Si ce fut toujours un
devoir pour les Pasteurs d’expliquer avec soin ce qui concerne le
sacrement de Confirmation, jamais ce devoir n’a paru plus nécessaire
qu’aujourd’hui, où l’on voit un si grand nombre de Chrétiens, au
sein même de l’Eglise de Dieu, négliger entièrement de le recevoir,
et un si petit nombre s’appliquer à en retirer les fruits salutaires
qu’il peut produire. II faut donc que les Pasteurs instruisent les
Fidèles de sa nature, de son efficacité et de son excellence, soit
au jour de la Pentecôte, qui est le temps principal où on
l’administre, soit à d’autres jours où ils pourront le faire
commodément. Ils doivent leur persuader non seulement de ne point le
négliger, mais encore de le recevoir avec beaucoup de respect et de
piété ; autrement il arriverait, par notre faute et pour notre
malheur, que ce grand bienfait de Dieu nous aurait été accordé en
vain.
§ I. — LA CONFIRMATION EST UN VRAI SACREMENT.
En commençant par le
mot même, on devra dire que l’Eglise a donné le nom de Confirmation
à ce Sacrement, parce que celui qui après son Baptême reçoit de l’Evêque
l’onction du Saint Chrême avec ces paroles sacramentelles « Je
vous marque du Signe de la Croix et je vous confirme par le Chrême
du salut, au nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit »,
reçoit aussi, quand rien n’arrête l’efficacité du Sacrement, une
Vertu nouvelle qui le rend plus fort, et qui en fait un parfait
soldat de Jésus-Christ.
Or que la Confirmation
soit un Sacrement réel et véritable, la sainte Eglise catholique l’a
toujours reconnu ; et le pape Melchiade et plusieurs autres
Souverains Pontifes très anciens, et d’une sainteté éminente, l’ont
enseigné clairement.
S. Clément ne pouvait
pas l’affirmer d’une manière plus positive : « Tous doivent se
hâter, dit-il, de se régénérer en Dieu, et de se faire marquer par
l’Evêque, c’est-à-dire de recevoir la Grâce et les sept Dons du
Saint-Esprit ; autrement, si on néglige de recevoir ce Sacrement,
non par nécessité, mais par mépris et volontairement, il est
impossible que l’on soit parfait Chrétien, comme nous l’apprenons de
Saint Pierre et des autres Apôtres, qui le tenaient de Jésus-Christ
Lui-même. »
Les Papes Urbain,
Fabien, Eusèbe, qui, animés du même esprit, ont répandu leur sang
pour Jésus-Christ, confirment la même vérité par leurs décrétales.
tous les Pères l’ont aussi soutenue.
Saint Denys
l’Aréopagite, évêque d’Athènes, expliquant comment on prépare le
saint Chrême, et la manière de s’en servir, dit : « Les Prêtres
revêtent le nouveau baptisé d’un habit conforme à son innocence, et
le conduisent à l’Evêque. Celui-ci le marque d’une Onction sacrée et
toute divine, et le fait participer de la très sainte Communion. »
Eusèbe de Césarée attribue tant de vertu à ce Sacrement qu’il ne
craint pas de dire que l’hérétique Novat ne peut obtenir le
Saint-Esprit, parce qu’étant malade, quand il reçut le Baptême, il
ne fut pas marqué par le signe du saint Chrême.
Mais les témoignages
les plus formels que nous possédons sur ce point, sont celui de
Saint Ambroise dans le livre qu’il écrivit sur les nouveaux
baptisés, et celui de Saint Augustin dans les traités qu’il composa
contre les lettres du donatiste Pétilien. tous deux étaient si
persuadés de la vérité de ce Sacrement, qu’il l’ont prouvée et
appuyée par plusieurs textes de la Sainte Ecriture. Saint Ambroise
rapporte à la Confirmation ces paroles de l’Apôtre : « ne
contristez pas l’Esprit-Saint de Dieu, dans lequel vous avez été
marqués. » Et Saint Augustin en fait autant des passages
suivants, dont l’un se lit dans les Psaumes : Comme l’huile
répandue sur la tête d’Aaron, et qui coule jusque sur sa barbe ;
et l’autre dans Saint Paul : L’Amour de Dieu a été répandu dans
nos cœur s par le Saint-Esprit qui nous a été donné.
Et quoique le Pape
Melchiade ait dit que le Baptême est intimement lié avec la
Confirmation, il ne faut pas croire pour cela que l’un ne soit pas
tout à fait distinct de l’autre. La différence des grâces que chacun
d’eux communique, les signes sensibles que représentent ces grâces
établissent nettement que ce sont aussi deux Sacrements différents.
Par le Baptême les
hommes sont engendrés à une vie nouvelle ; par la Confirmation au
contraire, déjà engendrés auparavant, ils deviennent des hommes
faits, en laissant ce qui tient de l’enfance ; dès lors, autant il y
a de différence entre la naissance et l’accroissement dans la vie
naturelle, autant il y en a entre le Baptême qui nous régénère
spirituellement et la Confirmation qui nous fait croître, et nous
donne la force parfaite de l’âme.
D’ailleurs, ne
fallait-il pas établir une espèce particulière de Sacrement, là ou
l’âme rencontre une espèce particulière et nouvelle de difficulté ?
Si nous avons d’abord besoin de la grâce du Baptême pour réformer
notre âme par la Foi, n’est-il pas également très convenable que nos
cœur s soient affermis par une autre grâce, afin que rien, ni la
crainte des châtiments, des supplices et de la mort, ne puisse nous
empêcher de confesser la vrai Foi. Or c’est ce dernier effet qui est
produit par la Confirmation.
D’où l’on doit conclure
qu’elle est un Sacrement différent du Baptême. Et voici comment le
Pape Melchiade exprime cette différence d’une manière très précise :
« Au Baptême, dit-il, l’homme est enrôlé dans la milice ; et dans
la Confirmation il est armé pour le combat. Sur les fonts du
Baptême, le Saint-Esprit accorde la plénitude de l’innocence ; et
dans la Confirmation il perfectionne pour conserver la Grâce. Dans
le Baptême nous sommes régénérés pour vivre ; après le Baptême,
confirmés pour combattre. Dans l’un, nous sommes lavés ; dans
l’autre, nous sommes fortifiés. La régénération sauve par et le même
dans la paix ceux qui reçoivent le Baptême, et la Confirmation donne
des armes et prépare les combats. » — Cette Vérité, enseignée
déjà par plusieurs Conciles, a été l’objet d’un décret spécial du
saint Concile de Trente ; de sorte que loin qu’une opinion contraire
soit permise sur ce point, le doute même ne l’est pas. Mais puisque
nous avons dit plus haut combien il est important d’apprendre aux
Fidèles par qui tous les Sacrements en général ont été institués, il
faut faire connaître aussi l’Auteur de la Confirmation. C’est un
moyen de donner une plus haute idée de sa sainteté. Les Pasteurs
enseigneront donc que non seulement Notre-Seigneur Jésus-Christ l’a
instituée, mais qu’Il a déterminé Lui-même, au témoignage du Pape
Saint Fabien, l’usage du saint Chrême, et les paroles que l’Eglise
catholique emploie pour l’administrer. Ils n’auront pas de peine à
en convaincre tous ceux qui voient dans la Confirmation un Sacrement
véritable. En effet, tous les Sacrements sont au-dessus des forces
de la nature, et par conséquent ils ne peuvent avoir pour Auteur que
Dieu seul.
§ II. — MATIÈRE ET FORME DE LA CONFIRMATION.
Voyons maintenant
quelles sont les parties qui composent ce Sacrement, et parlons
d’abord de ce qui en fait la matière.
La matière du Sacrement
de Confirmation s’appelle Chrême. Ce mot tiré du grec, est employé
par les écrivains profanes ; pour désigner toute espèce de parfums.
Mais les Auteurs ecclésiastiques ne l’appliquent communément qu’à
cette composition d’huile et de baume, qui se fait avec la
bénédiction solennelle de l’Evêque. Ainsi, deux choses sensibles
mêlées ensemble sont la matière de ce Sacrement. Et par le mélange
des éléments différents qui la composent, cette matière nous montre
la diversité des dons du Saint-Esprit, communiqués au confirmé. Elle
fait voir très bien également l’excellence de la Confirmation.
L’Eglise, dans ses
Conciles, a toujours enseigné que cette matière était bien telle que
nous venons de la décrire. nous en trouvons la tradition dans les
écrits de Saint Denys, de beaucoup d’autres Pères d’une grande
autorité, et surtout du Pape Saint Fabien, qui assure que
Notre-Seigneur Jésus-Christ a prescrit Lui-même la composition du
baume aux Apôtres, et qu’ils l’on ensuite transmise à l’Eglise.
Il n’y avait en effet
aucune matière plus propre que le saint Chrême à représenter les
effets de la Confirmation. L’huile, qui de sa nature est grasse, qui
coule et se répand facilement, exprime la plénitude de la grâce qui,
par le Saint-Esprit déborde et s’étend de Jésus-Christ notre Chef
sur nous comme ce parfum « qui coule sur la barbe d’Aaron, et
jusque sur ses vêtements ». — Dieu, en effet , a versé
l’huile de joie sur son Fils avec plus d’abondance que sur tous les
autres, et nous avons tous reçu de sa plénitude.
Le baume dont le parfum
est très agréable, signifie la bonne odeur de toutes les vertus que
les Fidèles répandent, après avoir été rendus parfaits par la
Confirmation, et qui leur permet de dire avec Saint Paul : « nous
sommes la bonne odeur de Jésus-Christ devant Dieu ». — Une autre
propriété du baume, c’est de ne pas laisser corrompre les choses qui
en ont été enduites ; ce qui exprime admirablement la vertu du
sacrement de Confirmation, puisqu’il est constaté que les cœur s des
Fidèles, prémunis par la grâce céleste qu’il communique, se
préservent facilement de la contagion du péché.
Quant à la consécration
du saint Chrême, c’est l’Evêque qui la fait avec des cérémonies
solennelles. Et cet usage vient de notre Sauveur Lui-même, qui
l’enseigna et le prescrivit aux Apôtres, dans la dernière Cène. nous
le savons par le pape Fabien, aussi illustre par sa sainteté que par
la gloire de son martyre. Mais d’ailleurs, la raison seule suffirait
pour nous montrer qu’il devait en être ainsi. Pour la plupart des
autres Sacrements, Jésus-Christ a choisi une matière qu’Il avait
sanctifiée Lui-même. Ainsi, il ne s’est pas contenté d’instituer
l’eau pour la matière du Baptême, en disant: « Si quelqu’un
n’est pas régénéré par l’eau et par l’esprit, il ne peut entrer dans
le Royaume de Dieu ; » mais quand il fut baptisé lui-même, Il
communiqua à l’eau la vertu de sanctifier. Ce qui a fait dire à
Saint Jean Chrysostome: « Que l’eau ne pourrait pas effacer les
péchés de ceux qui croient, si elle n’avait été sanctifiée en
touchant le corps de Notre-Seigneur. » Comme donc Il n’a point
consacré Lui-même la matière du Chrême, n’en ayant fait aucun usage,
il était nécessaire qu’elle le fût par des Prières saintes et
sacrées, et qu’une telle consécration fût réservée spécialement à l’Evêque,
qui est le Ministre ordinaire de ce Sacrement.
Après cela il faudra
expliquer la seconde partie de la Confirmation, c’est-à-dire la
forme, ou les paroles qui accompagnent l’onction sainte. Il y aura
lieu d’avertir les fidèles qui doivent recevoir ce Sacrement, que
l’instant où ils entendent prononcer ces paroles est aussi celui où
ils doivent exciter dans leurs cœurs des sentiments de Foi, de
Piété, de Religion, afin qu’il n’y ait rien en eux qui puisse mettre
obstacle à la Grâce. Voici ces paroles qui contiennent la forme
entière de ce Sacrement: « Je vous marque du signe de la Croix,
et je vous confirme par le Chrême du salut, au nom du Père, et du
Fils, et du Saint-Esprit. »
Et il est facile de
montrer par la raison que c’est bien là la forme essentielle. En
effet la forme d’un sacrement doit renfermer tout ce qui peut en
faire connaître la nature et la substance. Or, qu’y-a-t-il de plus
important à remarquer dans la Confirmation ? trois choses: la
Puissance divine qui y opère comme cause principale, la force de
l’esprit et du cœur que l’Onction sainte communique aux Fidèles pour
leur salut, et enfin le signe dont celui qui va entrer dans la
milice chrétienne demeure marqué, ces trois choses sont clairement
exprimées, dans les paroles que nous venons de citer ; la première
dans ces mots qui se trouvent à la fin, au nom du Père, et du
Fils, et du Saint-Esprit ; la seconde dans ceux-ci, placés au
milieu: Je vous confirme par le Chrême du salut ; et la
troisième par ces mots qui sont au commencement: Je vous marque
du Signe de la Croix. Au reste, quand même la raison ne pourrait
pas prouver que telle est la véritable forme du sacrement de
Confirmation, l’autorité de l’Eglise catholique qui a toujours
officiellement enseigné cette doctrine, ne nous permettrait pas
d’avoir le moindre doute sur ce point.
§ III. — DES MINISTRES DE LA CONFIRMATION
Les Pasteurs doivent
enseigner aussi à qui l’administration de ce Sacrement a été plus
spécialement confiée.
« Il y en a
plusieurs, dit le prophète, qui courent sans être envoyés ? »
Il faut donc apprendre au peuple quels sont les Ministres véritables
et légitimes de la Confirmation, afin qu’il puisse en recevoir la
grâce et les effets. Or, d’après la Sainte Écriture, l’Evêque seul
est le Ministre ordinaire de ce Sacrement. nous lisons dans les
Actes des Apôtres, que les habitants de Samarie, ayant reçu la
parole de. Dieu, on leur envoya « Pierre et Jean qui prièrent
pour eux, afin qu’ils reçussent le Saint-Esprit ; car Il n’était pas
encore descendu sur aucun d’eux, et ils n’avaient reçu que le
Baptême » On peut voir par ce passage que celui qui les avait
baptisés, n’étant que Diacre, n’avait pas le pouvoir de confirmer et
que cette Fonction était réservée à des Ministres d’un ordre
supérieur, c’est-à-dire aux Apôtres. On pourrait faire la même
observation partout où l’Ecriture fait mention de ce Sacrement.
Les témoignages des
saints Pères et des Souverains Pontifes ne manquent pas non plus
pour prouver cette vérité. nous en trouvons de très clairs dans les
décrets des Papes Urbain, Eusèbe, Damase, Innocent et Léon. Saint
Augustin en particulier se plaint fortement de la coutume tout -à
-fait abusive de l’Egypte et d’Alexandrie, où les Prêtres avaient la
témérité d’administrer la Confirmation.
Voici une comparaison
que les Pasteurs pourront employer pour faire comprendre combien il
était raisonnable et légitime de réserver aux Evêques cette
fonction. Quand on élève un édifice, les ouvriers, qui sont comme
des ministres inférieurs, préparent et disposent le ciment, la
chaux, le bois et tous les autres matériaux ; mais c’est à
l’architecte qu’il appartient de mettre la dernière forme et la
perfection à l’ouvrage. De même aussi ce Sacrement, qui est comme le
couronnement de l’édifice spirituel du salut, devait être administré
par l’Evêque, comme souverain Prêtre, et non par d’autres ministres
inférieurs. -Pour la Confirmation, comme pour le Baptême, on prend
aussi un Parrain. Si ceux qui exercent le métier de gladiateurs ont
besoin d’un maître, dont la science et les conseils leur apprennent
à diriger une attaque, et à porter des coups pour abattre leurs
adversaires, sans se laisser blesser eux-mêmes, combien, à plus
forte raison, les Fidèles n’ont-ils pas besoin d’un chef qui les
guide et qui les instruise, lorsqu’ils ont été couverts et revêtus
des armes puissantes que donne la Confirmation, et qu’ils sont
descendus dans cette arène spirituelle où le salut éternel est en
jeu ? C’est donc avec raison que l’on fait venir des Parrains pour
l’administration de ce Sacrement. Ils contractent les mêmes
affinités que les Parrains de Baptême, et le mariage leur est
interdit avec les mêmes personnes. (Voir au chapitre du Baptême, ce
que nous avons dit sur ce même point.)
§ IV. — NÉCESSITÉ DE LA CONFIRMATION.
Il arrive souvent que
les Fidèles apportent trop de précipitation, ou une molle
insouciance et une lenteur paresseuse à recevoir ce Sacrement.
(Quant à ceux qui sont tombés assez bas dans l’impiété pour le
mépriser et s’en moquer, nous n’avons point à nous en occuper ici.)
Les Pasteurs auront donc soin de dire qui sont ceux à qui on doit
donner la Confirmation, à quel âge, et avec quelles dispositions il
convient de la recevoir. Et d’abord ils apprendront aux Fidèles que
ce Sacrement n’est pas d’une nécessité absolue qu’il soit impossible
de se sauver sans lui. Mais quoiqu’il ne soit pas nécessaire,
personne cependant ne doit s’en abstenir ; loin de là ; il faut
craindre au contraire, clans une chose si sainte qui nous communique
d’une manière si abondante les dons de Dieu, de commettre la moindre
négligence. Ce que Dieu a établi pour la sanctification de tous,
tous doivent aussi le rechercher avec le plus grand empressement.
Saint Luc, racontant
l’effusion miraculeuse du Saint-Esprit au jour de la Pentecôte,
s’exprime ainsi: « II se fit tout à coup dans le ciel comme le
bruit d’un vent violent qui approchait et qui remplit toute la
maison ; » — puis, peu après, il ajoute que « tous furent
remplis du Saint-Esprit ». Or, il est permis de conclure de ces
paroles que cette maison étant l’image et la figure de l’Eglise,
tous les Fidèles ont droit au sacrement de Confirmation dont la
première application date de ce jour.
La même conclusion se
tire encore sans peine de la nature même du Sacrement. Ceux-là en
effet doivent être confirmés par le saint Chrême, qui ont besoin de
croître spirituellement, et de tendre à la perfection chrétienne. Or
tous les Fidèles sont évidemment dans ce cas. De même que le but de
la nature est de donner l’accroissement à ceux qui naissent et de
les amener à l’âge parfait, quoiqu’elle n’y réussisse pas toujours ;
ainsi l’Eglise catholique, notre mère commune, désire ardemment que
le Chrétien parfait se forme et s’achève dans ceux qu’elle a
régénérés par le Baptême. Or cet effet ne peut se produire que par
le sacrement de Confirmation ; dès lors il est manifeste que ce
Sacrement doit être reçu par tous.
Mais ici il y a une
observation à faire. tous ceux qui sont baptisés peuvent être
confirmés ; cependant il ne convient pas d’administrer ce Sacrement
à ceux qui n’ont pas encore l’usage de la raison ; et si l’on ne
croit pas qu’il soit nécessaire d’attendre l’âge de douze ans, au
moins est-il convenable de ne pas l’administrer avant l’âge de sept
ans. D’ailleurs la Confirmation n’a pas été instituée comme chose
nécessaire au salut, mais pour nous donner le courage et les armes
dont nous avons besoin, dans les combats qu’il nous faut soutenir
pour la Foi de Jésus-Christ. Or les enfants qui n’ont pas l’âge de
raison, ne soutiennent pas encore ces sortes de combats.
Il faut conclure de ce
que nous venons de dire, que ceux qui, parvenus à l’âge adulte,
veulent être confirmés, ne peuvent obtenir la grâce et les effets du
Sacrement, qu’autant qu’ils apportent à sa réception la Foi et la
Piété, et surtout qu’ils se repentent sincèrement des fautes graves
qu’ils ont commises. Les Pasteurs travailleront donc à les faire
confesser auparavant, ils les exhorteront à jeûner, à pratiquer
d’autres œuvres de piété, et à se conformer à la louable,
coutume de la primitive Eglise, en recevant la Confirmation à jeun.
Et il sera facile d’obtenir tout cela des Fidèles, si on leur fait
bien comprendre les effets admirables de ce Sacrement, et les grâces
qu’il nous apporte.
§ V. — DES EFFETS DU SACREMENT DE
CONFIRMATION.
On leur apprendra donc
que la Confirmation a cela de commun avec les autres Sacrements,
qu’elle donne une grâce nouvelle, si elle ne trouve aucun
empêchement dans celui qui la reçoit. nous l’avons démontré plus
haut: tous les Sacrements sont des signes mystiques et sacrés, qui
signifient et produisent tout à la fois la Grâce sanctifiante. Ainsi
la Confirmation remet et pardonne les péchés, puisqu’il est
impossible de supposer un instant la grâce avec le péché. Mais outre
ces effets qui sont ceux de tous les Sacrements en général, la
Confirmation a d’abord cela de particulier, qu’elle perfectionne la
grâce du Baptême. Ceux qui sont devenus Chrétiens par le Baptême
demeurent encore faibles et sans énergie, comme des enfants
nouvellement nés, mais ensuite le sacrement du saint Chrême les rend
plus forts pour résister aux attaques de la chair, du monde et du
démon ; il fortifie la foi dans leurs cœur », pour qu’ils puissent
confesser et glorifier le nom de notre Seigneur Jésus-Christ ; et
c’est pour cela sans doute que ce Sacrement a reçu le nom de
Confirmation.
Car il ne faut pas
croire, comme quelques-uns l’ont supposé avec autant d’ignorance que
d’impiété, que ce mot de Confirmation vienne de ce qu’autrefois ceux
qui avaient été baptisés dans leur enfance étaient conduits à l’âge
adulte devant l’Evêque pour confirmer en sa présence la profession
de Foi qu’ils avaient faite au Baptême ; autrement il faudrait dire
qu’il n’y avait aucune différence entre la Confirmation et
l’instruction que l’on faisait aux Catéchumènes ; ce qui ne peut se
soutenir par aucun témoignage certain. non ; la Confirmation tire
son nom de ce que Dieu, par la vertu de ce Sacrement, confirme en
nous ce que le Baptême a commencé d’y produire, et nous conduit à la
perfection de la Vie chrétienne. Et non seulement ce Sacrement
confirme en nous la Grâce, mais il l’augmente encore. Le Pape
Melchiade nous l’assure en ces termes: « l’Esprit Saint, en
descendant sur les eaux du Baptême, les rend salutaires, et leur
communique la plénitude de la Grâce pour réparer l’innocence de
l’homme ; mais par la Confirmation Il donne une augmentation de
grâce. » Et non seulement Il l’augmente, mais II l’augmente
d’une manière admirable. C’est ce que l’Ecriture a parfaitement
exprimé par l’image d’un vêtement nouveau, dans ces paroles de notre
Sauveur à ses Apôtres : « Demeurez dans la ville, jusqu’à ce que
vous soyez revêtus de la Vertu d’en haut. »
Si les Pasteurs veulent
faire connaître la divine efficacité de ce Sacrement (et rien
assurément ne sera plus propre à toucher le cœur des Fidèles) il
leur suffira d’expliquer ce qui arriva aux Apôtres. Avant la
Passion, et à l’heure même de la Passion, ils étaient si timides et
si faibles, qu’ils prirent la fuite aussitôt qu’ils virent arrêter
Jésus-Christ. Pierre lui-même, qui avait été désigné pour être la
pierre fondamentale de l’Eglise, qui avait montré d’ailleurs
beaucoup de courage et de grandeur d’âme, Pierre s’effraye à la voix
d’une simple femme, et soutient non pas une fois, ni deux, mais
trois fois de suite, qu’il n’est point le disciple de Jésus-Christ.
tous enfin, après la Résurrection, se retirent dans une maison et
s’y renferment par la crainte qu’ils ont des Juifs. Le jour de la
Pentecôte, au contraire ils sont tellement remplis de la vertu du
Saint-Esprit, qu’ils se mettent à prêcher hardiment, et en toute
liberté, l’Evangile qui leur a été confié non seulement aux Juifs,
mais à l’univers tout entier, et qu’ils ne trouvent pas de plus
grand bonheur que « celui d’être jugés dignes de souffrir pour le
nom de Jésus-Christ, les affronts, » la prison, les tourments et
les croix.
Enfin la Confirmation a
la vertu d’imprimer un caractère qui fait qu’on ne peut la recevoir
plus d’une fois, ainsi que nous l’avons déjà dit du Baptême, et
comme nous le dirons encore plus au long, en parlant du sacrement de
l’Ordre.
Si les Pasteurs
expliquent souvent, et avec soin, ces vérités aux Fidèles, il est
impossible que, après avoir connu l’excellence et l’utilité de ce
Sacrement, ils ne s’empressent pas de le recevoir avec beaucoup de
zèle, de piété, et de foi.
§ VI. — DES CÉRÉMONIES DU SACREMENT DE
CONFIRMATION
Il nous reste
maintenant à dire quelques mots des rites et des cérémonies de l’Eglise
dans l’administration de ce Sacrement. Les Pasteurs. comprendront
très bien les avantages de ces sortes d’explications, s’ils veulent
se rappeler ce que nous avons dit plus haut en traitant ce sujet.
D’abord les personnes
que l’on confirme reçoivent sur le front l’onction du saint Chrême.
Par la vertu de ce Sacrement le Saint-Esprit se répand dans le cœur
des Fidèles ; Il augmente leur force et leur courage, afin qu’ils
puissent combattre vaillamment dans la lutte spirituelle, et
résister invinciblement aux ennemis du salut. L’onction faite sur le
front marque qu’ils ne doivent jamais être empêchés de confesser
librement la foi du nom Chrétien, ni par la crainte, ni par la
honte, parce que c’est sur le front que se manifestent le plus
sensiblement ces diverses affections de l’âme.
D’ailleurs cette marque
qui distingue un Chrétien confirmé de ceux qui ne le sont pas, comme
certains insignes distinguent un soldat des autres, devait être
imprimée sur la partie la plus noble et la plus visible du corps,
qui est le front.
Il est encore un usage
religieusement conservé dans l’Eglise de Dieu, c’est d’administrer
la Confirmation de préférence le jour de la Pentecôte. C’est surtout
en ce jour que la vertu du Saint-Esprit fortifia et confirma les
Apôtres ; et le souvenir de cet événement miraculeux fait très bien
comprendre aux Fidèles la grandeur et l’excellence des Mystères qui
sont renfermés dans l’onction sacrée.
L’onction étant faite,
et la Confirmation donnée, l’Evêque frappe légèrement avec la main
la joue du nouveau confirmé pour lui faire entendre que, comme un
athlète généreux, il doit être prêt à souffrir avec un courage
invincible toutes les contradictions, pour le nom de Jésus-Christ.
Enfin il lui donne la
Paix, pour lui rappeler qu’il vient de recevoir la plénitude de la
grâce divine, et « cette paix qui surpasse toutes nos pensées
».
Telles sont, en abrégé,
les Vérités que les Pasteurs doivent enseigner sur le Sacrement de
Confirmation, non pas d’une manière sèche et nue, et uniquement en
paroles, mais avec le zèle d’une piété capable d’enflammer les
cœurs: De cette manière ils réussiront à les imprimer profondément
dans l’esprit des Fidèles.
|