Sturmius de Fulda
Abbé, Saint
† 779

 La vie de ce saint apôtre fut écrite par Eigil, son disciple, qui fut depuis abbé de Fulda, et gouverna ce monastère depuis l'an 818 jusqu'en 822. Ce document mérite toute confiance, si nous considérons le savoir, la piété et les lumières d'Eigil, qui, comme il le dit dans son prologue, passa vingt ans auprès de son maître, et l'assista dans ses derniers moments. Il a en outre soumis plusieurs fois son ouvrage au jugement des moines de Fulda. Eigil rédigea cette biographie à la prière d'une pieuse vierge, nommée Angildruth.

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Saint Boniface voyageant dans la Norique, c'est-à-dire, dans une partie de la Bavière actuelle, et y répandant à pleines mains la semence de l'Évangile, fit la connaissance des parents de notre Saint, qui descendaient d'une maison noble et qui professaient déjà le christianisme avant l'arrivée de l'apôtre de l'Allemagne. Il naquit vers l'an 712. Ses parents le confièrent à saint Boniface, pour qu'il fût élevé dans les sciences et dans la piété, et Sturmius conçut une affection si tendre pour son maître, que, malgré les larmes de ses parents, il le suivit dans ses voyages apostoliques. Ils arrivèrent de la sorte à Fritzlar, où il fut placé sous la conduite du saint abbé Wigbert, qui lui tint lieu de père et de maître et l'instruisit avec le plus grand soin dans la vertu et la théologie. Disciple plein d'ardeur, il fit des progrès rapides dans la science du salut : Dieu lui accorda des lumières extraordinaires pour comprendre les mystères de l'Écriture : nuit et jour son esprit était plongé dans la méditation de la loi divine, et les fruits qu'il en recueillit furent une charité sans bornes, une profonde humilité, une douceur prévenante, et une constante sérénité d'esprit, qui lui gagnait tous les cœurs. Au dehors, son maintien était noble, sa conduite mâle et toutes ses actions portaient l'empreinte de l'innocence et de la candeur. A peine eut-il atteint l'âge prescrit par les canons, qu'il fut élevé de l'avis unanime de toute la communauté, à la prêtrise, et fut chargé d'annoncer la parole de Dieu. Il convertit et baptisa une foule d'infidèles ; mais il ne bornait pas là ses soins : il travaillait encore fort utilement auprès de ceux qui avaient déjà reçu les lumières de la foi, mais qui ne laissaient pas de demeurer encore attachés à certaines pratiques superstitieuses. Il en réconcilia d'autres, qui entretenaient des haines et des inimitiés invétérées, et rétablit entre eux la paix et l'union chrétienne : partout enfin il se montra comme un luminaire bienfaisant au milieu des ténèbres de l'idolâtrie et de la superstition.

Ayant employé près de trois ans dans les exercices de la prédication, il se sentit tellement porté à la solitude, que ne pouvant résister au désir qu'il avait de se retirer, il en demanda la permission à saint Boniface, et l'obtint. Le Saint s'associa deux compagnons, et, après avoir reçu la bénédiction du prélat, ils se rendirent dans la forêt appelée Buchonie, pour y mener la vie des anachorètes. Déjà ils avaient marché pendant trois jours dans les bois, sans trouver un abri, lorsqu'ils arrivèrent à Hersfeld ou Hirschfeld, où se trouvait très-probablement une petite église.

Ils s'y arrêtèrent pendant quelque temps, mortifiant sans cesse la chair par les jeûnes et d'autres austérités.

Après cela saint Sturmius retourna auprès de Boniface, son maître, à qui il fit la description de la situation de ce lieu, de la nature du sol, des eaux qui y répandaient la fertilité, et des vallées. L'archevêque garda son anachorète (c'est ainsi qu'il appelait saint Sturmius) quelque temps auprès de lui, pesa mûrement tout ce qu'il en avait appris touchant le lieu de son habitation , mais trouva qu'il n'était cependant pas propre à la fondation d'une communauté, comme étant trop exposé aux incursions des voisins (les Saxons), et lui conseilla de pénétrer plus avant dans la forêt, jusqu'à ce qu'il trouvât un lieu où il pût s'établir sans danger. Encouragé par les exhortations et l'affection de son père spirituel, il retourna dans la solitude, où ses compagnons l'attendaient avec impatience. Lorsqu'il leur eut fait part du conseil de leur prélat, ils continuèrent leur marche le long de la rivière de Fulda, cherchant sur ses bords quelque lieu qui répondît à leurs désirs. Le troisième jour, ils arrivèrent à une petite rivière qui se jette dans la Fulda ; mais ne trouvant point de retraite commode, ils s'embarquèrent sur la Fulda et la redescendirent jusqu'à leur cellule, où ils servirent le Seigneur dans la prière et les veilles. Cependant Boniface manda de nouveau à noire Saint de venir le rejoindre : ils se revirent à Fritzlar, en se témoignant réciproquement la joie la plus cordiale. Ce fut là que le prélat exhorta pour la première fois le saint anachorète de se relâcher un peu à l'avenir de ses austérités, en lui faisant connaître son désir de former une communauté religieuse dans les forêts de la Buchonie. Ayant pris à cet égard des renseignements ultérieurs, il encouragea son disciple à exécuter ce projet, et le renvoya en le fortifiant de sa bénédiction paternelle. Celui-ci se remit en route, parcourut sur un âne, et au milieu de grands dangers, les forêts, sans avoir sur lui d'autre arme que le signe de la croix. Un jour il rencontra sur la route qui conduisait de la Thuringe à Mayence et qui servait de voie au commerce, une troupe d'escalâtes, qui le raillèrent et voulurent même passer à des voies de fait ; mais la main invisible de la Providence le protégea; il ne fut pas possible de lui faire aucun mal. Il arriva ainsi dans la contrée où se trouve aujourd'hui la ville de Fulda ; ce lieu lui plut, et il se hâta de retourner auprès de saint Boniface, qui voyageait alors entre Fritzlar et Amneburg, pour lui faire part de la découverte d'un endroit propre à la fondation d'un couvent. Après avoir reçu les instructions nécessaires, Sturmius, plein de zèle pour sa pieuse entreprise, retourna a Hersfeld, auprès de ses compagnons, dont le nombre s'était déjà accru, mais qu'à sa grande douleur il ne trouva pas disposés à entrer dans ses vues. Ils se séparèrent même de lui et se retirèrent dans un endroit nommé Crichlar.

Saint Boniface , pour pouvoir fonder dans le pays de Fulda , qui porte, dans la vie de saint Sturmius, le nom d'Eichlohe, la pieuse pépinière qu'il avait projetée, alla trouver le Roi des Francs, Carloman , à qui appartenait le fonds de cette terre , et le sollicita à s'en dessaisir pour la faire servir à une si bonne œuvre. Carloman lui donna aussitôt une étendue de quatre mille pas, et les seigneurs dits de Crabfeld, qui y avaient des possessions, encouragés par l'exemple et les exhortations du Roi, prouvèrent aussi leur bienfaisance en faisant de riches donations.

Lorsqu'il fut convenablement pourvu à tout par des actes authentiques, saint Sturmius se rendit à Chrichlar auprès de ses frères, en choisit sept, et vint avec eux, le 12 Janvier 744, sous le règne des deux frères Pépin et Carloman, à l'endroit où s'éleva par la suite le célèbre couvent de Fulda.

Les saints anachorètes commencèrent leur entreprise avec Dieu, en implorant par des cantiques, la prière, les veilles et le jeûne, sa bénédiction, sans laquelle nul projet ne réussit. Après cela ils mirent courageusement la main à l'œuvre, abattirent les arbres et arrachèrent de tous côtés les broussailles. Deux mois étaient à peine écoulés, lorsque S. Boniface, avec une suite nombreuse, vint visiter ces lieux ; voyant qu'il pouvait espérer les plus grandes choses pour la gloire de Dieu et le salut des âmes, il ne put retenir des larmes de joie, et rendit de ferventes actions de grâces au Seigneur pour le secours qu'il lui avait prêté. Il y passa encore quelque temps, dans une retraite complète, sur une éminence voisine, qui reçut ensuite, en mémoire de cette circonstance, le nom de Bischofsberg (Mont de l’Évêque) ; après cela il continua ses courses apostoliques avec ses compagnons.

Cependant la construction du couvent et de l'église, dirigée par S. Sturmius, avançait rapidement, et avant même qu'elle ne fût terminée, il se présenta des hommes pieux, avides de servir le Seigneur dans cette communauté, en se livrant à la retraite, à la méditation et aux œuvres de pénitence.

Au bout d'un an, on y vit de nouveau l'apôtre de l’Allemagne, qui était de toutes les institutions pieuses qui se formèrent à cette époque. Il expliqua à la communauté naissante les saintes Écritures et les traditions, lui prescrivit une règle sage, et lui ordonna, pour entretenir la discipline et la piété, de pratiquer des jeûnes sévères, et de s'abstenir du vin et de toute boisson forte. Cette dernière disposition fut cependant modifiée plus tard par un décret synodal sous le règne de Pépin, en faveur de ceux qui étaient malades ou d'une constitution faible ; quoiqu'il y eût toujours des moines qui l'observassent toute leur vie, en ne buvant ni vin ni aucune autre boisson enivrante. Saint Boniface, après avoir donné à saint Sturmius les instructions nécessaires pour la direction de sa communauté, s'éloigna de nouveau, continuant néanmoins ô visiter de temps en temps cette sainte pépinière, où il se reposait ordinairement de ses travaux en se fortifiant par la prière et par la méditation des saintes Écritures.

Le nombre des frères était déjà assez considérable, lorsqu'ils témoignèrent le désir d'adopter pour la communauté la règle de saint Benoît. Sturmius fut envoyé dans ce but en Italie, pour y visiter les monastères et s'y pénétrer de l'esprit de ce saint ordre dans toute sa perfection, afin qu'il fût en état de le faire entrer aussi dans les cœurs de ses frères. Son départ eut lieu la quatrième année de son arrivée à Fulda, c'est-à-dire vers l'an 748. Il s'accompagna de deux de ses frères, prit le chemin de Rome, visita les plus célèbres couvents d'Italie, probablement celui du Mont-Cassin, recueillit, comme une abeille diligente, les exemples de vertu des moines les plus saints, et retourna, au bout de deux ans, à Fulda, avec un riche trésor de préceptes et de modèles. Mais avant d'y arriver, il fut atteint, au couvent de Kitzingen, sur le Mein, d'une maladie qui dura quatre semaines. Lorsqu'il fut rétabli, il alla trouver d'abord saint Boniface, qui se tenait alors dans la Thuringe, et qui, après avoir reçu le rapport de son disciple le congédia en lui adressant ces paroles : « Vas-y donc, et tâche d'affermir le nouveau monastère de Fulda sur la base du genre de vie de ces moines, dont tu as recueilli les exemples ! » Après quatre jours de marche il fut rendu aux siens, qui virent avec étonnement en lui l'image fidèle de toutes les vertus dont il avait été le témoin en Italie. Conformément à la décision du saint archevêque il se chargea, sous le titre d’abbé, de la direction du couvent, montrant toujours à ses frères dans sa personne l'exemple de ce qu'il leur prescrivait.

Depuis cette époque, la réputation des moines de Fulda commença à se répandre dans toutes les contrées. Les sévères austérités, la touchante concorde, et la sainte rivalité de ces religieux attirèrent de tous côtés un grand nombre de personnes dans cet asile de la vertu et de la perfection, qui devint la pépinière de beaucoup de prélats distingués par leur science et leur sainteté.

Après la mort de son père spirituel, S. Sturmius se vit exposé aux traits de la calomnie ; mais sa vertu, après être sortie de cette épreuve avec gloire, n'en brilla qu'avec plus d'éclat. Il se trouva dans Fulda trois faux frères, qui portèrent des plaintes contre leur abbé auprès de S. Lui, archevêque de Mayence. Celui-ci se laissa séduire par leur piété hypocrite et ajouta foi à leurs calomnies. Ils accusèrent saint Sturmius de tramer des complots contre Pépin, et parvinrent même à se faire écouter à la cour. Le Saint, que ses actions auraient dû justifier aux yeux de tout le monde, fut obligé de comparaître devant Pépin ; mais au lieu de se justifier, chose qui fut très-facile pour lui, il se borna à montrer du doigt le ciel, en disant : « Là-haut est mon témoin et mon juge. Le Seigneur est mon soutien, c'est pourquoi je n'ai pas été confondu. » Le conseil des méchants prévalut, et Sturmius fut banni dans un monastère de France, qu'on croit être celui de Jumièges, où il fut reçu en frère, et traité par l'abbé et tous les religieux avec le plus grand respect ^ comme il convenait à ses mérites.

L'absence de leur chef spirituel affligea si fort les moines de Fulda, que quelques-uns voulurent quitter le couvent, et d'autres aller faire des représentations au Roi. Les plus sages l'emportèrent : ils eurent recours à Dieu par les prières et le jeûne, pour qu'il voulût manifester l'innocence du Saint. Lui leur donna un autre supérieur, dans la personne d'un des membres de son clergé, nommé Marc ; mais les moines le rejetèrent unanimement. Ils prirent en même temps la résolution de se rendre en corps jusqu'au trône de Pépin et de redemander leur abbé. Le saint archevêque, instruit de ce dessein, chercha à calmer les esprits agités, en leur permettant de choisir un abbé dans leur sein. On accéda à cette proposition, le choix tomba sur Preszold, que saint Sturmius avait élevé et qu'il aimait comme un fils. Ce véritable serviteur de Dieu travailla non-seulement à réunir les esprits, mais à procurer le rétablissement de son maître.

Cependant on faisait des prières continuelles dans les églises et les monastères du pays, pour que le Seigneur leur rendît leur père, et elles eurent bientôt leur effet. Pépin, de son propre mouvement, ordonna au serviteur de Dieu de se rendre à la cour, et de demeurer parmi les clercs ou religieux qui desservaient sa chapelle, jusqu'à ce qu'il lui eût fait connaître ses intentions. Ce prince, allant un jour à la chasse de grand matin, voulut selon sa coutume entrer dans sa chapelle, pour y faire ses prières. Il arriva, à cette occasion qu'il le rencontra dans la chapelle, et il lui adressa ces paroles : « Puisque la Providence nous a amenés ici, je dois vous déclarer que je ne sais pas pourquoi vos moines vous ont accusé, ni pourquoi je me suis fâché contre vous. » Le Saint répondit avec beaucoup d'humilité et de modestie : « Quoique je sois pécheur, je n'ai rien fait contre le service de Votre Majesté. » Pépin repartit : « Si vous avez eu des desseins hostiles contre moi, que Dieu vous le pardonne, moi je veux l'oublier de bon cœur, et vous aurez à l'avenir toujours part à ma bienveillance et à mon amitié. » Lorsque les religieux de la Buchonie eurent appris ce qui venait de se passer, ils supplièrent le Roi de rétablir leur maître dans sa première dignité. Le Roi y consentit et confirma en outre les privilèges que le Pape Zacharie avait accordés au monastère. Ceci arriva en 758.

A la nouvelle de l'approche de saint Sturmius, les religieux allèrent en procession au devant de lui, avec la croix d'or et les reliques de l'abbaye, et ils le reçurent avec de grandes réjouissances. Preszold lui remit la crosse, et le Saint s'appliqua aussitôt à corriger ce qu'il y avait de défectueux dans la vie et les mœurs de ses disciples. Il orna et enrichit l'église, augmenta les bâtiments, changea le cours de la Fulda et la fit entrer dans l'enclos de l’abbaye, afin de faciliter les travaux exécutés par les moines, et mit, en un mot, le plus grand ordre dans toutes les affaires de la maison. Il crut devoir diminuer quelque chose de la rigueur de la première règle, pour le rendre plus conforme à celle de saint Benoît.

Le Roi Pépin, et depuis lui son fils, Charlemagne, considérant les grandes dépenses que le Saint était obligé de soutenir pour une communauté de quatre cents religieux , sans les domestiques, firent encore diverses donations à son monastère , entre autres de terres situées à Hammelbourg. Dans les chartes de donation il est dit qu'ils en usent ainsi pour tâcher de reconnaître le mérite de l'abbé. Il acquit dans la suite encore plus de crédit sur l'esprit de Charlemagne, et il fut même chargé d'une mission importante auprès de Thassilon, duc de Bavière. Mais Charlemagne l'employa encore plus utilement pour l'Église à la conversion des Saxons. S. Sturmius, accompagné de plusieurs prêtres de sa communauté, instruisit et baptisa en 776 et 777 une grande partie de ces peuples encore idolâtres, et les détermina à abattre leurs forêts sacrées, à démolir leurs temples et à construire des églises chrétiennes. Mais ceux qui demeurèrent dans leur infidélité, firent dans la suite tomber dans l'apostasie plusieurs des nouveaux convertis. Ils avancèrent ensemble jusques sur le Rhin, exercèrent partout de grands ravages, et, à leur retour, ayant fait un camp à peu de distance de Fulda, ils formèrent le projet d'attaquer le couvent, de tuer les moines et d'incendier les bâtiments. Le Saint fut averti à temps de ce dessein : il assembla donc ses frères, les informa du danger qui les menaçait et leur ordonna de se refugier, avec le corps de saint Boniface, à Hammelbourg, tandis que lui irait au-devant des barbares et tâcherait de les détourner de leur projet. On prit aussitôt des mesures pour mettre en sûreté le saint corps, et toute la communauté prit la fuite; en route les moines se reposaient dans des tentes élevées à la hâte ; mais le quatrième jour déjà ils reçurent l'heureuse nouvelle de la défaite des ennemis. Le retour des serviteurs de Dieu ressembla à un véritable triomphe. D'après l'auteur de la vie du Saint et les annales de Fulda, ceci arriva en 778.

Charlemagne, qui avait beaucoup de vénération pour notre Saint, le pria, après qu'il eut dompté les Saxons, d'aller de nouveau leur prêcher l'Évangile. Quoique courbé par l'âge et les infirmités, il se rendit néanmoins avec ses compagnons à Heresbourg, pour y attendre le Roi. C'est là qu'il fut atteint d'une maladie, qui l'obligea de revenir à Fulda avec Wintar, médecin du Roi, qui lui prolongea la vie encore de quelques mois. Mais celui-ci lui ayant fait prendre un jour un remède qui produisit un effet contraire à ce qu'on attendait, le Saint pressentit aussitôt que sa fin était prochaine, fit sonner toutes les cloches du couvent, fit assembler tous les religieux autour de lui, leur adressa une grande exhortation, dans laquelle il les pria de lui pardonner s'il ne leur avait pas toujours prêché d'exemple, et pardonna en même temps à tous ceux qui lui avaient fait de la peine, nommément à l'archevêque.

Le lendemain, qui fut le jour de sa mort (17 Décembre 779), l'un des moines qui entouraient son lit, lui adressa encore ces paroles : « Nous ne doutons pas un instant que vous n'alliez entrer dans la vie éternelle. C'est pourquoi nous demandons à votre tendresse paternelle de se souvenir alors de nous, et d'intercéder pour vos disciples, qui mettent beaucoup de confiance dans votre prière. » Alors le Saint, se retournant vers ses frères, leur dit : « Conduisez-vous toujours comme il convient, faites en sorte par vos actions, que je puisse utilement prier pour vous, et vos vœux » seront accomplis. » Là-dessus, il rendit son âme à son Créateur, ayant atteint environ l'âge de soixante-sept ans. Quoique l'on fût persuadé de la sainteté de notre abbé, on célébra pendant plusieurs années à Fulda l'anniversaire de sa mort et non sa fête. Ce qui fait que son nom ne se trouve dans aucun des martyrologes du neuvième siècle, pas même dans celui de Rhaban-Maur, qui ne le composa que soixante ans après sa mort. Ce ne fut que le Pape Innocent II qui le déclara Saint par une canonisation solennelle qu'il fit au concile de Latran, l'an 1139, et il en adressa un bref le 19 Avril à Conrad, abbé de Fulda, et à ses religieux. Sa fête ne fut néanmoins établie que trois cents ans après, lorsque Jean, évêque de Wurtzbourg, fit la publication du bref d'Innocent, le dernier Dimanche du mois de Novembre 1439. Il ordonna que sa fête serait d'office double et chômée d'obligation dans tout son diocèse et dans tous les lieux qui étaient de la dépendance de l'abbaye de Fulda. Les reliques du Saint se conservèrent dans l'église de cette abbaye; lorsqu'on les leva de terre en 1613, on remarqua avec étonnement, à la grandeur des os, que saint Sturmius avait été d'une taille gigantesque.

SOURCE : Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux Saints… – Traduction : Jean-François Godescard. 

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