
Saint Jean-Baptiste
De La Salle
(1651-1719)
Troisième
partie
La
spiritualité de
Saint-Jean Baptiste De La Salle

3
Les obligations spirituelles des Frères
3-1-Le but de
leur vie: la sainteté
Le but, la
vraie mission des Frères, c'est la sainteté, d'abord pour eux, mais également
afin de conduire les autres, en l'occurrence leurs élèves et leurs Frères, à
la
sainteté. Pour cela, Jean-Baptiste De La Salle n'hésite pas à dire à ses Frères:
– Ce qui
fait la vie d’un saint, c’est son attention continuelle à Dieu: ce doit être
aussi celle des âmes consacrées à Dieu, et qui ne cherchent qu’à faire sa sainte
volonté, à l’aimer et à le faire aimer des autres... Engagez donc tous ceux que
vous enseignez à regarder le péché comme une maladie honteuse qui infecte les
âmes, les rend indignes de s’approcher de Dieu et de paraître devant lui.
Inspirez-leur l’amour de la vertu, imprimez-leur des sentiments de piété, et
faites en sorte que Dieu ne cesse de régner en eux... (MD 67)
3-2-Les vertus
qui conduisent les Frères à la sainteté
Les religieux
doivent avoir beaucoup plus de vertus que les personnes du siècle. Jean-Baptiste
instruit ses Frères:
– Vous qui
vous êtes donnés à Dieu... vous devez tout faire par esprit de religion... Ce
que Dieu exige de vous et en quoi il veut que votre justice surpasse celle des
gens du monde, c’est que vous ne gardiez pas seulement les commandements avec
exactitude, mais même que vous vous rendiez fidèles à la pratique des conseils
de son Évangile... Vous ne devez vous attacher et vous appliquer qu’à Dieu.
3-2-1-L'obéissance
L’obéissance
attire tellement les bénédictions de Dieu sur ce qu’on fait, qu’on obtient, par
son moyen tout ce qu’on désire, et qu’on acquiert une grande facilité à faire le
bien et à toucher les cœurs, lorsqu’on a l’avantage de travailler pour le salut
des âmes et de s’y employer par pure obéissance.
(MD 57)
Cependant, l’obéissance doit toujours
être animée et soutenue par la foi. Il faut être
fidèle à l’obéissance nonobstant les tentations les plus violentes...
Mais
l’obéissance est source de grâce dans une personne religieuse; elle peut être
comparée au bon grain semé dans un champ, qui profite beaucoup à son maître.
Une action,
quelque éclatante qu’elle soit par elle-même, séparée de l’obéissance n’est
nullement estimée de Dieu, étant dénuée de ce qui fait tout son mérite; au lieu
qu’une action qui paraîtrait de peu de valeur, devient très considérable devant
Dieu, par l’exactitude qu’on a à la faire dans un esprit d’obéissance... puisque
c’est à Dieu même qu’on obéit en la faisant; ce qui fait que cette vertu est
celle de toutes, qui approche le plus des vertus théologales: car elle a la foi
pour principe et pour guide, elle est toujours accompagnée de l’espérance et de
la confiance en Dieu, et elle est une production de la charité et du pur amour
de Dieu... En effet, celui qui obéit par esprit de religion possède en soi
toutes les vertus. Il est humble, parce qu’il faut l’être pour être soumis; il
est doux... Il est silencieux... il est patient parce qu’il souffre tout et
porte tous les fardeaux qu’on lui impose... Il est charitable à l’excès, parce
que l’obéissance lui fait tout entreprendre pour le bien du prochain...
Le principal
fruit que produit l’obéissance dans une personne religieuse est qu’elle lui
procure la perfection de son état.
(MD 11 et 12)
Il y a trois
sortes de désobéissance
Reprenant la
parabole du semeur, Jean-Baptiste De La Salle expose les trois sortes de
désobéissance:
La semence qui
tombe sur le grand chemin, est la parole du supérieur reçue par ceux qui n’ont
que des désirs d’obéir; ils ont, ce semble bien de l’affection pour
l’obéissance... mais on ne voit en eux que de la bonne volonté et point d’effet,
parce qu’ils trouvent difficile tout ce qu’on leur commande.
La semence qui
tombe sur des pierres est la parole du supérieur reçue par ceux qui font ce
qu’on leur commande, quand ils n’ont ni peine ni tentation; mais à la moindre
tentation, au moindre trouble d’esprit, à la moindre peine contre leur
supérieur, les voilà renversés, et ils ne peuvent se résoudre à faire ce qu’il
leur ordonne, parce qu’ils ne sont pas fondés dans la vertu et qu’ils n’ont pas
été exercés dans la pratique de l’obéissance.
La semence qui
tombe dans les épines est la parole du supérieur reçue par ceux qui obéissent en
tout ce qui leur plaît, et en quoi ils ne trouvent aucune difficulté; mais dès
qu’ils ont quelque répugnance à ce qu’on leur commande, ils ne sauraient se
porter à le faire, ne pouvant se vaincre et se faire la violence qui serait
nécessaire dans l’occasion.
(MD 14)
3-2-2-Les
religieux doivent aussi aimer la mortification et la pauvreté,
...parce que
plus on s’abandonne aux soins de la providence, plus elle est attentive à ne
laisser manquer de rien... Est-ce ainsi que vous en usez?
3-2-3-La joie
Il est important de considérer la
différence qu’il y a entre la joie des gens du monde et celle des serviteurs de
Dieu... Celle des premiers n’est que superficielle au lieu que celle des seconds
est très solide...
3-2-4-La
chasteté
L’un des
principaux moyens pour acquérir et conserver la chasteté, c’est de fuir aux
premières attaques du démon de l’impureté, de se faire grande violence pour
remporter la victoire dans quelque occasion ou tentation considérable.
(MF 129)
3-3-Première
obligation des Frères: édifier le prochain
Vous qui êtes
dans un emploi où tout le monde vous observe, et qui, par conséquent, vous
engage à pratiquer l’avis que saint Paul donne à Tite, évêque de Crète, son
disciple; il lui dit de se rendre en toutes choses un modèle de bonnes œuvres,
par la doctrine, par l’intégrité de ses mœurs, par la régularité de sa conduite
et sa gravité. Vos élèves vous observent... C’est pourquoi, pour bien vous
acquitter de votre devoir à leur égard, il est de conséquence que vos actions
les instruisent encore plus que vos paroles afin, comme ajoute saint Paul à
Tite, que vos paroles soient irrépréhensibles... Est-ce là votre pratique?
La profession
que vous exercez vous met dans l’obligation d’être, tous les jours, parmi le
monde où l’on observe jusqu’à vos moindres démarches; c’est ce qui doit vous
engager à ne rien omettre pour être des exemples de toutes sortes de vertus aux
yeux des séculiers au milieu desquels vous avez à vivre... S’ils remarquent en
vous quelques traits de légèreté ou de dissipation, ils se scandaliseront
facilement: au lieu que si vous paraissez devant eux avec un extérieur composé,
ils auront pour vous beaucoup de vénération.
(MD 69)
3-4-La vie en
communauté
Saint
Jean-Baptiste De La Salle, avait, dès le début, imposé à ses Frères, une vie en
communauté. Les réflexions qu’il fait à ce propos et les conseils qu’il donne à
ses Frères peuvent sembler en dehors des préoccupations des gens qui sont
obligés de vivre dans le monde. Pourtant, qui que nous soyons, nous sommes tous,
à un moment ou à un autre, ne serait-ce que quelques instants chaque jour,
conduits à vivre avec des voisins, de la famillle, des amis, etc. Durant ces
moments, nous vivons vraiment en “communauté”, et les paroles de Jean-Baptiste
nous concernent:
– C’est une
loi de Dieu, et par conséquent une obligation, quand des personnes demeurent
ensemble, qu’elles souffrent les unes des autres... Il n’est pas possible que
deux personnes vivent ensemble sans se faire souffrir par quelque endroit; et
comme on fait souffrir les autres, il est bien juste qu’on souffre d’eux...
Prenez donc le véritable chemin du Ciel: c’est celui des souffrances, c’est la
porte étroite; faites vos efforts pour y entrer, et Jésus-Christ ne manquera
point de vous donner la main pour vous y faire entrer... Le moyen de maintenir
l’union dans une communauté, malgré tous les divers caractères, c’est de
supporter charitablement les défauts de chacun, c’est d’être disposé à faire
grâce aux autres, comme nous voulons qu’on nous le fasse... Vivre en
communauté, c’est comme porter un fardeau difficile, et quel est ce fardeau?
Ce sont les défauts des autres. Quelque pesante que soit cette charge, saint
Paul veut que nous la portions si nous voulons accomplir la loi de
Jésus-Christ.... Si vous ne voulez rien souffrir de vos Frères, Dieu ne
souffrira rien de vous, et vous punira terriblement de ce que vous aurez fait
contre lui. (MD 73 à 75)



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