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Que conclure ?

Une étude, même partielle, de la vie et de la sainteté de Mère Marie-Catherine de Saint-Augustin, non seulement ne laisse pas indifférent, mais elle éveille aussi une certaine perplexité. Les avis et les convictions très favorables de tous ceux qui l'ont connue conduisent à penser: oui, Marie-Catherine de Saint-Augustin est vraiment une sainte. Alors pourquoi la lecture de la biographie écrite par le Père Ragueneau, son directeur, éveille-t-elle un certain malaise? Et pourquoi fallut-il attendre plus de trois siècles pour béatifier une sainteté incontestable? Serait-ce la présence constante des démons autour de Catherine, et des attaques redoutables qu'elle eut à subir d'eux, présence sur laquelle le Père Ragueneau insiste tant, peut-être trop? Probablement. C'est pourquoi nous allons nous efforcer d'apporter plusieurs réponses.

Nous avons vu plus haut que les autochtones du pays d'adoption de Catherine étaient des adeptes fervents de la sorcellerie. Par ailleurs, de nombreux colons, venant des campagnes françaises, étaient pour la plupart imprégnés par les superstitions nombreuses à l'époque. Pour le Père Ragueneau, la présence active des démons dans une vie qui recherchait la sainteté était presque normale. Par ailleurs, les contemporains de Catherine eurent à souffrir de certains cas avérés de possessions diaboliques; cela ne pouvait manquer de troubler certains esprits faibles. Pourtant ce n'était pas le cas de Mère Marie-Catherine de Saint-Augustin, très intelligente et remarquablement équilibrée.

Un autre point très important doit être abordé: personne, du vivant de Catherine, même au sein de sa communauté, ne s'aperçut des terribles combats que Catherine dut mener, ni des grâces exceptionnelles qu'elle connut. Seuls le Père Ragueneau et les confesseurs de Catherine, y compris Mgr de Laval, étaient au courant. Liés par le secret de la confession, ils ne pouvaient rien révéler. Pour les autres, Catherine était une religieuse ordinaire, certes très dévouée, toujours disponible et souriante malgré des souffrances physiques incontestablement visibles. Mais elle ne faisait que remplir ses fonctions et tous ses devoirs de religieuse, d'une manière aussi parfaite que possible. Et les laïcs avec qui elle devait constamment travailler en raison de sa charge de dépositaire, ne connaissaient que sa compétence et sa gentillesse.

Résumons-nous:

La sainteté et la charité de Catherine de Longpré étaient évidentes, et, nous l'avons vu, immédiatement après sa mort, les Canadiens cherchèrent à la faire béatifier. Mgr de Laval lui-même demanda immédiatement à celui qui avait été son principal confesseur et directeur, d'écrire sa vie. Il envoya également au Père Ragueneau de nombreux autres documents afin qu'il puisse faire un travail aussi complet que possible. Puis, peu de temps après la parution de livre du Père Ragueneau, nous avons vu que ce fut le silence. Pourquoi?

Catherine de Longpré vécut au 17ème siècle, à une époque où, en raison de certains excès mystiques, incontestablement dangereux voire proches de l'hérésie, comme le quiétisme, l'Église se montra très prudente. En effet les nombreuses descriptions des visions de Catherine, et surtout l'exposé de ses combats contre les démons pouvaient sembler inconcevables, voire invraisemblables. Mais, sauf quelques visions qui avaient lieu pendant la messe, tout se passait généralement pour Catherine, pendant la nuit ou pendant ses oraisons. Rien de ses combats, de ses grâces ou de ses joies extraordinaires ne filtraient à l'extérieur. Catherine était une personne absolument normale.

Alors pourquoi, dans ses écrits, s'est-elle tellement attardée sur sa vie intérieure. Tout simplement parce qu'on le lui avait demandé, et qu'elle devait obéir à son directeur spirituel. Mais ces récits sont-ils vraiment authentiques, sont-ils crédibles? Ne sont-ils pas exagérés? Si cela avait été, son évêque s'en serait aperçu rapidement; or, il a cru aux épreuves et aux joies de Catherine. Et, après trois cent vingt ans, elle est enfin béatifiée, car il n'est pas possible de nier la réalité de son œuvre, au Canada, donc de l'aide que Dieu lui apportait, notamment par l'intermédiaire du Père de Brébeuf, mort martyr peu de temps après son arrivée au Canada. Et cela, Satan ne pouvait pas le supporter.

Maintenant rentrons un peu en nous-mêmes. Qui d'entre nous n'a pas connu certaines joies étonnantes, venues comme ça, tout d'un coup, nous inonder. Et brusquement nous devenons meilleurs. Qui de nous n'a pas connu des tentations obsédantes, envahissant totalement notre vie, nous empêchant parfois de penser, de réfléchir? De nombreux jeunes qui se convertissent témoignent de la force obsédante, envahissante de ces tentations auxquelles, malheureusement, de nos jours, tant de gens ont succombé: sexe; alcool, drogue, argent, etc... Il n'y a rien d'extraordinaire dans la vie de Catherine, sinon plus d'épreuves, plus de souffrances compte tenu de la mission qui devait être la sienne.

Quant à nous, oublions un peu tous ces faits extraordinaires qui se déroulaient en elle, mais à l'insu de ses contemporains, lesquels ne voyaient qu'une sainte religieuse pleine de charité, pleine d'amour pour Dieu et pour son prochain.

Bibliographie

Catherine de Saint-Augustin
par l’abbé Pommier (1668).

 

Histoire de l’Hôtel-Dieu de Québec
par Henri-Raymond Casgrain ; Québec, Léger Brousseau, 1878, p. 239.

 

Vie de la Mère Marie-Catherine de Saint-Augustin, religieuse de l'Hôtel-Dieu du Précieux-sang de Québec, 1632-1668
par le Père Léonidas Hudon, Jésuite, dédié à Mgr Louis-Nazaire Bégin, Archevêque de Québec, publié à Montréal en 1907

 

L'Itinéraire Mystique de Catherine de Saint-Augustin
de Dom Guy-Marie OURY, publié chez C.L.D. en décembre 1985

 

Et aussi des sites Internet :

http://www.ameriquefrancaise.org/fr/

ou plus rapidement :

http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-75/Mémoire de Catherine de Saint-Augustin, du Québec à la Normandie

puis sur cette page, aller dans le sommaire

http://eglisecatholiquedequebec.org/histoire/principal_histoire.htm

http://www.ourroots.ca/e/page.aspx?id=372062

http://www.magnificat.ca/cal/fran/04-12.htm

http://eglisecatholiquedequebec.org/histoire/catherine_st_augustin/qui/

   

 

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