La spiritualité de sainte
Mechtilde
d’après le Livre de la Grâce spéciale
2-Le Cœur de Jésus et sainte Mechtilde
2-1-La vocation de Mechtilde
Mechtilde, sachant que ses péchés
avaient été remis, se reposait sur le Cœur de Jésus:
Alors, elle vit sortir du Cœur
du Seigneur un instrument de musique dont elle se servit pour célébrer les
louanges de Dieu...
Puis, le Seigneur l’appela et posa
ses mains sur les mains de Mechtilde afin de lui donner tout le travail et
toutes les œuvres de sa sainte humanité. Il mit ensuite ses yeux si doux sur les
yeux de sa bien-aimée, et lui communiqua ainsi le mérite de ses saints regards
et des abondantes larmes qu’il a versées. Par le contact de ses oreilles, il lui
donna toutes les opérations de son ouïe divine, et par celui de ses lèvres
vermeilles, toutes ses paroles de louange, d’action de grâce, de prière; et même
celles de ses discours publics, pour suppléer aux négligences qu’elle avait
commises.
Enfin il unit son très doux cœur
à celui de sa bien-aimée; il lui appliqua le fruit de tout son travail de
méditation, de dévotion, d’amour, et l’enrichit de tous ses biens. Alors cette
âme tout entière, incorporée au Christ Jésus, fondue par l’amour, comme la cire
par le feu, reçut le sceau de la ressemblance divine. C’est ainsi que cette
bienheureuse devint une même chose avec son Bien-Aimé... (Voir Annexe 1) (Le
Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre 1)
2-2-Les images et les symboles représentant le Cœur de
Jésus
2-2-1-Le Cœur de Jésus est une lampe
Pendant une messe, au moment de
l’élévation de l’hostie consacrée, Mechtilde crut voir le Seigneur élever de
ses propres mains son Cœur très doux semblable à une lampe translucide, remplie
et débordante... Ceci donnait à entendre que les hommes peuvent tous recevoir,
de la plénitude du Cœur de Jésus, la grâce plus que suffisante à chacun, selon
sa capacité, sans que ce Cœur cesse de surabonder en lui-même de béatitude, car,
en se déversant, il ne souffre pas de détriment.
Et Mechtilde vit alors les cœurs de
toutes les personnes présentes sous forme de lampes attachées par des liens au
Cœur du Seigneur. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXI,
19)
Une autre fois, pendant la messe,
la servante de Dieu vit le Cœur de Jésus-Christ symbolisé par une lampe
transparente comme le plus pur cristal et ardente comme la flamme. Cette lampe
laissait déborder de tous côtés son incomparable douceur, qui, plus suave que le
miel, pénétrait les cœurs de tous les dévots assistants. Le feu signifiait
l’ardeur de ce divin amour qui porta le Christ à s’offrir pour nous à Dieu le
Père sur l’autel de la croix. La douceur répandue signifiait la surabondance des
biens et de la félicité qu’il nous a donnés dans son propre Cœur.
Oui, nous avons vraiment en lui
tout ce qui peut nous être salutaire et utile, c’est-à-dire la louange et
l’action de grâces, la prière, l’amour, le désir, la satisfaction, enfin tout ce
qui peut compenser toutes nos négligences. (Le Livre de la Grâce spéciale,
troisième partie, chapitre XVII, 17)
2-2-2-La maison
Mechtilde venait de voir le Cœur de
Jésus sous la forme d’une lampe quand, soudain, le divin Cœur se changea en
une grande maison d’or, et le Seigneur se promenant au milieu de son propre Cœur
comme dans un splendide et agréable jardin.
Comme Mechtilde s’étonnait, elle
entendit le Seigneur:
— As-tu donc oublié ce mot du
psaume 2: “J’allai et je venais dans l’innocence de mon cœur, au milieu de ma
maison”? Et qui peut réaliser cela sinon moi? Personne n’est innocent par
soi-même, sinon moi seul. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie,
chapitre XIX, 17)
Quand Jésus donne son Cœur à une âme
Pendant une messe après le 4ème
dimanche après Pâques, le Seigneur dit à Mechtilde:
— Je te donne mon Cœur comme
maison de refuge, afin qu’à l’heure de ta mort il ne s’ouvre devant toi d’autre
chemin que celui de mon Cœur, où Tu viendras te reposer à jamais.
Mechtilde conçut alors une grande
dévotion pour le divin Cœur de Jésus-Christ, et, ensuite, presque chaque fois
que le Seigneur lui apparaissait, elle recevait de ce Cœur quelque faveur
spéciale, comme celle de causer familièrement avec lui. (Le Livre de la Grâce
spéciale, deuxième partie, chapitre XIX, 17)
La familiarité du Cœur de Jésus
Mechtilde souhaitait vivement la
présence de son Bien-Aimé lorsqu’il lui apparut. Son Cœur était ouvert comme
la porte d’une grande maison, pour lui donner entrée: le pavé était d’or dans
cette maison, dont la forme ronde signifiait l’éternité de Dieu. Le Seigneur se
tenait au milieu, l’âme auprès de lui. Ils causaient ensemble... (Le Livre
de la Grâce spéciale, Troisième partie, chapitre I, 1)
Pendant les fêtes de Pâques, le
Seigneur lui révéla encore la maison de son Cœur:
Le Seigneur lui montra une
superbe maison, vaste et élevée. Dans cette maison, elle en vit une petite,
faite de bois de cèdre, revêtue à l’intérieur de lames d’argent; au milieu
résidait le Seigneur. Elle reconnut sans peine que cette maison était le Cœur
divin, car elle l’avait vu plus d’une fois sous ce symbole; la petite maison
située dans la grande figurait l’âme qui est immortelle à l’instar du bois
incorruptible des cèdres. La petite maison avait sa porte à l’orient, fermée
d’un verrou d’or d’où pendait une chaîne d’or qui allait s’attacher au Cœur même
du Seigneur, de telle sorte que la chaîne paraissait l’ébranler lorsque la porte
s’ouvrait. Mechtilde comprit que la porte désignait le désir de l’âme, le verrou
sa volonté; mais la chaîne figurait le désir de Dieu, qui, toujours, prévient et
excite le désir de l’âme, et l’attire à lui.
Le Seigneur lui dit:
— C’est ainsi que ton âme est
toujours enfermée dans mon Cœur, et moi dans le tien. Mais quoique tu me
contiennes au-dedans de toi, si bien que je te suis plus intime que tu ne l’es à
toi-même, cependant mon divin Cœur dépasse et surpasse tellement ton âme qu’elle
semble ne pouvoir atteindre jusqu’à lui: c’est ce que signifie l’élévation et
les vastes dimensions de la grande maison que tu as vue. (Le Livre de la
Grâce spéciale, première partie, chapitre XIX, 33)
Huit jours après Pâques Mechtilde
vit de nouveau la maison. Elle entra et arriva “jusqu’à la plaie du Cœur.
Elle le vit grand ouvert et laissant échapper des vapeurs aussi embrasées que
celles d’un ardent foyer.
— Entre, dit Jésus,
parcours mon divin Cœur en long et en large: sa longueur représente l’éternité
de ma bonté; sa largeur l’amour et le désir que j’eus toujours de ton salut.
Parcours cette longueur et cette largeur, c’est-à-dire revendique comme ta
propriété, parce qu’il est vraiment à toi, tout le bien que tu trouveras dans
mon Cœur. Et le Seigneur souffla sur elle en disant:
— Reçois mon Saint-Esprit.
Alors cette bienheureuse,
remplie de l’Esprit-Saint, vit sortir de tous ses membres des rayons de feu dont
chacun allait toucher une des personnes pour qui elle avait prié. après la
communion, son cœur lui sembla fondu en un seul lingot d’or avec celui du
Seigneur qui lui disait:
— Ainsi ton cœur adhérera
toujours au mien selon ton désir et en proportion des délices que tu trouveras
dans cette union. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre
XIX, 36)
Jésus vient dans les âmes avec
un si grand amour que le cœur le plus froid et le plus obstiné peut s’y embraser
et se fondre d’amour, s’il consent à ne pas résister. (Le Livre de la Grâce
spéciale, troisième partie, chapitre XVIII, 18)
2-2-3-Le Cœur de Jésus est comme une vigne
Un dimanche, le Seigneur lui dit:
— C’est dans l’amour de mon Cœur
que je te laverai!
Aussitôt il ouvrit la porte de
ce Cœur, trésor où sont enfermées les douceurs infinies de la Divinité. Elle y
entra comme dans une vigne. Elle y vit un fleuve d’eau vive qui coulait de
l’orient à l’occident; et sur les bords du fleuve, douze arbres pourtant douze
fruits qui sont les vertus énumérées par saint Paul dans son épître,
c’est-à-dire: la charité, la pais, la joie. (Gal V, 22) Ce cours d’eau avait
nom: fleuve de l’amour. L’âme y entra, et fut lavée de toutes ses taches... Il y
avait aussi dans cette vigne, une plantation de palmiers... Le Seigneur, sous la
figure d’un jardinier béchait la terre. L’âme dit:
— Ô Seigneur, quelle est votre
bêche?
— Ma crainte, répondit le
Seigneur.
En certains endroits la terre
était dure, meuble en d’autres. La terre dure signifiait les cœurs endurcis dans
le péchés, que ni avis, ni reproches, ne peuvent corriger; la terre meuble
désignait les cœurs qui se sont attendris par les larmes et la contrition
sincère. Le Seigneur dit:
— Ma vigne c’est l’Église
catholique. Pendant trente trois ans je lui ai donné mon travail et mes sueurs.
Viens travailler avec moi dans cette vigne... (Le Livre de la Grâce
spéciale, deuxième partie, chapitre II, 2)
Mechtilde demanda à Jésus que son
cœur à elle soit toujours une vigne selon son Cœur. Aussitôt elle se vit comme
une vigne se promenant dedans son propre cœur et il lui fut révélé que
l’homme juste est la vigne de Dieu, car le Seigneur prend ses délices en celui
qui, de l’enfance à la mort, vit saintement pour lui. Cependant elle avait aussi
aperçu au milieu de la vigne une fontaine auprès de laquelle le Seigneur était
assis. De son Cœur Sacré, comme d’une source, l’eau coulait rapide vers cette
fontaine où il semblait la puiser pour la répandre sur les hommes désireux de
leur régénération spirituelle. Dans la construction élevée au-dessus de la
fontaine, on pouvait admirer sept écussons sculptés représentant les sept dons
du Saint-Esprit; ils sont en effet, bien représentés sous la forme d’écussons ou
de boucliers, car nul ne peut, sans avoir vaillamment combattu, les posséder
toujours pleinement.
Plus tard le Seigneur lui dit que
lorsqu’une âme est admise dans son intimité, il lui donne le mets le plus
exquis, c’est-à-dire le sacrement de son Corps et de son Sang. (Le Livre de
la Grâce spéciale, première partie, chapitre XXII, 41)
2-2-4-Le fleuve d’eau vive
Au cours d’une vision, Mechtilde
vit un fleuve sortir du Cœur divin pour se répandre sur elle, la pénétrer tout
entière et chasser sa tristesse au point de n’en laisser aucune trace. (Le
Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXII, 20)
2-2-5-Le Cœur divin est une cuisine
Étonnant! Reconnaissant son
indignité Mechtilde déclara au Seigneur:
— ... Je suis indigne d’être
employée dans votre cuisine à laver les écuelles!
Jésus répondit:
— Ma cuisine, c’est mon Cœur
divin. La cuisine est une salle commune ouverte à tous, aux esclaves comme aux
personnes libres; ainsi mon Cœur est sans cesse ouvert pour tous et disposé à
fournir à chacun ce qui peut lui plaire. Le chef de cette cuisine est le
Saint-Esprit, dont l’inestimable suavité remplit sans cesse mon Cœur avec une
libéralité débordante. Mes écuelles, ce sont les cœurs des saints et de mes élus
qui reçoivent continuellement de cette surabondance enivrante de mon Cœur divin.
(Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXIII, 20)
2-2-6-Le nid de l’âme
Un jour, après la communion, Jésus
dit à Mechtilde:
— Tu te feras un nid dans mon
Cœur divin.
— Qu’est-ce que ce nid? dit
Mechtilde.
Le Seigneur répondit:
— L’humilité gardée dans les
dons et les faveurs que tu reçois de ma part; plonge-toi toujours dans l’abîme
d’une humilité sincère. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie,
chapitre XXIV, 21)
2-2-7-Une flamme ardente
Mechtilde vit le Cœur du Seigneur
ouvert... Son aspect était celui d’une flamme ardente plutôt que d’un
brasier; sa couleur était admirable tandis que sa forme défiait toute
description. Le Seigneur dit:
-Ainsi ai-je voulu que les cœurs
de tous les hommes fussent embrasés du feu de l’amour. (Le Livre de la Grâce
spéciale, troisième partie, chapitre X, 10)
2-2-8-Les battements du Cœur de Jésus
Quatre
battements du Cœur de Jésus
Pendant une messe de la Nativité,
l’âme de Mechtilde saisit l’Enfant Jésus et entendit battre son Cœur. Or ce
cœur donnait comme d’un seul élan trois vigoureuses pulsations, puis un coup
léger... Jésus dit:
— Mon Cœur ne battait pas comme
celui des autres hommes... il a toujours battu comme tu l’entends.: c’est
pourquoi je suis mort si vite sur la croix.
Le premier battement
vient du tout puissant amour de mon cœur, amour si grand que j’ai vaincu dans ma
douceur et ma patience les contradictions du monde et la cruauté des juifs.
Le second battement
vient de l’amour très sage par lequel le me suis gouverné moi-même et tout ce
qui m’appartient d’une manière infiniment digne de louanges, amour qui m’a fait
ordonner avec sagesse tout ce qui est au ciel et sur la terre.
Le troisième
battement vient de ce doux amour qui me pénétrait au point de me faire trouver
douces les amertumes de ce monde, et de me rendre aimable et très agréable la
mort si amère que j’ai endurée pour le salut des hommes.
Le quatrième est
faible battement est l’expression de la bonté que j’eus, comme homme, et par
laquelle je paraissais aimable, de société facile et imitable en tous ses actes.
(Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre V, 9)
2-2-9-Le miroir
Le Cœur du Christ est pour nous
le miroir du plus ardent amour; nous pouvons y voir la tiédeur de notre cœur à
l’égard de Dieu et du prochain. (Le Livre de la Grâce spéciale, troisième
partie, chapitre XV, 15)
2-3-Le Cœur de Jésus supplée à nos manques
2-3-1-Le Seigneur supplée à nos négligences
Mechtilde n’avait pu arriver à
l’heure à la messe, ayant dû, par obéissance, achever un travail. Elle était
fort désemparée. Le Seigneur vint la rassurer en lui disant:
— Ne me crois-tu pas assez de
valeur pour payer tes dettes?... Est-ce que je ne suis pas d’une valeur assez
appréciable pour suppléer à toutes tes omissions?... Donc, je répondrai
complètement de tout devant Dieu le Père. (Le Livre de la Grâce spéciale,
première partie, chapitre XXXI, 55)
Mechtilde se plaignait encore ses
négligences, pensant qu’elle avait inutilement dépensé les dons reçus de Dieu,
et qu’elle les avait consommés sans profit par son ingratitude. Mais le Seigneur
lui dit:
— Ne te trouble pas,
j’acquitterai toutes tes dettes et je suppléerai à toutes tes négligences... Si
tu m’es parfaitement fidèle, tu dois préférer de beaucoup que l’Amour répare tes
négligences plutôt que de les réparer toi-même, car il en aura ainsi la gloire
et l’honneur. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XV,
13)
Une autre fois, comme elle
regrettait chez une personne de sa connaissance une négligence envers la sainte
Vierge, la Vierge Mère de Dieu lui donna le Cœur de Jésus-Christ, sous la
forme d’une lampe ardente, en lui disant:
— Voici que je te donne le très
digne et très noble Cœur de mon Fils bien-aimé afin qu’elle me l’offre avec la
fidélité parfaite et le souverain amour qu’il m’a témoigné et me témoignera sans
fin. Qu’elle me l’offre pour toutes ses négligences à mon service, et sa faute
sera amplement réparée. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie,
chapitre XLVI, 9)
2-3-2-Comment le Seigneur supplée à ce qui nous manque
Mechtilde était tombée dans une
grande tristesse et se croyait inutile puisque, après avoir reçu de si
grandes grâces elle n’aimait pas Dieu comme elle l’aurait dû. Le Seigneur lui
dit:
— Eh! ma bien-aimée, ne sois pas
triste; tout ce qui est à moi est à toi.
Alors elle dit:
— Si vraiment tout ce qui est à
vous est à moi, votre amour est donc mien, et il est vous-même, ainsi que dit
Jean: “Dieu est amour”. Alors je vous offre cet amour pour qu’il supplée à tout
ce qui me manque.
Le Seigneur accepta cette parole
et répondit:
— C’est bien, et quand tu
voudras me louer ou m’aimer et que tu n’arriveras pas à satisfaire ton désir, tu
diras: “Je vous loue, ô bon Jésus; à tout ce qui me manque, suppléez vous-même,
je vous prie.” Et quand il te plaira de m’aimer, tu diras: “Je vous aime, ô bon
Jésus; à ce qui me manque, daignez suppléer en offrant à votre Père, pour moi,
l’amour de votre cœur.” (Le Livre de la Grâce spéciale, quatrième partie,
chapitre XXIII, 22)
2-3-3-Jésus supplée aussi à nos insuffisances
spirituelles
Un jour Mechtilde vit Jésus sous la
forme d’un adolescent d’environ douze ans. Il lui dit:
— Qu’y a-t-il dans l’amour de la
louange divine, sinon un certain gémissement de l’âme qui souffre de ne jamais
louer Dieu autant qu’elle le désire? Eh bien! les désirs, la dévotion, la
prière, la bonne volonté qu’une âme a de faire le bien, sont également un
gémissement douloureux; et quand je viens suppléer par moi-même aux impuissances
de cette âme, je la guéris de toutes ses blessures. (Le Livre de la Grâce
spéciale, première partie, chapitre IX, 15)
2-3-4-La réciprocité dans la suppléance
Un autre jour, le Seigneur,
toujours à la recherche du salut de l’homme, fit comprendre à Mechtilde que,
comme le Seigneur ne peut plus maintenant souffrir ses douleurs, il se fait
suppléer par ses amis, par ceux qui adhèrent à lui dans la fidélité... Ainsi,
les souffrances et les tribulations de ceux qui l’aiment contribueront au mérite
des justes, au pardon des pécheurs et au bonheur éternel des défunts... (Le
Livre de la Grâce spéciale, troisième partie, chapitre XXVI, 37)
Une autre fois encore, remplie
de tristesse elle gémissait de se voir inutile, parce que la maladie l'empêchait
de garder l'observance. Alors elle entendit le Seigneur lui dire:
— Ah! Viens à mon secours,
laisse-moi rafraîchir en toi l'ardeur de mon Cœur divin.
Par cette parole, elle comprit
que toute personne qui supporte volontiers les peines et les tristesses en union
avec l'amour qui fit supporter à Jésus-Christ sur la terre tant d'afflictions et
une mort ignominieuse, offre au Seigneur de rafraîchir en elle l'ardeur de son
Cœur divin. N'est-il pas toujours à la recherche du salut de l'homme? En effet,
comme le Seigneur ne peut plus maintenant souffrir lui-même, il se fait suppléer
par ses amis, par ceux qui adhèrent à lui dans la fidélité. Et lorsque l'âme,
qui aura été sur la terre le rafraîchissement du Cœur divin, entrera dans le
ciel, elle volera droit vers le Cœur de Dieu, et elle ira, dans les flammes de
ce Cœur embrasé, se consumer tout entière avec ce qu'elle aura supporté pour le
Christ.
2-4-Le cœur de Jésus, c’est la miséricorde
2-4-1-Dieu est la Charité qui anime son Cœur et accueille les âmes
Un jour de l’Ascension Mechtilde
semblait être sur une montagne. Elle vit soudain l’Amour sous la forme d’une
vierge qui lui dit:
― C’est
moi qui ai conduit le Fils, du sein de son Père jusqu’en ce monde terrestre;
c’est moi qui maintenant l’élève au-dessus de tous les cieux.
Le Seigneur Jésus parut soudain
orné des vêtements de l’Amour, de la Charité. Ainsi Dieu était vêtu de lui-même,
puisque Dieu est Charité, et que la charité, c’est Dieu.
Le Seigneur Jésus arriva alors
devant son Père et lui présenta, renfermées en lui-même, les âmes de tous les
élus, tant de ceux qui étaient déjà au ciel que les élus à venir avec toutes
leurs œuvres, leurs souffrances et leurs mérites. Celles-là, même qui, pour le
moment, étaient en état de péché, apparaissaient dans le Christ telles qu’elles
seraient plus tard dans le ciel. Mais les âmes éprises d’amour et patientes dans
la souffrance étincelaient en son Cœur d’un éclat particulier, tandis que les
autres brillaient, selon leur rang, dans les diverses parties de son Corps.
Alors l’âme se prosterna aux pieds
du Seigneur pour l’adorer. Puis elle demanda au Seigneur pourquoi tant de gens
attendaient la mort avec frayeur. Le Seigneur répliqua:
― La
crainte du trépas vient de la nature, car l’âme aime le corps et frissonne
d’horreur devant l’amertume de la séparation. Mais toi, que crains-tu puisque tu
as reçu mon Cœur en gage d’immortelle alliance, pour maison de refuge et pour
demeure éternelle?
2-4-2-Les larmes d’amour du Seigneur
L’Évangile rapporte quelques scènes
où Jésus pleura; il expliqua:
― Chaque
fois que sur la terre je pensais à cette ineffable union qui me fait un avec
Dieu le Père, mon Humanité ne pouvait retenir ses larmes. Au souvenir de cet
inestimable amour qui, m’attirant du sein du Père, m’a fait épouser la nature
humaine, mon Humanité ne pouvait s’empêcher de verser des pleurs.
― Où sont
donc ces larmes que l’amour seul fit couler de vos yeux? demanda Mechtilde.
― Elles
ont une place spéciale dans mon Cœur, comme un trésor préféré que l’on garde
seul dans un lieu choisi... Ces larmes sont conservées au plus intime de mon
Cœur.
Et Mechtilde vit de nouveau le
Seigneur ouvrir la plaie de son Cœur. Il lui dit:
― Regarde
l’étendue de mon amour: si tu veux le bien connaître, tu ne le trouveras nulle
part plus clairement exprimé que dans l’Évangile. On n’a jamais entendu formuler
de sentiments plus forts et plus tendres que ceux-ci: Comme le Père m’ai aimé,
ainsi je vous ai aimés. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie,
chapitre XXI, 39)
2-4-3-La source de miséricorde
Le Seigneur emmena Mechtilde au
pied d’une montagne déserte et lui montra la fontaine de miséricorde qui
prend sa source au bas de cette montagne. Les anges firent boire l’eau de la
source à la glorieuse Vierge Marie pour l’accroissement de sa béatitude, puis
à tous les habitants du ciel. Ensuite les anges firent boire de la susdite
source de miséricorde à l’Église militante... Enfin, les anges firent boire de
cette même fontaine de miséricorde aux âmes du purgatoire. (Le Livre de la
Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXVIII, 25)
La nuit suivante, conduite de
nouveau en esprit à cette fontaine de miséricorde, elle vit bouillonner, sortant
de la même source, la veine d’eau très abondante de l’humble reconnaissance. Ce
cours d’eau, après avoir traversé le Cœur de Jésus-Christ, retournait aussi pur
vers sa source. Et ceci doit s’entendre de la manière suivante: puisque les dons
de Dieu sont divers et que tous les hommes n’ont pas la même grâce, vu la
division des dons, chacun doit veiller soigneusement sur le don qui lui a été
conféré par Dieu, et le faire remonter à Dieu par la reconnaissance, s’estimant
indigne de toute grâce et même de la vie. (Le Livre de la Grâce spéciale,
deuxième partie, chapitre XXIX, 25)
Un autre jour parlant des saints,
le Seigneur dit:
― En la
fête de chaque saint tu peux me louer d’abord pour les avoir choisis de toute
éternité... Même s’ils tombent dans de grands péchés (ceux qui sont encore sur
la terre) je ne vois plus en eux que la gloire à laquelle ils parviendront...
s’ils se convertissent, et grâce à ma miséricorde. (Le Livre de la Grâce
spéciale, première partie, chapitre XXXIV, 60)
|