« Melchiade ou
Miltiade », dit le Liber Pontificalis, « était né en Afrique il
siégea trois ans, sept mois et douze jours, depuis le consulat de
Maximien (310), jusqu'aux ides de janvier, sons le consulat de
Volusien et Anianus (10
janvier
314). Par une constitution, il défendit à tous les fidèles de jeûner
le jeudi et le dimanche, parce que les Manichéens, véritables
idolâtres qui infestaient alors la ville de Rome, avaient choisi ces
deux jours pour leurs jeûnes solennels. Il régularisa par un décret
la distribution du pain fermenté, bénit par t'évoque sous le nom
d'Eulogies. En une ordination au mois de décembre, il imposa les
mains à sept prêtres, cinq diacres et douze évêques destinés à
diverses églises. H fut enseveli dans la crypte pontificale de la
catacombe de Saint-Calliste, sur la voie Appienne. Après lui le
siège pontifical resta vacant seize jours ».
La première année
du pontificat de saint Melchiade (311) fut marquée par la
consommation du schisme des Donatistes. Les évêques d'Afrique,
profitant de la paix qui venait d'être rendue à l'Église par
l'empereur Galère, s'étaient assemblés à Carthage pour donner un
successeur à Mensurius, évêque de cette ville, mort pendant la
persécution. Le diacre Cécilien fut élu d'une voix unanime. Félix,
évêque d'Aptonge, lui imposa les mains, le fit asseoir dans la
chaire épiscopale et lui remit l'inventaire des vases d'or et
d'argent dont Mensurius avait confié la garde aux anciens de
l'Église. Quelques-uns de ces infidèles dépositaires avaient espéré
détourner à leur profit certains de ces objets précieux. Ils se
liguèrent avec deux diacres intrigants, Botrus et Celeusius qui
avaient osé afficher leurs prétentions au siège de Carthage. De
concert avec ces ministres ambitieux, ils appelèrent ceux des
évoques de Numidie qu'on n'avait pu convoquer à l'époque de
l'ordination de Cécilien. Sous la direction de Donat, évoque de
Cassis-Nigris, ville de Numidie, ils se formèrent en conciliabule et
déposèrent Cécilien, sous prétexte que Félix d'Aptonge, qui lui
avait imposé les mains, était un traditeur; que de plus Cécilien
avait refusé de se rendre à leur assemblée; enfin; qu'étant encore
diacre, il aurait empêché les fidèles de porter des secours aux
Martyrs dans leurs cachots, durant la persécution de Dioclétien.
Considérant donc le siège de Carthage comme vacant, ils élurent et
ordonnèrent pour évoque le lecteur Majorin. Telle fut l'origine du
long schisme de Carthage, connu sous le nom de schisme des
Donatistes, parce que Donat, l'évêque de Cassis-Nigris, en fut le
plus ardent et le principal fauteur.
Cependant
Constantin venait de vaincre le tyran Maxence et de faire son entrée
triomphale dans la ville éternelle. Les Donatistes lui présentèrent
une requête pour appuyer leur schisme de son autorité. Pour toute
réponse, Constantin chargea le Pape de les juger et de prononcer
contre eux une sentence définitive. Conformément aux intentions de
l'empereur, Melchiade ouvrit, le 2 octobre 313, dans l'antique
palais de Latran, alors habité par l'impératrice Fausta, un concile
composé de dix-neuf évêques d'Italie et des Gaules. Donat se
présenta en personne pour soutenir les accusations calomnieuses que
son parti ne cessait de mettre en avant contre Cécilien, l'évêque
légitime de Carthage. Mais il ne réussit qu'à attirer sur lui-même
la sévérité du concile. Convaincu d'avoir rebaptisé les hérétiques
et d'avoir conféré l'ordination épiscopale à des traditeurs
notoirement connus pour tels, il fut excommunié. On examina ensuite
en détail les actes du conciliabule des évoques de Numidie qui, en
311, avaient condamné Cécilien. On les trouva entachés
d'irrégularités, de violence et d'esprit de parti. Chacun des chefs
d'accusation articulés contre Cécilien fut ensuite discuté et pesé
attentivement. Aucun ne supportait un examen sérieux ce n'était
qu'un tissu d'inventions mensongères et de calomnies. La question
ainsi élucidée, saint Melchiade, de l'avis unanime des évêques du
concile, proclama l'innocence de Cécilien et la légitimité de son
ordination. Mais, par cet esprit de haute prudence qui distingue
toutes les mesures émanées du Saint-Siège, le Pape ne voulut séparer
de sa communion ni les évêques qui avaient condamné Cécilien, ni
ceux qui avaient été envoyés à Rome pour l'accuser. Il offrit même,
ajoute saint Augustin, de recevoir dans sa communion ceux qui
avaient été ordonnés par Majorin, l'évêque donatiste de Carthage en
sorte que dans tous les lieux où ce trouveraient deux évêques, à la
suite du schisme, celui qui aurait
l'ancienneté
d'ordination
serait
maintenu
et
qu'on donnerait
le
premier siège
vacant
à
l'autre. Donat
fut
seul excepté
de
cette mesure
de
miséricorde. On
le
condamna comme
l'auteur
de
tout le
trouble.
Il
repartit pour
l'Afrique,
plus
animé
que
jamais et
prêt
à
fomenter de
nouvelles
discordes.
Le
pape saint
Melchiade
n'en
vit
pas la fin.
Il
mourut trois
mois
après,
le
10 janvier
314.
Sa
modération,
sa
prudence et
sa
charité lui
valurent
les
éloges de
saint
Augustin
qui
s'écrie, en
parlant
du
saint Pontife
a 0
homme
excellent
1 o
vrai
fils
de
la paix
o
vrai père
du
peuple chrétien
s
Il fut
enterré
dans
le
cimetière de
Calliste,
et
transféré plus
tard
dans
l'église
de
Saint-Sylvestre.
Alban Butler :
Vies des pères, des martyrs, et des autres principaux saints… traduction
de Jean François
Godescard. |