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La présence de Jésus apporte la
paix
“Christ est
ressuscité ! Il est vraiment ressuscité !” Ce dialogue
s’entend à tous les coins de rue dans le monde orthodoxe. La
joie de la résurrection est exubérante, on ne peut la garder
pour soi, on la communique aux autres.
En ce temps
pascal, l’Église nous fait méditer à la fois sur les récits
évangéliques liés à la résurrection de Jésus, et sur la vie
des premiers Chrétiens.
Ce livre des
“Actes des Apôtres” nous offre réellement une lecture
passionnante, très vivante, relatée par un témoin de choix,
saint Luc, compagnon de voyage de saint Paul, et déjà auteur
du troisième évangile.
Le petit
extrait que nous lisons en ce jour montre l’empressement des
foules à voir passer Pierre. Le texte dit étonnement qu’on
espérait qu’au moins “son ombre” toucherait les malades pour
les guérir. Pierre, l’humble pécheur de Galilée, devenu le
premier Vicaire du Christ, guérit-il donc maintenant toutes
sortes de malades par le seul contact de son ombre, chose
que ne faisait pas le Christ ? Peut-être s’agit-il de ce que
promit Jésus à la dernière Cène : “Amen, amen, je vous le
dis, celui qui croit en moi fera aussi les œuvres que je
fais, et en fera même de plus grandes” (Jn. 14:12).
Ce détail n’est
pas sans importance, ni unique dans l’histoire des Saints.
On lit par exemple qu’au XVIe siècle, un
franciscain thaumaturge faisait tant de miracles, que son
supérieur l’obligeait à changer de monastère, pour y faire
revenir le calme : c’était saint Salvador de Horta Grionesos.
Un autre au XIe siècle, saint Wolbodon,
qui fut évêque à Liège et ensuite enterré dans un monastère
de la région, opéra tant et tant de miracles après sa mort,
que l’abbé du monastère lui intima l’ordre de cesser ses
miracles, pour que le monastère recouvrît le silence,
troublé par les manifestations d’enthousiasme des malades
guéris et de leurs proches ! Même situation à propos d’un
bon père chartreux italien de Maggiano, le bienheureux
Pietro Petrone (XIVe siècle).
Le procès de canonisation de saint Pascal Baylon (XVIe siècle)
reconnaît qu’on n’avait jamais vu tant de miracles pour un
saint.
S. Vincent Ferrier
sema littéralement les miracles dans toute l’Europe…
Nous parlions
de Pierre dans la première lecture ; voici maintenant Jean,
dans la deuxième : le disciple que Jésus aimait, le plus
jeune des apôtres, parvenu à la fin de ses jours à un âge
très avancé (on parle de cent vingt ans). D’après une sainte
tradition attestée par saint Jérôme et d’autres, Jean,
presque centenaire, subit un martyre à Rome,
dont il ne mourut pas, raison pour laquelle il fut ensuite
exilé à l’île de Patmos, en Mer Égée. Là il reçut cette
Révélation (c’est le sens du mot Apocalypse) dont nous
lisons ici le début.
Jean se dit
“frère et compagnon dans la persécution”, on comprend bien
pourquoi ; mais aussi “dans la royauté et l’endurance avec
Jésus” : sa royauté sacerdotale, qu’il exerce comme évêque
d’Éphèse en Asie Mineure, et son endurance en tant que
témoin de premier ordre de toute la vie publique de Jésus,
ayant été un des premiers appelés, un témoin des grands
moments, en particulier de la Transfiguration, de la
dernière Cène, de l’Agonie et de la Crucifixion de
Jésus-Christ.
Ce Jésus
crucifié, il le voit maintenant dans la gloire, car Jésus
est “le Vivant pour les siècles des siècles”. On imagine
bien l’étonnement où peut se trouver Jean en entendant ainsi
la voix de son Maître, “pareille au son d’une trompette”. Et
Jésus encore une fois le tranquillise : Sois sans crainte,
dit-il, comme il avait dit au Cénacle “La paix soit avec
vous”. Toujours la présence de Jésus apporte la paix, la
sérénité, la confiance. C’est aussi le signe de la Vérité :
quand une situation apporte la confusion ou le doute, ou la
peur, c’est certainement que Jésus n’est pas là.
Il y a un
élément commun dans tous ces textes : il y est question à
chaque fois du jour du Seigneur. Chez les Juifs, le sabbat
était le jour du repos, le jour sacré ; mais Jésus
ressuscita le lendemain du sabbat, le premier jour de la
semaine : c’est désormais ce jour qui est devenu “le” jour
par excellence, le jour où la communauté célèbre la
résurrection dans la joie. C’est le dimanche (dies dominica
: le jour du Seigneur), le jour qui appartient à Dieu avant
tout, le jour durant lequel on suspend toute activité pour
adorer et remercier Dieu. Au premier jour de la création,
Dieu créa la lumière ; au premier jour de la nouvelle
semaine, resplendit la gloire de la résurrection, de la
nouvelle vie, de la nouvelle lumière. Jésus apparaît aux
apôtres le premier jour, à Jean au “jour du Seigneur”, et le
psaume 117 y fait écho, disant que “voici le jour que fit le
Seigneur, qu’il soit pour nous jour de fête et de joie”.
Oui, faisons du dimanche un vrai jour de fête et un vrai
jour de joie, de repos du travail, de prière, pour pouvoir
se réunir en famille, et surtout dans la famille des
Chrétiens, autour de la Table Eucharistique et de la Parole
de Dieu.
C’est sur une
autre révélation, faite à sainte Faustyna Kowalska (“Sœur
Faustine”),
que le pape Jean-Paul II fit de ce dimanche la fête de la
Miséricorde divine. En donnant aux apôtres le pouvoir de
remettre les péchés, Jésus ajouta encore un trésor de grâces
aux mérites de Sa Passion. Par la Croix, il prenait sur lui
les péchés du monde ; et par ce Sacrement de la Miséricorde
(de la Réconciliation), il nous permet de retrouver la paix
chaque fois que nous reconnaissons humblement nos péchés et
que nous en recevons l’absolution d’un prêtre.
De l'évangile
de ce jour, on retiendra particulièrement ce moment où Jésus
confère aux Apôtres le pouvoir de remettre les péchés. C'est
une joie intime très intense qu'éprouve le pénitent en
recevant l'absolution de ses péchés ; c'en est une aussi
pour le prêtre qui lève la main en prononçant les mots
sacrés : “Et moi, au nom du Père, et du Fils, et du Saint
Esprit, je te remets tous tes péchés”.
L'apôtre Thomas
était absent du Cénacle, quand Jésus a conféré ce pouvoir de
remettre les péchés aux autres apôtres. Jésus le lui a
peut-être conféré plus tard, en particulier, ou bien Pierre
le fit au nom du Christ, on ne sait. Mais ce cher apôtre
Thomas nous donne aujourd'hui une grande leçon d'humilité,
lorsque, voyant les plaies du Christ, il s'écrie “Mon
Seigneur et mon Dieu”, reconnaissant l'Humanité et la
Divinité de son Maître, et provoquant cette bienheureuse
promesse du Christ : Heureux ceux qui croient sans avoir vu.
Bienheureux
sommes-nous si nous croyons ce que nous n'avons pas vu, si
nous recevons avec foi l'enseignement que nous transmet
l'Église depuis des siècles, si nous admettons notre erreur
à douter et si nous reconnaissons dans l'Eucharistie “notre
Seigneur et notre Dieu”.
Dans la Prière
du jour — qui, en latin, est un chef-d’œuvre de style — nous
demandons à Dieu de comprendre toujours mieux “quel baptême
nous a purifiés, quel Esprit nous a fait renaître, et quel
sang nous a rachetés”. Vraiment Dieu est “Dives in
misericordia”, riche en miséricorde.
Abbé Charles
Marie de Roussy
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