du Sanhédrin, des voyous dont on se sert, avec une bonne somme d'argent, quand on a besoin d’eux pour faire des tâches inavouables. Mais ceux-là ne connaissent pas Jésus. Il y a aussi, certainement les hommes et les femmes de la pègre que l’on trouve toujours dans toutes les foules du monde pour crier ce que l’on désire lui faire crier. Aujourd’hui ces malheureux sont là aussi, mais on ne les remarque pas; ils se tiennent bien discrets, cela vaut mieux. Et puis, on ne sait jamais, il y aura peut-être quelque chose à “gratter” si cet homme, ce Jésus, est déclaré Roi. Aujourd’hui, il vaut mieux rester tranquille, se faire oublier...

Jésus! L’Eau vive coule sur la foule de ceux qui L’aiment, et ils sont nombreux. L’Eau vive de son Amour remplit les hommes d’enthousiasme et d’amour aussi. Pour Lui, ils iraient jusqu’au bout du monde. Pour Lui, ils feraient n’importe quoi, car ils L’aiment. Ils le croient, ils en sont sûrs, et ils sont sincères. Alors, qui seront ceux qui feront la foule du Vendredi qui vient?...

“La foule, il suffit d’un tribun au verbe sonore pour la faire changer d’opinion du jour au lendemain!” Mais, Seigneur, sont-ce vraiment les mêmes personnes qui Te condamneront dans cinq jours? En partie oui, hélas! Ceux qui sont sur la frange, la pègre qui est là aujourd’hui, curieuse, et soucieuse d’obtenir des petits profits et contente de faire du bruit, de semer la pagaille. Il y aura les indécis, ceux qui n’ont pas eu besoin d’être guéris par Jésus, ou qui, n’ayant pas la foi, ne l’ont pas été.  Et il y aura ceux que le Sanhédrin aura été chercher: tous ces étrangers récupérés par la pègre qui crieront avec les loups. Mais pour le reste: la foule de vendredi pourrait-elle être celle d’aujourd’hui? Aujourd’hui, l’Eau vive coule à flots; vendredi, ce sera l’heure de la puissance des ténèbres. La foule de vendredi, ce sera celle des démons.

3-6-Nicodème et Joseph

3-6-1-Nicodème

Il est, dans l’Évangile, un personnage qui, pourrait-on dire, n’a pas la cote: il s’agit de Nicodème. En effet, quand l'Évangile nous le présente pour la première fois, c’est un pauvre homme, c’est-à-dire que ce n’est pas encore un pauvre selon de cœur de Dieu. Mais c’est un homme qui réfléchit, qui cherche à s’instruire pour comprendre, et qui ne condamne pas sans savoir.

Nicodème est une personnage bien placé. Il a fait de solides études: Jésus le qualifiera de docteur de la Loi. Il est bien considéré, il a des responsabilités et c’est un homme influent, car il est membre du Sanhédrin. Il connaît la Loi par cœur, il a médité la plupart des prophéties. C’est un homme droit, pieux et sûr de lui.

Pourtant, depuis quelque temps quelque chose le tracasse: on commence à parler beaucoup, un peu trop, d’un jeune prophète qui attire à lui toutes les foules. Ce Jésus, qui n’a pas fait d’études au Temple, auprès des professeurs habilités, enseigne cependant avec autorité. Parfois même, il fait des miracles: du moins à ce que l’on raconte. Mais son enseignement semble un peu excessif, car il prend l’Écriture beaucoup trop à la lettre, ce qui ne semble pas très raisonnable. Oh! bien sûr, tout cela, ce ne sont que des on-dit... Nicodème n’a jamais entendu Jésus et sa situation lui conseille de rester prudent... Pourtant, Jésus, le Nazaréen l’inquiète un peu, tout en l’attirant. 

Nicodème est un homme honnête, et il ne veut pas porter de jugements hâtifs qui pourraient être erronés: il doit juger par lui-même, discrètement. Il doit en savoir plus. Alors, un soir, Nicodème se risque: il va trouver Jésus, en faisant bien attention à ne pas être vu.

Jésus accueille Nicodème, avec bienveillance. Il parle longtemps avec lui tout en bousculant un peu ses belles certitudes: “Tu es Maître en Israël, et tu ne connaîs pas cela?... Vraiment, Je te le dis, si on ne naît de nouveau, on ne peut voir le Règne de Dieu!” Nicodème est un peu surpris: jamais on ne lui parlé de cette façon. C’est vrai, ”jamais homme n’a parlé comme cet homme!” Nicodème regarde Jésus qui le regarde étrangement, puis il Le quitte, perplexe. Nicodème part, comme le fit un certain jeune homme, vertueux mais riche, s’en était allé, lui aussi, car il avait de grands biens.

Les mois ont passé... La réputation de Jésus va en augmentant; ses contradicteurs, surtout les pharisiens et les membres du Sanhédrin se font de plus en plus agressifs: vraiment, il faut se débarrasser de cet homme, cat tout le monde va vers Lui... Ce jour-là, peu avant la Pâque, Jésus était allé, par avance, réconforter des bergers qui seraient bientôt dans la peine... Il venait de quitter ces pauvres au cœur de pauvre qu'Il aimait particulièrement. Son visage reflétait un bonheur profond malgré la tristesse étrange qui cependant l’imprègnait. Jésus avançait lentement, comme s’Il attendait quelqu’un. Quelqu’un arrive, en effet, et c’est Nicodème. Jésus s’inquiète:

- Que t’arrive-t-Il, mon ami, que tu sois venu jusqu’ici?

- Maître, Te souviens-Tu de la nuit pendant laquelle j’étais venu Te trouver... Je T’avais dit alors que je croyais que Tu étais un docteur venu de Dieu; car personne ne peut faire les miracles que Tu fais, si Dieu n'est avec lui. Et Tu m’avais répondu: “En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu.” Ne comprenant pas ta réponse, je T’avais alors longuement questionné: “Comment un homme peut-il naître quand il est vieux? Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et naître?”  Et Toi, Maître, Tu m’avais éclairé: “En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît d'eau et d'Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu... Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l'Esprit est esprit. Ne t'étonne pas que je t'aie dit: I1 faut que vous naissiez de nouveau. Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit; mais tu ne sais d'où il vient, ni où il va. Il en est ainsi de tout homme qui est né de l'Esprit...” Maître, j’ai souvent médité tes paroles, mais je ne les ai pas vraiment comprises.

Jésus regarde Nicodème, profondément, comme si déjà Il voyait une scène dramatique, mais Il se tait. Nicodème continue, comme troublé, et dans un soupir, il ajoute:

Maître, Tu m’as dit d’autres choses qui me bouleversent encore. Tu m’as dit: “Et comme Moïse éleva le serpent dans le désert, il faut de même que le Fils de l'homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle. Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle.”

Jésus confirme ces paroles d’un signe de tête, encourageant Nicodème à continuer:

Tu m’as dit aussi que la lumière était venue dans le monde, mais que les hommes avaient préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises. Car quiconque fait le mal hait la lumière, et ne vient point à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient dévoilées.” Jean (3, 1-21) Maître, dis-moi: nos œuvres sont donc mauvaises que nous refusions ta lumière?

Jésus regarde encore Nicodème:

- Mon ami...

Jésus ne peut continuer car Nicodème L’interrompt brusquement:

- Maître, j’ai autre chose à Te dire: Joseph l’Ancien et moi, nous serons bientôt rejetés du Sanhédrin. Ils complotent tous contre Toi, ils veulent Te faire mourir. Maître, je ne sais pas comment les en empêcher: ils ne veulent pas m’entendre. Que dois-je faire? Ils m’ont déjà exclu. Maître éloigne-Toi de Jérusalem, la ville n’est pas sûre pour Toi.

- Je sais, mais je dois revenir à Jérusalem, car mon Heure est venue. Je suis venu pour accomplir la volonté du Père, et Je dois la faire. L’heure des Ténèbres est venue, elle aussi. Dans trois jours, vendredi...

Nicodème est haletant, mais Jésus s’interrompt soudain, puis reprend:

- Nicodème, vendredi soir Tu renaîtras de l’eau et de l’Esprit. Va trouver Joseph d’Arimatie. Tenez-vous prêts: vendredi, j’aurai besoin de vous.

3-6-2-La foi de Nicodème

Brave Nicodème: il va lui-même rencontrer Jésus. De nuit, paraît-il! Mais qu’est-ce que cela peut faire? Il voulait éviter la foule, mais surtout il voulait avoir du temps avec Jésus. On ne peut aborder des sujets difficiles que si on a un peu de temps devant soi. Sinon, on reste à la superficie des choses.

Nicodème veut savoir. Il est docteur en Israël; il connaît les écritures, et Jésus l’intrigue: serait-ce Lui le Messie tant attendu? La question est tellement grave qu’elle doit être réfléchie longuement; on ne peut pas s’engager sur des racontars, des rumeurs qui circulent dans les foules. Il faut pouvoir poser ses questions longuement et recevoir les réponses avec attention. Cher Nicodème! Tu veux savoir, tu dois poser des questions sur ce qui te tracasse; tu dois voir Jésus de près et tranquillement: donc tu iras le voir de nuit. Et Jésus t’accueille. Jésus prend la peine de t’écouter, et Il te répond, parfois sans complaisance: “Comment! Toi un maître en Israël, tu ignores ces choses?” Mais toi tu écoutes, tu t’humilies devant Jésus et toi aussi tu constates: “Jamais homme n’a parlé comme cet homme!”

Pourquoi chaque fois qu’on parle de Nicodème on insiste plus sur le fait qu’il soit allé trouver Jésus de nuit que sur le reste de la conversation. Cher Nicodème, la plupart du temps l’Évangile t’oublie; on ne te retrouve qu’au pied de la croix, et chez Pilate pour demander le corps du Crucifié. Étonnant et merveilleux courage! Et quelle leçon pour nous! Avant de répandre des rumeurs, des idées, il faut d’abord s’informer afin d’être en mesure de chasser le doute. Il faut avoir approfondi un sujet -peu importe de quelle façon- pour être en mesure d’en parler et d’apporter un jugement sain: c’est de la simple honnêteté.

Saint Nicodème! A-t-on le droit de te nommer ainsi? Car être honnête avec soi-même et les autres, ce n’est pas un signe de couardise, de peur, de manque de courage, mais plutôt d’honnêteté. Et le courage, le vrai courage, tu le possédais beaucoup plus que tous ceux qui se sont enfuis pendant la Passion de Jésus. Alors pourquoi ont-ils comme occulté tes démarches? Pourtant, tu nous rends tellement de services quand, comme toi, nous avons besoin de nous faire éclairer. S’il n’y avait pas eu Nicodème, à qui Jésus aurait-il pu dire “qu’il nous fallait renaître de l’eau et de l’Esprit”?

Beaucoup de gens, qui, au départ étaient de grands incroyants, sont devenus chrétiens parce qu’ils ont rencontré Dieu. “Dieu existe: je l’ai rencontré,” a dit André Frossard. Beaucoup de “grands hommes” ont dit des choses comparables. À d’autres personnes il fut donné de ressentir des évènements extérieurs probants: ainsi, la lecture des Actes des Apôtres nous dit: “Comme leur prière se terminait, le lieu où ils étaient réunis se mit à trembler, ils furent tous remplis de l’Esprit-Saint et ils annonçaient la parole de Dieu avec assurance.”

Dieu se manifeste clairement à certaines personnes. La terre tremble pour manifester l’Esprit. Oui, Seigneur, nous avons vraiment besoin des preuves de ta présence, de ton existence, car nous sommes aveugles et sourds. Nous ne cessons de crier au Christ: “Manifeste-Toi!” Manifeste-Toi, Seigneur, car tant de gens de notre génération sont incapables de voir Dieu que d’ailleurs ils refusent. Pourtant certaines découvertes scientifiques nous mettent au pied du mur. Mais cela ne suffit pas toujours car c’est Dieu Lui-même que nous cherchons, Lui en qui nous croyons, mais nous avons besoin, souvent, de fortifier notre foi. "Je crois, Seigneur, mais viens en aide à mon manque de foi!" Seigneur! Manifeste-Toi pour que le monde croie! Seigneur, viens à notre aide quand notre foi semble défaillir...

3-6-3-Joseph d'Arimathie et Nicodème

Nous n’aurions jamais rien su d’autre sur Nicodème, comme nous n’avons rien su du jeune homme riche, s’il n’y avait eu la Passion de Jésus. Car c’est pendant la Passion que nous retrouvons Nicodème. Curieusement, et contrairement aux apôtres et aux disciples qui se sont enfuis, Nicodème est là: il suit Jésus, mais pas avec les bourreaux. Il reste silencieux et ne se manifeste pas outre mesure: on ne dira rien de lui, rien de ses gestes, rien de ses actes, rien de ses paroles. Non il est simplement là...

Nicodème est discrètement là, pendant toute la Passion, toujours aussi prudent. Mais quand Jésus est mort, quand il n’y a plus rien à espérer du Galiléen, quand il est même devenu très dangereux de se manifester en faveur du Crucifié, c’est alors que Nicodème se montre. C’est lui qui accompagnera Joseph d’Arimathie pour aller trouver Pilate, afin de recueillir le corps de Jésus crucifié. C’est lui qui, avec Joseph et Jean, le disciple que Jésus aimait, descendra Jésus de la croix, le portera jusqu’au tombeau, l’ensevelira et consolera Marie.

De riche qu’il était, Nicodème était devenu un pauvre selon le cœur de Dieu.

   

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