QUE VOTRE ROYAUME ARRIVE
§ I. — DU ROYAUME DE DIEU.
Le royaume de Dieu, qui
fait l’objet de cette seconde demande, est le but et la fin de toute
la Prédication Évangélique. C’est par là que Saint Jean Baptiste
commença à prêcher la Pénitence. « Faites pénitence,
disait-il , parce que le Royaume des cieux est proche. » Ce
fut aussi le commencement de la Prédication du Sauveur du monde. Et
lorsque, dans cet admirable Sermon sur la Montagne, Il montre à ses
disciples les voies de la béatitude, II leur parle d’abord du
Royaume des cieux comme du sujet fondamental de son discours. « Bienheureux
les pauvres en esprit, dit-Il , parce que le Royaume des
cieux leur appartient. » Bien plus, un jour que la foule voulait
Le retenir, voici la raison qu’Il donne de la nécessité de son
départ: « il faut que J’annonce aussi le Royaume de Dieu aux
autres villes, car Je suis envoyé pour cela. » Plus tard, c’est
encore ce même Royaume qu’Il ordonne à se Apôtres de prêcher ; et à
celui qui voulait aller enseveli son père: « allez, dit-Il,
et annoncez le Royaume de Dieu ». Et après sa Résurrection,
pendant ces quarante jours où II apparaît à ses Apôtres, c’est du
Royaume d Dieu qu’Il leur parle.
Les Pasteurs voudront
donc expliquer cette second demande avec tout le soin possible, afin
que les Fidèle en comprennent bien l’importance et la nécessité.
Et pour atteindre ce
but, ils pourront se servir avec habileté et profit de cette
considération si frappante, à savoir que Notre-Seigneur Jésus-Christ
a voulu et ordonné formellement que cette demande, quoique liée avec
les autres, en fût séparée et distincte dans son expression, et cela
afin de nous faire désirer et rechercher plus ardemment ce que nous
demandons. Il nous dit en effet: « Cherchez d’abord le Royaume
de Dieu et sa justice, et tout le reste vous sera donné par
surcroît. »
§ II. — CE QUI EST COMPRIS DANS CETTE
DEMANDE.
Les dons célestes
compris dans cette demande sont si précieux et si abondants qu’ils
embrassent même tout ce qui est nécessaire pour soutenir la vie du
corps aussi bien que celle de l’âme. trouverions-nous digne du nom
de roi, celui qui n’aurait aucun souci du bien et du salut de l’Etat ?
Mais si les hommes ont tant de sollicitude pour garder un royaume
terrestre, avec quelle vigilance, quelle paternelle Providence ne
devons-nous pas croire que le Roi des rois s’occupe de la vie et du
salut de ses créatures ?
En demandant le Royaume
de Dieu, nous réclamons donc par le fait tout ce dont nous avons
besoin dans notre pèlerinage, ou plutôt dans notre exil. Et notre
Prière s’appuie sur cette promesse si consolante et si positive du
Seigneur: « et tout le reste vous sera donné par surcroît. »
De telles paroles
prouvent bien que Dieu est vraiment le Roi du genre humain, et qu’Il
répand sur lui tous ses biens en abondance et avec libéralité. Et
c’est précisément la pensée de cette infinie Bonté de Dieu qui
mettait sur les lèvres de David ce chant de reconnaissance: « Le
Seigneur est mon Roi, et rient ne me manquera. »
Mais, (ne l’oublions
pas), ce n’est pas assez de demander instamment le Royaume de Dieu,
il faut encore joindre à cette demande tous les moyens nécessaires
pour le chercher et pour le trouver. Hélas ! les cinq vierges
folles, elles aussi, le demandaient avec instance: « Seigneur,
Seigneur, ouvrez-nous ! » et cependant, parce qu’elles n’avaient pas
tout ce qu’il fallait, pour accompagner leur Prière, et être
exaucées, elles ne furent point admises. Et ce ne fut point une
injustice. Car c’est Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même qui a
prononcé cette sentence: « Tous ceux qui me disent: Seigneur,
Seigneur, n’entreront point dans le Royaume des cieux. »
§ III. — DES MISÈRES DE CETTE VIE.
Les Prêtres chargés du
soin des âmes, (les Curés), ne manqueront pas de puiser en abondance
aux sources fécondes de nos Saints Livres, les vérités les plus
propres à exciter dans le cœur des Fidèles le désir et le goût du
Ciel. En même temps ils auront soin de mettre sous leurs yeux les
accablantes misères de notre vie mortelle, et ils feront en sorte de
les toucher assez pour qu’ils se recueillent, qu’ils rentrent en
eux-mêmes et qu’ils se souviennent que le ciel, la maison de Dieu,
la maison de leur Père est le séjour du bonheur suprême, et la
possession des biens infinis.
Ici-bas, en effet, nous
ne sommes que des exilés. nous habitons la même terre que les
démons, animés contre nous d’une haine que rien ne peut apaiser, nos
implacables et éternels ennemis.
Et que dire de ces
combats domestiques, de ces luttes intérieures que se livrent sans
cesse en nous le corps et l’âme, la chair et l’esprit ? Combats
terribles où nous avons toujours à craindre de succomber, où nous
succomberions même sur le champ, si la main du Seigneur n’était pas
là pour nous défendre. Ah ! certes, l’Apôtre Saint Paul sentait bien
tout le poids de ces misères, quand il s’écriait: « Malheureux
homme que je suis ! qui me délivrera de ce corps de mort ? »
Ces misères de notre
race, déjà si sensibles par elles-mêmes, ressortent bien plus
vivement encore de la comparaison de notre état avec celui des
autres créatures. Que ces créatures en effet soient privées de
raison ou même de sentiment, il est bien rare que quelques-unes
d’entre elles s’éloignent assez des actions, des sentiments et des
mouvements qui leur sont propres, pour manquer la fin qui leur a été
assignée. La chose est si évidente dans les animaux terrestres, dans
les poissons et dans les oiseaux, qu’elle n’a besoin d’aucune
explication. Que si nous portons nos regards vers le ciel, ne
sentons-nous pas aussitôt la vérité de ce Cantique de David: « Votre
Parole, Seigneur, demeure à jamais dans le ciel. » Le ciel, en
effet, est emporté par un mouvement qui ne s’arrête jamais ; mais ce
mouvement est si constant et si réglé, qu’il ne sort jamais de la
ligne que Dieu lui a tracée. Si nous regardons la terre et tout le
reste de l’univers, nous reconnaîtrons aisément qu’ils n’éprouvent
point d’altération dans leur état.
Mais que la misère de
l’homme est grande ! que ses chutes sont profondes et fréquentes !
s’il conçoit de bons projets, rarement il les exécute. Souvent il
abandonne et méprise le bien qu’il vient de commencer. Ce qui lui
plaisait tout à l’heure et lui semblait excellent, lui déplait tout
à coup. Il le rejette, et se laisse entraîner aux résolutions
honteuses et nuisibles.
Quelle est donc la
cause de cette inconstance et de cette misère ? Evidemment c’est le
mépris de l’inspiration divine. nous fermons l’oreille aux
avertissements que Dieu nous donne ; nous refusons d’ouvrir les yeux
aux lumières surnaturelles qu’Il nous offre, et nous n’écoutons
point les préceptes salutaires de notre Père du ciel.
Ici donc les Pasteurs
devront s’appliquer à mettre sous les yeux des Fidèles ce tableau
des misères humaines. Ils tâcheront d’en expliquer les causes et
d’en indiquer les remèdes. Ce qui leur sera facile, s’ils ont soin
d’aller puiser ;dans les œuvres des grands docteurs Saint
Jean Chrysostome et Saint Augustin, et surtout dans ce que nous
avons dit nous-mêmes en parlant du symbole des Apôtres. Car ces
vérités une fois connues, quel est l’homme si coupable et si pervers
qui ne voudrait s’efforcer avec la Grâce prévenante de Dieu, et
l’exemple de l’enfant prodigue, de se lever et de revenir avec
confiance se jeter entre les bras de son Roi, de son Père céleste ?
§ IV. — QUEL EST L’OBJET DE LA DEUXIÈME
DEMANDE
Après avoir montré par
ces explications tous les avantages que renferme cette Prière des
Fidèles, les Pasteurs feront voir ensuite ce que nous demandons par
ces paroles ; que votre Royaume arrive. Elles ont plusieurs
significations différentes, dont la détermination sera très utile
pour comprendre les autres passages de la Sainte Ecriture, et
nécessaire spécialement pour celui qui nous occupe. Or, la première
signification du Royaume de Dieu — signification ordinaire et
fréquente dans nos Saints Livres — c’est d’exprimer non seulement ce
pouvoir que Dieu exerce sur tous les hommes et sur tout l’univers,
mais encore cette Providence spéciale par laquelle Il dirige et
gouverne toutes choses. « Il tient dans ses mains, dit le
Prophète, la terre avec. ses extrémités les plus reculées. »
Ce qu’il faut entendre même des choses cachées dans les profondeurs
de la terre et dans toutes les parties du monde les plus secrètes.
C’est d’après cette idée que Mardochée disait: « Seigneur Dieu,
roi très puissant, toutes choses sont en votre Puissance, et il
n’est personne qui puisse résister à votre Volonté. Vous êtes maître
de tous, et rien ne résiste à votre Majesté. »
En second lieu ces mots
de Royaume de Dieu signifient cette Providence particulière
et très spéciale, par laquelle Dieu prend soin des hommes pieux et
fidèles, et les couvre de sa protection: Providence admirable et
unique, qui faisait dire à David: « Le Seigneur prend soin de
moi et rien ne me manquera ; » et au Prophète Isaïe: « Le
Seigneur est notre roi, il nous sauvera. »
Or, quoique Dieu exerce
son pouvoir en ce monde sur les saints et les gens de bien,
cependant Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même avertit Pilate que
son Royaume n’est pas de ce monde, c’est-à-dire qu’Il ne tire
nullement son origine de ce monde qui a été créé et qui est
périssable, et qu’Il ne domine point à la façon des empereurs, des
rois, des républiques, des présidents et de tous ceux que le vœu
général ou l’élection appelle à gouverner les états et les
provinces, ou qui s’emparent du pouvoir par la force et par la
violence. non, Notre-Seigneur Jésus-Christ, c’est Dieu qui l’a
établi Roi, dit le Prophète, et au témoignage de l’Apôtre, son
Royaume est la justice, car il dit: « Le Royaume de Dieu, c’est
la justice, la paix et la joie dans le Saint Esprit. »
Or, Jésus-Christ règne
en nous par les Vertus intérieures de la Foi, de l’Espérance et de
la Charité. C’est par ces Vertus que nous devenons en quelque sorte
partie de ce Royaume, et en même temps, les sujets privilégiés de
Dieu. Elles nous consacrent à son culte et à son service, de telle
sorte que si l’Apôtre Saint Paul a pu dire: « Je vis, ou plutôt
ce n’est plus moi qui vis, c’est Jésus-Christ qui vit en moi, »
chacun de nous peut dire aussi: « Je règne, ou plutôt, ce n’est
pas moi qui règne, c’est Jésus-Christ qui règne en moi. »
Ce Royaume est appelé
la justice, parce qu’il est fondé sur la justice de Jésus-Christ.
C’est de lui que le Sauveur parle dans Saint Luc, quand Il dit: « Le
Royaume de Dieu est au dedans de vous. »
Quoique Notre-Seigneur
Jésus-Christ règne par la Foi en tous ceux que l’Eglise, notre très
sainte Mère, regarde comme ses enfants, cependant II est plus
spécialement le Roi de ceux qui, remplis des dons de la Foi, de
l’Espérance et de la Charité, sont devenus en quelque sorte comme
des membres vivants et sanctifiés de Dieu Lui-même. C’est dans ces
parfaits Chrétiens que règne vraiment la Grâce de Dieu.
Le Royaume de Dieu est
encore le royaume de la Gloire. C’est de lui que Notre-Seigneur
parle dans Saint Matthieu, lorsqu’Il dit: « Venez, les bénis de
mon Père, possédez le Royaume qui vous a été préparé dés le
commencement du monde. » C’est ce Royaume aussi que le larron
pénitent demandait à Jésus sur la croix, en disant « Souvenez-vous
de moi quand Vous serez dans votre Royaume. » Et les paroles
suivantes de Saint Jean se rapportent au même objet: « Si
quelqu’un ne renaît de l’eau et de l’Esprit, il ne saurait entrer
dans le royaume de Dieu. »
C’est également la
pensée de Saint Paul dans ce passage de son Epître aux Ephésiens:
« Ni les impudiques, ni les avares (qui sont des idolâtres) n’ont
point d’héritage dans le Royaume de Jésus-Christ et de Dieu. »
Il faut encore entendre dans le même sens quelques-unes des
paraboles de Notre-Seigneur Jésus-Christ, lorsqu’Il parlait du
Royaume des cieux.
Mais il est nécessaire
que le Règne de la Grâce soit d’abord établi dans nos âmes. Car il
est impossible de régner un jour dans la Gloire, si l’on n’a eu
soin, tout d’abord de faire régner la Grâce en soi-même. Or, la
Grâce, au témoignage de Notre-Seigneur Lui-même , « est une
source d’eau vive qui jaillit jusqu’à la Vie Eternelle »
La Gloire, elle, n’est
autre chose que la Grâce consommée, et portée à sa perfection.
Tant que nous sommes
revêtus de ce corps fragile et mortel, tant que nous vivons dans les
ténèbres d’ici-bas, pèlerins, exilés, errants, sans forces et loin
de Dieu, on nous voit souvent, hélas ! faillir et tomber, parce que
nous repoussons le secours de la Grâce d’en haut, qui nous
soutenait. Mais lorsque la lumière du royaume de la Gloire, qui est
le Royaume parfait, aura brillé à nos yeux, nous serons à jamais
fermes et invariables dans le bien et la perfection. tous les vices
et toutes les incommodités auront cessé. notre faiblesse sera
changée en une force inaltérable. Dieu, enfin, Dieu Lui-même régnera
dans notre âme et dans notre corps, comme nous l’avons expliqué avec
les développements convenables dans le symbole des Apôtres, en
parlant de la Résurrection de la chair.
Telles sont les
différentes significations de ces mots Royaume de Dieu.
Voyons maintenant à quoi tend particulièrement cette demande.
Premièrement nous
demandons à Dieu que le Royaume de Jésus-Christ, qui est l’Eglise,
s’étende au loin ; que les infidèles et les Juifs se convertissent à
la Foi chrétienne et à la connaissance du vrai Dieu ; que les
schismatiques et les hérétiques rentrent en eux-mêmes et reviennent
à la Communion de l’Eglise dont ils se sont séparés, afin que soit
accomplie et réalisée cette parole du Seigneur dans le Prophète
Isaïe: « Elargis l’enceinte de ton pavillon, et développe les
voiles de tes tentes ; allonge tes cordages ; affermis tes pieux ;
tu pénétreras à droite et à gauche, parce que Celui qui t’a créé
sera ton Seigneur »: et celle-ci: « Les nations marcheront à
ta lumière, et les rois d l’éclat de ta splendeur. Lève les yeux
autour de toi, et vois: tous ces peuples s’avancent vers toi ; tes
fils viendront de loin ; tes filles s’élèveront à tes côtés. »
Mais il y a dans l’Eglise
des Chrétiens qui confessent Dieu de bouche, et qui Le renient par
leurs œuvres, des Chrétiens, dont la Foi est défigurée et
morte, en qui le démon habite, par suite de leurs péchés, et règne
dans sa propre maison. nous demandons que le Royaume de Dieu leur
arrive aussi, afin que, s’arrachant aux ténèbres du mal, et éclairés
par la Lumière divine, ils soient rétablis dans leur première
dignité d’enfants de Dieu ; nous demandons que le Père céleste, en
chassant de son Royaume les hérésies, les schismes, le péché et
toutes les causes du péché, nettoie l’aire de son Eglise, et
lui permette de jouir d’une paix douce et tranquille, en servant
Dieu dans la piété et l’innocence.
Nous demandons, enfin,
que Dieu vive et règne seul en nous, afin que la mort n’ait plus sur
nous aucun droit, qu’elle soit observée par la victoire de
Notre-Seigneur Jésus-Christ, et qu’ainsi, après avoir renversé et
anéanti l’autorité, la domination et la puissance de ses ennemis, II
demeure le seul et unique Souverain de toutes choses.
Les Pasteurs ne
manqueront pas d’apprendre aux Fidèles quel est l’esprit et le sens
de cette demande, et par suite avec quelles pensées et quelles
dispositions ils doivent adresser à Dieu cette Prière. Ils les
exhorteront d’abord à bien peser toute la force et la portée de
cette parabole du Sauveur: « Le Royaume des cieux est semblable
à un trésor caché dans un champ. Un homme vient-il à le trouver, il
le cache de nouveau, et dans sa joie, il s’en va, vend tout ce qu’il
possède et achète ce champ. » Ainsi celui qui connaîtra les
richesses de Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour elles, méprisera tout
le reste. Biens, fortune, puissance, tout sera vil à ses yeux. Rien
ne saurait être comparé à ce souverain Bien, ou plutôt rien ne
saurait tenir devant Lui. C’est pourquoi ceux qui auront le bonheur
de connaître ces richesses du Royaume de Dieu, s’écrieront avec
l’Apôtre: « Je me suis dépouillé de tout, je fais cas de toutes
choses comme de la boue, pour gagner Jésus-Christ. » C’est la
perle précieuse de l’Evangile. Celui qui aura dépensé pour l’acheter
tout l’argent qu’il avait retiré de la vente de tous ses biens
jouira d’un bonheur éternel. Heureux serions-nous, si Notre-Seigneur
Jésus-Christ daignait nous éclairer assez pour faire voir cette
perle de la Grâce divine, par laquelle Il règne en tous ceux qui Lui
appartiennent ! nous serions prêts à tout vendre et à tout donner,
jusqu’à nous-mêmes, pour l’acquérir et pour la conserver. C’est
alors que nous pourrions dire, sans la moindre crainte: « Qui
pourra nous séparer de la Charité de Jésus-Christ ? » Que si
nous voulons savoir quelle est l’excellence de la gloire du Royaume
céleste, et combien elle l’emporte sur tout le reste, écoutons ce
que dit le Prophète Isaïe, et après lui l’Apôtre Saint Paul: « L’œil
n’a point vu, l’oreille n’a point entendu, le cœur de l’homme n’a
jamais conçu ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment. »
§ V. — DANS QUELS SENTIMENTS IL FAUT FAIRE
CETTE DEMANDE.
Mais pour obtenir plus
sûrement l’effet de notre demande, il sera très utile de nous redire
à nous-mêmes qui nous sommes, c’est-à-dire les enfants d’Adam, trop
justement chassés du paradis, condamnés à l’exil, et dignes par nos
misères et nos péchés, de toute la haine de Dieu et des éternels
supplices. Alors nous nous tiendrons dans l’abaissement et
l’abjection. notre Prière sera pleine d’humilité. nous nous
défierons de nous-mêmes, pour nous jeter, comme le Publicain de l’Evangile,
dans le sein de la Miséricorde de Dieu. nous rapporterons tout à sa
Bonté, et nous lui rendrons d’immortelles actions de grâces, d’avoir
bien voulu « nous donner son esprit dans lequel nous avons la
confiance de crier: Père, Père ! »
Nous cherchons ensuite
à bien connaître ce qu’il faut faire et ce qu’il faut éviter pour
parvenir au Royaume céleste. Car Dieu ne nous a pas appelés à
l’oisiveté et à la paresse ; Il nous dit au contraire: « Le
Royaume des cieux souffre violence, et ce sont les violents qui
l’emportent. » Et ailleurs: « Si vous voulez entrer dans la
vie, gardez les Commandements. »
Ce n’est donc point
assez de demander le Royaume de Dieu, si en même temps on ne
travaille avec soin et avec zèle à le mériter. Il faut aider la
grâce, et devenir les coopérateurs de Dieu dans la route à suivre
pour arriver au ciel. Dieu ne nous abandonne jamais. Il nous a
promis d’être toujours avec nous. A nous de prendre garde de ne
point quitter Dieu et de ne point nous abandonner nous-mêmes. Dieu a
mis dans son Eglise, qui est son Royaume ici-bas, tout ce qui est
nécessaire pour protéger notre vie mortelle et assurer notre Salut
éternel: et ces légions d’Anges invisibles, et ce trésor visible des
Sacrements, si riches en grâces célestes. Avec de tels secours, que
la bonté de Dieu nous a ménagés, non seulement nous n’avons rien à
craindre de la puissance de nos ennemis acharnés, mais même nous
pouvons terrasser le tyran des enfers et le fouler aux pieds avec
ses cruels satellites.
Demandons donc très
instamment au Saint Esprit qu’Il nous enseigne à faire toutes choses
selon sa volonté ; qu’Il détruise l’empire de Satan, afin qu’au
dernier jour il n’ait aucun pouvoir sur nous. Demandons que
Jésus-Christ soit vainqueur, et qu’Il triomphe ; que ses lois soient
en vigueur par toute la terre, que ses décrets soient partout
exécutés, qu’il n’y ait ni traître ni déserteur parmi les siens, et
que tous se montrent tels qu’ils puissent se présenter avec
confiance devant Dieu leur Souverain, et entrer ensuite en
possession du Royaume céleste qui leur a été préparé de toute
éternité, et où ils jouiront avec Jésus-Christ d’un bonheur qui
n’aura point de fin.
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