« Le 24 novembre,
fête de notre père saint Jean de la Croix, Notre-Seigneur s’est
communiqué à mon âme, malgré mon extrême indignité, et Il m’a
fait connaître plus clairement quels étaient ses desseins au
sujet de l’œuvre de la Réparation des blasphèmes du saint Nom de
Dieu. Je vais donc dire à peu près ce qui s’est passé dans mon
âme.
Pendant toute la
messe, j’ai été occupée par Notre-Seigneur à voir comme
l’univers est coupable. J’ai entendu la sainte messe et fait la
sainte communion en réparation des outrages faits à Dieu: ce qui
est ma pratique habituelle depuis que Notre-Seigneur m’applique
à réparer les blasphèmes du saint Nom de Dieu, son Père.
J’éprouve une grande consolation de penser que par la sainte
communion, Notre-Seigneur vient en mon âme faire Lui-même cette
réparation, qui ne peut être dignement faite que par son divin
Cœur; aussi, quand je Le reçois, je commence par me donner à
Lui, m’anéantissant dans son Cœur, ensuite, je Le laisse faire
dans mon âme l’office de médiateur entre Dieu et les hommes.
Mais, à cette communion du jour de la fête de notre père saint
Jean de la Croix, aussitôt que Notre-Seigneur fut entré dans mon
âme, il s’empara de mes puissances et me fit entendre ces
paroles :
Jusqu’à présent, je
ne vous ai montré que peu à peu les desseins de mon Cœur ; mais
aujourd’hui je veux vous les montrer tout entiers. L’univers est
couvert de crimes ! L’infraction des trois premiers
commandements de Dieu a irrité mon Père. Le saint Nom de Dieu
blasphémé et le saint Jour du Dimanche profané mettent le comble
à la mesure d’iniquités. Ces péchés sont montés jusqu’au trône
de Dieu et provoquent sa colère, qui se répandra si on n’apaise
sa justice. Dans aucun temps ces crimes n’ont monté si haut. Je
désire, mais d’un vif désir, qu’il se forme une Association bien
approuvée et bien organisée pour honorer le Nom de mon Père.
Votre supérieure a raison de ne vouloir rien faire qui ne soit
solide en cette dévotion, car autrement, mon dessein ne serait
pas rempli.
Voilà à peu près la
commission dont voulais me chargé Notre-Seigneur auprès de mes
supérieurs; mais j’éprouvais de la répugnance à l’accepter,
n’ayant jamais entendu dire qu’il y eût dans l’Église
d’association pour cette fin dont me parlait Notre-Seigneur.
Alors j’ai dit:
— Ah ! mon Dieu,
si j’étais bien sûre que ce fût Vous qui me parliez, je n’aurais
pas de peine à dire ces choses à mes supérieurs.
Il me répondit :
— Ce n’est pas à
vous de faire cet examen, mais à eux. Je me suis déjà assez
communiqué à votre âme pour me faire connaître; ne vous ai-je
pas donné tout ce que je vous ai promis, lorsque je me suis fait
entendre à votre âme de la même manière que je le fais
maintenant ? Prenez bien garde: car si, manquant de simplicité,
vous mettiez obstacle à mon dessein, vous seriez responsable du
salut de ces âmes ; si, au contraire, vous êtes fidèle, elles
embelliront votre couronne.
Notre-Seigneur me
faisait ainsi entendre qu’Il voulait, par cette œuvre de
réparation, faire miséricorde à des pécheurs. Il me semble qu’en
finissant, Il me dit à peu près ces paroles :
— Eh ! à qui
m’adresserai-je, si ce n’est à une carmélite, qui par état doit
sans cesse glorifier mon Nom ?
Voilà, ma Révérende
Mère, quoique imparfaitement, ce que je crois que Notre-Seigneur
me fit entendre, car mon âme était toute perdue en Dieu et
saisie d’une grande frayeur. Notre-Seigneur me mettait en même
temps dans l’esprit ce qui fut dit à Abraham: que s’il trouvait
dis justes dans les villes coupables, elles seraient épargnées;
et il me semblait qu’en faveur des âmes qui se seraient
appliquées à la réparation des blasphèmes et des mépris faits
contre la majesté de Dieu, Il aurait apaisé sa justice et fait
grâce aux coupables. Voilà l’essence et le fond de tout ce que
Notre-Seigneur me fit entendre au sujet de l’Œuvre. Je déclare
bien humblement et bien véritablement, ma Révérende Mère,
qu’avec la grâce de Dieu, je vous ai parlé dans la plus grande
simplicité de mon âme. Voilà que je vous ai fait toutes les
commissions de Notre-Seigneur, comme sa petite domestique; je
laisse toutes ces choses à votre bon jugement et à la sagesse de
Monsieur le Supérieur. Pour moi, voilà ma petite mission remplie
près de vous; le Saint-Esprit, qui éclaire les Supérieurs, vous
fera connaître si c’est Lui que m’a dicté ce que j’ai écrit. Je
n’ai aucune attache à ces choses. Je n’y ajoute foi qu’autant
que mes Supérieurs l’approuveront. Maintenant, je vais me tenir
tranquille, glorifiant le saint Nom de Dieu en union avec le
Saint Enfant-Jésus ».
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