Lettre de Barnabé

Partie II

Lettre de Barnabé
(suite)

XI

1. Recherchons maintenant si le Seigneur a pris soin de manifester à l'avance l'eau et la croix. Au sujet de l'eau, il est écrit, à l'adresse d'Israël, qu'ils ne recevraient pas le baptême qui procure la rémission des péchés, mais qu'ils essaieraient de se fabriquer à eux-mêmes leur salut.

2. Le prophète dit en effet :
" Terre frémis de stupeur, plus encore,
Car c'est un double méfait que ce peuple a commis :
Ils m'ont abandonné, moi la source d'eau vive,
Pour se creuser à eux-mêmes une citerne de mort "
(Jr 2, 12-13).

3. " Est-elle une roche déserte,
Ma montagne sainte, Sion ?
Vous serez comme une nichée d'oiseaux,
Voletant çà et là, arrachés du nid " (Is 16, 1-2).

4. Le prophète dit encore:
" Moi je marcherai devant toi
En nivelant les hauteurs.
Je fracasserai les battants de bronze,
Je briserai les barres de fer.
Je te livrerai les trésors secrets,
Et les richesses cachées,
Pour qu'ils sachent que je suis, moi, le Seigneur Dieu " (Is 45, 2-3).

5. Et encore :
" Tu habiteras dans une citadelle élevée,
Bâtie sur le roc,
L'eau ne te fera pas défaut.
Tes yeux contempleront le roi dans sa gloire,
Et votre âme aura souci de la crainte du Seigneur " (Is 33, 16-18).

6. Et dans un autre prophète, il dit encore :
" Celui qui agit ainsi sera comme l'arbre,
Planté près du cours des eaux,
Qui donne son fruit en la saison,
Et jamais son feuillage ne tombera.
Tout ce qu'il fait réussit.

7. Rien de tel pour les impies, rien de tel.
Non, ils sont comme la bale emportée par le vent
De sur la terre.
Non, au jugement les impies ne tiendront,
Les égarés à l'assemblée des justes.
Car le Seigneur connaît la voie des justes,
Mais la voie des impies va se perdre " (Ps 1, 3-6).

8. Remarquez comme il décrit à la fois la croix et l'eau. Voici en effet ce qu'il veut dire : Bienheureux ceux qui ayant mis leur espérance dans la croix, sont descendus dans l'eau, car il indique la récompense par ces mots " en la saison " ; à ce moment-là, veut-il dire, je m'acquitterai envers toi. Et ces mots : " jamais son feuillage ne tombera " (Ps 1, 3), en voici le sens : toute parole qui sortira de votre bouche, sous l'inspiration de la foi et de la charité, sera la conversion et l'espérance d'un grand nombre.

9. Un autre prophète dit encore : " Le pays de Jacob recevait des louanges, plus que tout autre " (cf. So 3, 19). Ce qui veut dire que Dieu glorifie le vase qui renferme son esprit.

10. Et qu'est-il dit encore : " Il y avait un fleuve coulant sur la droite, de ses berges s'élevaient des arbres féconds, celui qui mange de leur fruit vivra éternellement " (Ez. 47, 2, 7, 12).

11. Comprenons : nous descendons dans l'eau, remplis de péchés et de souillures, mais nous en sortons, chargés de fruits, avec dans notre coeur la crainte et, dans l'esprit, l'espérance en Jésus. " Quiconque en mange vivra éternellement " signifie : quiconque écoute ces paroles et croit, vivra éternellement.

XII

1. Il décrit également la croix, par ces paroles d'un autre prophète : " Quand ces choses seront-elles accomplies ? Lorsque le bois, dit le Seigneur, aura été abaissé et redressé, et lorsque du bois le sang aura coulé " (cf. IV Esdras 4, 33 ; 5, 5). Voici donc ce qui se rapporte à la croix et à celui qui doit y être crucifié.

2. Dieu parla encore à Moise lorsque Israël était à se défendre contre les tribus étrangères ; il lui remémora que cette guerre même était le signe de la mort qu'ils méritaient à cause de leurs péchés. L'Esprit-Saint inspira à Moïse une attitude figurant la croix et Celui qui devait y souffrir, car voilà le sens du geste : à moins d'espérer en cette croix, ils seraient livrés à une guerre éternelle. Moïse entassa donc boucliers sur boucliers au milieu du champ de bataille, et se plaçant sur le tas de façon à dominer les autres, il étendit les bras ; c'est ainsi qu'Israël reprit l'avantage. Après un moment, Moïse ayant laissé retomber ses bras, Israël succombait à nouveau (Ex 17, 8-13).

3. Qu'est-ce à dire ? C'était pour leur faire reconnaître qu'ils ne pouvaient être sauvés que s'ils mettaient en lui leur espérance.

4. Le Seigneur dit encore dans un autre prophète : " Tout le jour j'ai tendu mes mains vers un peuple rebelle, et rétif à mes justes voies " (Is 65, 2).

5. Moïse figura d'une autre façon encore Jésus, montrant qu'il devait souffrir et que c'est lui qui donne la vie, lui qu'ils s'imagineront avoir fait périr. Israël succombait. Pour leur donner un signe, le Seigneur les fit mordre par toutes sortes de serpents et ils mouraient (cf. Nb. 21, 6-9) (car c'est par le serpent que la désobéissance est apparue dans la personne d'Ève). Or, le Seigneur agissait ainsi pour les convaincre que c'était à cause de leur désobéissance qu'ils étaient livrés aux angoisses de la mort.

6. Finalement, Moïse, qui avait publié ce précepte : " Vous n'aurez point d'image sculptée ou fondue pour votre Dieu " (Dt 27, 15), fabriqua néanmoins une telle image pour manifester une figure de Jésus. Il fabriqua donc un serpent d'airain, le dressa solennellement et fit convoquer le peuple par un héraut.

7. Le peuple réuni priait Moise d'intercéder pour leur guérison. Alors Moïse leur dit : " Lorsque quelqu'un d'entre vous sera mordu, qu'il vienne vers le serpent étendu sur le bois ; qu'il espère ; qu'il croie que celui-ci, même sans vie, peut le vivifier, et aussitôt il sera sauvé " (cf. Nb. 21, 8-9).
Ainsi firent-ils. Voici bien la gloire de Jésus : tout a eu lieu en lui et pour lui.

8. Et que dit Moïse à Jésus, fils de Navé, après lui avoir imposé ce nom comme à un prophète, dans la seule intention de faire comprendre au peuple que le Père révèle toutes choses au sujet de son Fils Jésus ?

9. Après lui avoir donné ce nom, en l'envoyant explorer le pays, Moïse dit à " Jésus, fils de Navé " (Nb 13,16) : " Prends un livre dans tes mains et écris ce que dit le Seigneur : dans les derniers jours, le Fils de Dieu renversera de fond en comble la maison d'Amaleq " (cf. Ex 17, 14).

10. Voilà de nouveau Jésus, figuré dans un être de chair, non pas comme fils d'homme, mais comme fils de Dieu. Mais comme les Juifs devaient dire un jour que le Christ est " fils de David " (Mt, 22, 42-44), David lui-même, qui redoutait l'erreur de ces pécheurs et qui en avait la connaissance, s'écrie prophétiquement : " Le Seigneur a dit à mon Seigneur, siège à ma droite ; tes ennemis, j'en ferai ton marchepied " (Ps 109, 1).

11. Et de même Isaïe :
" Le Seigneur a dit à son Oint, mon Seigneur,
Qu'il a pris par la main droite,
Pour abattre devant lui les nations
Et briser la puissance des rois " (Is 45 , 1).
Voilà comment " David l'appelle mon Seigneur ", et non pas mon fils (Mc 12, 37 ; Mt 22, 45 ; Lc 20, 44).

XIII

1. Voyons maintenant à qui est l'héritage : au peuple que nous sommes, ou bien au précédent ; et à qui s'adresse l'alliance, à nous ou à eux ?

2. Écoutez donc ce que dit l'Écriture au sujet du peuple : " Isaac implora le Seigneur pour sa femme, car elle était stérile " (Gn, 25, 21). Ensuite : " Rébecca alla consulter le Seigneur, et le Seigneur lui dit : Deux nations sont dans ton sein, deux peuples dans tes entrailles, un peuple dominera l'autre, l'aîné servira le cadet " (Gn 25, 22-23 ; cf. Rm 9, 10-12).

3. Vous devez saisir qui est Isaac, qui est Rébecca, et de quel peuple il est déclaré qu'il est plus grand que l'autre.

4. Dans une autre prophétie, Jacob éclaire encore ce point, lorsqu'il dit à Joseph : " Voici que le Seigneur ne m'a pas privé de ta présence, conduis-moi tes fils, que je les bénisse (Gn 48, 11,9).

5. Et Joseph lui conduisit Éphraïm et Manassé, pour qu'il bénisse Manassé qui était l'aîné. Joseph le conduisit donc à la droite de son père.. Mais Jacob vit là, en esprit, la figure du peuple à venir. Qu'est-il écrit ? " Jacob croisa ses mains et posa sa droite sur la tête d'Éphraïm, le puîné et le plus jeune, et il le bénit. Joseph dit alors à Jacob : Remets donc ta main droite sur la tête de Manassé, car c'est lui mon fils premier-né. Et Jacob dit à Joseph : Je sais, mon fils, je sais. Mais le plus grand servira le plus petit, et c'est le plus petit qui sera béni " (Gn. 48, 14, 18, 19).

6. Voyez à qui Jacob a décidé que serait la prédominance, et l'héritage de l'alliance.

7. Si Abraham lui-même a fait mention de ce fait, notre connaissance en sera parfaite. Or, qu'est-ce que Dieu dit à Abraham, lorsqu'il fut le seul à croire, et que sa foi lui fut imputée à justice ? " Voici, je t'ai appelé Abraham, et t'ai établi père des peuples incirconcis qui croient à Dieu " (Gn 17, 5 ; cf. Rm 4, 11s).

XIV

1. Bien, voyons maintenant si l'alliance qu'il avait juré à leurs pères de donner à ce peuple, lui fut vraiment donnée. Elle leur fut donnée. Mais ils n'en ont pas été dignes à cause de leurs péchés.

2. Le prophète dit, en effet : " Moïse sur le mont Sinaï jeûna quarante jours et quarante nuits afin de recevoir l'alliance du Seigneur avec son peuple, et Moïse reçut du Seigneur deux tables écrites en esprit, du doigt de la main du Seigneur (cf. Ex 24, 18 ; 31, 18). Les ayant donc en main il les portait au peuple pour les leur remettre.

3. Lorsque le Seigneur lui dit : " Moïse, Moïse, descends au plus vite, car ton peuple, que tu as ramené d'Égypte, a péché. " Moïse comprit qu'ils s'étaient encore fabriqué des idoles et il jeta les Tables de ses mains ; c'est ainsi que furent brisées les Tables de l'alliance du Seigneur (cf. Ex 32, 7-19 ; Dt 9, 12-17).

4. Moïse avait donc reçu l'alliance, mais eux, les Juifs, n'en étaient pas dignes. Apprenez comment c'est nous qui avons reçu l'alliance. Moïse l'avait reçue comme un serviteur, mais le Seigneur lui-même nous l'a donnée comme à un peuple d'héritiers, après avoir souffert pour nous.

5. Il est apparu à la fois pour permettre aux Juifs de pousser jusqu'au bout leurs péchés, et à nous-mêmes de recevoir l'alliance par l'intermédiaire de l'héritier, le Seigneur Jésus.
Son avènement avait été préparé, afin que par lui nos âmes, déjà atteintes par la mort et livrées aux égarements du péché fussent délivrées de leurs ténèbres et que l'alliance fût établie avec nous par sa parole.

6. L'Écriture explique, en effet, comment le Père lui commande de nous délivrer des ténèbres, et de se préparer un peuple saint.

7. Or, le prophète dit : " Moi, le Seigneur ton Dieu, je t'ai appelé dans la justice. Je te prendrai par la main et je te fortifierai. Je t'ai désigné comme alliance du peuple, lumière des nations, pour ouvrir les yeux des aveugles, faire sortir de prison les captifs, et de leur cachot ceux qui demeurent dans les ténèbres " (Is 42, 6-7). Connaissons donc de quel état nous avons été délivrés.

8. Le prophète dit encore : " Voici, j'ai fait de toi la lumière des nations, pour que, par toi, mon salut atteigne aux extrémités de la terre. Ainsi parle le Seigneur, le Dieu qui t'a racheté " (Is 49, 6-7).

9. Et aussi :
" L'Esprit du Seigneur est sur moi
Car il m'a oint
Pour porter la bonne nouvelle de la grâce aux pauvres ;
Il m'a envoyé panser les coeurs meurtris,
Annoncer aux prisonniers la liberté,
Le retour de la vue aux aveugles.
Pour annoncer une année agréable au Seigneur,
Et le jour de la rétribution,
Pour consoler tous les affligés " (Is 61, 1-2 ; cf. Lc 4, 18-19).

XV

1. L'Écriture mentionne également le sabbat dans les dix paroles que Dieu dit à Moïse, sur le Mont Sinaï, lui parlant face à face. " Sanctifiez le sabbat du Seigneur avec des mains pures et un coeur pur " (Ex 20, 8 ; Dt 5, 12 ; Ps 23, 4).

2. Dans un autre endroit : " Si mes fils observent le sabbat, c'est alors que je répandrai sur eux ma miséricorde " (cf. Jr 17, 24-25 ; Ex 31, 13-17).

3. Du sabbat, il est fait mention dès le commencement, à la création : " Dieu fit en six jours les oeuvres de ses mains ; le septième jour elles étaient achevées ; et il chôma le septième jour et le bénit " (Gn. 2, 2-3).

4. Faites attention, mes enfants, à ce que signifient ces mots : " Il acheva son œuvre en six jours. " Cela veut dire qu'en six mille ans, le Seigneur achèvera toutes choses, car pour lui un jour signifie mille années. C'est lui-même qui l'atteste par ces mots : " Voici, un jour du Seigneur sera comme mille années " (Ps 89, 4 ; 2 P. 3, 8). Donc, mes enfants, en six jours, c'est-à-dire en six mille ans, toutes choses auront achevé leur cours.

5. " Il chôma le septième " (Gn. 2, 2) veut dire : lorsque son Fils sera venu mettre une fin au temps de l'injustice, juger les impies, métamorphoser le soleil, la lune et les étoiles, alors il chômera pleinement le septième jour.

6. Mais il est encore dit : " Vous le sanctifierez avec des mains pures et un cœur pur " (Ex 20, 8 ; Ps 23, 4).
S'il y avait aujourd'hui un homme capable de sanctifier, par la pureté de son cœur, le jour que Dieu a rendu saint, notre erreur serait totale.

7. Mais remarquez-le bien, nous n'entrerons pleinement dans le repos pour le sanctifier, que lorsque nous serons nous-mêmes justifiés ; nous serons en possession de la promesse, lorsqu'il n'y aura plus d'injustice et que le Seigneur aura renouvelé toutes choses. Alors nous pourrons sanctifier le septième jour, ayant été nous-mêmes d'abord sanctifiés.

8. Le Seigneur dit enfin aux Juifs : " Je ne supporte pas vos néoménies ni vos sabbats " (Is 1, 13). Voyez bien ce qu'il veut dire : ce ne sont pas vos sabbats actuels qui me sont agréables, mais celui que j'ai fait moi-même et dans lequel, mettant toutes choses au repos, j'inaugurerai le huitième jour, c'est-à-dire un univers nouveau.

9. Voilà pourquoi nous célébrons dans l'allégresse le huitième jour celui où Jésus est ressuscité des morts et où, après s'être manifesté, il est monté aux cieux.

XVI

1. Je veux vous entretenir encore du Temple, de l'erreur de ces malheureux qui mettaient leur espérance dans un édifice, au lieu de la mettre en Dieu leur créateur, sous prétexte que cet édifice était la maison de Dieu.

2. Le culte qu'ils rendaient dans le Temple ne différait pas beaucoup des cultes païens. Mais apprenez en quel terme Dieu récuse ce Temple :
" Qui a mesuré le ciel à l'empan,
Et la terre dans le creux de sa main ?
N'est-ce pas moi, dit le Seigneur ?
Le ciel est mon trône
Et la terre l'escabeau de mes pieds.
Quelle maison pourriez-vous me bâtir,
Et quel lieu assigner à mon repos ? " (Is 40, 12 ; 66, 1).
Vous avez reconnu que leur espérance est vaine.

3. Enfin il dit encore : " Voici que ceux-là mêmes qui ont détruit ce Temple, le rebâtiront " (cf. Is 49, 17).

4. En effet, par suite de la guerre, le Temple fut détruit par leurs ennemis, et maintenant les serviteurs de ces ennemis le rebâtiront.

5. Il avait été dévoilé aussi que la cité, le Temple et le peuple seraient livrés. " Il arrivera dans les derniers jours, dit l'Écriture, que le Seigneur livrera les brebis de son pâturage, avec leur bercail et leur tour, à la destruction. " Et tout s'est passé comme le Seigneur l'avait prédit.

6. Mais recherchons s'il existe encore un temple de Dieu. Il en existe un, oui, mais là où lui-même déclare le bâtir et le restaurer. Il est écrit en effet : " Il arrivera qu'après une semaine un temple de Dieu sera bâti, magnifiquement, au nom du Seigneur " (cf. Dn. 9, 24-27).

7. Je vois donc que ce temple existe. Mais comment sera-t-il bâti au nom du Seigneur ? Vous allez l'apprendre. Avant que nous eussions la foi en Dieu, l'intérieur de nos cœurs était corruptible et fragile, vraiment comme une demeure faite te main d'homme ; il était rempli d'idolâtrie, habité par les démons, puisque nous faisions tout ce qui est contraire à la volonté de Dieu.

8. " Mais il sera bâti au nom du Seigneur " (cf. Dn 9, 24-27). Faîtes bien attention, que le temple du Seigneur soit magnifiquement rebâti ! Comment ? Vous allez l'apprendre. C'est en recevant la rémission des péchés et en mettant notre espérance en son nom, que nous sommes renouvelés, que nous devenons de nouvelles créatures ; et c'est pourquoi Dieu habite réellement en notre intérieur, en nous.

9. Comment cela ? C'est par la parole de foi, qu'il habite en nous, par la vocation de la promesse, par la sagesse de ses volontés, les préceptes de sa doctrine. C'est lui qui prophétise en nous, lui, l'hôte de nos cœurs. C'est lui qui nous ouvre la porte du Temple, à nous qui étions les esclaves de la mort ; et cette porte, c'est notre bouche, qu'il ouvre en nous donnant le repentir. C'est ainsi qu'il nous introduit dans le Temple impérissable.

10. Oui, celui qui désire son salut ne regarde pas à l'homme, mais à celui qui habite dans le cœur du prédicateur, qui parle par sa bouche, et il est tout frappé de n'avoir encore jamais entendu les paroles de celui qui parle par la bouche de son apôtre, et de n'avoir jamais même désiré les entendre. Voilà ce que signifie le Temple spirituel bâti pour le Seigneur.

XVII

1. Je vous ai donné toutes ces explications de mon mieux, aussi simplement que possible, et mon âme espère n'avoir rien omis, dans son zèle, des enseignements qui concernent le salut.

2. Car si je vous écrivais sur des choses présentes ou à venir, vous ne les comprendriez pas, elles qui sont encore à l'état de paraboles. Restons-en donc là pour ce que nous venons de dire.

XVIII

1. Passons encore à une autre sorte de connaissance et de doctrine. Il y a deux voies, répondant à deux sortes de doctrine et d'autorité : la voie de la lumière et celle des ténèbres. Elles sont bien éloignées l'une de l'autre ! A l'une sont préposés les anges de Dieu, qui conduisent vers la lumière ; à l'autre, les anges de Satan.

2. Or, Dieu est le Seigneur depuis l'origine et pour les siècles, et Satan est le prince du temps présent, le temps de l'iniquité.

XIX

1. Or, voici quel est le chemin de la lumière : si quelqu'un veut, en la suivant, parvenir au but qu'il se propose, il lui faut s'appliquer avec zèle à ses œuvres. Et nous avons reçu la connaissance de la bonne manière d'emprunter cette route.

2. Aime celui qui t'a fait, crains celui qui t'a formé, honore celui qui t'a racheté de la mort. Sois simple de cœur, riche du Saint-Esprit. Ne t'attache pas a ceux qui suivent la voie de la mort. Sache haïr tout ce qui déplaît à Dieu, sache haïr toute hypocrisie. N'abandonne pas les commandements du Seigneur.

3. Ne t'élève pas, mais sois humble en toutes choses. Ne t'attribue pas la gloire ; ne forme pas de mauvais desseins contre ton prochain, ne laisse pas ton âme s'enfler d'audace.

4. Ne commets ni fornication, ni adultère ; ne corromps pas les enfants. Ne te sers pas de la parole, ce don de Dieu, pour dépraver quelqu'un. Ne fais point acception de personnes lorsqu'il s'agit de reprendre les fautes d'autrui. Sois doux, sois paisible, tremble aux paroles que tu entends. Ne garde pas rancune à ton frère.

5. Ne te demande pas avec inquiétude si la parole va s'accomplir ou non. " Tu ne prendras pas en vain le nom du Seigneur " (Dt 5, 11). Tu aimeras ton prochain plus que ton âme. Tu ne feras pas mourir l'enfant dans le sein de sa mère, tu ne le feras pas mourir à sa naissance. Tu ne lèveras pas ta main de dessus la tête de ton fils ou de ta fille, mais dès leur enfance, tu leur enseigneras la crainte de Dieu.

6. Ne sois pas envieux des biens de ton prochain ; ne sois pas cupide. N'attache pas ton cœur aux orgueilleux, mais fréquente les humbles et les justes. Accueille comme un bien tout ce qui t'arrive, sachant que rien ne se fait sans Dieu.

7. N'aie pas deux pensées, ni deux langages. Car c'est un piège de mort que la duplicité dans le langage. Obéis à tes maîtres comme à l'image de Dieu, dans le respect et la crainte. Ne commande pas ton serviteur ou ta servante avec amertume, car ils espèrent dans le même Dieu que toi, de peur qu'ils n'en viennent à perdre la crainte de Dieu, votre commun maître : car Dieu ne fait pas acception de personnes, lorsqu'il nous appelle ; mais il choisit ceux que l'Esprit a disposés.

8. Tu partageras tous tes biens avec ton prochain, et tu ne diras pas que quelque chose t'appartient en propre, car si vous possédez en commun les biens impérissables, combien plus les biens qui doivent périr ! Ne sois pas bavard, la langue étant un piège de mort. Autant qu'il te sera possible, pour le bien de ton âme, sois chaste.

9. N'aie pas la main tendue pour recevoir, fermée pour donner. Tu aimeras " comme la prunelle de ton oeil " (Dt 32, 10 ; Ps 16, 8 ; cf. Ps 7, 2), ceux qui te prêcheront la parole du Seigneur.

10. Souviens-toi du jour du jugement, penses-y jour et nuit, recherche constamment la compagnie des saints. Tiens-toi toujours sur la brèche, soir en annonçant la parole et en allant porter au loin tes exhortations dans ton souci de sauver les âmes, soit en travaillant de tes mains pour racheter tes péchés.

11. N'hésite pas à donner et donne sans murmure, et tu connaîtras un jour celui qui sait payer largement de retour. Garde ce que tu as reçu, " sans rien ajouter, ni rien retrancher " (Dt 12, 32). Persévère dans la haine du mal. " Sois équitable quand tu as à juger " (Dt 1, 16 ; Pr 31, 9).

12. Ne fais pas de schismes, mais fais la paix en réconciliant les adversaires. Fais la confession publique de tes péchés. Ne va pas à la prière avec une conscience mauvaise. Telle est la voie de la lumière.

XX

1. La voie du " ténébreux " est au contraire tortueuse, et pleine de malédictions. C'est le chemin de la mort éternelle et du châtiment. On y rencontre tout ce qui perd les âmes : l'idolâtrie, l'impudence, l'orgueil de la puissance, l'adultère, le meurtre, la rapine, la vanterie, la désobéissance, la ruse, la malice, l'arrogance, les drogues, la magie, la cupidité, le mépris de Dieu.

2. Les persécuteurs des justes, les ennemis de la vérité, les amis du mensonge ; car tous ces gens ne connaissent pas la récompense te la justice, ils " ne s'attachent pas au bien " (Rm. 12, 9), ils ne secourent pas la veuve ni l'orphelin ; ils sont toujours en éveil non pour craindre Dieu, mais pour faire le mal. Bien loin de la douceur et de la patience, " ils aiment les vanités " (cf. Ps 4, 3), " poursuivent le gain " (Is 1, 23) ; sans pitié pour le pauvre, sans compassion pour l'affligé, ils sont prompts à la médisance, et, ne reconnaissant pas leur Créateur, " ils tuent les enfants " (Sg 12, 5), font périr par avortement des créatures de Dieu. Ils repoussent le nécessiteux, accablent l'opprimé, se font les avocats des riches, les juges iniques des pauvres. Bref, ils pèchent de toutes les manières.

XXI

1. Il est donc juste de s'instruire de toutes les volontés de Dieu consignées dans les Écritures, et de se diriger d'après elles. Car celui qui les accomplit sera glorifié dans le royaume de Dieu, mais celui qui choisit l'autre voie périra avec ses œuvres. C'est pour cela qu'il existe une résurrection et une rétribution.

2. J'ai quelque chose à vous demander, à vous qui êtes des privilégiés, si vous me permettez un conseil que m'inspire ma bienveillance. Vous avez parmi vous des gens à qui faire du bien ; n'y manquez pas.

3. Il est tout proche le jour où tout périra aux yeux du méchant : " Le Seigneur est proche ainsi que sa rétribution " (Is 60, 10).

4. Je vous en prie encore et encore : soyez à vous-mêmes vos bons législateurs, vos conseillers fidèles ; éloignez-vous de toute hypocrisie.

5. Veuille le Seigneur, le Maître de l'univers, vous donner la sagesse, l'intelligence, la science, la connaissance de ses volontés avec la patience.

6. Faites-vous dociles à Dieu, recherchant ce que le Seigneur attend de vous, afin d'être trouvés fidèles au jour du jugement.

7. S'il demeure quelque mémoire du bien, souvenez-vous de moi en méditant ces enseignements, afin que mon zèle et mes veilles aient porté quelque fruit ; je vous en prie, c'est une grâce que je vous demande.

8. Tant que vous serez dans le précieux vase de votre corps, ne négligez aucun de ces enseignements, mais appliquez-y continuellement votre esprit et accomplissez tout ce qui est commandé ; la chose en vaut la peine.

9. C'est pour cela surtout que je me suis empressé de vous écrire, sur les sujets à ma portée, voulant vous donner de la joie.

Salut à vous, enfants de dilection et de paix. Que le Seigneur de gloire et de toute grâce soit avec votre esprit.

    

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