On ne peut
qu’être heureux de savoir que deux époux sont béatifiés dans l’Eglise : Louis et
Zélie Martin ont été proclamés Bienheureux le dimanche 19 octobre 2008, et
pourront successivement devenir également Saints. Une remarque trop rapide et
superficielle pourrait dire : C’est normal qu’ils soient Saints, puisque leur
fille Thérèse est une Sainte. Ce raison-nement serait parfaitement faux. C’est
d’ailleurs le contraire qui s’est passé : Louis et Zélie ont cherché la
sanctification en Dieu, quotidiennement, et un des fruits de cette élévation à
Dieu a été leur fille, Sainte Thérèse.
Qu’ont-ils
donc fait ? Qui étaient-ils, ces parents ? A première vue, rien de très
extraordinaire. Tout est dans le quotidien, dans la simplicité : et c’est
précisé-ment là qu’ils ont rencontré Dieu.
Louis Martin
est né à Bordeaux en 1823, ses parents finissent par se fixer à Alençon ; en
grandissant, il se sent une vocation religieuse à laquelle il préfère un autre
genre de vie. Il ouvre une bijouterie-horlogerie. Il a des loisirs, comme tout
bon petit bourgeois de province : la pêche à la ligne, le billard au café du
coin avec quelques amis, quelques voyages et même un peu de “boursicotage”, mais
surtout il est un chrétien convaincu et actif et, en dehors de ses devoirs
religieux proprement dits (il va chaque dimanche à l’église, il reçoit les
Sacrements aussi, il prie beaucoup) — il cherche à rencontrer Jésus dans les
pauvres et participe aux Conférences Saint-Vincent-de-Paul, organisées par
Frédéric Ozanam (lui aussi Bienheureux) en vue de venir en aide aux nécessiteux.
C’est sa mère qui lui fait rencontrer en 1858 — il a trente-cinq ans déjà -
cette belle jeune fille qui sera son épouse.
Zélie Guérin
est née en 1831 ; elle aussi a renoncé à une vie religieuse, et a ouvert une
petite mercerie de dentelles à Alençon. En se rencontrant, Louis et Zélie ont
tout d’abord uni leur foi en Dieu et ont cherché à faire Sa volonté avant tout.
Zélie se plaisait à dire : Dieu est le Maître ; à quoi Louis ajoutait : Dieu
premier servi.
De leur
mariage naîtront successivement neuf enfants, dont quatre mourront en bas âge.
Tristesse pour des parents, ces deuils affinent leur foi. L’espérance de la vie
éternelle les fait vivre plus intensément en union avec Dieu. Zélie écrit :
“Nous nous efforçons de remettre toutes choses entre les mains de Dieu et
d’attendre les événements dans le calme et l’abandon à sa volonté”. Leur vie
chrétienne est intense : chaque matin ils vont participer à l’Eucharistie, Louis
pratique l’adoration nocturne ; chaque jour ils prient avec leurs enfants en
famille ; constamment ils sont remplis d’attention pour les autres, qu’ils
soient domestiques, voisins ou connaissances. Les cinq filles de ce ménage
grandissent véritablement “dans l’Eglise”. L’une d’elles, Céline, écrit :
“Quand Papa avait communié, il restait silencieux sur le chemin du retour,
continuant — nous disait-il — à (s’) entretenir avec Dieu”.
Zélie a été
très tôt frappée par la maladie. Un cancer au sein se déclare dès 1865 — elle a
34 ans, et elle continuera sa mission de mère pendant douze années encore. Elle
mourra à quarante-six ans (1877), jeune encore, pleine de vertus et de mérites,
acquis héroïquement dans l’acceptation quotidienne de la volonté de Dieu.
Louis
s’installera à Lisieux avec ses cinq filles. C’est une vie chaleureuse, avec ses
sorties, ses promenades, les veillées où l’on s’entretient dans une tendre
atmosphère devant le feu de cheminée. Quatre de ses filles entreront au Carmel
et une autre chez les Visitandines de Caen. Bientôt une pénible artériosclérose
le séparera toujours plus des siens, jusqu’à ce qu’il doive être interné
définitivement en hôpital psychiatrique. Il meurt en 1894.
Les époux
Martin ont su être la “Lumière du monde” (Mt. 5,13-16), ils ont “marché
humblement avec Dieu” (Mi. 6,8), ils ont cherché l’avis du Seigneur.
Ces nouveaux
Bienheureux sont pour nous un don de Dieu :
– un don pour
les époux : ils vécurent l’union indissoluble de leur mariage, pendant dix-neuf
années. Zélie écrivait à Louis : “Je ne puis pas vivre sans toi, mon cher
Louis”, et il lui répondait : “Je suis ton mari et ami qui t’aime pour la vie”.
– un don pour
les parents : ils reçurent de Dieu cette mission de donner la vie, malgré la
fatigue, malgré la maladie de Zélie.
– un don pour
tous ceux qui ont perdu un conjoint : Louis a accepté son veuvage avec foi et
courage, se donnant entièrement au bien de ses enfants.
– un don pour
tous les malades : ils ont accepté la maladie et la mort en face, sans rien
refuser à Dieu.
Oui, vraiment,
sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face, Docteur de l’Eglise,
avait raison de dire :
“Le Bon
Dieu m’a donné un père et une mère plus dignes du Ciel que de la terre”.
Le procès de
Béatification, pour être sanctionné, examine un miracle. Ce fut celui de la
guérison d’un bébé italien atteint d’une malformation pulmonaire à la naissance,
guéri en 2002. Louis et Zélie seront très probablement fêtés ensemble dans le
diocèse de Lisieux, mais au Martyrologe leur nom sera inscrit au jour respectif
de leur mort sur terre – leur naissance au ciel : 29 juillet pour Louis, 28 août
pour Zélie.
Sources :
Homélie du cardinal José Saraiva Martins, lors de la Béatification.
Article du journal
“La Croix” du dimanche 19 octobre.
Hagiography Circle :
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