

SYNODE DES ÉVÊQUES
INTERVENTIONS
XII ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ORDINAIRE
DU SYNODE DES ÉVÊQUES
5-26 OCTOBRE 2008
La Parole de Dieu dans la vie et dans la mission
de l'Église
14 - 10.10.2008
À
cette Neuvième Congrégation Générale sont intervenus les Pères suivants:
-
S.Exc. Mgr Cornelius Fontem ESUA, Archevêque de Bamenda (CAMÉROUN)
- S.Exc. Mgr
Francis DENIAU, Évêque de Nevers (FRANCE)
-
S.Exc. Mgr Antonio MENEGAZZO, M.C.C.J., Évêque titulaire de Mesarfelta, El Obeid
(SOUDAN)
-
S.Exc. Mgr Raymondo DAMASCENO ASSIS, Archevêque d'Aparecida, Président du
Conseil Épiscopal Latinoaméricain (C.E.L.AM.) (BRÉSIL)
-
S.Exc. Mgr Lucio Andrice MUANDULA, Évêque de Xai-Xai (MOZAMBIQUE)
-
S.Exc. Mgr Ramzi GARMOU, Archevêque de Téhéran des Chaldéens, Président de la
Conférence Épiscopale Administrateur Patriarcal d'Ahwaz des Chaldéens (IRAN)
- S.Exc.
Mgr Fidèle AGBATCHI, Archevêque de Parakou (BÉNIN)
-
S.Exc. Mgr Dionisio LACHOVICZ, O.S.B.M., Évêque titulaire de Egnazia, Évêque de
curie de Kyïv-Halyč (UKRAINE)
-
S.Exc. Mgr Berhaneyesus Demerew SOURAPHIEL, C.M., Archevêque Métropolite d'Addis
Abeba, Président de la Conférence Épiscopale, Président du Conseil de l'Église
Éthiopienne (ÉTHIOPIE)
Nous publions, ci-dessous, le résumé de leurs interventions:
-
S.
Exc. Mgr Cornelius Fontem ESUA, Archevêque de Bamenda (CAMÉROUN)
L’Église qui est au Cameroun, comme toutes les jeunes Églises qui sont en
Afrique connaît une forte croissance. Il est urgent pour nous d’approfondir la
foi des néophytes, en particulier les jeunes qui deviennent victimes du
matérialisme, de la sécularisation et du relativisme. Bon nombre d’entre eux
sont retombés dans la pratique de la religion africaine traditionnelle parce que
le christianisme ne semble pas répondre à toutes leurs questions, notamment en
période de crises. De plus, la religion africaine traditionnelle et les
structures familiales traditionnelles sur lesquelles la religion se base sont en
train de s’écrouler. Certains chrétiens trouvent refuge dans des sociétés
secrètes, des sectes et de nouveaux mouvements religieux, en espérant trouver en
eux la sécurité et les réponses aux questions les plus profondes de la vie.
Fort heureusement, la soif et la faim de la Parole de Dieu grandissent. Il est
nécessaire et urgent de remettre les Saintes Écritures dans les mains des
fidèles afin qu’elles prennent vie pour eux dans leur travail, dans leurs
familles et dans leurs différents cadres de vie, et qu’elle soient la source et
l’inspiration de la vie et des activités des petites communautés chrétiennes. Il
est aussi urgent d’inculturer la foi chrétienne et de dialoguer avec la religion
africaine traditionnelle. Pour une inculturation efficace, la Parole de Dieu
devrait être profondément enracinée dans les coeurs des personnes et être comme
une seconde chair pour eux.
Aussi proposons-nous les suggestions suivantes :
1. Les Conférences épiscopales et les diocèses devraient donner priorité au
ministère pastoral biblique et désigner des personnes pour la promouvoir et la
coordonner à différents niveaux, de manière à ce que la Parole de Dieu puisse
être à la base de nos activités pastorales.
2. Il faudrait donner une formation appropriée aux prêtres, aux religieux et aux
laïcs, afin qu’ils soient des agents de l’apostolat biblique, et introduire un
cours sur le ministère pastoral biblique dans les cursus des séminaires et dans
les maisons de formations pour préparer les futurs prêtres et religieux à leur
ministère.
3. Il serait souhaitable de donner une formation biblique à tous les fidèles,
notamment aux jeunes, et cela, non seulement dans les instituts spécialisés mais
aussi à l’aide de conférences bibliques régulières et de congrès sur la Bible de
manière à les rendre plus conscients de l’importance de la Parole de Dieu dans
leurs vies.
4. Puisque la famille chrétienne est l’Église domestique et l’endroit où toute
éducation et toute formation à la foi commence, la Bible devrait avoir une place
spéciale dans toute maison chrétienne pour la lecture, la prière, l’étude et la
vénération. Il serait souhaitable de donner aux femmes une formation biblique
appropriée de manière à ce qu’elles puissent promouvoir l’utilisation de la
Parole de Dieu dans la famille.
5. La Bible devrait être traduite dans les dialectes locaux, ce qui serait un
premier pas vers l’inculturation et ce qui rendrait la Parole de Dieu accessible
aux fidèles dans leur propre langue. Chaque chrétien devrait posséder une Bible,
la lire et s’y référer comme à un “vademecum”.
6. Comme le disait l’Apôtre Paul : “la foi naît de la prédication” (Rm 10, 17).
Les peuples d’Afrique croient fortement dans le pouvoir des mots, en particulier
quand il sont prononcés. Beaucoup d’entre eux n’ont pas accès aux médias écrits
soit parce qu’ils sont trop chers soit parce que la majorité d’entre eux ne sait
ni lire, ni écrire. Il est nécessaire de leur apporter les Écritures sous forme
audio-visuelle.
7. Une plus grande insistance devrait être portée sur la Parole de Dieu dans la
célébration des sacrements, notamment l’Eucharistie, et des sacramentaux.
8. En suivant l’exemple des Pères de l’Église primitive, la formation chrétienne
devrait être centrée sur la Parole de Dieu et les homélies devraient être plus
bibliques dans leur contenu afin de “nourrir” les fidèles avec la Parole de
Dieu.
9. Un institut biblique devrait être établi en Afrique de manière à promouvoir
des recherches bibliques dans le cadre de l’Église en Afrique.10. Enfin, un
Conseil pontifical pour la promotion de l’enseignement de Dei Verbum, notamment
le chapitre 6, devrait être créé.
- S. Exc. Mgr
Francis DENIAU, Évêque de Nevers (FRANCE)
C'est en scrutant son propre mystère que l'Église se réfère au peuple juif (Nostra
aetate 4). Ce n'est pas une réalité extérieure, et le dialogue juifs-chrétiens
n'est pas une espèce du dialogue inter-religieux. Il touche l'intérieur même de
l'Église et du mystère de la foi.
Nous sommes invités par Nostra aetate à un dialogue biblique. Les chrétiens ont
toujours la tentation de parler des Juifs au passé. En parlant du peuple juif
comme de nos frères aînés, Jean-Paul II nous situe comme des frères, appartenant
à la même génération. Nous sommes «héritiers en indivis» (Jean-Marie Lustiger)
d'un même héritage, l'ancien Testament. Nous le lisons différemment. Pour les
Juifs, à travers la Torah orale (mise par écrit dans le Talmud, mais qui se
poursuit dans la multiplicité des interprétations). Pour nous à travers le
nouveau Testament et la Tradition chrétienne (sans oublier que la tradition
orale, chez nous aussi, précède la mise par écrit) en insistant sur l'unité des
deux Testaments, autour de la figure du Christ Jésus.
Lecture du Judaïsme pharisien et lecture chrétienne se sont développées
simultanément. Pour nous chrétiens, la lecture juive, profondément différente de
la nôtre, n'en est pas moins possible et légitime ; et elle peut nous apprendre
beaucoup (CBP 22).
Points d'attention: que notre lecture de l'AT laisse place à la lecture juive ;
que notre lecture du NT ne génère pas d'antisémitisme; parler des Juifs non au
passé mais au présent; revisiter la notion d'accomplissement (CBP 21) ;
souligner la dimension d'attente eschatologique commune aux Juifs et aux
Chrétiens même si elle est différente; être attentifs à la mission universelle
présente dans la tradition juive; même si le «non» des Juifs à Jésus nous
blesse, chercher à percevoir ce que les Juifs y mettent de fidélité à Dieu et à
leur propre vocation; approfondir l'étude de Romains 9 -11 ; promouvoir le
dialogue au-delà des spécialistes, dans les paroisses et les mouvements.
-
S. Exc. Mgr Antonio MENEGAZZO, M.C.C.J., Évêque titulaire de Mesarfelta, El
Obeid (SOUDAN)
Au Soudan, il existe un grand désir et une grande faim de la Parole de Dieu et
la preuve en est le grand nombre de chrétiens qui demandent la Bible.
Nos chrétiens attendent de cette Assemblée une aide afin d’atteindre plus
facilement la Parole de Dieu, c’est-à-dire rendre plus accessible la Bible à
toutes les classes de la population, surtout grâce à sa traduction dans les
langues des différentes tribus.
Des prêtres, des religieux et des religieuses participent à la diffusion et à la
prière de la Bible avec des groupes de fidèles et guident ces groupes à la juste
compréhension de la Parole de Dieu, mais un plus fort engagement et un plus
grand effort leur est demandé.
La Parole de Dieu n’a pas pénétré profondément dans le coeur et dans l’esprit de
nos chrétiens: ils ne sont pas encore parvenus à changer complètement de
mentalité: leur culture n’a pas été purifiée complètement par la Parole de Dieu.
Bien des fois, ils sont incapables de trouver une solution à leurs problèmes et
recourent encore, avec une certaine facilité, à leurs antiques coutumes.
Le degré d’ignorance est plutôt élevé et bien des fois Dieu leur parle dans une
langue incompréhensible. En outre, la Bible a été traduite seulement en quelques
langues des nombreuses tribus existantes. Nous attendons un plus grand effort de
la part de l’Église et des Organisations catholiques pour aider les traductions
et préparer les experts en vue de ces traductions.
La Parole de Dieu est le centre de la vie chrétienne et devrait en tant que tel
être également le centre dans la préparation des catéchumènes au Baptême. Au
Soudan, la majorité des catéchumènes ne sait ni lire ni écrire: il s’ensuit que,
pour bien les préparer au Baptême, les catéchistes doivent être capables
d’expliquer la Parole avec des posters, des dessins et leur propre parole.
Un grand dilemme se pose ici: des catéchistes peu préparés parce que peu
instruits et des catéchumènes qui veulent devenir disciples du Christ: ils
apprennent le catéchisme et les vérités de la sainte foi par coeur, avec une
connaissance minimale des Écritures Saintes. Que faire? Peuvent-ils être
baptisés? Nous ne devons pas oublier que la Grâce de Dieu travaille en ces
chrétiens nouveaux et humbles.
Nous devons faire face à un autre grand défi pour la Justice et la Paix, et le
pardon et la réconciliation après 21 ans de guerre civile entre le Nord et le
Sud du pays, après tant de haine, d’injustices et de souffrances. Même après
l’accord de paix entre le Nord et le Sud, la situation n’est pas pour autant
devenue claire et encourageante. Et n’oublions pas la guerre au Darfour qui se
poursuit sans aucun signe d’amélioration de la situation. Nous sommes convaincus
que la solution pour un avenir de paix, on ne pourra la trouver que dans la
fidélité à Dieu et à sa Parole.
L’Eucharistie et la Parole de Dieu, tel est le binôme qui peut apporter la paix
et la sérénité dans le coeur de tous: mais comment faire quand les distances
sont énormes et l’insécurité du fait des guerres et du banditisme rend le
contact entre prêtres et fidèles très difficile et périlleux? Le manque de
prêtres est un autre facteur négatif. De nombreux chrétiens ne peuvent recevoir
la Parole de Dieu et l’Eucharistie que rarement, peut-être quelques fois par an.
Un surcroît d’esprit missionnaire de tout le clergé serait nécessaire tout comme
plus de générosité de la part des pays riches de clergé afin d’aider ceux qui se
trouvent dans le besoin.
- S.
Exc. Mgr Raymondo DAMASCENO ASSIS, Archevêque d'Aparecida, Président du Conseil
Épiscopal Latinoaméricain (C.E.L.AM.) (BRÉSIL)
Le Concile Vatican II fit une affirmation apparemment évidente, mais qui ne
l’était pas autant en pratique, ouvrant ainsi un vaste horizon. Il affirma que
l’Écriture Sainte, la Parole de Dieu écrite “sous l'inspiration du Saint-Esprit”
(DV 11) est “comme l’âme de la sainte théologie” (DV24), ainsi que “le soutien
et la vigueur de l’Église, et, pour les fils de l’Église, comme la solidité de
la foi, la nourriture de l’âme, la source pure et intarissable de la vie
spirituelle” (DV 21). Cette dernière affirmation a pris corps durant la Ve
Conférence Générale des Évêques d’Amérique latine et des Caraïbes, qui s’est
tenue l’année dernière à Aparecida, quand on a proposé explicitement un
changement de perspectives consistant à passer d’une pastorale biblique à “une
animation biblique de toute la pastorale” (DA 248). De telles indications ont
donc une répercussion directe sur la formation des futurs prêtres. Dans le monde
d’aujourd’hui, la formation presbytérale doit se centrer sur la Parole de Dieu,
ainsi que l’a bien rappelé S.S. Benoît XVI dans son discours inaugural à
Aparecida: “Au début de la nouvelle étape que l’Église missionnaire de
l’Amérique latine se dispose à entreprendre [...] la connaissance approfondie de
la Parole de Dieu constitue une condition indispensable”. En cette occasion, le
Souverain Pontife a également parlé de la nécessité urgente de “fonder notre
engagement missionnaire et toute notre vie sur la roche de la Parole de Dieu”(DA
247).
Dans le contexte actuel de l’Amérique et des Caraïbes, il est nécessaire et
urgent que le projet formatif et que la programmation des séminaires, outre à
privilégier la formation académique aux Saintes Écritures, s’occupe plus de
former les jeunes à une spiritualité biblique solide, en faisant un usage
créatif de tous les moyens à disposition et en donnant une importance
particulière à la Lectio divina. Le défi consiste à faire en sorte que les
futurs prêtres, dès leur formation initiale, apprennent à refléter leur propre
vie dans le miroir de la Parole de Dieu et parviennent à la connaissance de
Dieu, à la source vivante de sa Parole. Dans ce but, il faut qu’ils apprennent à
être toujours et profondément en contact avec la Parole de Dieu, non seulement
pour des motifs formels, c’est-à-dire pour des raisons académiques ou
pastorales, mais afin qu’un tel élément constitutif et structurel forge leur
projet de vie durant la formation initiale et continue à le faire également une
fois qu’ils seront devenus prêtres.
D’autre part, tout en ne renonçant pas au niveau élevé des études bibliques
demandées à un futur pasteur, nous ne pouvons pas oublier que son travail se
déroulera d’abord et avant tout dans la communauté ecclésiale. Ceci rend par
ailleurs nécessaire et urgente une préparation qui soit scrupuleuse afin de
pouvoir réaliser une “animation biblique de la pastorale” adéquate, sans perdre
de vue que le don de la Parole prophétique requiert, de par sa nature, des
ministres qui soient des pédagogues de la foi et qui sachent mettre “au début”
de chaque activité de l’Église la graine vivante et vivifiante de la Parole
Sacrée.
Enfin, il est nécessaire que les futurs prêtres apprennent à se nourrir chaque
jour du Pain de la Parole et à rencontrer le Christ dans les Saintes Écritures.
De cette manière seulement, ils pourront forger une spiritualité solide et
vigoureuse, alimentée par l’Évangile, et ils seront capables de faire en sorte
que la Parole de Dieu soit vraiment “l’âme de l’évangélisation et de l’annonce
de Jésus à tous” (DA 248).
-
S.Exc. Mgr Lucio Andrice MUANDULA, Évêque de Xai-Xai (MOZAMBIQUE)
En reprenant le rappel diligent de Jean-Paul II à l’humanité: “Vous tous les
peuples, ouvrez les portes au Christ! Son Évangile n’enlève rien à la liberté de
l’homme, au respect dû aux cultures, à ce qui est bon en toute religion” (RM 3),
et en considérant que le “premier but du Synode est de se consacrer au thème de
la Parole avec laquelle “Dieu, qui est invisible (cf. Col 1,15 ; 1 Tm 1,17 ),
s’adresse aux hommes comme à des amis (cf. Ez 33,11 ; Jn 15,14-15), et converse
avec eux (cf. Ba 3,38) pour les inviter à entrer en communion avec lui” (DV 2)”
(IL n°4), il nous semble que la plus grande contribution que cette Assemblée
synodale pourrait offrir à l’Église serait de récupérer l’importance de la
Parole de Dieu dans la vie et la mission de l’Église.
Tous les fidèles ne connaissent pas la Parole de Dieu et il est urgent qu’ils
soient initiés et encouragés à la lecture et à la méditation plus fréquente de
la Bible. L’écoute de la Parole de Dieu dans le cadre des célébrations
eucharistiques ne parvient pas à satisfaire, en effet, ce que la Dei Verbum
recommande: “Il faut que l‘accès à la Sainte Écriture soit largement ouvert aux
chrétiens” (DV 22).
Il faut donc que toute l’Église s’engage dans une pastorale biblique d’ensemble
qui permette à chaque famille chrétienne non seulement de disposer de la Parole
de Dieu, traduite dans sa propre langue, mais aussi de pouvoir accéder à sa
signification la plus élémentaire, de manière à ce que le véritable contenu de
la Parole salvifique de Dieu, Jésus Christ, le Verbe incarné, puisse être
transmis aux enfants, de génération en génération.
- S.
Exc. Mgr Ramzi GARMOU, Archevêque de Téhéran des Chaldéens, Président de la
Conférence Épiscopale Administrateur Patriarcal d'Ahwaz des Chaldéens (IRAN)
Toute la Bible, depuis le livre de la Genèse jusqu’à celui de l’Apocalypse, nous
dit que la fidélité à la Parole de Dieu conduit à la persécution. Le premier
persécuté par excellence est Jésus lui-même, qui a connu la persécution dès les
premiers jours de sa naissance et jusqu’à sa mort sur la croix. Selon
l’évangile, la persécution est considérée comme le signe le plus éloquent de la
fidélité à la Parole de Dieu. La croissance de l’Eglise et son propres chemin de
l’évangélisation des peuples est fruit de la persécution qu’elle a subie en tous
les lieux et en tous les temps. Jésus, dans l’évangile, nous parle avec beaucoup
de clarté de la persécution (Lc 21, 12-19). Prions l’Esprit-Saint, afin qu’Il
donne à l’Eglise du troisième millénaire et en cette année de saint Paul, la
grâce et la joie de faire une réelle expérience de la persécution à cause de sa
fidélité à la Parole de Dieu.
- S. Exc.
Mgr Fidèle AGBATCHI, Archevêque de Parakou (BÉNIN)
Il est heureux que le Saint Synode tienne ferme la stricte identification de la
Parole de Dieu avec la Personne de Jésus-Christ, en sorte que ce qui est dit du
devenir de la Parole est affirmé aussi du cycle du Verbe Incarné. Sur cette
base, le cycle du Verbe, dans les différentes phases que connaît sa rencontre
avec la culture humaine, pourrait se résumer ainsi.
- Lorsque le Verbe se fait chair, il entre dans la culture humaine, il
s'inculture. Ce faisant il agit sur décision libre, basé sur l' Amour qui devra
nous valoir le salut de Dieu. L'inculturation ne revient donc pas seulement à
une certaine pratique liée à l' apostolat ou à la liturgie, mais surtout à une
initiative aimante de Dieu pour sauver l 'homme tombé dans le péché. Le tout
premier à accomplir l’Inculturation dans sa forme la plus parfaite est donc
Jésus-Christ, inculturation personnalisée.
- En s’inculturant le Verbe s’acculture, Lui qui est non-culture accepte d'en
épouser une - qui d'ailleurs est teintée de péché - et de subir son influence.
- En s' acculturant, le Verbe acculture. La culture humaine ne reste pas sans
subir l'influence du Verbe qui vient en elle. Le Verbe propose et imprime son
inf1uence divine, ce qui suppose que la culture s' ouvre pour accueillir cette
inf1uence et y gagner quelque chose de la divinité.
Dans tout ce processus, le Verbe dé-culture. Comme le vigneron émonde la vigne,
le Verbe entend arracher de la culture des éléments non conformes à son image.
C'est bien ce que Yahvé réalise lorsqu'il intime à Israël de ne plus dire sur sa
terre: «Nos pères ont mangé les raisins verts, et les dents des fils en sont
agacées ». C'est la même lutte que Jésus-Christ mène en cherchant à éradiquer de
la culture le péché et ses conséquences. Or cette lutte, Jésus la mène jusqu'à
la destruction de ce Temple qu'il se propose de reconstruire au bout de trois
jours. Et comme le Temple de son Corps surgit du tombeau, ainsi la culture
déculturée acquiert la promesse de vie à travers la Résurrection du Christ.
C'est à cette complexe aventure pascale que se trouve engagé le processus de
l'inculturation dont il faut cerner simultanément et adéquatement toutes les
phases, pour ne pas risquer de regrettable dérives au cours de la pratique.
Comme l'Incarnation est l'avenir du monde, ainsi l'Inculturation est l'avenir de
toute forme d'apostolat, qu'il soit biblique, kérygmatique ou sacramentel. Dans
ce sens, je me permets d'avancer des propositions.
— que le kérygme aujourd'hui se revête de la même teinte eschatologique que dans
les débuts de l'Eglise. L'avenir de la foi est au ciel, mais le ciel est déjà
sur la terre avec le salut en Jésus-Christ Que cela soit enseigné et vécu. — Que
la méthode de l'Inculturation s'inscrive en droite ligne avec le mouvement
enclenché par le Verbe dans l'Incarnation, lui que nous avons appelé
l'Inculturation personnifiée.
-
S. Exc. Mgr Dionisio LACHOVICZ, O.S.B.M., Évêque titulaire de Egnazia, Évêque de
curie de Kyïv-Halyč (UKRAINE)
La première observation concerne l’unité entre la Parole et le Baptême, et entre
ceux-ci et l’Eucharistie:
Dans le Document de travail, il est dit que “Deux réalités unissent les
chrétiens : la Parole de Dieu et le Baptême”. Ce qu’il faudrait approfondir,
parce que, tel quel, cela ressemble à une demi-unité; en effet, au numéro 35, il
est écrit qu’il existe également une unité intime entre la Parole et
l’Eucharistie, ce qui s’appuie sur des citations de la Tradition de l’Église :
“Corpus Christi intelligitur etiam Scriptura Dei”, ou sur les paroles de saint
Jérôme : “En effet, la Parole de Dieu que l'on puise à la connaissance des
Écritures est vraie nourriture et vraie boisson”. Le Concile Vatican II affirme
également que la Parole et l’Eucharistie constituent “un seul acte de culte” (SC
56).
En résumé, on affirme l’unité intime entre la Parole et le Baptême ainsi
qu’entre la Parole et l’Eucharistie.
Les termes ainsi posés, il devient difficile de comprendre du point de vue de
l’œcuménisme pourquoi on ne peut pas célébrer le sacrement de l’Eucharistie avec
les orthodoxes (par exemple), alors qu’on peut célébrer avec eux le sacrement de
la Parole de Dieu et avoir en commun le Baptême. Si cette unité existe entre la
Parole, le Baptême et l’Eucharistie, pourquoi nier la communion eucharistique ?
D’autre part, par la même logique d’unité, mais en sens inverse, comme l’a dit
un archevêque orthodoxe (Agostino de Lviv, de la Commission théologique du
patriarcat de Moscou), si la communion eucharistique n’existe pas, on ne pas
plus célébrer la Parole ensemble, ni prier le “Notre Père” avec les catholiques.
En suivant cette logique, du côté des orthodoxes, on n’admettra pas la validité
du baptême des catholiques, comme cela a parfois été affirmé dans les rencontres
œcuméniques. Et il n’est pas même possible de s’appeler “frères” réciproquement.
Une deuxième observation relative à l’“Œcuménisme et à la Parole de Dieu”:
Comment pouvons-nous lire et commenter la Parole de Dieu avec les autres
confessions, par exemple, le passage “afin que tous soient un” (Jn 17, 20),
quand nous ne pouvons pas incarner cette Parole? La Parole devient stérile.
Quand tu n’es pas capable ou que tu ne veux pas incarner cette Parole, pourquoi
alors la lire ? Le Pape Benoît XVI dit justement que le monde attend une
“réponse à l’écoute de la Parole” (Inst. 54).
Nous avons l’impression que tout ce qui est dit sur l’œcuménisme est dit par les
autres, par un “tiers”, qui est absent au moment de le dire. Comme si cette
Parole pouvait faire un miracle, mais nous, nous restons nous-mêmes.
Un exemple: nous avons fait en Ukraine une traduction œcuménique de la Bible
avec la collaboration des orthodoxes et des protestants, mais nous ne pouvons ni
prier ni célébrer ensemble.
Troisième observation:
Il me semble que l’on coure également le risque d’instrumentaliser la Parole de
Dieu. Elle peut devenir un “instrument” de discussion, d’étude, de dialogue, de
rencontre, voire de prière en commun, mais elle reste superficielle, elle n’a
pas la force de changer, elle ne mène pas au mystère commun de la célébration de
la Parole, elle ne devient pas chair, autrement dit ne s’incarne pas dans la vie
de la personne et de son Église. On peut connaître par cœur toute la Bible, en
parler en toute compétence, mais rester en dehors d’elle, ne pas s’en nourrir,
ne pas être incorporé dans le Christ, ne pas être baptisé dans le Christ.
Peut-être que cette séparation entre la Parole et la vie est ce qui empêche
vraiment l’unité des chrétiens. Les Églises prononcent les paroles, mais ne
donnent pas à la Parole de Dieu le témoignage de ces paroles. La Parole est
peut-être trop “canonisée”, stérilisée, ce qui empêche la diaconie et la
koinonia, et même la martyria.
Par conséquent, il faut être responsable devant la Parole de Dieu. Sans doute,
on parle plus de la responsabilité d’apporter la Parole aux autres, de la
prédication de la Parole, mais on parle peut-être moins de la responsabilité de
la personne qui la prêche, de son Église et des Églises face à la Parole de
Dieu. Comment peut-on alors comprendre ce qui est dit de la Parole de Dieu qui
se lit dans l’Église, avec l’Église, et pour l’Église ? Peut-être faut-il
considérer plus sérieusement l’avertissement de saint Paul : “Que le disciple
fasse part de toute sorte de biens à celui qui lui enseigne la parole. Ne vous y
trompez pas ; on ne se moque pas de Dieu” (Ga 6, 6s).
- S.
Exc. Mgr Berhaneyesus Demerew SOURAPHIEL, C.M., Archevêque Métropolite d'Addis
Abeba, Président de la Conférence Épiscopale, Président du Conseil de l'Église
Éthiopienne (ÉTHIOPIE)
1) La Parole de Dieu a été la source de la littérature éthiopienne. La Bible a
été traduite en éthiopien entre le IVe et le VIe siècle.
2) Certains livres sont conservés dans leur totalité seulement en éthiopien
classique et certaines parties du canon biblique éthiopien sont précieuses pour
les études bibliques.
Le Livre de Hénoch et le Livre des Jubilés représentent des œuvres importantes
pour comprendre le contexte du judaïsme du second temple, du Qumrân et des
origines du christianisme. L’étude de la littérature apocalyptique est également
importante.
3) La Société Biblique éthiopienne a actuellement beaucoup à faire pour la
traduction de la Bible dans les langues locales et régionales (y compris avec
des cassettes, des CD, un appareil appelé “Proclaimer” qui fonctionne même à
l’énergie solaire).
Les membres de la Commission de la Société Biblique sont au nombre de 24, huit
appartiennent à l’Église orthodoxe éthiopienne Tewahedo, huit à l’Église
catholique et huit à l’Église évangélique. Ceci est un bon exemple de
coopération oecuménique. Actuellement, la commission est présidée par un
catholique.
4) Un projet d’édition catholique de la Bible en araméen, la langue officielle
de l’Éthiopie (proche de la New Revised Standard Version et de la Bible de
Jérusalem), est actuellement en cours, mais il nécessite de financement urgents.
5) Cours biblique à distance: organisé par l’Archidiocèse d’Addis Abeba. Près de
3.500 fidèles d’Addis Abeba et des environs participent à ce cours.
L’Archidiocèse propose également un cours biblique annuel qui se déroule tous
les samedis dans la Cathédrale de la Nativité de Notre-Dame, à Addis Abeba.



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