
* * *
Mystères Joyeux — Mystères Lumineux —
Mystères Douloureux
Mystères Glorieux
Mystères du Rosaire

Le silence
Le
silence dit Dieu... Le silence raconte Dieu. Dieu est dans le silence.
Dieu se trouve dans le silence...
Le silence! Notre monde
agité et bruyant ne connait plus le silence, le silence de Dieu, le
silence qui seul construit.
Dieu agit dans le silence.
Dieu crée en silence. Et c’est toujours dans le silence que Dieu nous
parle.
Dieu est Silence... Quand
Dieu vient sur la terre, quand Dieu vient parmi les hommes, Il ne vient
pas dans une grande ville grouillante d’activités, Il ne vient pas à une
époque où les guerres font rage, Il ne vient pas dans notre siècle
envahi par la radio, la télévision, le téléphone, internet, les
communications de toutes sortes, il ne vient pas dans notre monde où le
bruit est roi, où le mensonge semble régner en maître. Non, Dieu vient
là où il y a du silence.
Dieu ne travaille pas dans
le bruit. Dieu aime le silence et la paix. Quand Dieu
visita la terre, Il vint quand la paix s’était établie sur la terre:
certes, c’était la Paix Romaine, mais c’était la Paix voulue par Dieu,
c’était la Paix de Dieu.
Quand
Dieu visita la terre, Il vint parmi les pauvres, ceux qui ne font pas de
bruit... Quand Dieu visita la terre, Il naquit dans un petit pays, dans
un petit village, Bethléem, et Il vint habiter dans la plus simple des
bourgades, Il habita à Nazareth.
Pendant
trente ans Jésus se tut. Pendant trente ans le monde ignora que le Messie
était là, Dieu parmi les hommes, Dieu au milieu de nous, Dieu Emmanuel.
Jésus
naquit dans le silence. Jésus vécut dans le silence. Jésus se taisait
quand on Le tortutait. Et Jésus mourut sur la Croix, en silence. Seul un
grand cri nous informa que Dieu quittait la terre, que Dieu quittait ce
monde...
Le
silence dit Dieu. Tous ceux qui, sur terre, entourèrent Jésus de très
près, tous se taisaient... Marie et Joseph conservaient et méditaient
ces choses dans leur coeur.
Nous
aussi, avec Marie, avec Joseph, en silence, nous allons méditer la vie
de Jésus. En silence nous adorerons le Seigneur. En silence nous
suivrons Jésus à Bethléem, à Nazareth, durant sa vie publique. En
silence nous suivrons Jésus au long de sa Passion. Et nous contemplerons
les merveilles de sa résurrection et de sa vie de Ressuscité.


Mystères joyeux
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Premier mystère joyeux :
L’Annonciation
La petite ville de
Nazareth semble endormie en cette douce après-midi de printemps. Aucun
bruit extérieur ne vient troubler la paisible quiétude de Marie,
quiétude priante et laborieuse. Marie file du lin très blanc. Ce fil
deviendra bientôt un magnifique tissu avec lequel Marie confectionnera
une tunique qu’elle offrira à Joseph, l’époux que Dieu lui a donné.
Marie pense à sa consécration virginale, à son récent mariage. Marie
remercie Dieu qui lui a donné l’époux chaste qui saura la protéger, la
garder. Comme elle sera fidèle à Joseph, son époux qu’elle aime déjà si
tendrement, et en qui elle a toute confiance.
Marie pense à Joseph
qui viendra la saluer, ce soir, comme tous les soirs. Ensemble ils
prieront Dieu de leur envoyer vite le Messie attendu. Ils prieront pour
que soit hâtée la venue du Messie, et chacun dans son coeur aimerait
devenir la servante ou le serviteur de celle qui sera choisie pour être
la Mère bénie du Sauveur.
Marie pense à Joseph.
Marie prie. Marie espère... Marie travaille avec application: il faut
que son travail soit beau, qu’il soit vraiment un don de son amour à
l’époux choisi par Dieu. Marie prie en silence, avec intensité, sans
cesser de travailler.
Quelle est cette
lumière soudaine qui illumine la chambre où se tient Marie? Cette
lumière plus claire que le soleil? Marie lève les yeux. Qui est là,
devant elle? Marie esquisse un mouvement de recul, ou de fuite, mais
l’Être de lumière lui dit: “Ne crains pas Marie, voici que tu as
trouvé grâce devant Dieu. Réjouis-toi, comblée de grâce, le Seigneur est
avec toi.”
Marie s’étonne: que
signifie cette salutation? Silence... et enfin la grande Annonce,
l’Annonce attendue par tout le peuple d’Israël: “Voici que tu vas
enfanter un fils à qui tu donneras le nom de Jésus... Il sera appelé
Fils de Dieu.” Comment cela se fera-t-il pense tout bas Marie? Je
suis vierge et je dois le rester. Je suis mariée et je ne peux tromper
mon mari. Et Joseph est si bon... Comment cela peut-il se faire?”
L’Ange a tout
compris:”L’Esprit-Saint viendra sur toi et te couvrira de son
ombre... Rien n’est impossible à Dieu.” Marie se tait, Marie
accepte: “Qu’il me soit fait selon ta parole.” L‘ange peut se
retirer, en silence... Le monde sera sauvé.
Marie se tait
toujours. Marie prie. Voici que soudain Marie pense aux conséquences de
son ‘Fiat”:
Comment informer
Joseph? Comment réagira-t-il? Mon Dieu, que de souffrances pour lui,
Joseph. Marie, dans son silence ne pense qu’à Joseph; elle n’envisage
pas encore qu’elle pourrait être lapidée, comme adultère. Non elle prie,
et elle se tait. Elle ne dira qu’une seule chose à Joseph quand il
viendra ce soir: “Quelqu’un est venu m’annoncer que notre cousine
Élisabeth, celle qu’on croyait stérile, est enceinte depuis six mois.
Car rien n’est impossible à Dieu.” |
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Deuxième mystère joyeux :
La Visitation
Rien n’est impossible
à Dieu! Élisabeth est enceinte depuis six mois. Joseph, en apprenant la
nouvelle n’a pas une seconde d’hésitation: il faut que Marie aille
l’aider...
Il faut que Marie
aille aider sa cousine Élisabeth, car le Seigneur vient de lui accorder
une grande grâce, mais une grâce bien fatigante, vu son âge. Joseph ne
dit rien, ne pose aucune question: il a une telle confiance en son
épouse!
Joseph aide Marie à
préparer son petit baluchon. Joseph a trouvé quelqu’un parmi ses
connaissances qui va prochainement à Jérusalem et qui pourra
l’accompagner jusqu’à la ville du pays de Juda où habitent Élisabeth et
Zacharie son époux.
“Élisabeth
entendit la salutation de Marie et l’enfant qu’elle portait tressaillit
dans son sein.” Zacharie aussi
entendit la salutation de Marie et se hâta pour venir l’accueillir. Mais
Zacharie ne dit rien: Zacharie était muet. Zacharie était muet depuis le
jour où, dans le Temple, dans le Saint des Saints, il avait reçu, lui
aussi, la visite de l’Ange. Mais la nouvelle était si insensée que
Zacharie ne crut pas en la parole de l’Ange.
Depuis ce jour
Zacharie était muet et un peu sourd aux choses de Dieu. Zacharie
n’entendit pas son épouse bénir sa petite cousine Marie. Il n’entendit
pas Élisabeth dire à Marie:”D’où m’est-t-il donné que la Mère de mon
Sauveur vienne à moi? Heureuse celle qui a cru que s’accomplirait tout
ce qui lui avait été dit de la part du Seigneur!” Zacharie était
muet et sourd aux bénédictions de Dieu car il n’avait pas cru ce qui lui
avait été dit de la part du Seigneur.
Marie, la toujours
silencieuse ne peut se retenir: elle laisse éclater sa joie: “Mon âme
exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur. Il a regardé
l’humilité de sa servante. Toutes les générations me diront
Bienheureuse...”
Puis Marie se tait.
elle entre dans la maison de Zacharie. Pendant plus de trois mois elle
sera attentive aux besoins de la maman et du pauvre papa, lui aussi bien
fatigué. Marie ne dira jamais rien de ces quelques mois passés loin de
chez elle. Quand le petit Jean naîtra, Zacharie comprendra tout et
louera le Seigneur: ”Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël... Et
toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Seigneur, car tu
prépareras ses voies...”
Zacharie sait que le
Sauveur va naître. Zacharie sait que Marie est la choisie entre toutes
les femmes. Mais Marie se tait: déjà elle garde toutes ces choses dans
son coeur.
L’enfant de Marie, le
Fils du Très-Haut qu’elle porte dans son sein se développe
régulièrement. Maintenant il est facile de deviner que Marie est
enceinte. Mais Joseph ne sait toujours rien...
Marie rentre à
Nazareth. Joseph constate la grossesse de Marie. Joseph est malheureux,
très malheureux... Et Marie ne dit toujours rien: elle se contente de
sourire, d’un sourire si lumineux dans sa tristesse douloureuse. Joseph
ne sait quelle décision prendre. Joseph souffre dans son coeur et dans
son âme, mais il ne dit rien. Joseph va partir; il ne peut rester avec
Marie, elle est trop sainte. Joseph pleure... Mais Dieu veille et Joseph
aura, lui aussi, sa visitation. Alors il pourra prendre chez lui son
épouse... |
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Troisième mystère joyeux :
La Nativité de Jésus
Joseph est de nouveau
bien malheureux: se serait-il trompé? A-t-il vraiment vu et entendu
l’Ange du Seigneur qui lui demandait de prendre chez lui son épouse
Marie, car ce qui était en elle venait de Dieu? Lui et son épouse vivent
à Nazareth. Lui, Joseph a son travail à Nazareth. Et son épouse va
accoucher, incessamment. Ce n’est plus qu’une question de quelques
jours... Or, le Messie doit naître à Bethléem...
Le Messie doit naître
à Bethléem, et Joseph n’a aucune raison de se rendre à Bethléem.
D’ailleurs, même s’il devait y aller, il n’emmènerait pas Marie, dans
l’état où elle est, ce serait la pire des imprudences. Alors, l’enfant
attendu est-il vraiment le Messie? Car les prophètes ne peuvent se
tromper. Joseph souffre, Joseph ne sait pas quoi penser. Joseph est dans
l’obscurité intérieure la plus totale. Pourtant Joseph se tait: il sait
que Dieu l’éclairera bientôt.
Joseph espère, Joseph
souffre, Joseph se tait... et attend. Aujourd’hui, il a été beaucoup
moins vite dans son travail car l’inquiétude le ronge. Tiens! Voilà
quelqu’un: c’est son frère.
—Tu es au courant
Joseph? L’empereur vient de signer un édit: il faut que nous nous
fassions tous inscrire dans notre ville d’origine. C’est un recensement
dit-on. Ah! ces Romains, ils ne doutent de rien. Est-ce qu’on a du temps
à perdre ainsi pour ces bêtises? On voit bien que ce sont les maîtres,
ils en profitent... Aller à Bethléem, quand on est déjà débordé de
travail!
Joseph ne dit rien;
il se contente d’approuver son frère, sans dire un seul mot. Joseph ne
dit rien, mais son coeur exulte: voilà enfin la réponse du Seigneur.
L’Enfant naîtra à Bethléem. Mais il faut faire vite, très vite, car
l’heureux évènement n’attendra pas. Il faut partir tout de suite.
Joseph exulte mais
tranquillement il expose la situation à Marie qui se réjouit autant que
lui. À la hâte on prépare les objets indispensables. Et l’on prie,
beaucoup, dans le silence.
Joseph et Marie sont
partis discrètement. L’entourage était ému à cause de la fatigue du
voyage et plaignait Marie: au passage on en profitait pour maudire
l’empereur. Mais Marie et Joseph se taisaient.
Marie et Joseph sont
partis. Marie est assise sur un petit âne. Un autre âne porte les
bagages, bien légers certes, mais assez encombrants car il a fallu
prendre suffisament de layette et des objets pour le bébé. Marie
et Joseph avancent doucement pour éviter les cahots. Marie se tait et
prie. Marie ne se plaint jamais, ne dit rien, mais son coeur exulte
comme celui de Joseph.
Joseph et Marie,
après cinq jours de voyage arrivent enfin à Bethléem. Jésus peut
naître...
Jésus est né! Paix
sur terre aux hommes de bonne volonté! |
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Quatrième mystère joyeux :
Présentation de Jésus au Temple
Jésus est né, à
Bethléem comme l’avait annoncé le prophète Michée. Cela fait déjà
quarante jours, et il est temps maintenant, pour Marie et Joseph,
d’accomplir les rites de la Loi de Moïse, pour être purifiés et
présenter Jésus au Seigneur. Ils portèrent donc l’Enfant au temple de
Jérusalem.
Le jour de la
Présentation d’un enfant au Temple et de la Purification de sa mère
était, pour les juifs de cette époque, une grande fête de famille. On
peut donc imaginer la présence de Zacharie et peut-être d’Élisabeth. Il
n’est même pas interdit de penser que Marie retrouva, à cette occasion,
quelques-unes de ses anciennes compagnes et amies, pensionnaires comme
elle l’était, il n’y a pas si longtemps, à l’”École du Temple”...
Rien d’extraordinaire
donc, dans cette rencontre familiale et amicale. Non, rien, sauf
peut-être la venue inopinée d’un vieil homme, ”juste et pieux, qui
attendait la consolation d’Israël. L’Esprit-Saint qui était sur lui, lui
avait révélé qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Christ du
Seigneur. Il vint au Temple poussé par l’Esprit,... prit l’Enfant dans
ses bras et le bénit en disant: “Maintenant, ô Maître souverain, Tu peux
laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole, car mes yeux
ont vu ton salut que Tu as préparé à la face de tous les peuples,
lumière pour éclairer les nations, et gloire d’Israël ton peuple.”
Tout le monde
s’étonnait de ces paroles, mais Marie et Joseph, quoique stupéfaits,
gardaient le silence. Ils continueront à se taire ensuite, quand le
saint vieillard Syméon se mettra à prophétiser: “Cet enfant est là
pour la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe
de contradiction... “ Puis s’adressant à Marie: “Un glaive de
douleur te transpercera l’âme, afin que soient dévoilées les pensées
cachées de beaucoup de coeurs.”
L’Évangile ne nous
dit rien de plus. Il nous suggère seulement que les parents de Jésus ne
comprirent pas très bien ce qu’on leur disait. Ils se contentèrent “d’achever
ce qui était prescrit par la Loi, et s’en retournèrent en Galilée, dans
leur ville de Nazareth.” (Luc 2, 39)
Il faut méditer
longuement les paroles prophétisées par le vieillard Syméon. Tout le
monde parle pendant la Présentation de Jésus; tout le monde entend les
prédictions terribles de Syméon. Seuls les principaux intéressés, Marie
et Joseph se taisent: ils sont stupéfaits, ils achèvent ce qu’ils
avaient à faire, et ils s’en retournent chez eux. Plus tard on nous dira
que Marie gardait soigneusement toutes ces choses dans son coeur.
L’Évangile ne dit
rien de plus sur la suite des évènements. On peut supposer que la Sainte
Famille s’en retourna d’abord à Nazareth, puis qu’elle revint un peu
plus tard à Bethléem, auprès d’Élisabeth et de Zacharie. Ils y restèrent
et demeurèrent dans une petite maison. Joseph avait trouvé du travail:
la vie était modeste, mais on ne manquait de rien.
On peut supposer
également que c’est durant cette période que se présentèrent les mages.
Toutes ces suppositions sont plausibles, car, même si les conditions de
transport sont rudimentaires, les distances sont petites et par
conséquent les déplacements possibles. Il suffit de remarquer que
l’Évangile reste toujours muet lorsqu’il s’agit de présenter des détails
inutiles pour notre salut, donc pour la Rédemption. |
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Cinquième mystère joyeux :
Recouvrement de Jésus au Temple
La Sainte Famille est
installée à Bethléem, dans un petit logement. Certains mystiques ont dit
que Joseph avait quitté Nazareth pour répondre à une suggestion de
Zacharie: “L’enfant est le Messie; il doit donc être élevé près du
Temple, et bénéficier, pour son éducation, de la présence des docteurs.”
Pourquoi pas? Joseph, toujours docile, était donc revenu à Bethléem. Ce
faisant, il obéissait encore, sans le savoir, aux prophéties qui
disaient: “d’Égypte, j’ai rappelé mon Fils!”
La volonté du Père
conduisit en Égypte Joseph et sa famille, dans les conditions
dramatiques que l’on connaît. Puis “quand ceux qui en voulaient à la
vie de l’enfant” furent disparus, Joseph rentra à Nazareth. Joseph
et Marie se taisaient toujours: ils se contentaient d’obéïr en silence.
Et les années
passèrent. Jésus se fortifiait, en taille et en sagesse. Jésus, enfant
docile, apprenait le métier de son père, comme tous les enfants juifs de
l’époque. Joseph contemplait en silence l’adresse et le doigté de cet
enfant remarquable. Joseph enseignait aussi à Jésus: la Thorah, toute la
Loi et les prophètes, ainsi que toutes les prières rituelles qui
ponctuaient la journée des juifs. Et Jésus eut douze ans.
À douze ans, le jeune
juif devenait majeur après avoir subi les examens prouvant que,
dorénavant, il pouvait aller seul dans la vie, et prendre ses
responsabilités. La Sainte Famille, profitant d’un pèlerinage, retourne
à Jérusalem. Les femmes et les enfants vont d’un côté; les hommes se
regroupent entre eux: c’est la coutume. Les familles ne se reconstituent
que le soir, quand on arrive au camp pour passer la nuit. Cela explique
que Joseph et Marie n’aient pu s’apercevoir de la fugue de Jésus.
Pendant trois jours
Joseph et Marie chercheront Jésus. Trois longs jours! Comme si Jésus,
déjà, voulait préparer Marie à une absence beaucoup plus douloureuse.
Mais il se taira. Il ne dira qu’un seule chose à sa mère éplorée:
“Pourquoi me cherchiez-vous? Ne saviez-vous pas que je dois être chez
mon Père?” Marie et Joseph ne comprirent pas ces paroles. Mais
Marie, en silence, conservait toutes ces choses dans son coeur.
La Sainte Famille
rentre à Nazareth. La vie simple pourra reprendre. La prière de la
Sainte Famille se fera de plus en plus fervente, de plus en plus hymne
de louange au Père des Cieux. La vie douce et silencieuse de Nazareth
pourra continuer dans la paix. La vie laborieuse de Joseph et de Marie
se poursuivra sans à-coup: car Jésus leur était soumis...
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Mystères Lumineux
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Premier mystère lumineux :
Le Baptême de Jésus
Jean le Baptiste est
descendu dans le Jourdain. L’eau monte jusqu’à sa ceinture... Jean se
sent bien dans l’eau. Certes il fait chaud, mais la chaleur n’est pas
accablante, et l’eau est fraîche. Les gens se pressent autour de lui:
est-ce pour l’écouter, ou pour apprécier la fraîcheur de l’eau? Jean ne
se fait pas trop d’illusion: il sait qu’il y a là, autour de lui, des
disciples sincères, des gens qui ont vraiment pris conscience des
erreurs de leur vie, et qui s’en repentent sincèrement... Ceux-là
accueillent avec un cœur purifié le Baptême de pénitence que leur offre
l’étrange prophète qui annonce déjà “celui qui viendra après lui...”
Les gens se pressent
autour du Baptiste qui, maintenant, demande le silence :
— Mes amis, vous avez
reconnu vos péchés, vous savez que votre vie n’a pas toujours été pure,
que vous avez souvent violé la Loi de Dieu. Mais maintenant que vous
êtes purifiés, nous devons rendre grâce au Béni. Nous allons d’abord
chanter l’hymne d’action de grâce, puis nous remercierons notre Créateur
dans le silence de notre cœur.
L’hymne éclate,
joyeux :
“Louez Dieu par
vos cris de joie...”
L’hymne se termine
dans une joie profonde, puis, solennel, le silence s’établit,
impressionnant. La foule impressionnée n’ose plus bouger, quand,
bientôt, un léger remous se fait sentir, et quelqu’un s’approche de
Jean :
— Maintenant baptise
moi.
Jean s’écarte un peu,
comme apeuré :
— C’est moi qui
devrais être baptisé par Toi.
— Laisse faire afin
que toute justice s’accomplisse.
Les personnes
présentes regardent, intéressées: que se passe-t-il pour que Jean ait eu
un bref moment de recul, lui toujours accueillant ? Le silence devient
encore plus profond, mais Jean baptise le nouveau venu, avec une étrange
humilité, semble-t-il.
L’homme prie avec
Jean, et soudain éclate une voix puissante :
— Celui-ci est mon
Fils Bien-Aimé. Il a toute ma confiance. Écoutez-Le.
Une colombe est
venue se poser sur l’épaule de l’homme. Une colombe ? Cet oiseau ne
vient généralement pas dans cet endroit sauvage. Le site es devenu
impressionnant. LE SILENCE S’EST RÉTABLI, UN SILENCE VIVANT, PLEIN DE
DIEU... |
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Deuxième mystère lumineux :
Les noces de Cana
La fête bat son
plein. On mange, on boit bien, on rit et, de temps en temps on
s’interrompt pour porter un toast en l’honneur des mariés et les
féliciter. On félicite aussi le maître et la maîtresse de maison pour la
qualité des plats, et, bien sur, des vins. Grande joie à Cana !
Oui, grande joie.
C’est sûr, les jeunes que l’on vient de marier seront heureux, car
vraiment, tout laisse présager un bonheur sans faille. Ces jeunes sont
si purs, et si pieux, et la mariée si belle... Voici qu’un psaume de
louange s’élève: il convient de louer le Seigneur, même un jour de
noces, et peut-être encore plus un jour de noces... Car tout vient de
Dieu. Et le bonheur est là, presque palpable. Le Seigneur est présent
dans cette joie si simple quoique parfois un peu bruyante...
Tout le monde a prié
joyeusement et recommence à bavarder tranquillement; un serviteur
s’approche de Marie et lui dit quelques mots d’un air inquiet. Marie se
lève... Au bout de quelques instants, elle revient et se penche vers
Jésus :
— Ils n’ont plus de
vin.
— Femme, qu’y
puis-je ?
Marie regarde Jésus
sans rien dire. Jésus regarde Marie profondément, puis se lève et se
dirige vers les cuisines. Ses disciples l’ont suivi: peut-être veut-Il
discrètement quitter la noce... Mais non, Jésus parle aux serviteurs :
— Remplissez d’eau
ces jarres.
Remplir les jarres
avec de l’eau ? Pourquoi faire ? Serait-elles vides ? Mais on ne sert
pas d’eau pendant une noce, et surtout au moment du dessert...
— Puisez de cette eau
et portez-en au maître d’hôtel.
Le maître d’hôtel,
qui n’était au courant de rien, goûte cette eau et s’exclame :
— Pourquoi avoir
gardé ce bon vin pour la fin? Ce n’est pas dans les habitudes !
Alors les disciples
comprennent, les serviteurs aussi... L’étonnement est à son comble.
Jésus vient de manifester sa gloire. Jésus peut s’en aller, on n’a plus
besoin de Lui, dans cette noce, il doit aller ailleurs porter la Bonne
nouvelle... Il fait un petit signe à ses disciples qui maintenant
croient en Lui. Ils peuvent Le suivre...
Et discrètement et
en silence, pour ne pas se faire remarquer, Jésus et ceux qui vont
devenir ses apôtres quittent la salle des noces. Ils s’en vont avec
Celui que déjà ils aiment et admirent, ils s’en vont vers leur nouveau
destin. |
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Troisième mystère lumineux :
L’enseignement de Jésus
“Personne n’allume
une lampe pour la recouvrir d’un récipient ou la mettre sous le
boisseau; on la met au contraire sur un lampadaire pour que ceux qui
entrent voient la lumière. Car il n’y a rien de caché qui ne sera mis au
jour, ni rien de dissimulé qui ne sera connu et ne viendra au grand
jour. Faîtes donc attention à la manière dont vous écoutez.”
(Luc 8, 16-18)
“Faîtes donc
attention à la manière dont vous écoutez !”
Jésus, répète deux
fois cette petite phrase: c’est comme un reproche adressé aux disciples
qui, pourtant placés tout près de Lui, se communiquaient maintes
réflexions: leurs jugements personnels sur son divin enseignement. Jésus
s’arrête un moment, car les bavards continuent leurs bavardages...
Jésus s’arrête, Il se
tait, Il attend... car Il sait que le silence est aussi un enseignement.
Jésus se tait, Il attend que le calme revienne... Le calme
revient, en effet, car le silence qui est reproche est toujours une
parole, une parole bien supérieure aux paroles inconséquentes de ceux
qui ne savent pas et qui n’écoutent pas.
Jésus contemple ses
auditeurs et soupire: ce sont de pauvres êtres, mais Il les aime, car
ils L’aiment et leur présence ici, près de Lui, en est la preuve. Jésus
contemple ses auditeurs qui, un peu confus, Le regardent enfin, et Lui
sourient. Jésus leur sourit aussi, et d’une voix douce, faible tout en
étant audible, Il ajoute :
— Mes amis, apprenez
la valeur du silence, car le silence enseigne, le silence ouvre
l’intelligence. Je vous parle, mais vous n’écoutez pas toujours.
Pourtant mes paroles sont lumière, et ceux qui les écoutent pas sont
comme des insensés qui mettent leurs lampes sous le boisseau. La lampe
peut briller, mais personne ne la voit. Si vous n’écoutez pas les
paroles de vie, c’est comme si vous vous bouchiez les oreilles pour les
fermer à la vie, pour que mes paroles ne touchent pas votre cœur. Si
vous parlez trop fort, vous ne pouvez pas entendre les paroles de
vie, et vous empêchez d’entendre ceux qui en ont besoin.
Les paroles de Jésus
ont vraiment touché les cœurs. Le silence autour de Lui est devenu
impressionnant. Même quelques enfants qui jouaient un peu plus loin se
sont arrêtés dans leurs jeux et s’approchent de Jésus... |
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Quatrième mystère lumineux :
La transfiguration
Jésus grimpe les
pentes du Mont Tabor. Il devance un peu ses trois disciples préférés qui
peinent, s’essoufflent, et transpirent...Il fait chaud en ce début
d’après-midi de printemps, et le sentier, raide, est devenu bien
fatigant... Mais les trois apôtres suivent Jésus, en silence:
curieusement, depuis que Jésus s’est un peu éloigné, ils se taisent...
Pierre, Jacques et
Jean suivent Jésus, en silence... Parfois ils Le regardent comme pour
voir s’Il va enfin s’arrêter, mais non, Jésus marche toujours, sans se
retourner, comme s’Il allait à un rendez-vous...
Pierre, Jacques et
Jean suivent Jésus, en silence... De temps en temps ils contemplent le
paysage superbe qui s’étale nonchalamment devant leurs yeux. Ils
voudraient bien s’arrêter un peu, respirer, mais le Maître avance
toujours, alors les apôtres suivent... Ils suivent toujours Jésus, même
s’ils ne Le comprennent pas toujours. Et aujourd’hui, ils ne savent pas
où Jésus veut aller. Il leur a seulement dit, tout-à-l’heure :
— Venez avec Moi,
j’ai quelque chose à vous montrer.
Pierre, Jacques et
Jean suivent Jésus, en silence... Ils sont presque arrivés au sommet du
Tabor. Jésus, Lui, est déjà perdu dans sa prière. Les apôtres sont sur
le point de manifester leur contentement, quand, soudain, après un
éclair prolongé, une grande lumière les enveloppe ; ils sont près de
Jésus, mais Jésus n’est plus seul: voici Moïse, et Élie. Et Jésus
s’entretient avec eux de sa Passion prochaine et de la délivrance
prochaine de tous ceux qui sont morts depuis longtemps et qui
L’attendent...
Pierre, Jacques et
Jean écoutent avec une attention nouvelle, une attention qu’ils ne
connaissaient pas encore, car Élie et Moïse parlent des prophéties et de
leur prochaine réalisation. Ils évoquent un Serviteur souffrant et
révèlent son identité: les apôtres sont tellement stupéfaits qu’ils se
savent plus quelle attitude avoir. Seul Pierre peut réagir :
— Seigneur, c’est
bien que nous soyons ici. Nous pouvons monter trois tentes: une pour
Toi, une pour...
Pierre ne sait pas ce
qu’il dit, mais il faut toujours qu’il parle... Jésus ne répond rien et
poursuit sa conversation :
— Trois jours après
ma Passion, je ressusciterai, et je viendrai vous délivrer des enfers.
Le Fils de l’Homme doit beaucoup souffrir pour sauver tous les hommes et
leur rendre la vie éternelle que le péché leur a fait perdre.
Moïse et Élie
paraissent soudain encore plus lumineux, et Jésus n’est que lumière. Les
trois disciples sont entrés dans le silence qui maintenant les
enveloppe. Ils attendent, ils adorent quand, soudain, résonnant dans le
silence, une voix grave et puissante :
— Celui-ci est mon
Fils Bien-Aimé...
Les apôtres se sont
prosternés, en adoration. C’est de nouveau le silence sur la montagne,
un silence puissant, habité, le silence de Dieu. |
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Cinquième mystère lumineux :
L’Eucharistie
Jésus vient de laver
les pieds de ses disciples. Le silence est écrasant: les apôtres se
regardent sans dire un seul mot. Ils n’ont pas compris ce que le Maître
venait de faire, mais ils n’osent pas l’interroger. Jésus se rassied,
doucement, et pendant un instant Il contemple chacun de ses disciples...
Puis, lentement Il articule :
— Vous ne comprenez
pas ce que je viens de faire...
Tous les apôtres
hochent la tête: non vraiment, ils n’ont pas compris. Jean essuie
furtivement quelques larmes. Pierre est tellement bouleversé qu’il ne
cherche même pas à retenir ses larmes.
— Vous ne comprenez
pas ce que je viens de faire, reprends Jésus? Vous m’appelez Maître et
Seigneur, et vous faites bien car je le suis vraiment.
Les apôtres relèvent
la tête, comme rassurés.
— Si donc Moi, le
Maître et Seigneur je vous ai lavé les pieds, vous devrez, dorénavant
vous laver, vous aussi, laver les pieds de vos frères...
— Nous devrons laver
les pieds de nos frères ?!!!...
Les apôtres
manifestent un mouvement de recul et rompent soudain le silence. Mais
Jésus reprend :
— Mes amis, Je vais
maintenant conclure avec vous une Alliance Nouvelle. Quand je ne serai
plus là, Je vous enverrai l’Esprit et vous découvrirez la richesse de
mes enseignements. Les apôtres sont muets d’une attention nouvelle.
— L’Esprit vous
enseignera toutes choses et ouvrira vos intelligences aux enseignements
que je vous ai donnés. L’Esprit vous fera comprendre combien Dieu est
Amour. Il vous dira que le Père vers qui Je retourne est tendresse et
pitié, plein d’amour et de miséricorde... Et voici que Je suis avec vous
jusqu’à la consommation des siècles.
Un nouveau silence
emplit la salle du Cénacle, un silence d’amitié, de tendresse, un
silence d’Amour. Jésus se lève, et prend le pain :
— Mes amis, J’ai
désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec vous, cette Pâque
nouvelle.
Jésus rompt le pain :
— Prenez, et
mangez-en tous, ceci est mon Corps...
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Mystères Douloureux
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Premier mystère douloureux :
L’Agonie de Jésus
Il y a tellement de
choses à dire sur le silence de Gethsémani. Sur le silence et sur le
bruit...
Sur le bruit,
d’abord. Tout s’agite autour de Judas. Jérusalem a l’air calme, mais,
dans ce silence extérieur, se trame le forfait le plus noir et le plus
tragique de toute l’histoire de l’humanité. Tout est calme dans
Jérusalem, mais, au Sanhédrin, les langues vont bon train et les
passions s’exaspèrent: car il faut se débarrasser du gêneur, coûte que
coûte... et vite !
Autour de Jésus qui
pénètre dans le Jardin, les apôtres, surtout ceux qui marchent en avant
ou en arrière de Jésus, critiquent leur Maître. Tout semble si
tranquille dans la ville : vraiment, de quoi Jésus peut-Il si fort
s’inquiéter ? Au fond, Judas a peut-être raison, Jésus est trop fatigué,
Il commence à perdre un peu la tête. Il faudrait qu’Il se repose, et
qu’Il mange davantage: depuis plusieurs jours Il ne prend presque plus
rien. Il ne parle que de sa mort prochaine, de son arrestation...
Pourtant personne ne Lui en veut. Qui, d’ailleurs, pourrait Lui en
vouloir ? Tout le monde était avec Lui et pour Lui, il y a juste quatre
jours, quand le peuple L’acclamait.
Jésus entend mais ne
dit rien; à quoi bon! Ils ne peuvent pas encore comprendre.
Jésus reste un moment
avec les trois: Pierre, Jacques et Jean: “Demeurez là, près de Moi, et
surtout priez, priez pour ne pas entrer en tentation. Veillez et prier.
Veillez et priez, surtout ce soir, solennel entre tous.” Les trois
apôtres promettent; ils commencent la récitation de la prière que Jésus
leur a apprise, mais ils ne vont pas jusqu’au bout: déjà, ils
s’assoupissent...
Tout est maintenant
silencieux à Gethsémani. Jésus est seul avec le Père, le Père qui va
bientôt L’abandonner: mais c’est la volonté du Père qu’il en soit ainsi.
Jésus est seul et Satan arrive comme il l’avait déjà fait trois ans plus
tôt, au désert. Çà n’avait pas marché alors... Mais maintenant, c’est
son heure, l’heure de la puissance des ténèbres. Il faut profiter de
l’opportunité !
Jésus est seul, seul
dans la nuit où tout se tait. Oui, tout se tait, comme si la nature,
elle aussi abandonnait son Créateur pour le laisser seul avec l’Ennemi.
L’Agonie de Jésus peut commencer, rien ne viendra troubler la haine
déployée de Satan. Tout est nuit dans le Coeur de Jésus, tout est
souffrance, tout est peine: Jésus porte déjà les souffrances et toute la
peine des siècles passés et à venir, la douleur de tous les hommes
pécheurs qu’Il est venu sauver. Jésus porte aussi le poids de tous les
péchés du monde. Et l’intensité de sa détresse est telle au spectacle de
la multitude de ceux qui Le refuseront définitivement et se damneront,
que Jésus s’écrie : “Non pas çà, Père! Pas çà! Père, éloigne de Moi ce
calice!... Mais pas ma volonté, seulement la tienne, Père.”
Le silence de la
nuit se referme sur Jésus qui maintenant sue son sang... Ses préférés
dorment. D’ailleurs, ils dorment tous. Jésus doit rester seul dans le
désert muet de la nuit de son Agonie. Jésus doit rester seul pour
vaincre Satan et déjouer tous ses pièges mensongers. Le silence de la
nuit, maintenant se peuple de fantômes sans voix, mais Jésus lit leurs
pensées destructrices. C’est le silence total, pesant, angoissant. Mais
c’est dans ce silence que Jésus dit oui au Père: “Père, que ta
volonté se fasse, et non la mienne.” L’humanité sera sauvée. |
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Deuxième mystère douloureux :
La Flagellation
Jésus vient d’être
arrêté. Lui seul sait ce qui se passera durant ces heures atroces, son
Heure. Lui seul sait qu’il va devoir subir des supplices horribles. Lui
seul! Mais Il va avec ceux qui sont venus l’arrêter, suivant les
conseils de Judas, l’ami de tout à l’heure...
Maintenant, Jésus,
bien ligoté, va, de tribunal en tribunal, du Conseil au Prétoire. Et
Pilate, pour Le sauver ?... va Le faire flageller. Jésus se tait. Depuis
son arrestation Il n’a dit qu’une seul mot: Il est le Fils de Dieu.
Jésus est sur le lieu
du supplice. On Le dépouille de ses vêtements ; on L’attache à une
colonne. Les bourreaux frappent fort, en cadence, car les fouets sont
lourds, et il faut se donner du courage. La douleur est épouvantable
mais Jésus ne dit rien. Jésus se tait, et cela exaspère les bourreaux
qui frappent encore plus fort : “Qu’est-ce que c’est que ce condamné qui
ne crie pas sous les coups ? Qui ne hurle pas comme les autres ? Et qui
ne blasphème pas ?”
Mais ce condamné a un
regard étonnant, un regard qui transperce les coeurs, et les bourreaux,
soudain, sont mal à l’aise.
Jésus se tait, mais
son regard interroge ceux qui sont là : “Quel mal vous ai-Je fait pour
que vous Me traitiez ainsi ?”
Jésus se tait mais
son coeur prie: “Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font.”
Les bourreaux
s’amusent moins car le regard muet de Jésus est allé jusqu’à leur coeur,
leur coeur d’hommes perdus, mais un coeur d’homme quand même, un coeur
qui peut s’ouvrir, qui va s’ouvrir, peut-être...
La flagellation
s’achève. Jésus, détaché de la colonne s’écroule, mourant. Jésus se tait
toujours. |
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Troisième mystère douloureux :
Le couronnement d’épines
Jésus vient d’être
flagellé. Jésus a enfin pu remettre ses vêtements qui collent sur ses
plaies. On a assis Jésus sur un tronc d’arbre, pour qu’Il se repose un
peu, car voilà deux fois qu’Il se trouve mal, et Il doit absolument
rester vivant : c’est la règle, on ne crucifie pas un mort.
Jésus est assis, les
bourreaux Le contemplent en haussant les épaules. Les bourreaux qui
viennent de remplacer l’équipe précédente fatiguée ne savent pas quoi
faire avec le condamné, et ils s’ennuient...
Les bourreaux
s’ennuient et ils cherchent un jeu. Soudain, l’un d’eux se souvient :
― Il
prétend qu’Il est Roi! On doit Le couronner.
Aussitôt dit,
aussitôt fait. Les ronces d’un buisson d’épines du jardin voisin feront
l’affaire. La couronne est vite faite et placée sur la tête du condamné.
On appuie par-ci, par-là, pour mieux la faire tenir, et on admire
l’œuvre : çà Lui va très bien. Maintenant son manteau royal : la vieille
loque rouge qui est là conviendra à merveille. Et puis le sceptre de
roseau...
― Salut
Roi des juifs !
Jésus se tait. Jésus
ne lâche pas le sceptre de roseau ; pourtant ses mains meurtries et ses
doigts abîmés ne devraient pas pouvoir le tenir longtemps. Mais Jésus
est Roi : son silence le crie, ses attributs de dérision l’affirment.
Jésus est le Roi du monde, et ce sont des païens qui, malgré eux et sans
savoir ce qu’ils font, aujourd’hui le proclament.
Les païens ont
proclamé la Royauté de Jésus, sa Royauté qui n’est pas de ce monde, sa
Royauté qu’Il confirmera bientôt à Pilate avant que ce dernier ne
présente l’Homme à la foule hurlante des juifs : “Tu l’as dit, Je
suis Roi... Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la
vérité.”
Jésus-Roi! Jésus
couronné d’épines. Jésus, Tu Te tais, mais ton silence est plus éloquent
que tous nos discours-fleuves. Jésus, Tu Te tais devant tes bourreuax,
Tu Te tais devant Pilate qui ne veut pas de la vérité, Tu Te tais parce
que tes divins enseignements ne peuvent être reçus et compris que dans
le silence.
Jésus, Roi couronné
d’épines, maintenant nous comprenons ton Amour, ton humilité, ta
Miséricorde. Maintenant ta divinité éclate et le soldat romain qui tout
à l’heure Te percera le Coeur, le soldat romain aussi, dans le silence
du Calvaire, aura la confirmation éclatante de ta royauté : “Celui-ci
était vraiment le Roi des juifs. Celui-ci est le Fils de Dieu.” |
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Quatrième mystère douloureux :
Jésus est condamné à mort
Jésus-Roi est
présenté à la foule par Pilate de plus en plus inquiet. Mais la foule
refuse l’Homme. La foule ne veut pas de Jésus-Roi, elle ne veut pas de
Jésus-prophète, elle ne veut pas de Jésus-Fils de Dieu, elle ne veut pas
de Jésus-Amour. Car la foule, aujourd’hui est entre les mains de la
haine, entre les mains de Satan et des Puissances des Ténèbres dont
c’est l’Heure.
Pilate reconnait
encore une fois l’innocence de Jésus. Mais la foule veut la mort du Fils
de l’Homme. La foule veut la mort du Sauveur, la mort de son Roi.
― Crucifierais-je
votre Roi? crie Pilate.
― Nous
n’avons d’autre Roi que César !
― Quel
mal a donc fait cet homme ? Je ne trouve en lui rien qui mérite la mort.
― Mort
à cet homme ! Relâche-nous Barrabas.
― Que
ferai-je donc de Jésus qu’on appelle Christ ?
― Qu’il
soit crucifié! À mort! Crucifie-le !...
Pilate se lave les
mains :
― Je
suis innocent du sang de cet homme.
― Que
son sang retombe sur nous et sur nos enfants !
Parole terrible que
celle-là! Jésus, innocent, est condamné à mort par les chefs de son
peuple, par ceux qui auraient dû Le recevoir et Le protéger. Parole
terrible qui poursuivra tout le peuple juif, même le peuple innocent qui
n’était pas présent chez Pilate ce jour-là, parole terrible qui
poursuivra le peuple juif tout au long des siècles. Le sang de Jésus
condamné à mort par les siens est retombé sur leurs enfants. Ici, on
peut tenter et même réussir tous les pardons et toutes les
réconciliations que l’on voudra, on n’effacera jamais la longue liste
des persécutions, des mépris, des pogroms, et encore moins de la Shoah,
subis par le peuple juif, le peuple de Dieu, au long des siècles.
Pourtant Jésus,
innocent condamné à mort, pourtant Jésus a pardonné. Et bientôt, alors
que jusqu’à ce moment Il s’était tu, ne laissant échapper aucune
plainte, bientôt, juste avant de mourir, Jésus dira : “Père,
pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font !”
Ils ne savaient pas
ce qu’ils faisaient... C’est possible, c’est même certain puisque Jésus
le dit. Mais le Père, malgré toute sa bonté et sa Miséricorde, le Père,
ayant créé l’homme libre ne peut pas, ne veut pas empêcher les causes
secondes d’agir, ni les conséquences naturelles ou humaines de se
manifester. Parfois Dieu semble se taire.
Le Roi des juifs est
condamné à mort. Jésus est chargé de sa Croix. Le long chemin du
Calvaire commence. Le Chemin de Croix de Jésus est le Chemin de notre
salut, de notre Rédemption. Nous aussi, tôt ou tard dans notre vie, nous
aurons à suivre le Chemin de Jésus et à porter notre Croix, en silence,
pour suivre Jésus, pour venir après Lui. |
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Cinquième mystère douloureux :
Jésus meurt sur la Croix
Jésus est sur la Croix,
crucifié : Jésus va mourir, Jésus meurt.
Jésus a prononcé toutes les
paroles annoncées par les prophètes. Jésus a dit tout ce qu’Il devait
dire afin que tout fût accompli. Maintenant, Jésus peut remettre son âme
entre les mains du Père...
Jésus va mourir et la terre
gronde comme si elle avait peur. La terre gronde mais maintenant la
foule se tait: elle a peur elle aussi.
La terre tremble et la
foule frémit, et les hommes s’en vont. Ne restent sur le Golgotha que
ceux qui doivent rester. Il y a là la Mère du Crucifié et quelques amis
de Jésus. Ils sont rares les amis de Jésus: Jean et quelques femmes, et
ils pleurent. Nicodème et Joseph d’Arimathie ne sont pas loin non plus,
juste un peu plus loin, car ils n’avaient pas le droit d’être plus près.
Il y a aussi quelques
soldats qui voudraient bien partir, mais ils n’en ont pas le droit: leur
loi leur impose de rester pour faire leur devoir. Alors tremblants, ils
se taisent et s’éloignent un peu. Ils ont peur de rester trop près du
Crucifié car le ciel semble, lui aussi, se mettre de la partie. Plus de
soleil, plus de lumière, mais des éclairs puissants qui, parfois,
déchirent silencieusement l’espace avant que tout redevienne ténèbres.
Tout est devenu ténèbres
épaisses. La terre roule des grondements sourds, d’effrayants
grondements qui semblent venir du plus profond de ses entrailles.
Le ciel aussi rugit et
pleure: la détresse a saisi tous les éléments et l’angoisse est
universelle. Maintenant tout se tait. Le silence est effrayant,
prolongé, surnaturel. On n’entend que quelques sanglots étouffés, et les
plaintes des larrons qui n’ont plus la force de blasphémer. La terre a
peur; la terre se tait, la nature pleure, la nature attend, comme
suspendue d’angoisse, d’une terrifiante angoisse.
Et soudain, comme un éclair
sonore, un grand cri... Le grand cri de Jésus qui meurt... et le
silence: total, épais, palpable, terrible. Jésus est mort. Jésus a remis
son âme entre les mains du Père. La Création est orpheline.
Orpheline ? Peut-être pas.
Car, au grand cri de Jésus un autre cri répond, celui d’un soldat
romain : “Celui-là était vraiment le Fils de Dieu.”
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Mystères glorieux
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Premier mystère glorieux :
La Résurrection de Jésus
Personne n’a vu de ses yeux
la Résurrection de Jésus. Les gardes, peut-être, mais il n’est pas
certain qu’ils aient compris alors ce qui se passait: un éclair, un bref
tremblement de terre...
La pierre qui fermait le
tombeau est maintenant déplacée...
La peur saisit ces hommes
frustes qui ne s’embarrassent pas de problèmes métaphysiques :
décidément rien n’est vraiment normal autour de cet homme qu’on appelait
Jésus! D’autant plus que, s’étant penchés pour voir si, au moins, tout
était correct dans le tombeau, ils constatent qu’il est vide. Pourtant,
ils avaient monté la garde sérieusement...
Voici que des voix de
femmes se font entendre, tout près. Les gardes s’affolent : vite, il
faut fuir pour informer ceux du Temple qui ne sont pas commodes du tout,
et qui pourraient bien leur faire de fâcheuses histoires...
Le Jardin du tombeau est
redevenu silencieux ; les femmes impressionnées se taisent. Elles ont
senti le tremblement de terre tout-à-l’heure, et elles ont vu un grand
éclair... Maintenant il fait clair, mais il règne ici une atmosphère
étrange, comme si, malgré le drame qui s’est joué dans ces lieux il y a
trois jours, la nature était en pleine effervescence, comme si la nature
avait envie de chanter sa joie... mais quelle joie ?...
Les femmes restent toujours
silencieuses, mais contemplent, sidérées, la transformation du verger :
tous les arbres dont la végétation était tellement en retard, sont
maintenant en pleine floraison, et c’est une coulée de blancheur qui
recouvre les lieux. Et les oiseaux gazouillent à qui mieux mieux. Et une
brise fraîche et douce secoue les branches enchanteresses. Un écureuil
s’attarde sur une branche, comme en contemplation...
Les femmes continuent
d’avancer, mais leur frayeur s’est dissipée. Leur immense chagrin s’est
comme transformé en allégresse. Et le soleil rayonnant, éblouissant,
rajeuni, inonde tout de ses rayons pleins d’une lumière de louange...
Un homme vient vers ces
femmes étonnées :”Vous cherchez Jésus le Nazaréen, Jésus le Crucifié?
Il n’est pas ici, Il est ressuscité comme Il l’avait dit. Allez prévenir
ses disciples qu’Il les attend en Galilée.”
Les femmes se retournèrent
avec grande joie, “et voici que Jésus vint à leur rencontre en
disant: Je vous salue ! Elles s’approchèrent, saisirent ses pieds et se
prosternèrent devant LUI.”
Les femmes ont reconnu
Jésus tout de suite, instantanément... Elles n’eurent pas à demander à
l’Homme venu vers elles : “Qui es-Tu ?” Non, les pauvres femmes,
les humbles femmes courageuses, mésestimées, ont reconnu Jésus tout de
suite. Elles l’adorèrent en silence...
Les grandes joies sont
souvent silence, car elles sont trop grandes pour pouvoir être
exprimées. |
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Deuxième mystère glorieux :
L’Ascension du Seigneur
Jésus bavarde avec ses
apôtres. Le repas est achevé et les apôtres ont tout nettoyé et rangé.
Maintenant ils écoutent Jésus qui se fait de plus en plus proche, de
plus en plus amical, de plus en plus tendre. Les apôtres sont baignés
d’amour, de l’Amour de leur Maître. Jean s’est glissé jusqu’aux pieds de
Jésus et il a mis ses mains sur les genoux de Jésus qu’il regarde
intensément, amoureusement. Jean recueille toutes les paroles de Jésus
pour les inscrire en lui d’une manière indélébile. Jean se sent bien :
il resterait bien ainsi jusqu’à l’éternité. Les autres apôtres aussi se
sentent en paix. Ils écoutent Jésus, religieusement, et parfois posent
une question à laquelle Jésus répond avec une inlassable patience.
Tout est calme et serein
dans la salle du Cénacle. Bientôt Jésus se lève... Il se lève et fait
mine de partir, mais par la porte, comme autrefois.
Aujourd’hui Jésus ne
disparaît comme Il en avait pris l’habitude depuis qu’Il est ressuscité.
Jésus se lève et fait signe à ses apôtres de Le suivre. La petite troupe
est heureuse: Jésus va-t-Il revivre avec eux comme avant ? La petite
troupe retrouve ses anciens réflexes et se met à parler, à accabler
Jésus de remarques, de questions trop humaines: “Est-ce maintenant
que Tu vas établir ta Royauté en Israël ?”
Jésus ne répond pas: ils
n’ont pas à connaître les secrets du Père. Jésus avance avec ses
disciples qui bavardent librement, et avec beaucoup d’agitation. Jésus
se retourne, regarde ses amis qu’Il aime tant. Ils n’ont pas encore
compris ; qu’importe, dans quelques jours ils recevront l’Esprit qu’Il
va leur envoyer.
Jésus s’est arrêté. Il
regarde ses disciples qui parlent sans arrêt, comme soudain libérés.
Jésus les regarde et leur sourit. Oh! le sourire de Jésus !
Que se passe-t-il soudain?
Tout le monde se tait. Les apôtres sont comme médusés. Ils regardent
Jésus et ne cessent de lever leur regard toujours plus haut vers le
ciel. Mais Jésus n’est plus là. Jésus qui montait doucement vers le Père
n’était plus visible à leurs yeux de chair.
Et les apôtres restent là,
immobiles, stupéfiés, silencieux, comme hébétés...
“Que faites-vous ici,
hommes de Galilée ? Retournez à Jérusalem. Jésus, qui a été enlevé au
Ciel du milieu de vous, reviendra de la même manière que vous l’avez vu
s’en aller vers le Ciel.”
Retour brutal vers les
réalités terrestres. On ne reste jamais longtemps au ciel quand on vit
encore sur la terre. Il faut toujours retourner à Jérusalem. |
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Troisième mystère glorieux :
La Pentecôte
Il y a déjà dix jours !...
Dix jours que les apôtres enfermés dans la salle du Cénacle “par peur
des juifs,” attendent et prient avec la Mère de Jésus. Dix jours
déjà, et rien ne se passe. Pourtant Jésus avait bien dit qu’Il leur
enverrait son Esprit, bientôt. Mais rien, toujours rien. Alors les
langues vont bon train ; chacun donne son avis, exprime une
incompréhension, une nouvelle incrédulité, une perplexité... Seule Marie
se tait. Marie écoute et se tait.
Parfois Marie sourit, et
son merveilleux sourire d’ange rassure les apôtres agités et inquiets.
Marie écoute et sourit, mais ne dit rien. Elle est comme en extase dans
un extraordinaire monde intérieur, un monde d’amour et de paix qui
rassure et calme les esprits incertains, agités et inquiets.
Marie sourit aux apôtres
mais continue à se taire, et peu à peu sa sérénité et sa confiance
semblent se communiquer aux disciples de Jésus. Comme pour suivre un
mouvement de Marie, les apôtres se lèvent et récitent la prière de
Jésus : “Notre Père qui es aux Cieux, que ton Règne vienne...”
Un grand bruit, une grande
secousse, une intense lumière, un feu qui se partage en langues, un feu
qui envahit les esprits “peu intelligents, lents à croire...” Un
grand feu d’Amour emplit les esprits et les coeurs. Un grand feu qui
pénètre les âmes, qui anime les corps, qui chasse toutes les craintes,
qui illumine les intelligences...
Les apôtres se taisent. Ils
regardent Marie qui leur fait signe d’aller. Les apôtres ouvrent les
portes, les fenêtres, les apôtres sont dans la rue; les voici sur la
place, là où tous les badauds et les hommes d’affaires, les gens d’ici,
les gens d’ailleurs sont réunis. C’est une agitation inhabituelle car la
grande secousse a été ressentie dans tout Jérusalem. Les hommes de
toutes races et de toutes nations, tous ceux qui passent forcément par
Jérusalem pour faire leurs affaires, tous ils arrivent, de tous les
quartiers de Jérusalem, pour savoir ce qui se passe, pour se renseigner,
pour entendre.
Et tous voient quelques
hommes, quelques hommes du peuple, de ces gens méprisés parce qu’ils
n’ont pas fait d’études. Ces quelques hommes parlent, et on les
écoute... Et tous entendent, et comprennent, car ces gens du peuple, ces
pauvres de Yahvé, ces gens ignorants parlent leur langue, à eux, les
étrangers. Comment ces gens sans culture peuvent-ils connaître le grec,
le latin, un latin et un grec très purs, sans faute de syntaxe? Même les
Perses et les Iduméens arrivés là depuis la veille les comprennent et
s’étonnent... Les docteurs d’Israël n’en croient pas leurs oreilles :
“Ces gens sont ivres !” Mais non! ce n’est pas possible: on n’est
pas ivre à neuf heures du matin.
Enfin, les bouches
se ferment, et les esprits s’apaisent pour écouter l’Esprit qui parle
par la voix de Pierre.
Marie est toujours dans son
silence d’adoration. Elle a suivi les apôtres et contemple la scène.
Marie qui a, toute sa vie, vécu dans la foi, reçoit, elle aussi, la
lumière de l’Esprit, l’Esprit qui, il y a trente trois ans, la couvrit
de son ombre.
Maintenant Marie comprend
tout. Et Marie, silencieuse, adore dans son coeur les merveilles de
Dieu. |
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Quatrième mystère glorieux :
L’Assomption de Marie
Marie est seule... Jean a
dû s’absenter quelques heures. Marie s’active dans la maison : il y a
tant de choses à ranger. Les apôtres se sont réunis ici il y a quelques
jours, et ils ont laissé bien du désordre : Ah ! ces hommes ! Pierre a
même oublié un vêtement, un vêtement déchiré. Marie prend ce pauvre
vêtement et le raccommode: ainsi, ce sera mieux.
Marie va chercher quelques
légumes dans un coin de la petite cuisine et les épluche. Puis, comme à
son habitude, elle les accommode au goût de Jean. Elle le soigne ce
petit Jean que son Fils lui a laissé... ce petit plein d’amour qui ne
parle que d’Amour. Maintenant, tout est prêt, la maison est rangée, le
repas préparé : Jean peut revenir.
Tiens ! Marie va dans sa
petite chambre et, de son grand coffre, sort quelques objets qu’elle
touche avec un amour infini : des souvenirs de son Fils. On dirait
qu’elle les adore en silence. Et Marie prend sa jolie robe claire, la
déplie et l’essaie. Il n’y a pas de glace chez Marie, cela ne se faisait
pas dans son temps. Mais si Marie avait pu se voir, elle ne se serait
certainement pas reconnue tant elle est rajeunie : on dirait une toute
jeune fille. Seul son visage porte des signes de fatigue. Soudain Marie
soupire, va dans le petit jardin, et lève les yeux vers le ciel. Puis
Marie s’assoit sur le vieux banc placé là par Jean.
Marie s’assoit et prie. La
prière de Marie est extase. Marie sourit, son visage s’illumine. Jésus
ne doit pas être bien loin dans sa pensée, dans son coeur car Marie a
soudain l’air heureux, tellement heureux... Marie rajeunit encore...
Marie se lève et tend les bras comme pour répondre à un appel muet.
“Oui, Jésus, je viens.
Jésus, mon Jésus, mon Fils, je T’aime, Je T’attendais Jésus, avec tant
d’espérance... Oui, je viens, Jésus !...” Soudain Marie devient
lumière...”
“Mère, où es-tu ?” C’est
Jean qui, de retour à la maison, s’inquiète de ne pas voir la Mère de
Jésus, la Maman qui lui a été confiée. Jean appelle, cherche dans toute
la maison silencieuse, mais Marie n’est plus là. Tout est silence dans
la maison paisible...
Plus personne sur la terre
ne reverra jamais Marie. Elle est montée au Ciel, avec son corps, avec
son âme. Car Marie, la toute pure, la toute sainte, ne pouvait pas
connaître la corruption. Marie est au Ciel avec son corps mortel devenu
glorieux. Marie, est au Ciel, avec son Fils, vivante, intacte : c’est la
foi de l’Église. |
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Cinquième mystère glorieux :
Le Couronnement de Marie
Marie est partie vers le
Ciel, sans bruit...
Marie va retrouver son Fils
et l’étreindre dans un embrassement infini d’amour. Marie peut
s’extasier devant le Père qui la reçoit, royalement. Marie rejoint
l’Esprit d’Amour, l’Époux mystique de l’Annonciation. Le Ciel contemple
les retrouvailles de la Trinité avec la plus pure, la plus belle, la
plus sainte des créatures. Le Ciel se tait... émerveillé et ravi.
Le Ciel se tait...
émerveillé et ravi. Les Anges sont comme en extase. Le Ciel se tait, car
pour l’instant Dieu contemple la plus parfaite de ses créatures: et Dieu
la trouve bonne, la trouve belle, la trouve admirable. Dieu contemple
ses mérites de Créateur-Amour. Dieu-Amour contemple la seule créature
qui ait jamais répondu aussi totalement et parfaitement à son Amour.
Dieu se contemple en Marie
comme dans un miroir. Et dans sa pensée éternelle, Dieu se “souvient”.
Dieu se “souvient” de la faute de Lucifer, de l’erreur d’Ève et d’Adam.
Dieu se “souvient” aussi de sa colère quand Il ordonna à l’Archange de
chasser le pauvre couple humain hors du Paradis.
Dieu se “souvient”
également de sa mansuétude et de sa miséricorde quand, apitoyé par la
détresse de l’Homme, Il promit un Sauveur, un Sauveur qui naîtrait d’une
femme, la Femme qui écraserait de son talon la tête du serpent.
Tout est silence dans le
Ciel qui contemple la contemplation de Dieu. La Femme promise est là, la
Femme aimée de Dieu, la Femme qui a répondu à tout l’Amour de Dieu, à
tous les espoirs que Dieu avait mis en elle. La Femme-Mère, Mère de Dieu
est là, adorant son Seigneur qu’elle vient de rejoindre. Dieu peut
couronner son Œuvre. Car Marie c’est le super Chef-d’oeuvre de Dieu, la
Merveille des merveilles, la Reine immaculée, l’Image parfaite du
Créateur qu’Il va maintenant couronner.
Alors, soudain, rompant le
silence d’attente, le Ciel éclate de joie. Dieu le Père couronne sa
Fille bien-aimée, Dieu l’Esprit-Saint couronne son Épouse fidèle. Et
Dieu le Fils couronne sa Mère. Les choeurs célestes explosent en chant
de gloire, de louanges, et d’amour.
Sur terre, rien ne
se passe. Les apôtres sont seulement un peu plus heureux dans leur
coeur, plus heureux que d’habitude. Et plus confiants aussi. Les apôtres
sont envahis comme d’un grand silence intérieur qui les comble de joie.
Le Ciel éclate en cris d’allégresse, en l’honneur de Marie, et la terre
se tait, de joie... et de reconnaissance.
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