
Saint Jean-Baptiste
De La Salle
(1651-1719)
Troisième
partie
La
spiritualité de
Saint-Jean Baptiste De La Salle

5
L'Eucharistie
Jésus a dit à
ses disciples “qu’il était le pain vivant descendu du ciel.”
Jean-Baptiste De La Salle poursuit son enseignement:
Il est en effet vivant dans ceux
qui
le reçoivent; car lorsqu’ils s’approchent du sacrement de l’Eucharistie avec des
saintes dispositions, il se répand dans toutes les facultés de leurs âmes, et y
exerce des actions de vie, les conduisant et dirigeant par son divin Esprit, par
lequel il vit et agit en eux... Mangez donc de ce pain divin volontiers et avec
affection, et le plus souvent que vous pourrez, puisque si vous savez y trouver
tout le goût qu’il renferme, il donnera à votre âme une vie toute céleste sur la
terre. Faites que la sainte communion produise une union si constante entre
Jésus-Christ et vous, que vous ne vous en sépariez jamais... (MD 48 et 49)
5-1-Il faut
honorer le Saint-Sacrement
Il faut rendre
au Saint-Sacrement l’honneur qui lui convient. il faut témoigner à cet adorable
mystère, un amour tout particulier et un très profond respect extérieur et
intérieur. Mais, le respect extérieur serait peu considéré de Dieu et de
Jésus-Christ même, si vous ne l’accompagniez d’un anéantissement intérieur...
Dieu veut que l’honneur qu’on lui rend et le respect qu’on lui témoigne, soient
beaucoup plus au-dedans qu’au dehors. C’est aussi ce qu’attend de vous
Jésus-Christ dans l’Eucharistie; il veut que notre âme se fonde, pour ainsi
dire, en sa présence, à l’aspect de ce Dieu d’amour, et que vous lui fassiez
connaître, par l’attention continuelle que vous aurez aux bontés qu’il a eues
pour vous, en se donnant à vous sans réserve dans cet auguste sacrement, que
vous l’honorez intérieurement, comme il le demande de vous... (MD 48)
5-2-La sainte
Communion
5-2-1-Les
dispositions pour bien communier
S’il est vrai,
ô mon Sauveur Jésus, que les principales dispositions qu’il faut que mon cœur
ait pour vous recevoir dans la sainte communion sont: une grande pureté
intérieure, un ardent amour pour vous, une dévotion tendre à vous rendre mes
devoirs et une affection toute particulière pour la vertu, qui me donnera toutes
ces grâces si ce n’est vous, divin Jésus, en vous recevant? Et s’il faut les
posséder avant que de vous recevoir, c’est à vous sans doute à les former dans
mon cœur puisque vous savez que je ne puis les avoir de moi-même...
Tout ce que je
puis, ô mon Dieu, c’est de vous demander la contrition et à vous offrir mon cœur
contrit et humilié; mais comment pourrais-je même vous la demander, si vous ne
me donnez cet esprit de prières, qui est votre divin Esprit qui veut bien prier
en moi et pour moi?... Toute la préparation que je puis apporter pour vous
recevoir dans cet adorable sacrement est de vous dire: mon cœur est prêt,
Seigneur, pour recevoir vos grâces...
Faites qu’il
n’y ait plus dans mon esprit que de saintes pensées, ni dans mon cœur que de
saintes affections; qu’il ne sorte plus de ma bouche que des paroles saintes...
Oui, mon Dieu, je veux vous aimer, et je ne veux vivre que pour vous aimer,
puisque vous ne m’avez créé que pour vous... Et il n’y a que vous seul qui
puissiez rassasier mon cœur.
5-2-2-Un
véritable acte de foi
Aimable Jésus
qui vous cachez à nos yeux sous de faibles accidents dans l’adorable sacrement
de votre corps, pour demeurer plus facilement avec nous, vous le dîtes, et cela
se fait, et votre corps nous est rendu présent par trois ou quatre paroles;
c’est un effet des plus surprenants de votre toute puissance... Je le crois, et
je n’en doute point, que c’est vous-même qui êtes venu en ce monde, pour nous
sauver, et quoique je ne vous voie pas, que je ne vous touche pas, et que rien
de tout ce qu’il y a sous ce voile grossier ne me soit sensible, je dirai
cependant confidemment avec saint Thomas que vous êtes mon Seigneur et mon
Dieu...
Nous trouvons
dans ce sacrement l’abrégé et le raccourci de toutes vos merveilles, je le
confesse et je le crois simplement et sans examen, et c’est, ô mon Sauveur, tout
ce que je puis vous dire. Si je ne vois pas ce qu’il y a de grand dans ce
sacrement, c’est, ô mon Sauveur, parce que vous le cachez à mes yeux, et que
vous voulez éprouver ma foi.
Que
pourrais-je aussi désirer sur la terre, si ce n’est de vous posséder, et de
m’unir à vous, ô mon Sauveur Jésus, dans la sainte Communion? Il est vrai que
parfois je demande des signes et des miracles; mais ils ne sont autres que la
conversion de mon cœur, les touches fréquentes de votre grâce, une volonté qui
ne se porte qu’à vous plaire, et une fermeté inébranlable dans le bien: ce sont
là, ô mon Jésus, les miracles que je désire et que vous voulez faire en moi; ce
sont ces prodiges de la grâce qui servent à vous donner de la gloire, et à la
faire paraître à vos créatures...
Dans le pain
et le vin, où Jésus n’est pas reconnaissable, il n’y a que la foi seule qui
puisse vous y faire connaître pour ce que vous êtes. (I 6)
5-2-3-La
communion fréquente
C’est
vous-mêmes que le Père convie à venir à son festin pour y recevoir son Fils
Jésus-Christ dans l’Eucharistie... Il n’est pas concevable que des hommes qui
sont nés pour le Ciel, qui dans le Baptême se sont engagés à mener une vie
sainte, négligent les moyens que Dieu leur donne pour se sanctifier, et surtout
le principal, qui est la communion au corps de Jésus-Christ qui s’unissant à
eux, leur communique si abondamment les grâces dont ils sont capables et qu’il
leur a préparées... Pressez-vous donc de communier, et portez-vous-y avec foi...
Pourquoi la
fréquente communion?
– Ne vous
abstenez pas de la communion; elle vous est nécessaire.
(LA 55)
Jean-Baptiste De La Salle écrit: “Les
premiers disciples avaient coutume de communier tous les jours et cette pratique
a été fort longtemps en usage dans l’Église; surtout ceux qui assistaient à la
sainte messe ne manquaient pas d’y communier. Plusieurs Pères de l’Église
prouvent que cette pratique a été conforme au dessein de Jésus-Christ dans
l’institution de l’Eucharistie... Quel bonheur pour vous de pouvoir communier
souvent pour vous conserver la grâce qui vous abandonnerait bientôt si vous
abandonniez la communion!...
Les effets de
la sainte communion sont si admirables,... que cela vous doit particulièrement
engager à vous en approcher souvent... Puis, donc, que vous ne pouvez pas
trouver un remède plus prompt et plus efficace à vos tentations et à vos chutes
que la réception du corps de Jésus-Christ, recevez-le souvent, afin que, par son
moyen, votre âme ne tombe pas aisément dans aucun péché.
Et rappelant
saint Chrysostome, Jean-Baptiste De La Salle rappelle que la sainte communion
nous unit si intimement à Jésus-Christ que nous devenons un même corps avec lui,
et le corps de Jésus-Christ même... C’est ainsi que la sainte communion nous
transforme en lui. (MD 54)
5-2-4-Pourquoi
s'abstient-on de la communion?
C’est souvent
mal à propos qu’on se dispense de la communion alors qu’elle est le remède à
toutes les infirmités de notre âme. Une des excuses qu’apportent le plus
ordinairement ceux qui sont tièdes dans le service de Dieu, pour se dispenser de
communier, est qu’il n’y sont pas disposés... Voulez-vous donc laisser tomber
votre âme en défaillance?...
Certes, il est nécessaire de s’éprouver avant de communier pour ne pas faire une
communion indigne. Il n’y a sans doute
que le péché mortel qui mette dans l’impossibilité de communier, quelque désir
qu’on ait de le faire, et quelque sollicitation qu’on nous en fasse, car ce
serait faire un sacrilège de communier en cet état.
Mais, continue
Jean-Baptiste de la Salle s’adressant à ses Frères, serait-il bien possible
que vous voulussiez noircir votre âme d’un tel péché, vous à qui Dieu a fait
tant de grâces, et à qui il en fait encore tous les jours de si particulières et
de si considérables?
Pourquoi, alors, n’est-on pas toujours disposé à communier? Parce qu’on a des
peines ou des tentations? Ne savez-vous
pas que bien loin que les peines et les tentations soient une indisposition pour
communier, qu’au contraire, plus on est peiné ou tenté, et plus on doit avoir
recours à la communion qui est un remède sûr pour adoucir vos peines et pour
affaiblir vos tentations?
Est-on dans la
sécheresse? Priez Jésus-Christ, résidant en vous, de suppléer à votre
impuissance, et de faire l’un et l’autre en vous et pour vous. (MD 50 et
suivantes)
5-2-5-Très
important: les prétextes pour ne pas communier
Les grands
avantages qu’on se procure en communiant souvent sont cause que le démon fait
tout son possible pour en engager plusieurs à ne communier que rarement, sous de
faux prétextes qu’il leur met dans l’esprit:
– Certains craignent de faire un sacrilège,
(mais pour
cela il faut être en état de péché mortel)
– D’autres disent qu’ils ne sont
pas dignes de communier si souvent: il ne faut pas qu’ils s’attendent de l’être
jamais... Si vous attendez pour communier d’être sans défaut, vous ne
communierez de votre vie.
– D’autres
craignent d’abuser d’un si auguste mystère.
Mais c’est pour devenir saint qu’on communie, et
non pas parce qu’on est saint... C’est même pour cette fin que vous devez
communier souvent.
Comme
l’eucharistie est un sacrement d’amour, il faut aussi faire paraître un amour
tendre pour Jésus-Christ en le recevant... bien qu’il ne soit pas nécessaire
pour communier d’avoir une dévotion sensible...
– N’est-il pas à craindre de communier par coutume quand on communie si souvent?
Croyez-vous donc que la coutume soit mauvaise? Et ne faudrait-il pas aussi ne
point entendre tous les jours la sainte messe, de crainte d’y assister par
coutume?
Gardez-vous
bien d’adhérer à aucune de ces raisons pour vous exempter de la communion, quand
d’ailleurs vous n’avez pas d’empêchement essentiel. Et puisqu’étant retirés du
monde, votre premier soin doit être de vous unir à Dieu, approchez-vous souvent
de lui par la sainte communion: elle est le moyen le plus aisé et le plus sûr
que Dieu vous ait laissé de vous unir à lui.
(MD 55)
5-2-6-Les
mauvaises communions
Malheureusement il y des mauvaises communions. Et c’est un crime bien
considérable qu’une mauvaise communion... Ce malheur peut arriver dans les plus
saintes communautés. Judas, qui pourtant suivait Jésus, en est un exemple.
Ce qui est cause ordinairement qu’on
fait une mauvaise communion est, ou l’hypocrisie, ou la honte de déclarer ses
péchés; c’est aussi ce qui l’a causée dans Judas...
Le moyen de
prévenir un si fâcheux état et d’y remédier, est premièrement d’être fort humble
et de vous accoutumer à vous accuser humblement de toutes vos fautes, sans en
celer ou déguiser une seule, sinon le démon vous surprendra encore lorsque vous
y penserez le moins et vous fera tomber dans ses pièges...
Cependant, on ne tombe pas tout d’un coup dans un crime si détestable; si on le
commet, c’est que l’on a fermé insensiblement son cœur à la grâce
et qu’on l’a tenu fermé à ceux à qui Dieu en a
donné le soin pour conduire au Ciel.
5-2-7-Les
communions peu utiles
Il est certain que pour recevoir la grâce de l’Eucharistie, il suffit d’être
exempt de péché mortel. Cependant, si on veut profiter de la communion, il faut
avoir confessé ses péchés véniels, car une des raisons pour laquelle
il arrive que les communions sont quelquefois peu
utiles, c’est parce qu’on se met peu en peine de se corriger de ses fautes
vénielles, quoiqu’on les confesse.



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