INTRODUCTION
 

L'objet propre de la Théologie ascétique et mystique, c'est la perfection de la vie chrétienne.

1. Il a plu à la bonté divine de nous communiquer, outre la vie naturelle de l'âme, une vie surnaturelle, la vie de la grâce, qui est une participation à la vie même de Dieu, ainsi que nous l'avons montré dans notre Tr. de Gratia. Comme cette vie nous est donnée en vertu des mérites infinis de N. S. Jésus Christ, et qu'il en est la cause exemplaire la plus parfaite, on l'appelle avec raison vie chrétienne. Toute vie a besoin de se perfectionner, et elle se perfectionne en se rapprochant de sa fin. La perfection absolue c'est l'obtention de cette fin ; ce n'est qu'au ciel que nous l'atteindrons : là nous posséderons Dieu par la vision béatifique et l'amour pur, et notre vie aura son plein épanouissement ; alors en effet nous serons semblables à Dieu, parce que nous le verrons tel qu'il est, similes ei erimus quoniam videbimus eum sicuti est (Joan., III, 2). Sur terre nous ne pouvons acquérir qu’une perfection relative, en nous rapprochant sans cesse de cette union intime avec Dieu qui nous prépare à la vision béatifique. C’est de cette perfection relative que nous allons traiter : après avoir exposé les principes généraux sur la nature de la vie chrétienne, sa perfection, l’obligation de tendre à cette perfection et les moyens généraux par lesquels on y parvient, nous décrirons successivement les trois voies, purgative, illuminative et unitive par lesquelles passent les âmes généreuses, avides de progrès spirituel.
Mais auparavant, il nous faut, dans une courte Introduction, résoudre quelques questions préliminaires.

2. Dans cette Introduction nous traiterons cinq questions :

I. Nature de la Théologie ascétique ;
II. Ses sources ;
III. Sa méthode ;
IV. Son excellence et sa nécessité ;
V. Sa division.
 

§ I. Nature de la Théologie ascétique

Pour mieux expliquer ce qu'est la Théologie ascétique, nous exposerons successivement : 1° les noms princlpaux qui lui ont été donnés ; 2° sa place dans les sciences théologiques ; 3° ses rapports avec le Dogme et la Morale ; 4° la distinction entre l'Ascétique et la Mystique.

I. Ses différents noms

3. La théologie ascétique porte différents noms.

a) On l'appelle la science des saints, et avec raison ; car elle nous vient des saints qui l'ont vécue encore plus qu'ils ne l'ont enseignée, et elle est destinée à faire des saints, en nous expliquant ce qu'est la sainteté et quels sont les moyens d'y parvenir.
b) D'autres la nomment science spirituelle, parce qu'elle forme des spirituels, c'est-à-dire des hommes intérieurs, animés de l'esprit de Dieu.
c) Mais, comme elle est une science pratique, on l'appelle aussi l'art de la perfection, puisque son but est de conduire les âmes à la perfection chrétienne ; ou encore l'art des arts, puisqu'il n'est pas d'art plus excellent que celui de perfectionner une âme dans la plus noble des vies, la vie surnaturelle.
d) Cependant le nom qui aujourd'hui lui est le plus fréquemment donné est celui de théologie ascétique et mystique. 1) Le mot ascétique vient du grec ‘exercice’, ‘effort’ et désigne tout exercice laborieux qui se rapporte à l'éducation physique ou morale de l'homme. Or la perfection chrétienne suppose des efforts que S. Paul compare volontiers à ces exercices d'entraînement auxquels se soumettaient les lutteurs pour gagner la victoire. Il était donc naturel de désigner sous le nom d'ascèse les efforts de l'âme chrétienne luttant pour acquérir la perfection. C'est ce que firent Clément d'Alexandrie et Origène, et à leur suite un grand nombre de Pères. Il n'est donc pas étonnant qu'on ait donné le nom d'ascétique à la science qui traite des efforts nécessaires pour acquérir la perfection chrétienne. 2) Toutefois, pendant de longs siècles, le mot qui prévalut pour désigner cette science fut celui de Théologie mystique (‘mystérieux’, ‘secret’ et surtout ‘secret religieux’) parce qu'elle exposait les secrets de la perfection. Puis le moment vint où ces deux mots furent employés dans le même sens ; mais l'usage a prévalu de réserver le nom d'ascétique à cette partie de la science spirituelle qui traite des premiers degrés de la perfection jusqu'au seuil de la contemplation, et le nom de mystique à celle qui s'occupe de la contemplation et de la voie unitive.
e) Quoiqu'il en soit, il résulte de toutes ces notions que la science dont nous nous occupons est bien la science de la perfection chrétienne : c'est ce qui va nous permettre de lui assigner sa place dans le plan général de la Théologie.

II. Sa place en théologie

4. Nul n'a mieux fait comprendre que Saint Thomas l'unité organique qui règne dans la science théologique. Il divise sa Somme en trois parties : dans la première, il traite de Dieu premier principe qu'il étudie en lui-même, dans l'unité de sa nature et la trinité de ses personnes ; et dans les œuvres qu'il a créées, qu'il conserve et qu'il gouverne par sa providence. Dans la seconde, il s'occupe de Dieu fin dernière, vers lequel doivent tendre les hommes en orientant leurs actions vers lui, sous la direction de la loi et l'impulsion de la grâce, en pratiquant les vertus théologales et morales et les devoirs particuliers à chaque état. La troisième nous montre le Verbe Incarné se faisant notre voie pour aller à Dieu et instituant les sacrements pour nous communiquer la grâce, afin de nous conduire à la vie éternelle. Dans ce plan, la théologie ascétique et mystique se rattache à la seconde partie de la Somme, tout en s'appuyant sur les deux autres.
5. Depuis lors, tout en respectant l'unité organique de la Théologie, on l'a divisée en trois parties : la Dogmatique, la Morale et 1'Ascétique.
a) Le Dogme nous enseigne ce qu'il faut croire sur Dieu, la vie divine, la communication qu'il en a voulu faire aux créatures raisonnables et surtout à l'homme, la perte de cette vie par le péché originel, sa restauration par le Verbe incarné, son action dans l'âme régénérée, sa diffusion par les sacrements, sa consommation dans la gloire.
b) La Morale nous montre comment nous devons répondre à cet amour de Dieu en cultivant la vie divine dont il a bien voulu nous donner une participation, comment nous devons éviter le péché et pratiquer les vertus et les devoirs d'état qui sont de précepte.
c) Mais quand on veut perfectionner cette vie, aller au delà de ce qui est un strict commandement et progresser dans la pratique des vertus d'une façon méthodique, c'est l'Ascétique qui intervient en nous traçant des règles de perfection.

III. Ses rapports avec le Dogme et la Morale

6. L'Ascétique est donc une partie de la morale chrétienne, mais la partie la plus noble, celle qui tend à faire de nous des chrétiens parfaits. Tout en étant devenue une branche spéciale de la Théologie, elle conserve avec le Dogme et la Morale des rapports intimes.
1° Elle a son fondement dans le Dogme. Quand elle veut exposer la nature de la vie chrétienne, c'est au Dogme qu'elle demande des lumières. Cette vie est en effet une participation à la vie même de Dieu : il faut donc remonter jusqu'à la Sainte Trinité pour y trouver le principe et l'origine de cette vie, suivre ses péripéties, voir comment, conférée à nos premiers parents, elle fut perdue par leur faute et restaurée par le Christ rédempteur ; quel est son organisme et son fonctionnement dans notre âme, par quels canaux mystérieux elle y est apportée et augmentée, comment elle se transforme en vision béatifique dans le ciel. Or toutes ces questions sont traitées dans la Théologie dogmatique ; et qu'on ne dise pas qu'on peut les présupposer ; si on ne les rappelle dans une courte et vivante synthèse, l'Ascétique apparaitra sans base, et on demandera aux âmes des sacrifices très durs sans pouvoir les justifier par un exposé de ce que Dieu a fait pour nous. Il est donc bien vrai que le dogme est, selon la belle expression du Cardinal Manning, la source de la dévotion.
7. 2° Elle s'appuie aussi sur la Morale et la complète. Celle-ci explique les préceptes que nous devons pratiquer pour acquérir et conserver la vie divine. Or l'Ascétique, qui nous fournit les moyens de la perfectionner, suppose évidemment la connaissance et la pratique des commandements ; ce serait une dangereuse illusion de négliger les préceptes sous prétexte de cultiver les conseils et de prétendre pratiquer les plus hautes vertus avant de savoir résister aux tentations et éviter le péché.
8. 3° Cependant l'Ascétique est bien une branche distincte de la Théologie dogmatique et morale. Elle a en effet son objet propre : elle choisit dans l'enseignement de Notre Seigneur, de l'Eglise et des Saints tout ce qui se rapporte à la perfection de la vie chrétienne, sa nature, son obligation, ses moyens, et coordonne tous ces éléments de manière à en former une véritable science. 1) Elle se distingue du Dogme, qui ne nous propose directement que des vérités à croire parce que, tout en s'appuyant sur ces vérités, elle les oriente vers la pratique, les utilisant pour nous faire comprendre, goûter et réaliser la perfection chrétienne. 2) Elle se distingue de la Morale, parce que, tout en rappelant les commandements de Dieu et de l'Eglise, base de toute vie spirituelle, elle nous propose les conseils évangéliques, et, pour chaque vertu, un degré plus élevé que celui qui est strictement obligatoire. C'est donc bien la science de la perfection chrétienne.
9. De là son double caractère de sciençe à la fois spéculative et pratique. Assurément elle contient une doctrine spéculative, puisqu'elle remonte jusqu'au Dogme pour expliquer la nature de la vie chrétienne ; mais elle est surtout pratique, parce qu'elle recherche les moyens à prendre pour cultiver cette vie. C'est même, entre les mains d'un sage directeur, un art véritable, qui consiste à appliquer avec tact et dévouement les principes généraux à chaque âme en particulier, l'art le plus excellent et le plus difficile de tous, ars artium regimen animarum. Les principes et règles que nous donnerons tendront à former de bons directeurs.

IV. Différence entre l’Ascétique et la Mystique
 
Ce que nous avons dit s'applique à la fois à l'une et à l'autre.
10. A) Pour les distinguer, on peut définir la théologie ascétique cette partie de la science spirituelle qui a pour objet propre la théorie et la pratique de la perfection chrétienne depuis ses débuts jusqu'au seuil de la contemplation infuse. Nous faisons commencer la perfection avec le désir sincère de progresser dans la vie spirituelle, et l'ascétique conduit l'âme, à travers les voies purgative et illuminative, jusqu'à la contemplation acquise.
11. B) La Mystique est cette partie de la science spirituelle qui a pour objet propre la théorie et la pratique de la vie contemplative, depuis la première nuit des sens et la quiétude jusqu'au mariage spirituel.
a) Nous évitons donc, dans notre définition, de faire de l'Ascétique l'étude des voies ordinaires de la perfection, et de la Mystique l'étude des voies extraordinaires... aujourd'hui en effet on réserve plutôt ce mot d'extraordinaire à une catégorie spéciale de phénomènes mystiques, ceux qui sont des grâces gratuitement données venant s'ajouter à la contemplation, comme les extases et les révélations.
b) La contemplation est une vue simp/e et affectueuse de Dieu ou des choses divines : elle s'appelle acquise quand elle est le fruit de notre activité aidée de la grâce, infuse quand, dépassant cette activité, elle est opérée par Dieu avec notre consentelnent (n° 1299).
c) C'est à dessein que nous réunissons dans un seul et même traité la théologie ascétique et mystique. 1) Assurément il y a des différences profondes entre l'une et l'autre, que nous aurons soin de signaler plus tard ; mais il y a aussi entre les deux états, ascétique et mystique, une certaine continuité qui fait que l'un est une sorte de préparation à l'autre, et que Dieu utilise, quand il le juge à propos, les dispositions de l’ascète pour l’élever aux états mystiques. 2) En tout cas, l’étude de la mystique projette beaucoup de lumiere sur l'ascé- tique et réciproquement; car les voies de Dieu sont harmonieuses, et l'action si puissante qu'il exerce sur les âmes mystiques fait mieux saisir, par le relief avec lequel elle apparaît, son action moins forte sur les débutants ; ainsi les épreuves passives décrites par S. Jean de la Croix font mieux comprendre les sécheresses ordinaires qu'on éprouve dans les états inférieurs, et de même on comprend mieux les voies mystiques quand on voit à quelle docilité, à quelle souplesse arrive une âme qui, pendant de longues années, s'est livrée aux rudes travaux de l'ascèse. Ces deux parties d'une même science s'éclairent donc naturellement et gagnent à n'être pas séparées.

§ II. Les sources de la Théologie ascétique et mystique

12. Puisque la science spirituelle est une des branches de la Théologie, il est évident que ses sources sont les mêmes que pour celle-ci : avant tout, les sources qui contiennent ou interprètent le donné révélé, l'Ecriture et la Tradition ; puis les sources secondaires, toutes ces connaissances qui nous viennent de la raison éclairée par la foi et par l'expérience. Nous n'avons donc ici qu'à signaler l'usage qu'on en peut faire en Théologie ascétique.

I. De la sainte Ecriture

Nous n'y trouvons pas sans doute une synthèse de la doctrine spirituelle, mais de très riches documents dispersés çà et là, dans l'Ancien comme dans le Nouveau Testament, sous forme de doctrines, de préceptes et de conseils, de prières, et d'exemples.
13. 1° Des doctrines spéculatives sur Dieu, sa nature, ses attributs, son immensité qui pénètre tout, son infinie sagesse, sa bonté, sa justice, sa miséricorde, son action providentielle qui s'exerce sur toutes les créatures mais surtout sur les hommes pour les sauver ; sa vie intime, la génération mystérieuse de l'Eternelle Sagesse ou du Verbe, la procession du Saint Esprit, lien mutuel du Père et du Fils ; ses œuvres : en particulier ce qu'il a fait pour l'homme, pour lui communiquer une participation à sa vie divine, le restaurer après sa chute, par l'Incarnation du Verbe et la Rédemption, le sanctifier par les sacrements, et lui préparer dans le ciel les joies éternelles de la vision béatifique et de l'amour pur. Il est évident que cet enseignement si noble, si élevé est un puissant stimulant pour accroître notre amour de Dieu et notre désir de la perfection.
14. 2° Un enseignement moral composé de préceptes et de conseils : le Décalogue, qui se résume tout entier dans l'amour de Dieu et du prochain et par conséquent dans le culte divin et le respect des droits d'autrui ; l'enseignement si élevé des Prophètes, qui rappelant sans cesse la bonté, la justice et l'amour de Dieu pour son peuple, le détourne du péché et surtout des pratiques idolâtriques, lui inculque le respect et l'amour de Dieu, la justice, l'équité, la bonté à l'égard de tous, mais surtout des faibles et des opprimés ; les conseils si sages des livres sapientiaux, qui contiennent par anticipation tout un exposé des vertus chrétiennes ; mais par dessus tout l'admirable doctrine de Jésus, la synthèse ascétique condensée dans le sermon sur la Montagne, la doctrine plus élevée encore que nous trouvons dans les discours que nous rapporte S. Jean et qu'il commente dans ses Epîtres ; la théologie Spirituelle de S. Paul, si riche en aperçus dogmatiques et en applications pratiques. Le pâle résumé que nous en donnerons bientôt nous montrera que le Nouveau Testament est déjà un code de perfection.
15. 3° Des prières pour nourrir notre piété et notre vie intérieure. En est-il de plus belles que celles que nous trouvons dans les Psaumes, et que l'Eglise a jugées si propres à glorifier Dieu et à nous sanctifier, qu'elle les a transportées dans sa Liturgie, dans le Missel et dans le Bréviaire ? Il en est d'autres encore qu'on trouve de ci de là dans les livres historiques ou sapientiaux ; et surtout il y a le Pater, la prière la plus belle, la plus simple, la plus complète dans sa brièveté que l'on puisse trouver, et la prière sacerdotale de Notre Seigneur, sans parler des doxologies que l'on trouve déjà dans les Epîtres de S. Paul et dans l'Apocalypse.
16. 4° Des exemples qui nous entraînent à la pratique de la vertu. a) L'Ancien Testament fait défiler devant nous une série de patriarches, de prophètes et d'autres personnages illustres, qui n'ont pas été sans faiblesses, mais dont les vertus ont été célébrées par S. Paul (Hebr. Ch. XI en entier) et longuement décrites par les Pères qui les proposent à notre imitation. Et en effet qui n'admirerait la piété d'Abel et d'Hénoch, la vertu solide de Noë pratiquant le bien au milieu d'une génération corrompue, la foi et la confiance d'Abraham, la chasteté et la prudence de Joseph, le courage, la sagesse et la constance de Moïse, l'intrépidité, la piété et la sagesse de David, la vie austère des Prophètes, la vaillance des Machabées et tant d'autres exemples qu'il serait trop long de mentionner ? b) Dans le Nouveau Testament, c'est tout d'abord Jésus qui nous apparaît comme le type idéal de la sainteté, puis Marie et Joseph, ses fidèles imitateurs, les Apôtres, qui, d'abord imparfaits, se dévouent corps et âme à la prédication de l'Evangile aussi bien qu'à la pratique des vertus chrétiennes et apostoliques, si bien qu'ils nous disent plus éloquemment par leurs exemples que par leurs paroles :  « Imitatores mei estote sicut et ego Christi ». Si plusieurs de ces saints personnages ont eu leurs défaillances, la façon dont ils les ont rachetées n'en donne que plus de valeur à leurs exemples, en nous montrant comment on peut racheter ses fautes par la pénitence.
Pour donner une idée des richesses ascétiques qu'on trouve dans la sainte Ecriture, nous ferons en Appendice un résumé synthétique de la spiritualité des Synoptiques, de S. Paul et de S. Jean.

II. La tradition

17. La Tradition complète la sainte Ecriture en nous transmettant des vérités qui ne sont pas contenues dans celle-ci, et de plus l'interprète d'une façon authentique. Elle se manifeste par le magistère solennel et par le magistère ordinaire.
1° Le magistère solennel, qui consiste surtout dans les définitions des Conciles et des Souverains Pontifes, ne s'est occupé que rarement des questions à proprement parler ascétiques et mystiques ; mais il a eu souvent à intervenir pour éclaircir et préciser les vérités qui forment la base de la spiritualité : comme la vie divine considérée dans sa source, l'élévation de l'homme à l'état surnaturel, le péché originel et ses suites, la rédemption, la grâce communiquée à l'homme régénéré, le mérite qui augmente en nous la vie divine, les sacrements qui confèrent la grâce, le saint sacrifice de la messe où sont appliqués les fruits de la rédemption. Au cours de notre travail, nous aurons à utiliser toutes ces définitions.
18. 2° Le magistère ordinaire s'exerce de deux façons, d'une manière théorique et pratique. A) L’enseignement théorique nous est donné d’une façon négative par la condamnation des propositions des faux mystiques, et d’une façon positive par la doctrine commune des Pères et des théologiens ou par les conclusions qui se dégagent des vies des Saints. a) Il s'est trouvé, à diverses époques, de faux mystiques qui ont altéré la vraie notion de la perfection chrétienne : tels les Encratites et les Montanistes dans les premiers siècles, les Fraticelles et certains mystiques allemands du Moyen-Age, Molinos et les Quiétistes dans les temps moderpes ; en les condamnant, l'Eglise nous a montré les écueils à éviter et par là même la voie à suivre.
19. b) Par contre il s'est formé peu à peu une doctrine commune sur toutes les grandes questions de spiritualité, qui forme comme le commentaire vivant des enseignements bibliques : on la trouve chez les Pères, les théologiens et auteurs spirituels, et, quand on les fréquente on est frappé de l'unanimité qui se manifeste sur tous les points vitaux qui se rapportent à la nature de la perfection, aux moyens nécessaires pour y arriver, aux principales étapes à suivre. Sans doute il reste quelques points controversés, mais sur des questions accessoires, et ces discussions ne font que mieux ressortir l'unanimité morale qui existe sur le reste. L'approbation tacite que donne l’Eglise à cet enseignement commun nous est un sûr garant de vérité.
20. B) L'enseignement pratique se trouve surtout dans la canonisation des Saints qui ont enseigné et pratiqué l'ensemble de ces doctrines spirituelles. On sait avec quel soin minutieux on procède à la revision de leurs écrits aussi bien qu'à l'examen de leurs vertus ; de l'étude de ces documents il est facile de dégager des principes de spiritualité sur la nature et les moyens de perfection, qui seront l'expression de la pensée de l'Eglise. On peut s'en rendre compte en lisant l'ouvrage si documenté de Benoît XIV : de Servorum Dei Beatificatione et Ca- nonizatione, ou quelques-uns des procès de Canonisation, ou enfin des biographies de Saints écrites selon les règles d'une sage critique.

III. La raison éclairée par la foi et l’expérience

21. La raison naturelle étant un don de Dieu absolument nécessaire à l'homme pour connaître la vérité, qu'elle soit naturelle ou surnatutelle, a une part très large dans l'étude de la spiritualité, comme de toutes les autres branches de la science ecclésiastique. Mais, quand il s'agit de vérités révélées, elle a besoin d'être guidée et perfectionnée par les lumière de la foi ; et, pour appliquer les principes généraux aux âmes, elle doit s'appuyer sur l'expérience psychologique.
22. 1° Son premier rôle est de recueillir, d'interpréter et de coordonner les données de l'Ecriture et de la Tradition ; celles-ci sont en effet dispersées dans différents livres, et ont besoin d'être réunies pour former un tout. De plus les paroles sacrées ont été prononcées en telle et telle circonstance, à l'occasion de telle ou telle question, dans tel milieu donné ; de même les textes de la Tradition ont été souvent motivés par les circonstances de temps, de personnes. a) Pour en saisir la portée, il faut les situer dans leur milieu, les rapprocher d'enseignements analogues, puis les grouper et les interpréter à la lumière de l'ensemble des vérités chrétiennes. b) Ce premier travail fait, on peut de ces principes tirer des conclusions, en montrer le bien fondé et les applications multiples aux mille détails de la vie humaine, dans les situations les plus diverses. c) Principes et conclusions seront enfin coordonnés en une vaste synthèse et formeront une véritable science. d) C'est à elle aussi qu’il convient de défendre la doctrine ascétique contre ses détracteurs. Plusieurs l'attaquent au nom de la raison et de la science, et ne voient qu'illusion là où il y a de sublimes réalités. Répondre à ces critiques en s'appuyant sur la philosophie et la science est précisément le rôle de la raison.
23. 2° La spiritualité étant une science vécue, il importe de montrer historiquement comment elle a été mise en pratique ; et pour cela il faut lire des biographies de Saints, anciens et modernes, de diverses conditions et de divers pays, pour constater de quelle façon les règles ascétiques ont été interprétées, adaptées aux divers temps comme aux différentes nations, aux devoirs d’état particuliers. Et, comme il n'y a pas que des saints dans l'Eglise, il faut bien se rendre compte des obstacles qui s'opposent à la pratique de la perfection, des moyens employés pour en triompher. Des études psychologiques s'imposent donc, et à la lecture il faut joindre l’observatlon.
24. 3° C'est encore à la raison, éclairée par la foi, qu'il appartient d'appliquer les principes et les règles générales à chaque personne en particulier, en tenant compte de son tempérament, de son caractère, de son âge et de son sexe, de sa situation sociale, de ses devoirs d’état, comme aussi des attraits surnaturels de la grâce, en tenant compte aussi des règles sur le discernement des esprits. Pour remplir ce triple rôle, il faut non seulement une intelligence pénétrante, mais un jugement droit, beaucoup de tact et de discernement. Il y faut joindre l'étude de la psychologie pratique, des tempéraments, des maladies nerveuses et des états morbides qui ont tant d'influence sur l'esprit et la volonté, etc. Et comme il s'agit d'une science surnaturelle, il ne faut pas oublier que la lumière de la foi y joue un rôle prépondérant, et que les dons du S. Esprit la complètent merveilleusement; en particulier le don de science, qui des choses humaines nous élève jusqu'à Dieu, le don d'intelligence qui nous fait mieux pénétrer les vérités révélées, le don de sagesse qui nous les fait discerner et goûter, le don de conseil qui nous permet d'en faire l'application à chacun en particulier. Aussi les Saints, qui se laissent conduire par l'Esprit de Dieu, sont en même temps les plus aptes à mieux comprendre et à mieux appliquer les principes de la vie spirituelle ; ils ont une certaine connaturalité pour les choses divines, qui les leur fait mieux saisir et goûter (Matth., XI, 25).

§ III. La méthode à suivre

Pour mieux utiliser les sources que nous venons de décrire, quelle méthode faut-il employer ? Est-ce la méthode expérimentale, descriptive, ou la méthode déductive, ou enfin l'union des deux ? Quel est l'esprit qui doit présider à l'emploi de ces méthodes ?
25. 1° La méthode expérimentale, descriptive ou psychologique consiste à observer en soi ou dans les autres les faits ascétiques ou mystiques, à les classer, les coordonner, pour en induire les signes ou marques caractéristiques de chaque état, les vertus ou dispositions qui conviennent à chacun d'eux ; et cela sans s'inquiéter de la nature ou de la cause de ces phénomènes, sans se demander s'ils procèdent des vertus, des dons du S. Esprit, ou de grâces miraculeuses. Cette méthode, dans sa partie positive, a de nombreux avantages ; car il faut bien connaître les faits avant d'en expliquer la nature et la cause.
26. Mais, si on l'emploie exclusivement : a) elle ne peut constituer une véritable science ; sans doute elle en fournit les bases, à savoir les faits et les inductions immédiates qu'on en peut tirer ; elle peut même constater quels sont les moyens pratiques qui généralement réussissent le mieux. Toutefois, tant qu'on ne remonte pas à la nature intime et à la cause de ces faits, on fait plutôt de la psychologie que de la théologie ; ou, si l’on décrit minutieusement les moyens de pratiquer telle ou telle vertu, on ne montre pas assez le ressort, le stimulant à pratiquer cette vertu. b) De là on s'expose à tomber dans des opinions mal fondées. Si, dans la contemplation, on ne distingue pas ce qui est miraculeux, comme l'extase, la lévitation, de ce qui en constitue l'élément essentiel, c'est-à-dire, le regard prolongé et affectueux sur Dieu sous l’action d'une grâce spéciale, on pourra en conclure trop facilement que toute contemplation est miraculeuse : ce qui est contraire à la doctrine commune. c) Beaucoup des controverses sur les états mystiques s'atténueraient si aux descriptions de ces états on ajoutait les distinctions et les précisions que fournit l'étude théologique. Ainsi la distihction entre la contemplation acquise et infuse permet de mieux comprendre certains états d'âme très réels et de concilier certaines opinions qui, à première vue, semblaient contradictoires. De même, dans la contemplation passive, il y a bien des degrés : il en est où suffit l'usage perfectionné des dons, il en est d’autres où Dieu doit intervenir pour agencer nos idées et nous aider à en tirer des conclusions frappantes, il en est enfin qui ne s'expliquent guère que par des connaissances infuses. Toutes ces distinctions sont les résultats de longues et patientes recherches à la fois spéculatives et pratiques ; en les faisant, on réduirait le nombre des divergences qui séparent les diverses écoles.
27. 2° La méthode doctrinale ou déductive consiste à étudier avec soin ce que nous enseignent sur la vie spirituelle l’Ecriture, la Tradition, la théologie, en particulier la Somme de S. Thomas, à en déduire des conclusions sur la nature de la vie chrétienne, sa perfection, l'obligation et les moyens d'y tendre, sans se préoccuper suffisamment des faits psychologiques, du tempérament et du caractère des dirigés, de leurs attraits, des résultats produits sur telle ou telle âme par tel ou tel moyen ; sans étudier en détail les phénomènes mystiques décrits par1es Saints qui les ont éprouvés, comme Ste Térèse, S. Jean de la Croix, S. François de Sales, etc., ou du moins sans en tenir un compte suffisant. Comme nous sommes exposés à nous tromper dans nos déductions, surtout quand nous les multiplions, il est sage de les soumettre au contrôle des faits. Si, par exemple, on constate que la contemplation infuse est assez rare, on mettra quelques restrictions à la thèse soutenue par quelques écoles, à savoir que tous sont appelés aux plus hauts degrés de la contemplation.
28. 3° Union des deux méthodes. A) Il faut donc savoir combiner harmonieusement les deux méthodes. C'est en réalité ce que font la plupart des auteurs ; il y a seulement entre eux cette différence que les uns s'appuient davantage sur les faits et les autres sur les principes. Nous essaierons de tenir le juste milieu, sans avoir la prétention d'y réussir. a) Les principes de théologie mystique, déduits par les grands maîtres, des vérités révélées nous aideront à mieux observer les faits, à les analyser d'une façon plus complète, à les ordonner d'une façon plus méthodique, à les interpréter plus sagement ; nous n'oublierons pas en effet que les mystiques décrivent leurs impressions, sans vouloir, souvent du moins, en expliquer la nature. Les principes nous aideront aussi à rechercher la cause des faits en tenant compte des vérités déjà connues, à les coordonner de manière à en faire une véritable science.
b) Par ailleurs l'étude des faits ascétiques et mystiques corrigera ce qu'il y aurait de trop rigide et de trop absolu dans des conclusions purement dialectiques ; il ne peut y avoir en effet d'opposition absolue entre les principes et les faits ; si donc l'expérience montre que le nombre des mystiques est restreint, il ne faut pas se hâter de conclure que cela tient uniquement aux résistances qu'on oppose à la grâce. Il est utile aussi de se demander pourquoi dans les causes de canonisation on juge de la sainteté beaucoup plus par la pratique des vertus héroïques que par le genre d'oraison ou de contemplation ; ces faits pourront en effet montrer que le degré de sainteté n'est pas toujours et nécessairement en rapport avec le genre et le degré d’oraison.
29. B) Comment fusionner ces deux méthodes ? a) Il faut tout d'abord étudier le donné révélé, tel qu'il nous est fourni par l'Ecriture et la Tradition, y compris le magistère ordinaire de l'Eglise ; et, à l'aide de ce donné, déterminer, par la méthode déductive, ce qu'est la vie et la perfection chrétienne, quels sont ses différents degrés, la marche progressive suivie généralement pour arriver à la contemplation, en passant par la mortification, la pratique des vertus morales et théologales ; en quoi consiste cette contemplation, soit dans ses éléments essentiels, soit dans les phénomènes extraordinaires qui parfois l’accompagnent.
30. b) A cette étude doctrinale il faut joindre la méthode d'observation : 1) examiner avec soin les âmes, leurs qualités et leurs défauts, leur physionomie spéciale ; leurs attraits et leurs répugnances, les mouvements de la nature et de la grâce qui se produisent en elles ; ces connaissances psychologiques permettront de mieux préciser les moyens de perfection qui leur conviennent le mieux, les vertus dont elles ont le plus besoin et vers lesquelles la grâce les incline, leur correspondance à cette grâce, les obstacles qu'elles rencontrent et les moyens qui leur réussissent le mieux pour en triompher. 2) Pour élargir le champ de son expérience, on lira attentivement les vies de Saints, surtout celles qui, sans dissimuler leurs défauts, montrent la façon progressive dont ils les ont combattus, comment et par quels moyens ils ont pratiqué les vertus ; si et comment ils sont passés de la vie ascétique à la vie mystique, sous quelles influences. 3) C'est aussi dans la vie des contemplatifs qu'on étudiera les phénomènes divers de la contemplation, depuis les premières lueurs indécises jusqu'aux plus hauts sommets, les effets de sainteté produits par ces grâces, les épreuves auxquelles ils ont été soumis, les vertus qu'ils ont pratiquées. Tout cela viendra compléter et parfois rectifier les connaissances théoriques qu'on avait acquises.
31. c) A l'aide des principes théologiques et des phénomènes mystiques bien étudiés et bien classifiés, on pourra remonter plus facilement à la nature de la contemplation, à ses causes, à ses espèces, distinguer ce qu'il y a en elle de normal et d'extraordinaire. 1) On se demandera dans quelle mesure les dons du S. Esprit sont les principes formels de la contemplation, et comment il les faut cultiver pour se mettre dans les dispositions intérieures favorables à la contemplation. 2) On examinera si les phénomènes dûment constatés s’expliquent tous par les dons du S. Esprit, si quelques-uns ne supposent pas des espèces infuses, et comment elles opèrent dans l'âme ; ou bien si c'est l'amour qui produit ces états d'âme, sans connaissances nouvelles. 3) C'est alors qu'on pourra mieux voir en quoi consiste l’état passif, et dans quelle mesure l'âme y demeure active, la part de Dieu et de l'âme dans la contemplation infuse ; ce qui est ordinaire en cet état, et ce qui devient extraordinaire et préternaturel. Ainsi on pourra mieux étudier le problème de la vocation à l'état mystique et du nombre plus ou moins grand des vrais contemplatifs. En procédant ainsi, nous aurons plus de chance d'arriver à la vérité, à des conclusions pratiques pour la direction des âmes : une étude de ce genre sera non moins attrayante que sanctifiante.
32. 4° En quel esprit doit-on suivre cette méthode ? Quelle que soit la méthode employée, il est-nécessaire d'étudier ces difficiles problèmes avec beaucoup de calme, de pondération, en vue de connaître la vérité, et non pour faire triompher à tout prix le système qui a nos préférences. a) Par conséquent, il importe de dégager et de mettre en lumière tout ce qui est certain ou communément admis, et de rejeter au second plan ce qui est controversé. La direction à donner aux âmes ne dépend pas des questions controversées mais des doctrines communément reçues. Il y a unanimité dans toutes les écoles pour reconnaître que le renoncement et la charité, le sacrifice et l'amour sont nécessaires à toutes les âmes et dans toutes les voies, et que la combinaison harmonieuse de ce double élément dépend beaucoup du caractère des personnes qu'on dirige. Tout le monde admet qu'il ne faut jamais cesser de pratiquer l'esprit de pénitence, bien qu'il prenne différentes formes selon les différents degrés de perfection ; qu'il faut pratiquer les vertus morales et théologales d'une façon de plus en plus parfaite pour arriver à la voie unitive, et que les dons du Saint Esprit, cultivés avec soin, donnent à notre âme une souplesse qui la rend plus docile aux inspirations de la grâce, et la préparent, si Dieu l’y appelle, à la contemplation. On est d’accord aussi sur ce point important que la contemplation infuse est essentiellement gratuite, que Dieu la donne à qui il veut et quand il le veut ; que par conséquent on ne peut se mettre soi-même dans l'état passif, et que les marques d'une vocation prochaine à cet état sont celles que décrit si bien S. Jean de la Croix. Et lorsque les âmes arrivent à la contemplation, elles doivent, de l'aveu de tous, progresser dans la conformité parfaite à la volonté de Dieu, le saint abandon et surtout l'humilité, vertus que recommande constamment Ste Thérèse. On peut donc diriger prudemment les âmes, même celles qui sont appelées à la contemplation, sans avoir résolu toutes les questions controversées que se posent encore les auteurs contemporains.
33. b) Il nous semble aussi que si on aborde ces problèmes avec un esprit conciliant, en cherchant ce qui nous rapproche plus encore que ce qui nous divise, on arrivera non pas sans doute à supprimer ces controverses, mais à les adoucir, à les atténuer, à voir l'âme de vérité que contient chaque système. C'est tout ce qu'on peut faire ici-bas : il faut savoir attendre les lumières de la vision béatifique pour résoudre un certain nombre de problèmes difficiles.

§ IV. Excellence et nécessité de la Théologie ascétique

Le peu que nous avons dit sur la nature, les sources et la méthode de la Théologie ascétique nous permet d'entrevoir son excellence et sa nécessité.

I. Excellence de la théologie ascétique

34. Son excellence se tire de son objet. Or son objet est l'un des plus nobles qu'on puisse étudier. C’est en effet une participation de la vie divine communiquée à l'âme, et cultivée par elle avec une ardeur inlassable. Et si nous analysons cette notion, nous verrons combien cette branche de la théologie est digne de notre attention.
1° Nous y étudions tout d'abord Dieu dans ses rapports les plus intimes avec l'âme : la Sainte Trinité habitant et vivant en nous, nous communiquant une participation à sa vie, collaborant à nos bonnes œuvres, et par là nous aidant à augmenter sans cesse en nous cette vie surnaturelle, à purifier notre âme, à l'embellir par la pratique des vertus, à la transformer jusqu'à ce qu'elle soit mûre pour la vision béatifique. Peut-on imaginer rien de plus grand, de plus excellent que cette action de Dieu transformant les âmes pour se les unir, se les assimiler d'une façon si parfaite ?
2° Nous étudions ensuite l'âme elle-même dans sa collaboration avec Dieu, se dégageant peu à peu de ses défauts, de ses imperfections, cultivant 1es vertus chrétiennes, s'efforçant d'imiter les vertus de son divin Modèle, malgré les obstacles qu'elle trouve au dedans et au dehors, cultivant les dons du Saint Esprit, acquérant une souplesse merveilleuse pour obéir aux moindres touches de la grâce, et se rapprochant ainsi chaque jour de son Père céleste. Si aujourd'hui on considère toutes les questions se rapportant à la vie comme les plus dignes de captiver notre attention, que dire d’une science qui traite de la vie surnaturelle, de la participation à la vie même de Dieu, qui en décrit les origines, les progrès, et son entier épanouissement dans le ciel ? N'est-ce pas là l'objet le plus noble de nos études ? N'est-ce pas aussi le plus nécessaire ?

II. Nécessité de la théologie ascétique

Pour arriver à plus de précision en une matière si délicate, nous exposerons : 1° sa nécessité pour le prêtre ; 2° sa très grande utilité pour les laïques ; 3° la manière pratique de l'étudier.
1° Nécessité pour le Prêtre
35. Le prêtre doit se sanctifier et sanctifier ses frères, et, à ce double point de vue, il est obligé d'étudier la science des saints.
A) Que le prêtre soit obligé non seulement de tendre à la perfection, mais de la posséder à un degré plus élevé que le simple religieux; c'est ce que nous démontrerons plus tard avec Saint Thomas. Or la connaissance de la vie chrétienne et des moyens qui contribuent à la perfectionner, est normalement nécessaire pour arriver à la perfection.
a) La connaissance allume et stimule le désir. Savoir ce qu'est la sainteté, son excellence, son obligation, ses effets merveilleux dans l'âme, sa fécondité, c'est déjà la désirer. La connaissance d'un bien tend à nous le faire désirer : on ne peut contempler long-temps et avec attention un fruit délicieux sans que naisse la pensée de le goûter. Or le désir, surtout quand il est ardent et prolongé, est déjà un commencement d'action : il met en branle la volonté et la pousse vers l'obtention du bien saisi par l'intelligence ; il lui donne de l'élan, des énergies pour l'atteindre, et soutient son effort pour le conquérir : ce qui est d'autant plus nécessaire que bien des obstacles s'opposent à notre progrès spirituel.
b) Voir en détail les nombreuses étapes à parcourir pour arriver à la perfection, les efforts soutenus faits par les saints pour triompher des difficultés et avancer sans cesse vers le but désiré, enflamme les courages, soutient l'ardeur au milieu de la lutte, empêche le relâchement et la tiédeur, surtout si en même temps on considère les secours et les réconforts que Dieu a préparés aux âmes de bonne volonté.
c) Cette étude s'impose encore plus à notre époque : « Nous vivons en effet dans une atmosphère de dissipation, de rationalisme, de naturalisme, de sensualisme, qui pénètre, même à leur insu, une multitude d'âmes chrétiennes, et qui envahit jusqu'au sanctuaire » (Giroux, Rapport cité, p. 156). Les deux ou trois années qu'on passe à la caserne font participer les jeunes clercs eux-mêmes, ceux surtout qui n'ont pas reçu dans leur famille une éducation profondément chrétienne, à cet esprit fâcheux. Or quel est le meilleur moyen de réagir contre ces tendances funestes de notre temps, sinon de vivre dans la compagnie de Notre Seigneur et des Saints par l'étude méthodique et suivie des principes de spiritualité, qui sont en opposition directe avec la triple concupiscence ?
36. B) Pour la sanctification des âmes qui lui sont confiées. a) Même lorsqu'il s'agit des pécheurs, un prêtre a besoin de connaître l'Ascétique pour leur apprendre comment il faut éviter les occasions de péché, combattre les passions, résister aux tentations, pratiquer les vertus contraires aux vices qu'il s'agit d'éviter. Sans doute la théologie morale suggère déjà brièvement ces choses ; mais l'Ascétique les synthétise et les développe. b) Mais de plus il y a dans presque toutes les paroisses des âmes d'élite que Dieu appelle à la perfection, et qui, si elles sont bien dirigées, aideront le prêtre dans l'exercice de l'apostolat par leurs prières, leurs exemples et mille petites industries. On peut en tout cas en former quelques-unes en faisant un choix parmi les enfants qu'on élève au catéchisme ou au patronage. Or, pour réussir en cette œuvre si importante, il est nécessaire au prêtre d'être un bon directeur, de posséder les règles tracées par les saints et contenues dans les livres de spiritualité ; sans cela, on n'a ni le goût ni l'aptitude requise pour cet art si difficile de former les âmes.
37. c) A plus forte raison l'étude des voies spirituelles est nécessaire pour la direction des âmes ferventes appelées à la sainteté, et qu'on rencontre parfois jusque dans les plus petites campagnes. Pour les conduire jusqu'à l'oraison de simplicité et à la contemplation ordinaire, il faut connaître non seulement l' Ascétique mais encore la Mystique sous peine de s'égarer et de mettre obstacle au progrès de ces personnes. C'est la remarque de sainte Thérèse : « Pour cela un directeur est très nécessaire, mais il est à désirer qu'il ait de l'expérience... Mon opinion est et sera toujours que tout chrétien doit, lorsqu'il le peut, communiquer avec des hommes doctes, et plus ils le seront, mieux cela vaudra. Ceux qui marchent par les voies de l'oraison en ont plus besoin que les autres ; et cela, à proportion qu'ils seront plus spirituels... Ce dont je suis très persuadée, c'est que le démon ne séduira point par ses artifices une personne d'oraison qui consulte des théologiens, à moins qu'elle ne veuille se tromper elle-même. Selon moi, il redoute extrêmement la science humble et vertueuse : il sait qu'il sera démasqué par elle, et qu'il se retirera avec perte » (Vie par elle-même, ch. 13, p. 173-177 de l’éd. des carmélites de Paris). Saint Jean de la Croix ne tient pas un autre langage : « De tels maîtres spirituels (ignorant les voies mystiques) ne comprennent pas les âmes engagées dans cette contemplation paisible et solitaire ; ils les forcent à reprendre le chemin de la méditation et du travail de la mémoire, à faire des actes intérieurs où les dites âmes ne trouvent que sécheresse et distraction… Qu’on le sache bien : celui qui se trompe par ignorance, alors que son ministère lui impose le devoir d’acquérir les connaissances indispensables, n'échappera pas à un châtiment qui sera selon la mesure du mal produit. » (La vive flamme d’amour, strophe III, v. 3, §. 11).
Qu'on ne dise pas : Si je rencontre de ces âmes, je les abandonnerai au Saint Esprit pour qu'il les dirige. Le Saint Esprit vous répondrait qu'il vous les a confiées, et que vous devez collaborer avec Lui à leur direction ; sans doute, Il peut lui-même les conduire ; mais, pour éviter tout danger d'illusion, Il veut que cette conduite soit soumise à l'approbation d'un directeur visible.

2° Utilité pour les laïques

38. Nous disons utilité et non pas nécessité : car les laïques peuvent se laisser conduire par un directeur instruit et expérimenté, et ne sont donc pas obligés absolument d'étudier la Théologie ascétique. Toutefois cette étude leur sera très utile pour trois raisons principales : a) Pour stimuler et entretenir le désir de la perfection, comme aussi pour donner une certaine connaissance de la nature de la vie chrétienne et des moyens qui nous permettent de la perfectionner. On ne désire point ce qu'on ne connaît pas, tandis que la lecture des livres spirituels excite ou augmente le désir sincère de mettre en pratique ce qu'on a lu. Que d'âmes, par exemple, se sont portées avec ardeur vers la perfection en lisant l'Imitation, le Combat spirituel, l'Introduction à la vie dévote, la Pratique de l' amour de Dieu ? b) De plus, même lorsqu'on a un guide spirituel, la lecture d'une bonne Théologie ascétique facilite et complète la direction. On sait mieux ce qu'il faut dire en confession ou en direction ; on comprend et on retient mieux les conseils du directeur, quand on les retrouve dans un livre qu'on peut relire. Le directeur, de son côté, se voit dispensé d'entrer dans de nombreux détails, et se contente, après quelques avis substantiels, de faire lire quelque traité où le dirigé trouvera les éclaircissements et les compléments nécessaires. Ainsi la direction pourra être plus courte, sans rien perdre de son profit : le livre continuera et complétera l'action du directeur. c) Enfin la lecture d'un traité de vie spirituelle pourra suppléer, dans une certaine mesure, à la direc- tion qu'on ne peut recevoir, faute de guide spirituel, ou du moins qu'on ne reçoit que rarement. Sans doute, comme nous le dirons plus tard, la direction est le moyen normal pour se former à la perfection ; mais lorsque, pour une raison ou pour une autre, on ne peut trouver  un bon directeur, le Bon Dieu y supplée, et l’un des moyens dont il se sert est précisément un de ces livres qui, d’une façon précise et méthodique, tracent la voie à suivre pour devenir parfait.

3° De la manière d'étudier cette science

39. Trois conditions sont requises pour acquérir les connaissances nécessaires à la direction des âmes : un Manuel, la lecture des grands maîtres, la pratique. A) L'étude d'un Manuel. Assurément les lectures spirituelles qu'on fait dans un séminaire, la pratique de la direction, et surtout l'acquisition progressive des vertus aident beaucoup le séminariste à se former lui-même à l'art difficile de la direction des âmes. Cependant il y faut joindre aussi l'étude d'un bon Manuel. 1) Les lectures spirituelles sont avant tout un exercice de piété, une série d'instructions, de conseils et d'exhortations sur la vie spirituelle, et il est bien rare qu'on y traite d'une façon méthodique et complète toutes les questions de spiritualité. 2) En tout cas, si les séminaristes n’ont pas un Manuel, auquel ils puissent rattacher logiquement les divers conseils qu’on leur donne, et qu'ils puissent relire de temps en temps, ils auront vite oublié ce qu'ils avaient entendu, et manqueront de la science compétente. Or cette science est une de celles que le jeune clerc doit acquérir au Séminaire, dit avec raison Pie X (Motu proprio, 9 sept. 1910)
40. B) L'étude approfondie des Maîtres spirituels, en particulier des auteurs canonisés, ou de ceux qui, sans l'être, ont vécu en saints. a) C'est en effet à leur contact que le cœur s'échauffe, que l'intelligence, éclairée de la foi, perçoit plus clairement et goûte mieux que dans un livre didactique les grands principes de la vie spirituelle, et que la volonté, soutenue par la grâce, est entraînée à la pratique des vertus si vivement décrites par ceux qui s'y sont vaillamment exercés. En y joignant la lecture de la vie des Saints, on comprendra mieux encore pourquoi et comment on doit les imiter, et l'irrésistible influence de leurs exemples ajoutera une nouvelle force à leurs enseignements.  b) Cette étude, commencée au Séminaire, devra se poursuivre et se perfectionner dans le ministère : la direction des âmes la rendra plus pratique ; de même qu'un bon médecin ne cesse de perfectionner ses études par la pratique de son art, et son art par de nouvelles études, ainsi un sage directeur complètera ses connaissances théoriques par le contact avec les âmes, et l'art de la direction par de nouvelles études en rapport avec les besoins spéciaux des âmes qui lui sont confiées.
41. C) La pratique des vertus chrétiennes et sacerdotales, sous la sage impulsion d'un directeur. Pour bien comprendre les différentes étapes de la perfection, il n'est pas de moyen plus efficace que de les parcourir soi-même : le meilleur guide à travers les montagnes n'est-il pas celui qui les a parcourues en tous sens ? Et quand on a été bien dirigé, on est, toutes choses égales d'ailleurs, plus apte à diriger les autres, parce qu'on a vu par expérience comment on applique les règles aux cas particuliers.
En combinant ces trois conditions, on étudiera la Théologie ascétique avec beaucoup de profit pour soi et pour les autres.
42. Solution de quelques difficultés. A) On reproche parfois à l'Ascétique de fausser les consciences, en se montrant beaucoup plus exigente que la Morale, et en demandant aux âmes une perfection irréalisable. Le reproche serait fondé, si elle ne distinguait pas entre le précepte et le conseil, entre les âmes appelées à la haute perfection et celles qui ne le sont pas. Mais il n’en est pas ainsi : tout en pressant les âmes d’élite vers les hauteurs inaccessibles aux chrétiens ordinaires, elle n’oublie pas la différence entre les commandements et les conseils, les conditions essentielles au salut et celles qui sont requises pour la perfection ; mais elle sait aussi que, pour garder les commandements, il faut observer quelques conseils.
43. B) On l'accuse de favoriser l'égoïsme, en mettant au-dessus de tout la sanctification personnelle. Que le salut de notre âme doive être la première de nos préoccupations, c'est ce qu'enseigne Notre Seigneur lui-même (Matth., XVI, 26). Mais en cela il n'y a rien d'égoïste ; car l'une des conditions essentielles au salut, c'est la charité à l'égard du prochain, qui se manifeste par des œuvres corporelles aussi bien que par des œuvres spirituelles ; et la perfection demande que l’on aime son prochain au point de se sacrifier pour lui, comme Jésus l'a fait pour nous. Si c'est là de l'égoïsme, avouons qu'il est peu à redouter.  C) On insiste : l'Ascétique pousse les âmes à la contemplation, et par là même les détourne de la vie active. Il faut absolument ignorer l'histoire pour affirmer que la contemplation nuit à l'action : « Les vrais mystiques, dit M. de Montmorand, sont gens de pratique et d'action, non de raisonnement et de théorie. Ils ont le sens de l’organisation, le don du commandement, et se révèlent très bien doués pour les affaires. Les œuvres qu’ils fondent sont viables et durables ; ils font preuve, dans la conception et la conduite de leurs entreprises, de prudence et de hardiesse, et de cette juste appréciation des possibilités qui caractérise le bon sens. Et de fait le bon sens paraît être leur maîtresse pièce : un bon sens que ne trouble aucune exaltation maladive, aucune imagination désordonnée, et auquel s'ajoute la plus rare puissance de pénétration. » (Psychologie des mystiques, 1920, p. 20-21). N'avons-nous pas vu en effet, en lisant l'Histoire de l'Eglise, que la plupart des saints qui ont écrit sur la vie spirituelle étaient en même temps des hommes de science et d'action ? Témoin : Clément d'Alexandrie, S. Basile, S. Chrysostome, S. Ambroise, S. Augustin, S. Grégoire, S. Anselme, S. Bernard, le B. Albert le Grand, S. Thomas, S. Bonaventure, Gerson, Ste Thérèse, S. François de Sales, S. Vincent de Paul, le Card. de Bérulle, Me Acarie, et tant d'autres qu'il serait trop long d'énumérer. La contemplation, loin d'être un obstacle à l'action, l'éclaire et la dirige. Rien donc de plus noble, de plus important, de plus utile que la Théologie ascétique bien comprise.

§ V. Division de la Théologie ascétique et mystique

I. Divers plans suivis par les auteurs

Après avoir indiqué les divers plans adoptés, nous proposerons celui qui nous semble le mieux adapté à notre but. On peut se placer à plusieurs points de vue pour tracer une division logique de la science spirituelle;
44. 1° Les uns, l'envisageant avant tout comme une science pratique, laissent de côté toutes les vérités spéculatives sur lesquelles elle repose, et se bornent à coordonner aussi méthodiquement que possible les règles de la perfection chrétienne : tels furent, parmi les Pères, J. Cassien dans ses Conférences, S. Jean Climaque dans son Echelle mystique... et, dans les temps modernes, Rodriguez dans la Pratique de la perfection chrétienne. L'avantage de cette méthode est d'entrer immédiatement dans l'étude des moyens pratiques qui mènent à la perfection. L'inconvénient est de ne pas proposer aux âmes ces stimulants que nous donne la considération de ce que Dieu et Jésus Christ ont fait et font encore pour nous, et de ne pas baser la pratique des vertus sur ces convictions profondes et générales que l'on trouve dans la méditation des vérités dogmatiques.
45. 2° Aussi les Pères grecs et latins les plus illustres : S. Athanase et S. Cyrille, S. Augustin et S. Hilaire ; les grands théologiens du Moyen-Age, Richard de S. Victor, le B. Albert le Grand, S. Thomas et S. Bonaventure, ont soin de baser leur doctrine spirituelle sur les dogmes de foi et d'y rattacher les vertus dont ils exposent la nature et les degrés. C'est ce qu'a fait en particulier l'Ecole française du dix-septième siècle, avec Bérulle, Condren, Olier, J. Eudes. Elle veut éclairer l'esprit et fortifier les convictions pour mieux faire pratiquer les austères vertus qu'elle propose à notre pratique, et c'est là son mérite : Mais on lui reproche parfois de donner trop à la spéculation et pas assez à la pratique ; unir les deux serait la perfection, et plusieurs l'ont essayé aves succès.
46. 3° Parmi ceux qui s'efforcent de combiner ces deux éléments essentiels, il en est qui suivent l'ordre ontologique des vertus, tandis que d'autres suivent l'ordre psychologique du développement de ces mêmes vertus à travers les trois voies, purgative, illuminative et unitive. A) Parmi les premiers se place S. Thomas, qui, dans la Somme, traite successivement des vertus théologales et morales et des dons du S. Esprit qu'il rattache à chaque vertu. Il a été suivi par les principaux auteurs de l'Ecole française du XVIIe siècle et d'autres écrivains. B) Parmi les seconds se placent tous ceux qui voulant former des directeurs spirituels, ont décrit successivement les ascensions de l'âme à travers les trois voies, en mettant seulement, en tête de leurs traités, une courte introduction sur la nature de la vie spirituelle ; tels sont Thomas de Vallgornera, O. P., Mystica Theologia Divi Thomæ, Philippe de la Ste Trinité, C. D., Summa theologiæ mysticæ, Schram, O. S. B., Institutiones theologiæ mysticæ, Scaramelli, S. J., Direttorio ascetico, et de nos jours, A. Saudreau, Les degrés de la vie spirituelle.
47. 4° D'autres enfin, comme le P. Alvarez de Paz, S. J. et le P. Le Gaudier, S. J., ont combiné les deux méthodes : tout en exposant longuement et d'une façon dogmatique ce qui concerne la nature de la vie spirituelle et les principaux moyens de perfection, ils ont ensuite appliqué ces principes généraux aux trois voies. Il nous a semblé que, pour répondre au but que nous nous proposons, former des directeurs d'âmes, c'était la meilleure division que nous pussions suivre. Sans doute, avec un plan de ce genre, on n'échappe pas à quelques redites, et l'on est obligé de pratiquer un certain morcelage ; mais ce sont là des inconvénients inhérents à toute division, et auxquels on peut remédier par des renvois aux sujets déjà traités ou à déve- lopper plus tard.

II. Notre plan

48. Nous diviserons notre théologie ascétique en deux parties. Dans la première, qui sera surtout doctrinale, et que nous intitulerons les Principes, nous exposerons l'origine et la nature de la vie chrétienne, la perfection de cette vie, l'obligation de tendre à cette perfection, et les moyens généraux pour y arriver. Dans la seconde, qui sera l'application des principes aux différentes catégories d'âmes, nous suivrons les ascensions progressives d'une âme qui, animée du désir de la perfection, suit successivement les trois voies, purgative, illuminative et unitive. Cette seconde partie, tout en s'appuyant sur la doctrine, sera surtout psychologique.
La première partie éclairera notre marche en nous montrant le plan divin de notre sanctification, stimulera nos efforts en nous rappelant la générosité de Dieu à notre égard, et nous tracera déjà les grandes lignes à suivre pour répondre à cette générosité par le don total de nous-mêmes. La seconde guidera nos pas en exposant en détail les étapes successives à parcourir, avec l'aide de Dieu, pour arriver au but. Ainsi, pensons-nous, se trouveront réunis et conciliés les avantages des autres divisions.

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