Écrits patristiques
Lettre à Diognète
10-Si donc, ô Diognète, tu
désires ardemment le don de la foi, tu l'obtiendras. D'abord, tu
connaîtras Dieu le Père: vois comme il a aimé l'homme; c'est
pour lui qu'il a créé le monde; il a placé sous sa dépendance tout
ce que le monde renferme; il lui a donné l'intelligence et la
raison. C'est à
l'homme seul qu'il a permis de regarder le ciel; il
l'a formé à son image; il
lui a envoyé son fils unique; il
lui promet son royaume; il le donnera à ceux qui lui rendront amour
pour amour. Ô quelle
joie sera la tienne quand tu le connaîtras! Combien
tu aimeras celui qui, le premier, t'a tant aimé? Une
fois touché de son amour, tu chercheras à l'imiter, à retracer sa
bonté. Quoi! L'homme pourrait imiter Dieu! Quel langage! Cesse de
t'étonner, l'homme le peut, puisque Dieu le veut.
Faire peser sur ses semblables le
joug de la tyrannie, se croire d'une condition meilleure que ceux
qu'on opprime, étaler le faste de l'opulence, écraser le faible,
tout cela ne fait pas le bonheur; aussi n'est-ce pas en cela que
l'homme peut imiter son Dieu, car aucun de ces traits ne caractérise
la majesté divine; mais prendre
sur soi le fardeau du malheureux, du
lieu élevé où le ciel nous a placés, répandre des bienfaits sur ceux
qui se trouvent au dessous de nous, regarder les richesses comme des
dons que Dieu fait passer par nos mains pour arriver à l'indigent,
c'est devenir le Dieu de ceux qu'on soulage, c'est imiter Dieu
lui-même. Alors en
passant sur la Terre, vous
comprendrez qu'il est au ciel un Dieu qui tient les rênes du monde
et qui le gouverne comme un empire.
Les Mystères de Dieu se
dévoileront à tes yeux, tu en parleras le langage, tu aimeras, tu
admireras ces hommes que l'on opprime, parce qu'ils ne veulent pas
renoncer à ce Dieu. Tu condamneras l'erreur et l'imposture du monde,
lorsque tu auras appris à vivre pour le ciel, et à mépriser ce que
l'on nomme la mort. Tu
ne redouteras qu'une seule mort, la véritable mort, celle qui est
réservée aux pécheurs condamnés à des feux éternels qui seront à
jamais leur supplice. Oui,
tu admireras ces hommes qui endurent ici-bas les tourments du feu
pour la justice, et tu proclameras leur bonheur quand tu connaîtras
ce feu éternel auquel ils ont échappé.
*****
La Lettre originale à Diognète
s'arrête ici. En effet,
la plupart des critiques modernes ont signalé entre les paragraphes
qui précèdent et les deux chapitres qui suivent, 11 et 12, une
différence assez forte pour qu’ils aient cru devoir les rejeter
comme apocryphes. Pour ces auteurs, les chapitres de 1 à 10 ne
s’adressent qu’au seul Diognète. Par contre, les chapitres 11 et 12
ont un caractère plus général, s’adressant à tous ceux qui veulent
être disciples de la vérité. De plus, on ne peut pas ne pas
remarquer également de grandes différences de style. En conséquence,
il semble bien que ces chapitres 11 et 12 aient été rajoutés et que
leur origine soit ignorée. Nous les conservons cependant, estimant
que, compte tenu de cette mise en garde, ils pourront cependant
intéresser certains de nos lecteurs. |