Ce
saint était fils de Pétrone, préfet du
Prétoire, qui se rendit aussi célèbre par sa piété que par son
éloquence : Il reçut une excellente éducation dans la maison
paternelle, et fut formé de bonne heure à tous les exercices de la
vie ascétique.
Lorsqu'il
fut en âge de voyager, il passa en Orient, et visita les solitaires
qui habitaient les déserts de la Palestine et de l'Egypte, afin de
se perfectionner dans la science des saints par les exemples vivants
qu'il aurait sous les yeux. Il resta un temps, considérable dans les
lieux où il trouva un plus grand nombre de serviteurs de Dieu ; et
parmi ceux dont il voulut être le disciple, on compte surtout S.
Jean de Lycopolis, S. Apollon et S. Ammon. Il fit une relation de ce
qu'il avait vu de plus édifiant dans son voyage, et nous l'avons
encore dans le second livre des Vies des Pères, que Gennade
lui attribue.
Son retour en
Italie concourut avec la mort de S. Félix, évêque de Bologne. Étant
allé à Rome, où il arriva en 43o, le pape Célestin l'élut pour
succéder à ce saint prélat. S. Eucher dit à cette occasion, que S.
Hilaire d'Arles et S. Pétrone de Bologne avaient passé du faîte des
grandeurs humaines au service de l'Eglise.
Pétrone, qui
avait traversé nu-pieds les déserts de l'Orient, qui avait joint aux
fatigues du voyage les austérités de la pénitence, et qui s'était
toujours préservé de la dissipation par un amour constant de la
prière et du recueillement, ne voulut rien diminuer de ses exercices
ordinaires, quand il se vit revêtu de la dignité épiscopale. Il
redoubla même de ferveur, dans la persuasion que sa sanctification
et celle de son troupeau étaient inséparables l'une de l'autre.
La ville de
Bologne avait éprouvé plusieurs fois en fort peu de temps, les
suites des horreurs de la guerre. Elle avait été saccagée par
Radagaise, roi des Huns. Ce prince, païen superstitieux, étant venu
de Pannonie en Italie, avec Alaric, roi des Goths, dans l'année 399,
prit Aquilée, et porta le ravage dans tous les lieux où il passa.
Alaric, qui craignait Stilicon, général de l'empire, retourna dans
la Pannonie ; mais Radagaise, à la tête d'une armée puissante,
marcha de Bologne à Rome. Les Païens de cette ville le regardèrent
comme le vengeur de leurs dieux, que les Chrétiens insultaient, et
ils ne doutèrent point qu'il ne remportât la victoire. Cette
confiance ne dura pas longtemps. Stilicon vint de Pavie avec son
armée; puis, étant tombé sur les ennemis, qui ne l'attendaient
point, il les tailla en pièces sans aucune perte de son côté.
Radagaise s'enfuit inutilement sur les montagnes voisines de Fiésoli ;
il fut pris et mis à mort par ordre de Stilicon. Alaric, encouragé
par la trahison du vainqueur de Radagaise, repassa en Italie ; et
ne trouvant point d'obstacles, il saccagea deux fois Bologne,
pilla les campagnes et se rendit maître de Rome. Il mourut peu de
temps après dans le voisinage de Reggio, lorsqu'il se préparait à
faire la conquête de la Sicile et de l'Afrique.
S. Pétrone, en
arrivant à Bologne, trouva cette ville encore plongée dans la misère
et la désolation. Il s'occupa donc du soin de réparer ses pertes. Il
commença par extirper les semences d'arianisme que les Goths y
avaient jetées. A la vérité, Alaric avait épargné les églises, et
leur avait même accordé des privilèges ; mais celles de Bologne ne
subsistaient plus ; elles avaient été détruites parles Païens, qui
composaient la principale partie de l'armée de Radagaise. La
cathédrale reconnaissait pour son fondateur
S. Zama, élu premier évêque de Bologne par le pape S. Denys, vers
l'an 270, et elle était dédiée sous l'invocation de S.
Pierre.
Elle fut
détruite sous les persécutions de Dioclétien et de Julien l'Apostat.
Le saint évêque Fuscinien la fit reconstruire dans un autre
quartier. S. Pétrone en devint à son tour le fondateur, et la dédia
sous l'invocation des SS. Nabor et Félix. Elle appartient
aujourd'hui aux pauvres Clarisses. Sigonius et Benoît XIV ont donné
l'histoire des églises fondées ou réparées par le saint évêque, et
ils comptent celle de Saint-Etienne, bâtie sur le modèle des églises
de la Croix et du Sépulcre de Jérusalem ; celle de Sainte-Thècle, de
Sainte-Agathe, de Saint-Jean l'Evangéliste, etc.
S. Pétrone enrichit la ville des
reliques de plusieurs martyrs, notamment de celles de S. Florien,
qui furent apportées de Vicenze et déposées dans l'église de
Saint-Etienne. S. Florien, qui est honoré comme le principal patron
de Bologne, paraît avoir souffert le martyr sous Dioclétien.
Le saint évêque
répara aussi les ruines de Bologne, et l’agrandit en faisant
construire autour de nouvelles murailles. Il fit un voyage à
Constantinople pour obtenir des secours relatifs à cet objet, de
l'empereur Théodose le Jeune. De retour en Italie, il finit
saintement sa carrière avant l'an450. Ses reliques ayant été
découvertes bien longtemps plus tard et sa sainteté ayant été
confirmée par plusieurs miracles, la ville de Bologne fit bâtir une
église de son nom en 1211, laquelle appartient présentement aux
Servites. En 1890 on en bâtit une autre qui est beaucoup plus belle
que la première, et est desservie par un chapitre de chanoines
séculiers. S. Pétrone est honoré à Bologne comme un des principaux
patrons de cette ville. On lit son nom dans le Martyrologe romain
sous le 4 d'octobre.
SOURCE :
Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux
Saints… – Traduction : Jean-François Godescard. |