LE PASTEUR

PRÉSENTATION

Le « Pasteur » d’Hermas 

 

Le « Pasteur » (ouvrage attribué à Hermas)

Hermas est un grec vendu comme esclave dans la ville de Rome. Il est acheté par une certaine Rhôdé qu’il finit par épouser après l’avoir affranchi. Lui est menteur. Elle, bavarde et douée d’un très mauvais caractère.  Leurs enfants sont mauvais au point qu’ils dénoncent leurs parents lors d’une persécution.

Toute cette histoire est inventée !

Hermas serait, selon certaines sources, le frère de l’évêque de Rome St Pie Ier (140-155), le 10e pape (martyr). Il est l’auteur du « Pasteur d’Hermas » texte chrétien du IIe siècle. Il s’agit de l’écrit le plus long de la période des pères apostoliques ; il revêt un intérêt particulier par son genre littéraire apocalyptique (plusieurs « visions »), par le message libérateur sur la pénitence post-baptismale (en particulier après le péché d’adultère ou encore celui d’apostasie), et par le portrait qu’il nous laisse de l’Église catholique romaine vers l’an 150 (les détails manifestant une Eglise sainte mais non pas exempte de pécheurs sont sans concession…Le vice de l’ambition est souvent relevé comme cause de divisions). Il est présent dans le Nouveau Testament de la plus ancienne Bible en notre possession : le « Codex Sinaiticus ».

Hermas y décrit l’Eglise sous deux images : une vieille femme et une tour (nous en sommes les pierres plus moins hautes et belles, le Christ en est la porte). C’est une mère qui prend soin de ses enfants :

« Ecoutez-moi mes enfants. Je vous ai élevés en grande simplicité, innocence, et sainteté grâce à la miséricorde du Seigneur qui a répandu sur vous la justice… Faites régner la paix entre vous. Alors moi aussi, je pourrai me présenter joyeuse devant le père pour rendre compte de vous tous à votre Seigneur » (vision 3 9).

Hermas reçoit la visite d’un « pasteur » qui se révèle être l’ange de la pénitence (ou conversion du cœur). Le désir du pasteur est que tout homme « vive pour Dieu » (qu’il obtienne la Vie éternelle). « Marchez donc selon ces préceptes et vous vivrez pour Dieu ».

Les préceptes qu’il donne peuvent paraître difficiles à observer (Hermas le lui dira) mais ils sont possibles :

« Il peut tout dominer, y compris ces préceptes, l'homme qui a le Seigneur dans son cœur. En revanche, pour ceux qui ne l'ont que sur le bout des lèvres, dont le cœur endurci est loin de Dieu, ces préceptes sont durs et impraticables. Vous donc, les hommes vains et légers dans la foi, mettez le Seigneur dans votre cœur et vous connaîtrez qu'il n'y a rien de plus facile que ces préceptes, ni de plus doux, ni de plus humain. 6. Convertissez-vous, vous qui suivez les préceptes du diable, préceptes difficiles, amers, brutaux, impudiques, et ne craignez plus le diable, car il n'a aucun pouvoir contre vous. 7. Moi, l'Ange de la pénitence qui triomphe du diable, je serai avec vous. Il peut faire peur, le diable, mais cette peur manque de force. Ne le craignez donc pas et il vous fuit." (…) « Tu les garderas (tous les préceptes), dit-il, si ton cœur purifié se tourne vers le Seigneur, et tous les garderont qui se purifieront le cœur des vains désirs de ce monde, et ils vivront pour Dieu."

On trouve un petit traité de démonologie dans le « pasteur » et quelques règles de « discernement des esprits » pour savoir ce qui vient du bon ange et du mauvais !

Il nous donne aussi une série de « paraboles » ou « similitudes » (sic) de son cru dont certaines ressemblent beaucoup à celles de Jésus dans l’Evangile. En tous cas, si les images changent, la doctrine est la même. « Car toute chair recevra sa rémunération, qui sera trouvée intacte et sans tache et où l'Esprit saint aura pris demeure ».

Il décrit l’église de Rome comme étant une assemblée de bons et de mauvais (ivraies et bon grains se côtoient). « Ni les justes ni les pécheurs ne se distinguent dans ce monde, mais sont semblables. Car ce monde pour les justes est un hiver et (les justes) ne se remarquent pas, puisqu'ils l'habitent avec les pécheurs »

Les intérêts matériels, la faiblesse, la lassitude, la persécution ont provoqué l’abandon (apostasie) ou la chute (« lapsi » = ceux qui sont tombés) de beaucoup.

Ce livre est essentiellement un appel à la pénitence et à l’Espérance en la miséricorde de Dieu. A tout péché : miséricorde (sauf à celui contre l’Esprit saint).

« Ayez donc confiance en Dieu, vous qui, à cause de vos péchés, désespériez de la vie, qui ajoutiez à vos péchés, qui alourdissiez votre vie, puisque, si vous vous convertissez au Seigneur du fond de votre cœur, si vous pratiquez la justice le reste des jours de votre vie, si vous le servez convenablement selon sa volonté, il vous guérira de vos péchés passés et vous donnera le pouvoir de triompher des œuvres du diable. La menace du diable, ne la craignez pas du tout : il est sans force, comme les nerfs d'un mort. 3. Écoutez-moi donc et craignez celui qui peut tout, sauver et perdre, et observez ses commandements et vous vivrez pour Dieu."

Le Seigneur veut le salut de tous. Une belle parabole des rameaux d’un saule illustre cette grande vérité de foi : « Après avoir examiné les rameaux de tout le monde, le Pasteur me dit : " Je t'ai dit que cet arbre est vivace. Vois-tu, dit-il, combien ont fait pénitence et ont été sauvés ? - Je vois, Seigneur, dis-je. - Pour que tu voies que la miséricorde de Dieu est grande et glorieuse, il a aussi donné un esprit à ceux qui sont dignes de la pénitence ».(…) « Ceux dont les rameaux furent trouvés desséchés et rongés de vers, ce sont les apostats, traîtres à l'Église, qui dans leurs péchés ont blasphémé le Seigneur et qui encore ont rougi du nom du Seigneur invoqué sur eux (Ac 15, 17; Jc 2, 7; Gn 48, 16; etc.). Ceux-là donc pour Dieu sont morts définitivement. Tu vois que pas un d'entre eux n'a fait pénitence, même après avoir entendu les paroles que, sur mon ordre, tu leur as dites. La vie s'est donc retirée de telles gens. 5. Ceux qui les ont remis desséchés, mais non pourris, ils sont tout près des premiers : c'étaient des hypocrites qui introduisaient des doctrines hétérodoxes et détournaient les serviteurs de Dieu et surtout les pécheurs qu'ils empêchaient de faire pénitence, en les convainquant par des doctrines folles. Ceux-là ont un espoir de faire pénitence. 6. Et tu vois que beaucoup d'entre eux ont déjà fait pénitence depuis que tu leur as dit mes préceptes. D'autres encore feront pénitence et tous ceux qui ne feront pas pénitence ont déjà perdu la vie; mais tous ceux d'entre eux qui se sont repentis sont devenus bons et leur demeure a été fixée dans les premiers murs; certains même sont montés dans la tour. Tu vois donc, dit-il, que le repentir des pécheurs assure la vie, et l'impénitence, la mort ».(…) « Ceux qui ont remis des rameaux verts, mais fendillés ont toujours été fidèles et bons, mais il y avait entre eux de la jalousie pour des questions de priorité et d'honneurs. Et ils sont tous bien fous de rivaliser ainsi pour les premiers rangs. 5. Mais après avoir entendu mes préceptes, puisqu'ils étaient bons, ils se sont purifiés et ont rapidement fait pénitence. Et leur demeure fut fixée dans la tour. Mais si l'un d'entre eux en revient aux dissensions, il sera rejeté de la tour et perdra sa vie. 6. La vie appartient à tous ceux qui observent les commandements du Seigneur (Qo 12, 13). Or, dans les commandements, il n'est question ni de priorité, ni d'honneurs, mais de patience et d'humilité pour l'homme. C'est dans de telles gens que réside la vie du Seigneur; dans les querelleurs et les violateurs de la loi, c'est la mort ».(…) « Beaucoup d'entre eux ont fait pénitence et sont allés habiter dans la tour. Beaucoup se sont éloignés définitivement de Dieu : ceux-là ont perdu définitivement la vie ».

Autre comparaison de «  la tour » qui figure l’Eglise :

" Dites-moi, Seigneur, dis-je, le nom des vierges et des femmes vêtues de noir. - Écoute, dit-il, le nom des vierges les plus fortes, celles qui se tenaient aux angles. 2. La première, c'est la Foi, la seconde, la Tempérance, la troisième, la Force, la quatrième, la Patience; les autres, placées entre les premières, ont comme nom : Simplicité, Innocence, Sainteté, Gaieté, Vérité, Intelligence, Concorde, Charité. Celui qui porte ces noms et celui du Fils de Dieu pourra entrer dans le royaume de Dieu (Jn 3, 5). 3. Écoute aussi, dit-il, le nom des femmes vêtues de noir; quatre d'entre elles sont les plus fortes : la première, Incrédulité, la seconde, Intempérance, la troisième, Désobéissance, la quatrième, Tromperie. Leurs suivantes s'appellent : Tristesse, Méchanceté, Débauche, Colère, Fausseté, Démence, Médisance, Haine. Le serviteur de Dieu qui porte ces noms verra le royaume de Dieu, mais n'y entrera pas.

 La « similitude » des 12 montagnes :

« Voici ce que sont les croyants venus de la sixième montagne, celle qui a des crevasses grandes et petites et des herbes flétries dans ces crevasses : 2. ceux qui ont de petites crevasses, ce sont ceux qui se gardent rancune mutuellement et, de par leurs médisances réciproques, ils sont flétris dans la foi. Mais beaucoup d'entre eux ont fait pénitence. Et les autres se repentiront quand ils entendront mes préceptes; car leurs médisances ne sont pas graves et ils se repentiront vite. 3. Ceux qui ont de grandes crevasses s'obstinent dans la médisance, deviennent rancuniers et ne décolèrent plus les uns contre les autres. Ceux-là donc ont été rejetés loin de la tour et jugés indignes de la construction. De telles gens vivront difficilement. 4. Si Dieu notre Seigneur qui domine tout et tient sous son pouvoir toute la création ne garde pas de ressentiment à l'égard de ceux qui avouent leurs péchés, s'il leur devient propice, un homme mortel et plein de péchés pourra-t-il garder rancune à un homme, comme s'il avait le pouvoir de le perdre ou de le sauver (Jc 4, 12) ? 5. je vous le dis, moi, l'ange de la pénitence : vous tous qui avez ce penchant, supprimez-le et faites pénitence, et le Seigneur guérira vos péchés précédents, si vous vous purifiez de ce démon; sinon, vous lui serez livrés pour la mort ».

(…) « " 1. Voici ce que sont les croyants venus de la onzième montagne, dont les arbres étaient ornés d'une foule de fruits très variés : 2. des hommes qui ont souffert pour le nom du Fils de Dieu, qui souffrirent même avec empressement, du fond de leur cœur et qui ont livré leur vie (Ac. 15, 26). 3. - Et pourquoi donc, Seigneur, dis-je, tous ces arbres ont-ils des fruits et certains, des fruits plus beaux ? - Écoute dit-il. Tous ceux qui ont souffert à cause du nom sont glorieux auprès de Dieu et leurs péchés à eux tous ont été effacés, parce qu'ils ont souffert pour le nom du Fils de Dieu. Mais voici pourquoi leurs fruits sont variés et certains meilleurs. 4. Tous ceux, dit-il, qui, traînés devant les autorités, ont été soumis à la question et n'ont pas nié, mais au contraire ont souffert avec empressement, ceux-là sont beaucoup plus glorieux auprès du Seigneur et leurs fruits sont les meilleurs. Tous ceux, en revanche, qui furent tremblants et indécis, qui se demandèrent en leur cœur s'ils renieraient ou confesseraient (le Seigneur), mais qui pour finir ont souffert, ceux-là ont des fruits plus médiocres, par la faute de cette intention qui montait à leur cœur. Car c'est une mauvaise intention pour un serviteur que celle de renier son propre maître. 5. Veillez donc, vous qui avez cette intention, à ce qu'elle ne demeure pas dans votre cœur et que vous ne mouriez pour Dieu. Et vous qui souffrez pour Dieu, vous devez le glorifier (1 P 4, 13, 15, 16) de ce qu'il vous a jugés dignes de porter son nom et d'être guéris de tous vos péchés. 6. Félicitez-vous donc et croyez avoir accompli une grande œuvre lorsque quelqu'un d'entre vous souffre pour Dieu. Le Seigneur vous fait don de la vie et vous ne comprenez pas ! Car vos péchés vous alourdissaient et si vous n'aviez pas souffert pour le nom du Seigneur, à cause de vos péchés, vous seriez morts pour Dieu. 7. je dis cela pour vous qui hésitez à renier ou à confesser. Confessez que vous avez un Seigneur, de peur d'être, en le reniant, jetés en prison. 8. Si les gentils punissent leurs esclaves, s'ils renient leur maître, que fera de vous, à votre avis, le Seigneur maître de toutes choses ? Rejetez ces desseins de vos cœurs, afin de vivre éternellement pour Dieu ».

(…) « Je vous le dis à vous tous qui avez reçu le sceau : soyez simples, oubliez les offenses, ne vous obstinez pas dans votre malice ou dans le souvenir amer des offenses, n'ayez qu'un seul esprit, remédiez à ces discordes funestes, écartez-les de vous : le maître du troupeau sera content de tout cela. 5. Il se réjouira s'il trouve toutes ses brebis en bonne santé sans qu'aucune ne soit égarée. Mais s'il découvre que certaines d'entre elles sont égarées, malheur aux bergers : 6. et si ce sont les bergers eux-mêmes qu'on trouve égarés, que répondront-ils au maître de leurs troupeaux ? Car enfin, pourront-ils se dire égarés par une brebis ? On ne les croira pas, car c'est une chose incroyable qu'un berger puisse souffrir du fait d'une brebis; il sera plus lourdement puni à cause de son mensonge. Et moi aussi je suis berger et il faut de toute nécessité que je rende compte de vous. Guérissez-vous donc, pendant que la tour est encore en construction ».

(...) « Pour ma part, Seigneur, dis-je, je proclame à tout homme les merveilles du Seigneur et j'espère que tous ceux qui ont péché auparavant, en entendant mes paroles, feront spontanément pénitence pour recouvrer la vie. 4. - Persévère, dit-il, dans cette mission, conduis-la à bon terme. Tous ceux qui appliquent les préceptes du Pasteur obtiendront la vie et lui-même, une grande gloire auprès du Seigneur. Tous ceux, en revanche, qui n'observent pas ces préceptes, tournent le dos à leur propre vie et méprisent le Pasteur; lui, n'en a pas moins d'honneur auprès de Dieu. Tous ceux donc qui le méprisent et n'observent pas ses commandements se livrent eux-mêmes à la mort et chacun d'eux est comptable de son propre sang. Je te le dis (encore) : mets-toi au service de ses préceptes et tu posséderas le remède pour tes péchés ».

(…)" Aie dans tes fonctions une énergie virile, révèle à tout le monde les merveilles du Seigneur et tu auras de grands mérites par ce ministère. Quiconque marchera selon ces préceptes, vivra et sera heureux dans sa vie; quiconque les aura négligés ne vivra pas et son existence (ici-bas) sera malheureuse. 2. A tous ceux qui peuvent faire le bien, dis de ne pas cesser de le faire; accomplir de bonnes œuvres leur est utile. Je dis qu'il convient d'arracher tout homme à la misère. Celui qui, par l'indigence, est dans sa vie quotidienne en butte aux difficultés, endure un grand tourment et une grande épreuve. 3. Celui donc qui arrache à la nécessité l'âme d'un tel homme se crée une grande joie : car quelqu'un qui est tenaillé par des misères de ce genre souffre le même supplice et les mêmes tortures que celui qui est dans les fers. Et beaucoup, quand ils ne peuvent plus supporter ces souffrances, se donnent la mort. Celui donc qui, connaissant la misère d'un tel homme, ne l'en retire pas, commet un grand péché et devient comptable de son sang. 4. Faites donc de bonnes œuvres, vous tous qui avez reçu (ces préceptes) du Seigneur, de peur que la construction de la tour ne s'achève pendant que vous tardez à les faire. C'est pour vous, en effet, qu'ont été interrompus les travaux. Si donc vous ne vous hâtez pas, la tour sera achevée et vous en serez exclus. " 5. Quand il eut fini de me parler, l'ange se leva du lit et, prenant avec lui le Pasteur et les vierges, il se retira, mais il me dit qu'il renverrait chez moi ce Pasteur et ces vierges » (fin du « pasteur » !).

Hermas nous décrit la discipline romaine en matière de mariage, de remariage, d’adultère dans l’église de Rome au 2° siècle ce qui est très précieux.

Le CEC cite par deux fois le « Pasteur d’Hermas » :

CEC 760
L'Eglise - préfigurée dès l'origine du monde

760  "Le monde fut créé en vue de l'Eglise", disaient les chrétiens des premiers temps (Hermas, vis. 2,4,1 cf. Aristide, apol. 16, 6 Justin, apol. 2,7). Dieu a créé le monde en vue de la communion à sa vie divine, communion qui se réalise par la "convocation" des hommes dans le Christ, et cette "convocation", c'est l'Eglise. L'Eglise est la fin de toutes choses (cf. S. Epiphane, hær. 1,1,5), et les vicissitudes douloureuses elles-mêmes, comme la chute des Anges et le péché de l'homme, ne furent permises par Dieu que comme occasion et moyen pour déployer toute la force de son bras, toute la mesure d'amour qu'il voulait donner au monde:

De même que la volonté de Dieu est un acte et qu'elle s'appelle le monde, ainsi son intention est le salut des hommes, et elle s'appelle l'Eglise.
(St Clément d'Alexandrie, pæd. 1,6).

CEC 2517

Le cœur est le siège de la personnalité morale: "C'est du cœur que viennent intentions mauvaises, meurtres, adultères et inconduites" (Mt 15,19). La lutte contre la convoitise charnelle passe par la purification du cœur et la pratique de la tempérance:

Maintiens-toi dans la simplicité, l'innocence, et tu seras comme les petits enfants qui ignorent le mal destructeur de la vie des hommes (Hermas, mand. 2,1).

    

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